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CA VERSAILLES (13e ch.), 27 novembre 2018

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (13e ch.), 27 novembre 2018
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 13e ch.
Demande : 17/03915
Date : 27/11/2018
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 22/05/2017
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2018-024444
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7902

CA VERSAILLES (13e ch.), 27 novembre 2018 : RG n° 17/03915 

Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2018-024444

 

Extrait : 1/ « Sur la qualification du contrat : […] Selon l'article L. 313-7 du code monétaire et financier les opérations de crédit-bail sont les opérations de location de biens d'équipement ou de matériel d'outillage achetés en vue de cette location par des entreprises qui en demeurent propriétaires, lorsque ces opérations, quelle que soit leur qualification, donnent au locataire la possibilité d'acquérir tout ou partie des biens loués, moyennant un prix convenu tenant compte, au moins pour partie, des versements effectués à titre de loyers.

Pour être constitutif d'une opération de crédit-bail visée à cet article, le contrat de location doit comporter de la part du bailleur une promesse unilatérale de vente donnant au locataire la possibilité d'acquérir tout ou partie du bien loué.

En l'espèce, les conditions générales du contrat conclu entre M. X. et la société Ferrari financial services dont M. X. a reconnu avoir reçu un exemplaire, prévoient : * article 1 : l'accord a pour but une location de longue durée du véhicule (...), * article 12 a) acquisition du véhicule par le prospect (le preneur) : le véhicule demeure la propriété exclusive de Ferrari et ne fait pas l'objet d'une promesse de vente en faveur du prospect. Le prospect pourra cependant à la fin de la durée déterminée de location demander à Ferrari si cette dernière accepterait de vendre le véhicule au prospect. Le véhicule pourrait alors, à la seule discrétion de Ferrari, être vendu au prospect au prix sur le marché des particuliers à la date de ce transfert tels que ce prix sera énoncé par Ferrari en sus de la TVA [...]. La présente n'est pas à considérer comme une option d'achat en faveur du prospect.

A la lecture de ces stipulations contractuelles il apparaît que l'acquisition du bien loué par le preneur est subordonnée à l'acceptation du bailleur, de telle sorte que le contrat de location longue durée en date du 8 avril 2009 qui ne comporte pas la promesse unilatérale de vente exigée par la loi précitée ne peut être qualifié de crédit-bail. »

2/ « Sur le caractère abusif des articles 11-1 et suivants des conditions générales : M. X. soutient que l'article 11 et l'article 13 des conditions générales du contrat intitulé « résiliation extraordinaire » constituent des clauses abusives qui doivent être réputées non écrites en application des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation en ce qu'elles créent au détriment du preneur consommateur un déséquilibre significatif permettant au bailleur financier de réaliser le bien repris en cas de défaillance du locataire sans lui permettre de présenter un acheteur faisant une offre satisfaisante ; il rappelle que ce type de clause a été stigmatisé par la Commission des clauses abusives dans sa recommandation n° 86-01 du 17 janvier 1986 concernant les contrats de location avec option d'achat ou de location avec promesse de vente de biens et consommation.

La société Ferrari financial services répond que la recommandation de la Commission des clauses abusives visée par M. X. ne concerne pas le contrat de location litigieux mais qu'à l'inverse dans sa recommandation n° 96-02 relative aux contrats de location de véhicules automobiles, la Commission des clauses abusives ne conteste pas la validité de ce type de clause dans les contrats de location simple, contrairement à la recommandation n° 86-01 susvisée.

[*]

L'article L. 132-1, alinéa 5 du code de la consommation devenu L. 212-1 répute non écrites les clauses abusives. La clause abusive est définie par l'ancien article L. 132-1 devenu L. 212-1 comme celle qui a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat.

L'article R. 132-2 du même code devenu R.212-2 prévoit que dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont présumées abusives au sens des dispositions des premier et cinquième alinéas de l'article L. 212-1, sauf au professionnel à rapporter la preuve contraire, les clauses ayant pour objet ou pour effet de : 4° reconnaître au professionnel la faculté de résilier le contrat sans préavis d'une durée raisonnable.

Il est constant que le contrat litigieux a été conclu entre un professionnel et un consommateur.

En l'espèce, l'article 11 des conditions générales du contrat précise les conditions de restitution du véhicule : « le prospect doit, sans qu'il ait été nécessaire de le mettre en demeure et à ses frais propres restituer le véhicule (…) immédiatement à l'échéance de l'accord (…) ». Cette clause qui organise la restitution du véhicule en fin de contrat de location ne créée pas de déséquilibre significatif entre les droits et les obligations du loueur, qui est resté propriétaire du véhicule, et du preneur qui a l'obligation de restituer la chose louée.

L'article 13.4 intitulé « résiliation extraordinaire » stipule que « Ferrari sera en droit de résilier l'accord pour motif sérieux et sans préavis, en particulier dans les cas suivants :

(1) le prospect a manqué à ses obligations de paiement portant au moins sur deux loyers ;

(2) le prospect cesse ses paiements ; (…) ».

Le contrat prévoit alors en son article 13.4 que : « en cas de résiliation par anticipation de l'accord, et nonobstant l'obligation de restitution du véhicule énoncée à l'article 11, le prospect devra payer à Ferrari la valeur de remboursement conformément à l'article 8.9 diminué de (…) tout produit de remise sur le marché du véhicule (…) ».

Dès lors que le contrat en cause n'est pas un contrat de location avec option d'achat ou de location avec promesse de vente, il n'y a pas lieu de se référer à la recommandation n° 86-01 du 17 janvier 1986 de la Commission des clauses abusives invoquée par M. X. mais à la recommandation n° 96-02 relative aux locations de véhicules automobiles aux termes de laquelle la Commission des clauses abusives recommande que soient éliminées des contrats de location de véhicule automobile les clauses ayant pour objet ou pour effet de : 30° prévoir le jeu de la clause pénale sans mise en demeure préalable et sans renonciation expresse à cette formalité de la part du locataire.

Cet article 13.2 de résiliation extraordinaire qui dispense le loueur d'adresser au préalable au preneur une mise en demeure conformément à l'ancien article 1146 du code civil est abusive en ce qu'elle confère à Ferrari, en cas de non-paiement par le preneur de deux loyers, le droit de résilier le contrat sans préavis, ce qui constitue un avantage excessif privant le preneur de toute possibilité de régulariser sa situation ; cette clause crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties.

Il convient, ajoutant au jugement de ce chef, de déclarer non écrite cette clause. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

TREIZÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 27 NOVEMBRE 2018