TI ORLÉANS, 17 janvier 2014
CERCLAB - DOCUMENT N° 6994
TI ORLÉANS, 17 janvier 2014 : RG n° 11-13-000264
Publication : Site CCA
Extraits : 1/ « Suivant une note en délibéré datée du 8 mars 2013, le Tribunal a relevé d'office : - la question de la consultation du FICP sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts ; - le caractère abusif de la clause rédigée comme suit « Je/Nous soussigné(e)(s)(ées) reconnais/(sons) avoir (....) obtenu les explications nécessaires sur les caractéristiques du crédit qui correspondent à mes/nos besoins » ; - la déchéance du droit aux intérêts qui découlerait du défaut par le prêteur de la justification de l'accomplissement de son devoir d'explication et de mise en garde. »
2/ « Or, la clause litigieuse rédigée comme suit « Je/Nous soussigné(e)(s)(ées) reconnais/(sons) avoir (....) obtenu les explications nécessaires sur les caractéristiques du crédit qui correspondent à mes/nos besoins » conduit à rendre impossible toute contestation ultérieure et libère l'emprunteur de son obligation de démontrer in concreto qu'il a accompli son obligation de conseil. Ce faisant, un déséquilibre entre les droits et les obligations du prêteur et de l'emprunteur se fait jour au bénéfice du premier.
C'est dans la même lignée que la Cour de Cassation avait rendu le 1er février 2005 un avis considérant qu'était abusive la clause stipulant que l'information prévue par l'ancien article L. 311-9 du Code de la Consommation sera établie par la production de l'enregistrement informatique de l'envoi. La Cour relève en effet que par ce biais, le prêteur se libérait de la preuve du contenu de l'information annuelle. C'est pour ces raisons que la Commission des Clauses Abusives a considéré que la clause litigieuse était abusive. Et il importe peu qu'elle n'ait pas eu connaissance des pièces du dossier dès lors que le document d'information précontractuelle n'est pas en cause et que par ailleurs, aucune autre pièce ne démontre l'accomplissement in concreto de l'obligation de conseil. La clause susvisée sera donc déclarée abusive et réputée non écrite. »
TRIBUNAL D’INSTANCE D’ORLÉANS
JUGEMENT DU 17 JANVIER 2014
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-13-000264.
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
PRÉSIDENT : JAFFREZ B.
GREFFIER : BOBINEAU N.
DEMANDEUR :
SA F.
[adresse], représentée par la SCP GUILLAUMA-PESME, avocat au barreau d'Orléans
DÉFENDEUR :
Madame X.
non comparante
A l'audience du 5 novembre 2013, les parties ont comparu comme il est mentionné ci-dessus et l'affaire a été mise en délibéré à ce jour.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :
Le 26 juin 2011, Mme X. née Y. concluait un prêt personnel avec la société anonyme F. portant sur la somme de 4.677 euros remboursable en 120 mensualités, moyennant un taux nominal de 7,74 % et un taux effectif global de 8,02 %.
Par courrier daté du 16 octobre 2012, Mme X. était mise en demeure de payer la somme de 5.092,98 euros.
Puis, par acte d'huissier de justice converti en procès-verbal de recherches infructueuses en date du 11 février 2013, la société l'assignait devant le Tribunal d'Instance d'Orléans.
Elle demande sa condamnation, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, à lui payer, outre les intérêts moratoires au taux de 8,02 % :
- la somme de 4.317,46 euros au titre du capital restant dû ;
- la somme de 392,70 euros au titre des échéances impayées ;
- la somme de 6,39 euros au titre des intérêts de retard ;
- la somme de 360,81 euros au titre de la pénalité légale de 8 % ;
La société demanderesse sollicite en outre la condamnation de l'emprunteur à lui payer la somme de 400 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Suivant une note en délibéré datée du 8 mars 2013, le Tribunal a relevé d'office :
- la question de la consultation du FICP sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts ;
- le caractère abusif de la clause rédigée comme suit « Je/Nous soussigné(e)(s)(ées) reconnais/(sons) avoir (....) obtenu les explications nécessaires sur les caractéristiques du crédit qui correspondent à mes/nos besoins » ;
- la déchéance du droit aux intérêts qui découlerait du défaut par le prêteur de la justification de l'accomplissement de son devoir d'explication et de mise en garde.
Par courrier reçu le 4 avril 2013 a répondu que la clause litigieuse n'était pas abusive et que le FICP avait été consulté.
Par jugement du 7 mai 2013, le Tribunal d'Instance d'Orléans a saisi la Commission des Clauses Abusives à propos de la clause susvisée.
Suivant avis rendu le 6 juin suivant, la Commission des Clauses Abusives a considéré que la clause litigieuse était abusive.
A l'audience du 5 novembre 2013, la société de crédit maintient ses demandes et produit le contrat de prêt, un tableau d'amortissement ainsi qu'un décompte détaillé de sa créance.
Bien que régulièrement assignée, Mme X. n'est ni présente, ni représentée.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Selon l'article 472 du Code de Procédure Civile, si le défendeur ne comparait pas, il n'est fait droit à la demande que dans la mesure où celle-ci est régulière et bien fondée.
[minute page 3]
1. Sur la créance de la société F. :
L'article L. 132-1 du Code de la Consommation dispose que « Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. »
L'article L. 311-8 du Code de la Consommation prévoit par ailleurs que le prêteur doit fournir à l'emprunteur les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière. Ce devoir de conseil est distinct de l'obligation d'information résultant de l'article L. 311-6 et portant sur les caractéristiques du contrat de crédit envisagé.
Ainsi, la seule production du document intitulé « Information précontractuelle » est insuffisant pour démontrer que le prêteur a satisfait aux exigences de l'article L. 311-8. Ce document correspond à l'information demandée par l'article L. 311-6, l'article L. 311-8 requiert en outre que soient mise en parallèle les caractéristiques du prêt ainsi décrites d'une part, et les besoins et la situation financière de l'emprunteur, d'autre part.
Conformément à l'article 1315 du Code Civil, il revient au prêteur de démontrer qu'il a satisfait aux exigences de ces deux articles (Cour de Cassation, 1er chambre civile 10 avril 1996).
Or, la clause litigieuse rédigée comme suit « Je/Nous soussigné(e)(s)(ées) reconnais/(sons) avoir (....) obtenu les explications nécessaires sur les caractéristiques du crédit qui correspondent à mes/nos besoins » conduit à rendre impossible toute contestation ultérieure et libère l'emprunteur de son obligation de démontrer in concreto qu'il a accompli son obligation de conseil. Ce faisant, un déséquilibre entre les droits et les obligations du prêteur et de l'emprunteur se fait jour au bénéfice du premier.
C'est dans la même lignée que la Cour de Cassation avait rendu le 1er février 2005 un avis considérant qu'était abusive la clause stipulant que l'information prévue par l'ancien article L. 311-9 du Code de la Consommation sera établie par la production de l'enregistrement informatique de l'envoi. La Cour relève en effet que par ce biais, le prêteur se libérait de la preuve du contenu de l'information annuelle.
C'est pour ces raisons que la Commission des Clauses Abusives a considéré que la clause litigieuse était abusive. Et il importe peu qu'elle n'ait pas eu connaissance des pièces du dossier dès lors que le document d'information précontractuelle n'est pas en cause et que par ailleurs, aucune autre pièce ne démontre l'accomplissement in concreto de l'obligation de conseil.
La clause susvisée sera donc déclarée abusive et réputée non écrite.
Par conséquent, si la société F démontre avoir satisfait aux obligations de l'article L. 311-6 du Code de la Consommation, elle ne peut démontrer avoir fait application de l'article L. 311-8 du même code.
Par ailleurs et contrairement à ce qu'elle soutient, la société F. ne justifie pas de la consultation du FICP.
Elle encourt donc la déchéance du droit aux intérêts.
Il ressort pièces produites que le montant des paiements depuis la conclusion du contrat s'élève à la somme de 196,95 euros qu'il conviendra de déduire du montant du capital emprunté éventuellement additionné des primes d'assurance échues, en l'espèce, 4.677 euros. En outre, la déchéance du droit aux intérêts conduit à assortir l'ensemble de la condamnation au paiement d'un intérêt au taux légal.
Mme X. sera donc condamnée à payer à la société F. la somme de 4.480,05 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement, le courrier de mise en demeure et l'assignation n'ayant pas touché la défenderesse.
[minute page 4]
2. Sur les demandes accessoires :
Le domicile de Mme X. étant inconnu, il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire du présent jugement.
Conformément à l'article 696 du Code de Procédure Civile, Mme X. sera condamnée aux entiers dépens.
La situation financière respective des parties justifie que soient laissés à la charge de la demanderesse les frais irrépétibles qu'elle a engagés.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal statuant par mise à disposition après débats publics, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,
DÉCLARE abusive la clause stipulée aux termes du contrat de crédit conclu le 26 juin 2011 entre Mme X. née Y. et la société anonyme F. E rédigée comme suit « Je/Nous soussigné(e)(s)(ées) reconnais/(sons) avoir (...) obtenu les explications nécessaires sur les caractéristiques du crédit qui correspondent à mes/nos besoins »,
La DÉCLARE en conséquence non écrite,
DIT que la société F. doit être déchue de son droit aux intérêts,
CONDAMNE Mme X. née Y. à payer à la société anonyme F. la somme de 4.480,05 € (QUATRE MILLE QUATRE CENT QUATRE-VINGTS EUROS CINQ CENTIMES) au titre du capital restant dû, outre les intérêts au taux légal courant à compter de la signification du présent jugement,
REJETTE le surplus des demandes y compris celles formées sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
CONDAMNE Mme X. née Y. aux entiers dépens,
DIT n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du présent jugement.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe, les jours, mois et an susdits par le Président et le Greffier susmentionnés.
LE GREFFIER LE JUGE D’INSTANCE
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