CA AIX-EN-PROVENCE (2e ch. civ.), 21 septembre 1995
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 759
CA AIX-EN-PROVENCE (2e ch. civ.), 21 septembre 1995 : RG n° 92/14470 ; arrêt n° 542/95
Publication : Juris-Data n° 047068
Extrait : « pour obtenir la nullité de cette clause, Monsieur X. ne peut valablement se fonder sur l'article L. 132-1 du Code de la Consommation qui prohibe les clauses abusives entre professionnels et non professionnels ou consommateurs alors que le véhicule acheté était destiné à son activité professionnelle comme l'établit l'apposition de son tampon commercial avec son enseigne et son numéro au registre du commerce sur le contrat de crédit-bail. ».
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 21 SEPTEMBRE 1995
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 92/14470. Arrêt n° 542/95.
ARRÊT DE LA 2ème CHAMBRE CIVILE en date du 21 septembre 1995
Prononcé sur appel d'un JUGEMENT rendu le 29 juin 1992 par le Tribunal de Commerce d'AIX-en-PROVENCE.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
CONFORMÉMENT aux articles 786 et 910 du Nouveau Code de Procédure Civile, sans opposition de la par des Avoués et des Avocats des parties.
Président : Monsieur ISOUARD, Magistrat rapporteur
Greffier Divisionnaire : Madame FORCELLINI
LORS DU DELIBÉRÉ : Président : Monsieur DRAGON
Conseillers : Monsieur ISOUARD, Madame CORDAS
DÉBATS : du 16 JUIN 1995
Monsieur le Président a avisé les parties que le délibéré serait prononcé à l'audience du 21 SEPTEMBRE 1995.
PRONONCÉ : A l'audience publique du 21 septembre 1995 par Monsieur le Conseiller ISOUARD assisté de Madame FORCELLINI, Greffier Divisionnaire
NATURE DE L'ARRÊT : CONTRADICTOIRE
[minute page 2]
NOMS DES PARTIES :
APPELANTE :
LA SOCIETE FRANFINANCE, anciennement SOLOVAM - UCR de MARSEILLE
[adresse], poursuites et diligences de ses représentants légaux, APPELANTE, Représentée par Maître ERMENEUX, Avoué près la Cour, Assistée par Maître ABEGA substituant Maître SOCRATE, Avocat au Barreau de MARSEILLE.
CONTRE :
INTIMÉ :
Monsieur X.
né le […] à […], de nationalité française, domicilié à [adresse], AIDE JURIDICTIONNELLE TOTALE - décision du [date], INTIMÉ, APPELANT INCIDENT, Représentée par la SCP PRIMOUT FAIVRE, Avoués associés près la Cour, Ayant pour Conseil Maître Nathalie MARCHESSEAU, Avocat au Barreau d'AIX-en-PROVENCE.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Début 1989, la Société SOLOVAM a donné en crédit bail à Monsieur X. un véhicule utilitaire de marque MERCEDES. Ce contrat a été cautionné par Monsieur Y.
A la suite de la défaillance du locataire, cette convention a été résiliée et le véhicule restitué. Par jugement du 29 juin 1992, le Tribunal de Commerce d'AIX-en-PROVENCE a rejeté les demandes contre Monsieur Y. et condamné Monsieur X. à payer à la Société SOLOVAM la somme de 8.228,97 Francs représentant la pénalité de 10 % sur les loyers à échoir, rejetant le surplus de la demande,
[minute page 3] Le 12 août 1992, la Société FRANFINANCE, nouvelle appellation du bailleur, a interjeté appel de cette décision.
Elle sollicite sa réformation et la condamnation de Monsieur X. à lui payer les sommes de :
- 66.547,07 Francs avec intérêts au taux légal à compter du 5 décembre 1990, solde du crédit bail selon les dispositions contractuelles ;
- 20.000,00 Francs de dommages-intérêts ;
- 5.000,00 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
En cours de procédure, elle s'est désistée de son action contre Monsieur Y.
Monsieur X. conclut à la confirmation du jugement attaqué, à l'allocation des plus larges délais pour se libérer des sommes qui seraient mises à sa charge et à la condamnation de son adversaire à lui payer la somme de 8.000 Francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Il soulève tout d'abord la nullité de l'indemnité de résiliation qui constitue une clause abusive au sens de l'article 35 de la Loi du 10 janvier 1978.
Subsidiairement il réclame la modération de cette indemnité en raison de son caractère manifestement abusif.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur les sommes dues au titre du crédit bail :
Le contrat de crédit bail stipule (article 13) qu'en cas de résiliation pour défaut de paiement du loyer, ce qui est le cas en l'espèce, Monsieur X. ayant cessé ses règlements à compter d'octobre 1990, le crédit preneur sera redevable des loyers restant à échoir diminués du prix de reprise ou de revente du matériel financé et une indemnité de 10 % s'appliquera à toutes les sommes non payées à leur date.
Pour obtenir la nullité de cette clause, Monsieur X. ne peut valablement se fonder sur l'article L. 132-1 du Code de la Consommation qui prohibe les clauses abusives entre professionnels et non professionnels ou consommateurs alors que le véhicule acheté était destiné à son activité professionnelle comme l'établit l'apposition de son tampon commercial avec son enseigne et son numéro au registre du commerce sur le contrat de crédit bail.
[minute page 4] En conséquence, cette clause s'avère valable.
La Société FRANFINANCE décompose ainsi sa créance :
I - SOLDE DÉBITEUR AVANT RÉSILIATION
- Loyers échus impayés :
* mensualité impayée du 5/10/90…… 3.902,63 Francs
* mensualité impayée du 5/11/90…… 3.902,63 Francs
* mensualité impayée du 5/12/90…… 3.902,63 Francs
11.707,89 Francs
- Indemnité forfaitaire de 10 % + TVA 1.388,54 Francs
SOIT 13.096,63 Francs 13.096,63 Francs
II - SOLDE DÉBITEUR APRÈS RÉSILIATION
- Loyers à échoir hors taxe :
* 25 échéances du 5/01/91 au 5/01/93
(chacune de 3.291,59 francs)… 82.289,75 Francs
- Peine de 10 % suivant dispositions
contractuelles…… 8.228,97 Francs
- Option d’achat en fin de contrat… 7.358,16 Francs
SOIT 97.876,88 Francs (A)
- A déduire :
* vente du matériel le 7/12/90… 56.179,65 Francs
diminuée des :
* frais de réparation… 0,00 Francs
* commission de remplacement de 6 % 3.370,77 Francs
SOIT 52.808,88 Francs (B)
(A – B) 45.068,00 Francs
TVA 18, 60 % 8.382,64 Francs
SOIT 53.450,64 Francs 53.450,64 Francs
SOLDE RESTANT DU 66.547,07 Francs
[minute page 5] L'indemnité de résiliation prévue par le contrat constitue une clause pénale en ce qu'elle a pour objet de sanctionner l'inexécution des obligations du locataire ; elle est soumise en tant que telle aux dispositions de l'article 1152 du Code Civil ; la Cour peut donc la modérer d'office.
En prenant en considération le capital investi, les sommes versées, le prix de revente du véhicule, les frais de gestion et de fonctionnement inclus dans le montant des loyers, la juste rémunération de la prestation, l'exigibilité anticipée de la dette, la Cour estime que l'indemnité de résiliation est excessive par rapport au préjudice effectivement subi et doit être ramenée, en tenant compte de ces différents éléments d'appréciation à 40.000 Francs ;
Monsieur X. doit être condamné à payer à la Société FRANFINANCE la somme de 53.096,43 Francs (13.096,43 Francs + 40.000 Francs) avec intérêts au taux légal à compter du 5 décembre 1990, date de la résiliation du crédit bail ainsi que le prévoit l'article 13-3 C du contrat ;
En raison de l'ancienneté de la dette, il ne convient pas d'accorder à Monsieur X. des délais de paiement.
Sur la demande en dommages-intérêts :
A l'appui de sa demande en dommages-intérêts, la Société FRANFINANCE expose que Monsieur X. a inventé l'existence de Monsieur Y. qu'il a présenté comme son frère alors que cette personne n'existe pas et a signé l'acte de caution à sa place, lui créant ainsi un préjudice résultant dans l'absence de sûreté personnelle.
Monsieur X. reconnaît être le signature [N.B. : comprendre sans doute le « signataire »] de l'acte de caution. En signant cet engagement pour une personne imaginaire, il a commis une faute laissant croire à son créancier qu'il bénéficierait d'une garantie et aurait un gage supérieur à la réalité, lui causant par là un préjudice.
Il convient d'évaluer ce préjudice à la somme de 5.000 Francs, peu important la négligence du proposé de la Société FRANFINANCE qui a rempli et recueilli le cautionnement sans s'assurer de l'existence de la caution.
[minute page 6]
Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :
L'équité commande de laisser à la charge de chacune des parties le montant de leurs frais non compris dans les dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, STATUANT PUBLIQUEMENT, CONTRADICTOIREMENT ;
INFIRME le jugement du 29 juin 1992 du Tribunal de Commerce d'AIX-en-PROVENCE ;
STATUANT A NOUVEAU :
CONDAMNE Monsieur X. à payer à la Société FRANFINANCE la somme de 53.096,43 Francs (CINQUANTE TROIS MILLE ZERO QUATRE VINGT SEIZE FRANCS, QUARANTE TROIS CENTIMES) avec intérêts à compter du 5 décembre 1990 ;
REFUSE à Monsieur X. l'octroi d'un délai de paiement ;
CONDAMNE Monsieur X. à payer à la Société FRANFINANCE la somme de 5.000 Francs (CINQ MILLE FRANCS) à titre de dommages-intérêts ;
REJETTE les demandes au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
CONDAMNE Monsieur X. aux dépens et autorise Maître ERMENEUX, Avoué à recouvrer directement ceux d'appel dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu provision.
- 5735 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Nature - Clause nulle
- 5893 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Conclusion du contrat
- 5933 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Véhicules et engins
- 5938 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Financement de l’activité - Crédit-bail et location financière
- 6157 - Code civil et Droit commun - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Droit antérieur à l’ordonnance du 10 février 2016 - Clauses léonines