CA METZ (1re ch.), 1er février 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7429
CA METZ (1re ch.), 1er février 2018 : RG n° 16/03871 ; arrêt n° 18/00034
Publication : Jurica
Extrait : « En l'espèce, il ressort du contrat de location conclu par la société LOCAM et M. X. qu'il a été signé par ce dernier à [ville E.], son lieu de travail, dans le cadre de son activité professionnelle. En effet le contrat précise, dans les renseignements relatifs au locataire, en bas à gauche de la première page, à la ligne « Qualité du signataire », qu'il a conclu en qualité de « Kinésithérapeute-Ostéopathe », il comporte un cachet à son nom rappelant ces deux diplômes par les abréviations « MKDE – DOE », ainsi qu'une mention pré-imprimée dans la case acceptation de la location indiquant « Le locataire (...) Il atteste que le contrat est en rapport direct avec son activité professionnelle (...) ». Dès lors le contrat a un rapport direct avec l'exercice de la profession de M. X., et les dispositions des articles L. 121-23 et L. 121-24 du Code de la Consommation ne sont pas applicables.
M. X. soutient par ailleurs que l'article 12 comporte une clause abusive, de même que l'article 15 prévoyant la restitution immédiate du bien loué, et que ces articles doivent être réputés non écrit comme étant rédigés de manière illisible. L'ancien article L. 132-1 du Code de la Consommation (devenu L. 212-1 du Code de la consommation), concernant les clauses abusives, s'applique aux consommateurs personnes physiques et aux personnes morales non-professionnelles. Il n'est pas applicable à M. X. qui a agi dans le cadre de son activité professionnelle libérale.
Par ailleurs le nouvel article 1171 du Code Civil, relatif aux clauses abusives dans les contrats d'adhésion, n'est pas applicable aux contrats conclus avant le 1er octobre 2016, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. Il n'est dès lors pas applicable au présent litige afférent à un contrat du 21 décembre 2012.
Enfin M. X. soutient que les conditions générales du contrat ne sont pas conformes aux dispositions du Code de la Consommation, en ce qu'elles sont illisibles. Cependant les dispositions du nouvel article L. 211-1 du Code de la Consommation, issues de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, prévoyant que « les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible », ne sont pas applicables au litige relatif au contrat conclu par les parties le 21.12.2012, avant leur entrée en vigueur. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE METZ
PREMIÈRE CHAMBRE
ARRÊT DU 1er FÉVRIER 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 16/03871. Arrêt n° 18/00034.
APPELANT :
Monsieur X.
représenté par Maître B., avocat à la Cour d'Appel de METZ
INTIMÉE :
SAS LOCAM
représentée par Maître B.-P., avocat à la Cour d'Appel de METZ
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : Monsieur HITTINGER, Président de Chambre
ASSESSEURS : Madame STAECHELE, Conseiller, Madame DUSSAUD, Conseiller, Entendu en son rapport
GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Madame BELLIARD, adjoint administratif faisant fonction de greffier
DATE DES DÉBATS : En application des dispositions de l'article 786 et 907 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 5 décembre 2017, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame STAECHELE, Conseiller et Madame DUSSAUD, Conseiller et magistrat chargé du rapport.
Ces Magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour pour l'arrêt être rendu le 1er février 2018.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE ANTÉRIEURE :
Le 21 décembre 2012, M. X. a conclu un contrat n° XXX auprès de la société SAS LOCAM « Location Automobiles Matériel » (la société LOCAM) ayant pour objet la location de matériel informatique en contrepartie du règlement de 21 loyers trimestriels de 1.435,20 euros TTC. Les biens ont été livrés selon procès-verbal de livraison et de conformité en date du 6 février 2013.
Par courrier recommandé du 20 septembre 2013, la société LOCAM a mis en demeure M. X. de régler la somme de 5.875,21 euros correspondant à des loyers impayés, intérêts de retard, indemnité et provision de loyer en cours, et ce, dans un délai de 8 jours, lui indiquant qu'à défaut la totalité de la créance deviendrait immédiatement exigible.
Par acte d'huissier du 30 novembre 2015, la société LOCAM a fait assigner M. X. devant le tribunal de grande instance de Metz aux fins de le voir condamner à lui payer la somme principale de 34.826,63 euros, outre intérêts au taux légal et autres accessoires de droit.
M. X. n'a pas comparu.
Par jugement en date du 28 avril 2016, le tribunal de grande instance de Metz a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, condamné M. X. à payer à la société LOCAM la somme de 34.826,63 euros avec intérêts au taux légal à compter du 23 septembre 2013 pour la somme de 5.857,21 euros et pour le surplus à compter du 30 novembre 2015, outre la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu que les conditions contractuelles de résiliation due à un manquement contractuel du locataire étaient réunies, que le décompte des sommes dues par M. X. produit pas la société LOCAM n'était pas contesté et que l'article 12 des conditions générales prévoyait également, dans ce cas, le versement d'une indemnité acquise à la société LOCAM.
Le tribunal a toutefois débouté la société LOCAM de sa demande de condamnation de M. X. aux « autres accessoires de droit » en considérant que ceux-ci n'étaient pas explicités.
Par déclaration au greffe de la cour en date du 19 octobre 2016, M. X. a interjeté appel de ce jugement.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par ses dernières conclusions récapitulatives en date du 9 mai 2017, M. X. demande à la cour de :
« Faire droit à l'appel
Infirmer le jugement entrepris
Vu le Code de la Consommation et notamment les articles L. 121-23 et 24 alors applicables,
Constater dire et juger que le contrat de location financière du 21 décembre 2012 ne porte pas la désignation précise de la nature et des caractéristiques du bien offert, ni les modalités et les délais de livraison du bien, paragraphes qui ne sont pas renseignés,
Déclarer nul et de nul effet le contrat de location financière daté du 21 décembre 2012 et en tout cas abusive et de nul effet les clauses contenues dans les articles 12 et 15 du contrat de location,
Constater que la taille de caractère des conditions générales de location figurant dans les deux annexes du contrat pages 3 et 4 est illisible et que de ce fait l'ensemble des Conditions Générales sont nulles, réputées non écrites et en tout cas inopposables à Monsieur X.
Débouter la société LOCAM de sa demande
Condamner SAS LOCAM LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS à payer à Monsieur X. la somme de 2.000 euros par application de l'Article 700 du CPC
La condamner aux dépens de première instance et d'appel
Subsidiairement,
Dire irrecevable la demande de la société LOCAM de distraction des dépens sur l'affirmation de droit de Maître B.-P. Agnès. »
M. X. soutient que le contrat de location de longue durée sur lequel la société LOCAM fonde sa demande est nul comme ne respectant pas les dispositions d'ordre public du code de la consommation, dont l'article L. 121-23 de ce code alors applicable. Il fait valoir à cet égard que le contrat ne désigne pas de manière précise la nature et les caractéristiques du bien offert et que le paragraphe 2 ne contient pas la date et le lieu de livraison.
Il soutient également que la société LOCAM, créancier professionnel, est débiteur envers son client consommateur d'une obligation d'information justifiant que le non-respect des dispositions d'ordre public des articles L. 121-3 et 24 soit sanctionné par la nullité du contrat.
M. X. ajoute que le contrat contient des clauses abusives, particulièrement ses articles 12 et 15, portant sur la restitution immédiate du bien loué, de sorte que la nullité de ces clauses impose le rejet de la demande de la société LOCAM.
Il soutient enfin que les conditions générales de location lui sont inopposables car elles sont non conformes au code de la consommation et illisibles du fait de la taille des caractères utilisés.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 13 septembre 2017, la société LOCAM « LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS » demande à la cour de :
« Vu les anciens articles 1134 et suivants et 1149 anciens du code civil,
Vu la destination professionnelle de la location,
Vu les pièces versées,
- Dire non fondé l'appel entrepris ; Débouter Monsieur X. de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- Confirmer le jugement du 28 avril 2016 en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
- Condamner Monsieur X. à régler à la société LOCAM à régler à la société LOCAM une nouvelle indemnité de 2.500 euros au titre de l'article 700 du CPC ;
-Le condamner aux entiers dépens d'instance et d'appel ; Ces derniers distraits au profit de Maître Agnès B.-P. sur son affirmation de droit. »
La société LOCAM soutient que les dispositions du code de la consommation invoquée par M. X. ne peuvent s'appliquer car ce dernier a contracté avec la société LOCAM dans le cadre et pour les besoins de son activité professionnelle de kinésithérapeute-ostéopathe ainsi qu'il est stipulé au contrat et ainsi que M. X. l'a indiqué par mention manuscrite sous sa signature.
La société LOCAM ajoute que, en tout état de cause, le contrat de location et le procès-verbal de livraison et conformité signés par M. X. désignent les biens en cause. Elle soutient également que M. X. n'apporte pas la preuve de ses affirmations concernant l'obligation de restitution des matériels loués après la résiliation du contrat et précise qu'elle est demeurée propriétaire des biens loués à M. X.
Elle fait enfin valoir que M. X. ne décrit pas le défaut d'exécution d'une obligation d'information dont il aurait été victime et ajoute qu'elle l'a pleinement instruit quant aux engagements respectifs des parties. La société LOCAM précise que M. X. n'a pas attrait dans la cause le fournisseur des biens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 novembre 2017.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE L'ARRÊT :
Sur la demande principale de la société LOCAM :
M. X. soutient que le contrat est nul comme ne respectant pas les dispositions des articles L. 121-23 et suivants du Code de la Consommation, dans leur rédaction alors applicable.
L'article L. 121-23 du Code de la Consommation, dans sa rédaction applicable à la date de conclusion du contrat du 21 décembre 2012, invoqué par M. X., concernait le démarchage à domicile, et imposait certaines mentions dans le contrat à peine de nullité.
Toutefois l'ancien article L. 121-22 du Code de la Consommation également applicable au litige, disposait :
« (...). Ne sont pas soumis aux dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-28 : (...).
4° Les ventes, locations ou locations-ventes de biens ou les prestations de services lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession. »
En l'espèce, il ressort du contrat de location conclu par la société LOCAM et M. X. qu'il a été signé par ce dernier à [ville E.], son lieu de travail, dans le cadre de son activité professionnelle. En effet le contrat précise, dans les renseignements relatifs au locataire, en bas à gauche de la première page, à la ligne « Qualité du signataire », qu'il a conclu en qualité de « Kinésithérapeute-Ostéopathe », il comporte un cachet à son nom rappelant ces deux diplômes par les abréviations « MKDE – DOE », ainsi qu'une mention pré-imprimée dans la case acceptation de la location indiquant « Le locataire (...) Il atteste que le contrat est en rapport direct avec son activité professionnelle (...) ».
Dès lors le contrat a un rapport direct avec l'exercice de la profession de M. X., et les dispositions des articles L. 121-23 et L. 121-24 du Code de la Consommation ne sont pas applicables.
M. X. soutient par ailleurs que l'article 12 comporte une clause abusive, de même que l'article 15 prévoyant la restitution immédiate du bien loué, et que ces articles doivent être réputés non écrit comme étant rédigés de manière illisible.
L'ancien article L. 132-1 du Code de la Consommation (devenu L. 212-1 du Code de la consommation), concernant les clauses abusives, s'applique aux consommateurs personnes physiques et aux personnes morales non-professionnelles. Il n'est pas applicable à M. X. qui a agi dans le cadre de son activité professionnelle libérale.
Par ailleurs le nouvel article 1171 du Code Civil, relatif aux clauses abusives dans les contrats d'adhésion, n'est pas applicable aux contrats conclus avant le 1er octobre 2016, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. Il n'est dès lors pas applicable au présent litige afférent à un contrat du 21 décembre 2012.
Enfin M. X. soutient que les conditions générales du contrat ne sont pas conformes aux dispositions du Code de la Consommation, en ce qu'elles sont illisibles.
Cependant les dispositions du nouvel article L. 211-1 du Code de la Consommation, issues de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, prévoyant que « les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible », ne sont pas applicables au litige relatif au contrat conclu par les parties le 21.12.2012, avant leur entrée en vigueur.
En tout état de cause le contrat est rédigé de manière lisible.
Les moyens soulevés par M. X. sont écartés et ses demandes correspondantes sont rejetées.
Par des motifs pertinents, que la Cour adopte, le tribunal a fait droit partiellement aux demandes de la société LOCAM. Il y a lieu de confirmer le jugement en toutes ses dispositions.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
Les dispositions du jugement statuant sur les dépens et indemnité pour frais irrépétibles sont confirmées.
M. X., partie perdante, sera condamné aux dépens de la procédure d'appel et à payer à la société LOCAM la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. La demande de M. X., partie perdante, est rejetée sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Il résulte de l'article 103 du Code local de procédure civile que la procédure de distraction des dépens n'est pas applicable dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin, et de la Moselle.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour statuant publiquement et par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoire :
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant :
Condamne M. X. à payer à la société SAS LOCAM - Location Automobiles Matériel la somme de 1.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Condamne M. X. aux dépens de la procédure d'appel ;
Déboute les parties de toute autre demande.
Le présent arrêt a été prononcé par mise à disposition publique le 1er février 2018, par Monsieur HITTINGER, Président de Chambre, assisté de Monsieur FOURNIER, Greffier, et signé par eux.
- 5820 - Code de la consommation - Clauses abusives - Application dans le temps - Illustrations : Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014
- 5821 - Code de la consommation - Clauses abusives - Application dans le temps - Illustrations : Réforme du Code de la consommation - Ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016
- 5879 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères alternatifs : cadre de l’activité
- 5946 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Activité administrative - Informatique
- 6003 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Rédaction et interprétation - Rédaction claire et compréhensible (L. 212-1, al. 1, C. consom.) - Clause confuses
- 6093 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Lisibilité - Présentation générale
- 6151 - Code civil et Droit commun - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Droit postérieur à l’ordonnance du 10 février 2016 et à la loi du 20 avril 2018 - Art. 1171 C. civ. - Application dans le temps