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CA PARIS (25e ch. sect. B), 20 octobre 2006

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (25e ch. sect. B), 20 octobre 2006
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), 25e ch. sect. B
Demande : 05/05140
Date : 20/10/2006
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Juris Data
Décision antérieure : TGI PARIS (5e ch. 2e sect.), 13 janvier 2005
Numéro de la décision : 307
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 781

CA PARIS (25e ch. sect. B), 20 octobre 2006 : RG n° 05/05140 ; arrêt n° 307

Publication : Juris-Data n° 314743

 

Extrait : « Qu'une partie ne peut se prévaloir de la qualité de non professionnel ou consommateur lorsque le contrat qu'elle a conclu a un rapport direct avec son activité professionnelle, peu important son absence de compétence professionnelle au regard de l'objet du contrat ; Considérant qu'il n'est pas discuté, en l'espèce, que Mme Y. a conclu les contrats litigieux pour les besoins de la protection de son cabinet médical, en sorte que ces contrats ont un rapport direct avec son activité professionnelle et qu'elle ne peut légitimement se prévaloir des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ; […] Que, de même, elle ne peut non plus se prévaloir de l'inobservation alléguée du délai de rétractation de sept jours prévu par l'article L. 121-25 du code de la consommation, l'application de l'ensemble les dispositions relatives au démarchage à domicile étant exclue par l'article L. 121-22 en cas de contrat en rapport direct avec l'activité professionnelle exercée ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

VINGT CINQUIÈME CHAMBRE SECTION B

ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2006

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Numéro d'inscription au répertoire général : 05/05140. Arrêt n° 307. Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 janvier 2005 - Tribunal de Grande Instance de PARIS (5ème ch. 2ème sect.) - RG n° 03/00266.

 

APPELANTE :

SAS LOCATION AUTOMOBILE MATÉRIEL exerçant sous le nom commercial LOCAM

prise en la personne de son représentant légal [adresse], représentée par la SCP FANET - SERRA - GHIDINI, avoués à la Cour, assistée de Maître MIGAUD (Selarl ABM), avocat au barreau de CRETEIL, toque : PC129

 

INTIMÉES :

- Madame X. épouse Y.

[adresse], représentée par la SCP MIRA - BETTAN, avoués à la Cour, assistée de Maître RAKOTO (Selarl CYMERMAN), avocat au barreau de PARIS, toque : R 236

- SOCIÉTÉ ARTYS ILE DE FRANCE

prise en la personne de ses représentants légaux [adresse], représentée par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués à la Cour, assistée de Maître BOLLIET (SCP GOSPARD et BOLLIET), avocat au barreau de COMPIÈGNE

[minute page 2]

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 septembre 2006, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame DELMAS-GOYON, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur JACOMET, président, Monsieur LAURENT-ATTHALIN, conseiller, Madame DELMAS-GOYON, conseiller.

Greffière, lors des débats : Madame MARTEYN.

ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - prononcé publiquement par Monsieur JACOMET, président - signé par Monsieur JACOMET, président et par Madame MARTEYN, greffière présente lors du prononcé.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par contrats du 30 juin 2000, Mme Y., qui exerce la profession de médecin à titre libéral, a souscrit auprès de la société Locam un contrat de location portant sur du matériel de télésurveillance fourni par la société Artys Ile de France - AIDF, ci-après dénommée société AIDF, et auprès de la société AIDF un contrat d'abonnement de télésurveillance, pour une durée irrévocable de 60 mois ;

Elle a également signé, le 6 juillet 2000, un procès-verbal de réception de matériels, attestant de la mise en service de l'installation après contrôle de son bon fonctionnement et démonstration complète ;

Estimant avoir été abusée, Mme Y. a dénoncé les contrats précités le 26 juillet 2000 motifs pris, notamment, d'anomalies et de clauses abusives, et a assigné les sociétés AIDF et Locam, le 19 décembre 2002, afin de voir constater la résiliation des contrats avec toutes conséquences de droit ;

Par jugement du 13 janvier 2005, le tribunal de grande instance de Paris a constaté la résiliation du contrat de télésurveillance du 30 juin 2000 à compter du 30 juin 2001, condamné in solidum les sociétés Locam et AIDF à payer à Mme Y. la somme de 3.670,28 €, avec intérêts au taux légal à compter du 19 décembre 2002, ainsi que 1.000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, et condamné la société AIDF à payer à la société Locam la somme de 4.256,16 € à titre de dommages et intérêts ;

Au soutien de sa décision, le tribunal a retenu que,

[minute page 3] Mme Y. bénéficie des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation relatif à la protection des consommateurs contre les clauses abusives dès lors que, même si l'installation en cause était destinée à équiper ses locaux professionnels, l'objet du contrat était sans rapport avec ses connaissances et son activité professionnelle, ce contrat ne pouvant donc être regardé comme conclu entre deux professionnels,

sa demande de résolution du contrat pour défaut de délivrance de la chose louée et non respect des obligations découlant de l'article 1719 du code civil est rejetée, Mme Y. n'ayant émis aucune réserve lors de la mise en service de l'installation ni aucune réclamation concernant l'absence de fonctionnement allégué de l'installation,

elle ne peut légitimement prétendre n'avoir découvert que le 24 juillet 2000, à réception de l'échéancier qui lui a été adressé par la société Locam, que le loyer de 730 francs n'était pas annuel mais mensuel, le contrat d'abonnement de télésurveillance mentionnant de façon apparente les mensualités hors taxe et taxe comprise,

c'est en revanche à bon droit qu'elle invoque les dispositions du contrat relatives à sa durée irrévocable de 60 mois, qui caractérisent une clause abusive, cette clause étant réputée non écrite, en sorte que sa demande de résiliation du contrat est prise en considération avec effet au 30 juin 2001, une durée d'un an apparaissant raisonnable pour ce type de contrat ;

Vu les conclusions déposées le 22 juin 2006 par la société Locam, appelante en principal et intimée incidemment, aux termes desquelles, reprenant la thèse développée en première instance, elle conteste la qualité de consommateur de Mme Y. au sens des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation, soutient que n'étant intervenue que pour financer le matériel librement choisi par la locataire auprès d'un fournisseur tout aussi librement choisi, après réception du procès-verbal de livraison du matériel signé par Mme Y., elle n'est pas responsable du litige opposant celle-ci à la société AIDF, ce qui résulte d'ailleurs aussi des dispositions du contrat de location, elle demande à la cour de débouter Mme Y. de ses demandes à son encontre et de la condamner à lui payer la somme de 5.338,56 € au titre des loyers impayés jusqu'au terme du contrat, subsidiairement, au cas où le contrat de location serait résolu en conséquence de la résolution du contrat de vente pour défaut de délivrance, la somme de 3.757,46 €, montant du prix d'achat du matériel qu'elle a payé à la société AIDF, plus subsidiairement, si la cour devait faire droit aux demandes de Mme Y., elle formule diverses demandes à l'encontre de la société AIDF ;

Vu les conclusions déposées le 17 mai 2006 par la société AIDF, intimée en principal et appelante incidemment, par lesquelles elle conteste également que Mme Y. puisse bénéficier des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation, elle demande à la cour de débouter Mme Y. de ses demandes et de dire que le contrat signé par elle doit se poursuivre jusqu'à son terme, également, de débouter la société Locam de ses demandes à son encontre ;

Vu les conclusions déposées le 9 janvier 2006 par Mme Y., intimée en principal et appelante incidemment, par lesquelles elle fait valoir que le jugement déféré a été rendu en dernier ressort, en sorte que l'appel de la société Locam est irrecevable, à titre subsidiaire, le délai de rétractation de 7 jours n'a été respecté, ni par la société AIDF, ni par la société Locam, en sorte que les contrats sont nuls et que ces sociétés doivent être condamnées à lui payer in solidum, en deniers ou quittance, la somme de 6.673,20 €, à titre infiniment subsidiaire, le système de télésurveillance n'a jamais été en mesure de fonctionner, en sorte qu'il convient de prononcer la résolution des contrats pour défaut de [minute page 4] délivrance et de condamner ces sociétés à lui payer la somme précitée, outre 5.000 € à titre de dommages et intérêts, à titre plus que subsidiaire, confirmer le jugement, sauf à condamner les sociétés AIDF et Locam in solidum à lui payer la somme de 5.338,56 € ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI, LA COUR,

Considérant que pour un exposé complet des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère aux énonciations du jugement déféré et aux écritures ci-dessus visées ;

Considérant, sur l'irrecevabilité de l'appel invoquée par Mme Y., que le tribunal a statué sur les demandes de celle-ci telles que formulées, non dans son assignation introductive d'instance du 19 décembre 2002, mais dans ses conclusions récapitulatives du 7 avril 2004 par lesquelles, selon les énonciations du jugement, elle demandait au tribunal à titre principal de prononcer la résolution du contrat pour défaut de délivrance et de condamner les sociétés AIDF et Locam in solidum à lui payer la somme de 5.004,93 €, outre 3.000 € à titre de dommages et intérêts ;

Que ces demandes sont, soit indéterminées, soit d'un montant supérieur au taux en dessous duquel le tribunal statue en dernier ressort tel qu'il résulte tant du décret du 27 avril 2001 (3.800 €) que du décret du 13 mai 2005 (4.000 €), en sorte que c'est à bon droit que le jugement est qualifié de jugement rendu en premier ressort ;

Qu'ainsi, le moyen tiré de l'irrecevabilité de l'appel interjeté par la société Locam n'est pas fondé ;

Considérant, ensuite, que les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation relatives à la protection des consommateurs contre les clauses abusives s'appliquent, aux termes de cet article, aux contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs ;

Qu'une partie ne peut se prévaloir de la qualité de non professionnel ou consommateur lorsque le contrat qu'elle a conclu a un rapport direct avec son activité professionnelle, peu important son absence de compétence professionnelle au regard de l'objet du contrat ;

Considérant qu'il n'est pas discuté, en l'espèce, que Mme Y. a conclu les contrats litigieux pour les besoins de la protection de son cabinet médical, en sorte que ces contrats ont un rapport direct avec son activité professionnelle et qu'elle ne peut légitimement se prévaloir des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ;

Considérant qu'il s'ensuit que Mme Y. doit être déboutée de ses demandes fondées sur l'existence de clauses abusives dans les contrats du 30 juin 2000, le jugement déféré étant infirmé de ce chef ;

Que, de même, elle ne peut non plus se prévaloir de l'inobservation alléguée du délai de rétractation de sept jours prévu par l'article L. 121-25 du code de la consommation, l'application de l'ensemble les dispositions relatives au démarchage à domicile étant exclue par l'article L. 121-22 en cas de contrat en rapport direct avec l'activité professionnelle exercée ;

[minute page 5] Considérant, par ailleurs, que c'est par d'exacts motifs, que la cour adopte, que les premiers juges ont rejeté les demandes de Mme Y. tendant à la résolution des contrats pour inexécution de l'obligation de délivrance ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il convient de débouter Mme Y. de l'ensemble de ses demandes et de faire droit à la demande de paiement de la société Locam qui, à juste titre, sollicite le paiement du montant des loyers jusqu'au terme du contrat, qu'elle a remboursé à Mme Y. en vertu de l'exécution provisoire du jugement, soit la somme en deniers ou quittance de 5.338,50 € ;

Qu'il y a lieu de condamner Mme Y. à payer à la société Locam une indemnité de 1.500 € et à la société AIDF une indemnité de 1.000 € pour les frais exposés par elles tant en première instance qu'en appel, en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Considérant, enfin, que Mme Y. sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute Mme Y. de l'ensemble de ses demandes,

La condamne à payer à la société Locam, en deniers ou quittance, la somme de 5.338,50 €,

La condamne également à payer une indemnité de 1.500 € à la société Locam et de 1.000 € à la société Artys Ile de France - AIDF, par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Condamne Mme Y. aux entiers dépens de première instance et d'appel, et admet les avoués concernés au bénéfice de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE.                    LE PRÉSIDENT.