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CA LYON (1re ch. civ. A), 13 décembre 2007

Nature : Décision
Titre : CA LYON (1re ch. civ. A), 13 décembre 2007
Pays : France
Juridiction : Lyon (CA), 1re ch. A
Demande : 06/04158
Date : 13/11/2007
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Décision antérieure : CASS. CIV. 2e, 3 mai 2006
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7324

CA LYON (1re ch. civ. A), 13 décembre 2007 : RG n° 06/04158

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Attendu que par l’arrêt du 3 mai 2006, la Cour de Cassation a annulé l’arrêt de la Cour d’appel de Lyon du 3 juin 2004 en ce qu’il a déclaré valides les clauses exonérant la Société NPO de toute responsabilité à l’égard des participants au rallye, mis hors de cause cette Société et son assureur la Compagnie l’EQUITE et a débouté Monsieur X. de ses prétentions à leur encontre ».

2/ « Attendu qu’en effet, en sa qualité de professionnel de l’organisation d’une manifestation sportive à risques, la Société NPO, même si elle n’était tenue que d’une obligation de moyens, devait tout mettre en oeuvre pour veiller à la sécurité maximale des participants aussi bien sur l’état mécanique des véhicules engagés comme elle le signalait avec insistance dans le règlement que sur la couverture de la responsabilité civile par une police d’assurance ;

Attendu que sa responsabilité est engagée et qu’elle ne saurait se décharger en invoquant l’article 22 du règlement qui ne concerne que la responsabilité civile du pilote du véhicule ni même l’article 10 de ce même règlement relatif à la responsabilité en dehors de la durée du raid, dès lors qu’elle s’était engagée à assurer le transport aller et retour du participant et des véhicules par bateau de Nice à Tunis et de Tunis à Marseille et avait précisé à l’article 19 qu’ils bénéficiaient d’une assurance responsabilité civile et d’un rapatriement sanitaire ; Attendu que la Société NPO considérait donc que la manifestation par elle organisée commençait le 3 avril pour se terminer le 14 à l’arrivée à Marseille, le raid proprement dit se déroulant du 5 au 13 avril 1997 ; Attendu que la clause d’exonération de responsabilité de l’article 10, trop générale et en contradiction avec la stipulation de l’article 19 ne peut donc être opposée à Monsieur X. ;

Attendu que la faute de la Société NPO a fait perdre à ce participant la chance de bénéficier, en sa qualité de conducteur autorisé, d’une assurance permettant l’indemnisation de son dommage direct ou par ricochet ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE LYON

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE A

ARRÊT DU 13 DÉCEMBRE 2007

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 06/04158. Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON, Au fond, du 10 septembre 2001 : R.G. n° 1999/3401.

 

APPELANT :

Monsieur X.

[adresse], représenté par Maître DE FOURCROY, avoué à la Cour, assisté par la SCP VUILLARD PERRE-VIGNAUD, avocats au Barreau de Lyon

 

INTIMÉS :

AUTO MOTO VERTE SAS

représentée par ses dirigeants légaux domiciliés audit siège. [adresse], représentée par Maître VERRIERE, avoué à la Cour, assistée par Maître BLAMOUTIER, avocat au Barreau de Paris

Maître Y., es qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la Société MEDIMPE

[adresse], défaillant

Société NPO SARL

[adresse], représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour, assistée par Maître FAUVET, avocat au Barreau de Paris

Compagnie L’ÉQUITÉ SA

[adresse], représentée par la SCP LAFFLY-WICKY, avoués à la Cour, assistée par Maître BRET, avocat au Barreau de Lyon

 

L’instruction a été clôturée le 24 août 2007

L’audience de plaidoiries a eu lieu le 31 octobre 2007

L’affaire a été mise en délibéré au 6 décembre 2007, prorogée au 13 décembre 2007, les avoués dûment avisés conformément à l’article 450 dernier alinéa du nouveau code de procédure civile.

COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :

Président : Monsieur VOUAUX-MASSEL

Conseiller : Madame BIOT

Conseiller : Monsieur GOURD

Greffier : Mme MONTAGNE pendant les débats uniquement

A l’audience Madame BIOT, conseillère a fait le rapport conformément à l’article 785 du nouveau code de procédure civile.

ARRÊT : réputé contradictoire ; prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du nouveau code de procédure civile ; signé par Monsieur VOUAUX-MASSEL, président et par Madame JANKOV, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS. PROCÉDURE. PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Monsieur Z., Président du Conseil d’Administration de la Société MEDIMPE et Monsieur X., vétérinaire, ont participé du 3 au 13 avril 1997 au raid ESSILOR de Tunis à Djerba organisé par la Société Neveu Pelletier Organisation (NPO) avec un véhicule 4 x 4 MITSUBISHI PAJERO, propriété de la Société MEDIMPE.

Le 14 avril 1997, à l’issue de la dernière épreuve du raid, alors qu’ils étaient sur le trajet du retour, le véhicule a été accidenté et Monsieur Z. est décédé des suites de ses blessures.

Par jugement du 26 février 1998, le Tribunal de Première Instance de Kairouan (Tunisie) a condamné Monsieur X., conducteur du véhicule, à une peine d’amende pour homicide involontaire.

Par jugement du 10 septembre 2001, le Tribunal de Grande Instance de Lyon statuant sur l’action en indemnisation de leur préjudice engagée par les consorts Z. contre Monsieur X., les Assurances du Crédit Mutuel, assureur du véhicule, l’UMIGA et sur appel en garantie contre la Société NPO et son assureur la Compagnie l’EQUITE et la Société MEDIMPE, a :

- en application de l’article 3 de la loi du 5 juillet 1985, condamné Monsieur X. à réparer le préjudice subi par la veuve et les enfants de la victime ainsi que sa mère et ses frères et soeur et à rembourser à la CPAM de Lyon ses débours

- « condamné la SA MEDIMPE à relever et garantir Monsieur X. de la totalité de ces condamnations,

- rejeté toutes les autres demandes, principales ou d’appels en garantie,

- déclaré le présent jugement opposable à la CPAM de Lyon et à l’UMIGA,

- rejeté la demande d’exécution provisoire,

- condamné Monsieur X. à payer en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

- aux consorts Z., la somme de 10.000 francs,

- à la CPAM de Lyon la somme de 2.000 francs,

- débouté les parties de leurs demandes sur le même fondement,

- condamné Monsieur X. aux dépens distraits au profit de Maître D., condamnation dont il sera relevé et garanti par la Société MEDIMPE ».

Par arrêt du 20 janvier 2004, la présente cour a confirmé le jugement sur l’application de la loi française, en ce qu’il a déclaré Monsieur X. tenu de réparer l’intégralité des conséquences dommageables de l’accident du 14 avril 1997, condamné la Société MEDIMPE à garantir Monsieur X. des condamnations financières à son encontre, mis hors de cause les Assurances du Crédit Mutuel et AXA Assurances.

Avant dire droit, la Cour a invité les parties à conclure sur la validité des clauses d’exclusion de responsabilité de la Société NPO stipulées dans le contrat.

Par un second arrêt du 3 juin 2004, la Cour a dit que la Société NPO était fondée à se prévaloir de ces clauses d’exclusion de responsabilité dès lors qu’elles ne portaient pas sur les obligations essentielles du contrat d’engagement conclu par les participants au rallye.

Par arrêt du 3 mai 2006, la Cour de Cassation, au visa de l’article L. 132-1 du Code de la consommation, a cassé et annulé l’arrêt du 3 juin 2004 rendu par la Cour d’appel de Lyon mais seulement en qu’il a déclaré valides ces clauses exonérant la Société NPO de toute responsabilité à l’égard des participants au rallye et mis hors de cause cette société et son assureur.

La cause et les parties ont été renvoyées devant la Cour d’appel de Lyon autrement composée.

Monsieur X., appelant, soutient que la Société NPO a commis une faute lourde en ne contrôlant pas avant le départ l’assurance du véhicule participant au raid.

Il conclut à l’inopposabilité des clauses d’exclusion de responsabilité des articles 10 et 22 du règlement du rallye qui sont abusives au sens de l’article L. 132-1 du Code de la consommation puisqu’elle crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.

Il demande donc de réformer le jugement en qu’il a mis hors de cause la Société NPO et son assureur la Compagnie l’EQUITE et de les condamner à le relever et garantir de toutes condamnations financières contre lui au profit des consorts Z.

Il conclut en outre à la condamnation de la Société NPO, de la Compagnie l’EQUITE et de Maître Jean-Philippe Y. es qualité de mandataire judiciaire de la Société MEDIMPE à lui payer la somme de 2.000 euros chacun sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

La Société NPO conclut au rejet des demandes de Monsieur X. en faisant valoir qu’elle n’avait aucune obligation de vérification des assurances des participants au raid.

Subsidiairement, elle demande à être garantie par la Compagnie d’assurances l’EQUITE et plus subsidiairement reproche à la Société d’Assurances AUTO MOTO Verte AMV, courtier, une défaillance à la fois dans son devoir d’information à l’égard de son mandant et de son obligation générale de prudence.

Elle conclut donc à la condamnation de cette Société à la relever et garantir de toutes condamnations et sollicite une indemnité de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

La Société NPO insiste sur la négligence de Monsieur Z. en sa qualité de représentant de la Société MEDIMPE tenue de fournir divers documents, en particulier une attestation d’assurance ce qui impliquait la vérification de la validité de celle-ci sur le territoire tunisien.

Elle conteste toute responsabilité n’ayant contracté aucun engagement de contrôle à l’égard des participants au raid.

L’EQUITE conclut au rejet des demandes de la société NPO, sa garantie n’étant pas due puisque l’accident s’est produit en dehors de la manifestation et que la société organisatrice n’avait aucune obligation de vérification de la validité des documents administratifs imposés aux participants.

Maître Y. es qualités de liquidateur de la Société MEDIMPE n’a pas constitué avoué.

L’Assurance Moto Verte (AMV) conclut à l’irrecevabilité de la demande formée après l’arrêt de la Cour de Cassation qui a expressément statué en la mettant hors de cause.

Elle indique que la Cour de renvoi n’est saisie que de la validité des clauses d’exclusion de responsabilité.

Subsidiairement, elle conclut à la confirmation du jugement qui l’a mise hors de cause en précisant qu’elle n’a qu’une obligation de moyens et qu’en l’espèce, le contrat d’assurances était clair.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS ET DÉCISION :

Attendu qu’il convient de statuer par arrêt réputé contradictoire, l’intimé défaillant ayant été cité à sa personne ;

Attendu que par l’arrêt du 3 mai 2006, la Cour de Cassation a annulé l’arrêt de la Cour d’appel de Lyon du 3 juin 2004 en ce qu’il a déclaré valides les clauses exonérant la Société NPO de toute responsabilité à l’égard des participants au rallye, mis hors de cause cette Société et son assureur la Compagnie l’EQUITE et a débouté Monsieur X. de ses prétentions à leur encontre ;

Attendu que demeurent donc en litige la question de la responsabilité civile de la Société NPO à l’égard de Monsieur X. et la garantie de la Compagnie d’Assurance l’EQUITE ;

Attendu qu’il est constant que le véhicule Pajero Mitsubishi 4 x 4 propriété de la Société MEDIMPE engagé dans ce raid était assuré auprès du Crédit Mutuel Assurances mais que la garantie de cette Compagnie d’assurances ne couvrait pas la circulation en Tunisie, exclusion expressément notée sur la carte verte ;

Attendu que dans le règlement du raid ESSILOR organisé par NPO, il était stipulé à l’article 3 : « les participants doivent fournir un passeport en cours de validité, les conducteurs un permis de conduire, la carte grise du véhicule, l’assurance carte verte » et à l’article 24 : « le départ sera refusé à tous participants n’ayant pas réglé entièrement leur droit d’inscription aux vérifications administratives à Nice » ;

Attendu qu’ainsi la Société organisatrice prévoyait une vérification administrative avant le départ de Nice ce qui correspond au terme « fournir » employé lequel implique non seulement que les participants soient titulaires des documents visés dans le règlement mais encore qu’ils les remettent à l’organisateur ;

Attendu qu’en négligeant de contrôler l’attestation d’assurance du véhicule de la Société MEDIMPE représentée par Monsieur Z., la Société NPO a failli à son obligation de sécurité à l’égard des participants pour lesquels l’assurance automobile d’un véhicule engagé dans cette manifestation était déterminante et ce d’autant plus qu’elle spécifiait dans l’article 22 du règlement que le pilote serait seul responsable des accidents qu’il pourrait occasionner, sans recours contre l’organisation ou les autorités locales ;

Attendu qu’en effet, en sa qualité de professionnel de l’organisation d’une manifestation sportive à risques, la Société NPO, même si elle n’était tenue que d’une obligation de moyens, devait tout mettre en oeuvre pour veiller à la sécurité maximale des participants aussi bien sur l’état mécanique des véhicules engagés comme elle le signalait avec insistance dans le règlement que sur la couverture de la responsabilité civile par une police d’assurance ;

Attendu que sa responsabilité est engagée et qu’elle ne saurait se décharger en invoquant l’article 22 du règlement qui ne concerne que la responsabilité civile du pilote du véhicule ni même l’article 10 de ce même règlement relatif à la responsabilité en dehors de la durée du raid, dès lors qu’elle s’était engagée à assurer le transport aller et retour du participant et des véhicules par bateau de Nice à Tunis et de Tunis à Marseille et avait précisé à l’article 19 qu’ils bénéficiaient d’une assurance responsabilité civile et d’un rapatriement sanitaire ;

Attendu que la Société NPO considérait donc que la manifestation par elle organisée commençait le 3 avril pour se terminer le 14 à l’arrivée à Marseille, le raid proprement dit se déroulant du 5 au 13 avril 1997 ;

Attendu que la clause d’exonération de responsabilité de l’article 10, trop générale et en contradiction avec la stipulation de l’article 19 ne peut donc être opposée à Monsieur X. ;

Attendu que la faute de la Société NPO a fait perdre à ce participant la chance de bénéficier, en sa qualité de conducteur autorisé, d’une assurance permettant l’indemnisation de son dommage direct ou par ricochet ;

Attendu qu’eu égard aux circonstances de l’accident et à la faute retenue par le Tribunal de Kairouan, cette perte de chance doit être évaluée à 50 % du préjudice ;

Attendu que la Société l’EQUITE auprès de laquelle la Société NPO avait souscrit une police d’assurances de la responsabilité civile pour les manifestations sportives doit garantir cette société en application de l’article 1 de la police définissant l’objet et l’étendue de l’assurance et stipulant à l’alinéa 1 qu’elle couvre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile pouvant incomber à l’organisateur ou aux concurrents du fait des dommages corporels ou matériels causés aux spectateurs, aux tiers aux concurrents mais seulement pour ces derniers lorsqu’il s’agit d’épreuves ne comportant pas sur la totalité de leur parcours un usage privatif de la voie publique ;

Attendu que la demande formée contre la Société AMV devient sans objet ;

Attendu qu’il serait inéquitable de laisser à Monsieur X. la charge de l’intégralité de ses frais irrépétibles ; qu’il y a lieu de lui allouer une indemnité sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Vu l’arrêt de la Cour de Cassation du 3 mai 2006 (première chambre civile),

Vu l’arrêt de la cour d’appel de Lyon du 20 janvier 2004 ;

Réforme le jugement tendu par le Tribunal de Grande Instance de Lyon le 10 septembre 2001 en ce qu’il a rejeté l’appel en garantie contre la Société NPO,

Statuant à nouveau,

Dit que la Société NPO a commis une faute engageant sa responsabilité à l’égard de Monsieur X. auquel elle a fait perdre une chance d’être indemnisé de son dommage,

Dit que cette perte de chance est de 50 % du préjudice subi,

Condamne la Société NPO à garantir dans cette proportion Monsieur X. des condamnations prononcées contre lui au profit des consorts Z.,

Condamne la Société d’assurance L’EQUITE à garantir la Société NPO de cette condamnation,

Déclare le présent arrêt opposable à Maître Y., es qualités de liquidateur judiciaire de la Société MEDIMPE,

Condamne in solidum la Société NPO et la Société l’EQUITE à verser à Monsieur X. une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

Les condamne aux dépens d’appel qui comprendront ceux de l’arrêt cassé avec droit de recouvrement direct au profit des avoués des parties adverses.