6420 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Maison de retraite (4) - Droits du résident
- 6417 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Maison de retraite (1) - Présentation générale
- 6418 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Maison de retraite (2) - Formation du contrat
- 6419 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Maison de retraite (3) - Contenu initial et modification du contrat
- 6421 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Maison de retraite (5) - Obligations du résident
- 6422 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Maison de retraite (6) - Obligations de l’établissement
- 6423 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Maison de retraite (7) - Durée et fin du contrat
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6420 (10 juillet 2020)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CONTRAT
HÉBERGEMENT DE PERSONNES ÂGÉES - MAISONS DE RETRAITE (4) - DROITS DU PENSIONNAIRE
Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2020)
A. VIE PRIVÉE - DROITS ET LIBERTÉS FONDAMENTAUX
Textes. Sur la définition des droits des usagers, V. l’art. L. 311-3 CASF dans sa rédaction résultant de la loi du 28 décembre 2015.
Droit à la vie privée du pensionnaire. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à la vie privée et à la liberté du consommateur au-delà des contraintes normales de la vie en collectivité, et notamment :
- de lui interdire d'installer des objets personnels ou des meubles ou de décorer son logement de façon compatible avec la taille de celui-ci et avec la présence éventuelle d'autres consommateurs (considérant n° 47 ; autres exemples : interdiction de laisser sur sa table de nuit des photos ou autres objets similaires, de s'étendre sur son lit dans la journée, de se lever ou de se coucher en dehors de certaines heures, de choisir ses compagnons de table) ;
- de permettre au professionnel de prendre connaissance du courrier des consommateurs ;
- de permettre au professionnel d'inspecter les effets personnels du consommateur ;
- de permettre au professionnel en dehors de cas motivés par l'urgence ou les nécessités de l'entretien de pénétrer dans les locaux dont le consommateur a la jouissance ;
- d'imposer au consommateur des sanctions privatives de liberté en cas de manquement au contrat ou au règlement intérieur. Recomm. n° 85-03/B-27° : Cerclab n° 2155.
Marquage de vêtements. V. pour une clause déclarée abusive ou illicite dans une mesure et pour une raison inconnues (décision non consultée) : TGI Grenoble, 11 octobre 2010 : RG n° 08/05993 ; Dnd (« [les effets personnels] doivent obligatoirement être marqués par le système en vigueur aux S. »), confirmé par CA Grenoble (1re ch. civ.), 7 mai 2013 : RG n° 10/04912 ; Cerclab n° 4466 (jugement exécuté, le contrat modifié n’étant pas contesté par l’association).
Installation de meubles appartenant au pensionnaire. Eu égard aux contraintes légitimes de la vie en collectivité dans un établissement pour personnes âgées, n'est pas abusive la clause stipulant que tout pensionnaire de longue durée a la possibilité d'apporter en partie son mobilier personnel, mais qui réserve à l’établissement le droit de refuser certains meubles pour des raisons d'hygiène et/ou de sécurité, dès lors qu’elle énonce les motifs précis de refus et qu’elle ne porte pas une atteinte caractérisée et inadmissible à la vie privée et à la liberté des pensionnaires eu égard aux normes de sécurité et d'hygiène que cet établissement se doit de respecter. TGI Rennes (1re ch. civ.), 19 juillet 1994 : RG n° 93002894 ; jugt n° 424 ; Cerclab n° 1770 (absence d’avantage excessif).
Comp. : est abusive l'interdiction abrupte et indifférenciée de la détention dans les chambres de tout appareil électrique, compte tenu de leur variété et de la variété des situations ; si le principe de l'autorisation est nécessaire, celui de l'interdiction sans exception doit être jugé abusif compte tenu de l'extrême diversité des appareils en cause. CA Grenoble (1re ch. civ.), 16 juin 2015 : RG n° 12/05633 ; Cerclab n° 5248 (clause du règlement de fonctionnement interdisant la détention dans la chambre du résident d'appareils électriques tels que les appareils de chauffage, les réfrigérateurs et les réchauds), infirmant TGI Grenoble, 5 novembre 2012 : RG n° 09/03438 ; Dnd (clause valable même si sa rédaction est « un peu » maladroite).
Introduction de boissons. Est abusive la clause interdisant l’introduction de toute boisson venant de l'extérieur dans l’établissement, qu’elles aient été acquises par le pensionnaire ou apportées par un tiers, et prévoyant sa confiscation et sa destruction immédiate par l’établissement, dès lors que, s'il est nécessaire d'éviter l'introduction de boissons, notamment alcoolisées, qui pourraient nuire à la santé de pensionnaires soumis à certains traitements médicaux, il ne saurait pour autant être porté atteinte de façon aussi générale à la liberté dans la vie quotidienne à laquelle les pensionnaires sont encore en droit de prétendre, même s'il existe des contraintes liées à la vie en collectivité. TGI Aix-en-Provence (1re ch.), 7 mai 1992 : RG n° 21-91 ; Cerclab n° 708 (clause abusive par sa généralité), confirmé par CA Aix-en-Provence (1re ch. A), 18 septembre 1995 : RG n° 92-12582 ; arrêt n° 509 ; Cerclab n° 761 ; Juris-Data n° 044756 ; Contr. conc. consom. 1995, n° 190, obs. Raymond.
Repas : horaires. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet d'imposer des horaires de repas très différents de ceux en usage. Recomm. n° 85-03/B-32° : Cerclab n° 2155 (considérant n° 52 ; pratique contraignante pour les pensionnaires).
Droit d’aller et de venir. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de restreindre le droit du consommateur de s'absenter à tout moment de l'établissement, sauf pour le professionnel à décliner sa responsabilité s'il juge que l'état de santé du consommateur ne le permet pas, à demander d'être informé préalablement de départs ou de retours à des heures inhabituelles, ou à stipuler les précautions à respecter pour la sécurité et la tranquillité des autres occupants. Recomm. n° 85-03/B-28° : Cerclab n° 2155 (considérants n° 48 à 50 ; si le professionnel est garant de la sécurité des consommateurs, il ne lui appartient pas de se substituer au libre arbitre de chacun).
Droit à la dignité. Est sans objet la demande de l’association, invoquant le fait que l'absence de douche individuelle est contraire à la dignité alors que la clause, qui mentionne que « chaque chambre est équipée d'une salle de bains comprenant une douche un lavabo et un WC », exclut de fait des équipements sanitaires communs. CA Grenoble (1re ch. civ.), 24 février 2014 : RG n° 09/04276 ; Cerclab n° 4707, sur appel de TGI Grenoble, 28 septembre 2009 : RG n° 08/05529 ; Dnd (jugement examinant une version antérieure : est illicite au regard de l'article L. 311-3 CASF, qui garantit aux personnes âgées prises en charge le respect de leur dignité, de leur intégrité, de leur vie privée et de leur sécurité, la clause stipulant que le logement remis à usage privatif « est équipé d’un coin toilette avec lavabo et sanitaire sauf cas particuliers » ; le « cas particulier » n’est pas un motif légitime compte tenu de la généralité de la formulation ; s'agissant d'un contrat de séjour à durée indéterminée impliquant la fixation, souvent de manière définitive, par la personne âgée de sa résidence dans l'établissement d'accueil, la privation d'un espace sanitaire individuel non motivée par une raison inhérente à la personne même du résident mais par exemple à des contraintes techniques, telles l'absence d'équipements sanitaires dans certains logements, est parfaitement incompatible avec les droits mentionnés par le texte).
Droit de visites de tiers. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet d'imposer des horaires de visite lorsque le consommateur n'a pas la jouissance exclusive d'un logement, sans accorder à celui-ci la faculté d'en recevoir occasionnellement en dehors de ces horaires sous réserve que le professionnel en ait été informé suffisamment à l'avance pour prendre ses dispositions. Recomm. n° 85-03/B-29° : Cerclab n° 2155. § La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de restreindre le droit de recevoir des visites dans les établissements où chaque consommateur a la jouissance exclusive d'un logement, sauf à stipuler les précautions à respecter pour la sécurité et la tranquillité des autres occupants. Recomm. n° 85-03/B-30° : Cerclab n° 2155 (considérants n° 48 à 50).
Droit de recevoir des invités. La Commission des clauses abusives recommande que les contrats rappellent le droit pour le consommateur de recevoir des invités payants aux repas, sous réserve que le responsable de l'établissement en ait été informé préalablement. Recomm. n° 85-03/A-11° : Cerclab n° 2155 (considérant n° 53 ; faculté importante pour le maintien des relations familiales ou amicales ; la formulation utilisée par la Commission est liée au fait les contrats n’interdisent pas cette possibilité, mais ne l’évoquent pas non plus ; repas supplémentaires bien évidemment facturés).
B. SANTÉ DU PENSIONNAIRE
Santé du pensionnaire : relations avec son médecin. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de limiter le libre choix de son médecin par le consommateur et son droit d'être examiné par lui en dehors de la présence de tiers. Recomm. n° 85-03/B-17° : Cerclab n° 2155 (considérant n° 38 ; clauses citées subordonnant la visite d'un médecin « extérieur » à l'accord du médecin de l'établissement ou imposant lors de cette visite la présence de l'infirmière ou tout autre préposé de l'établissement). § V. aussi sous l’angle de l’information du pensionnaire : la Commission des clauses abusives recommande que les contrats rappellent le droit pour tout consommateur de faire appel au médecin de son choix et d'être examiné par lui sans la présence d'un tiers. Recomm. n° 85-03/A-10° : Cerclab n° 2155.
Est conforme au principe du libre choix du médecin traitant la clause qui stipule qu’« il est laissé entière liberté au résident pour faire intervenir des professionnels libéraux de santé ». CA Grenoble (1re ch. civ.), 6 mars 2018 : RG n° 15/03145 ; Cerclab n° 7469, confirmant TGI Grenoble, 24 juillet 2015 : RG n° 12/00080 ; Dnd (jugement ayant tout aussi justement, selon l’arrêt, exprimé une réserve au sujet du dernier alinéa figurant dans le projet de contrat de séjour).
Si le recours d’un résident à son médecin personnel ne peut être interdit, il peut être exigé de celui-ci qu’il signe une convention avec l’établissement. § V. par exemple : n’est pas abusive la clause qui reproduit, sans y ajouter, les dispositions légales de l’ancien art. L. 314-2 CASF applicables aux établissements, sans être de nature à faire obstacle au libre choix affirmé du médecin. CA Grenoble (1re ch. civ.), 16 juin 2015 : RG n° 12/05633 ; Cerclab n° 5248 (clause du règlement de fonctionnement « chaque résident peut faire appel au médecin de son choix sous réserve que celui-ci signe la convention d'exercice libéral » avec l'établissement), confirmant TGI Grenoble, 5 novembre 2012 : RG n° 09/03438 ; Dnd (clause conforme aux anciens art. L. 314-2 et R. 313-30-1 s. CASF). § N.B. Texte disposant qu’« un contrat portant sur ces conditions d'exercice est conclu entre le professionnel et l'établissement », lequel peut notamment prévoir des modes de rémunération particuliers, autres que le paiement à l'acte et sur un paiement direct des professionnels par l'établissement.
V. cependant, plus exigeant : est abusive la clause qui, tout en rappelant le principe du libre choix du médecin traitant, le conditionne au respect par celui-ci des règles de fonctionnement de l'établissement, ce qui a en réalité pour effet de laisser à la discrétion de l'établissement la possibilité de limiter le droit reconnu au patient et qui octroie au médecin coordonnateur un rôle qui excède largement ses missions définies à l'art. D. 312-158, 3° CASF. TGI Grenoble (4e ch. civ.), 28 septembre 2009 : RG n° 08/05529 ; Cerclab n° 4250 (« à la condition que celui-ci se conforme au fonctionnement de l’établissement, et qu'il soit en contact permanent avec son personnel et plus particulièrement avec le médecin coordinateur de l'établissement »).
Hospitalisation du pensionnaire : auteur de la décision. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet d'autoriser, sauf cas d'urgence, le médecin de l'établissement à faire hospitaliser un consommateur sans l'accord de son médecin traitant. Recomm. n° 85-03/B-18° : Cerclab n° 2155 (considérant n° 39 ; clause abusive dès lors que l’hospitalisation peut constituer un motif de résiliation du contrat).
Hospitalisation du pensionnaire : droit de retour. Est abusive, en raison de l’ambiguïté de sa rédaction, la clause qui ne mentionne pas qu’un résident bénéficiaire de l'aide sociale est assuré à l'issue d'une hospitalisation du maintien de sa chambre, alors qu’une telle assurance doit être inscrite dans le contrat. CA Grenoble (1re ch. civ.), 24 février 2014 : RG n° 09/04276 ; Cerclab n° 4707 (clause stipulant : « pour les personnes bénéficiant de l'aide sociale, au-delà du 35e jour, les modalités sont prévues par le règlement départemental d'aide sociale et s'imposent à l'établissement comme aux résidents accueillis »).