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CA PARIS (15e ch. B), 2 mai 2003

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (15e ch. B), 2 mai 2003
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), 15e ch. sect. B
Demande : 2001/07908
Date : 2/05/2003
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 9/03/2001
Décision antérieure : T. COM PARIS (3e ch.), 17 janvier 2001
Numéro de la décision : 192
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 881

CA PARIS (15e ch. B), 2 mai 2003 : RG n° 2001/07908 ; arrêt n° 192

Publication : Juris-Data n° 217476

 

Extrait : « Considérant, d'une part, que la société ECS soutient, sans être contredite, que la société HYGIADIS est une importante entreprise de fabrication et commerce de gros de produits d'entretien pour l'aménagement et l'habitat ; qu'il est constant que cette dernière a souscrit les contrats litigieux, portant sur du matériel informatique, pour les besoins de son activité, ce qui lui interdit de se présenter comme une non-professionnelle au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ; que, d'autre part, elle ne précise pas quelles circonstances l'auraient privée de la faculté de discuter les conditions de sortie des contrats en cause voire de s'adresser à une entreprise concurrente de la société ECS si celles que lui proposait cette dernière ne lui convenaient pas ; qu'elle ne peut donc être suivie lorsqu'elle invoque le caractère abusif de cette clause ».                

 

COUR D’APPEL DE PARIS

QUINZIÈME CHAMBRE SECTION B

ARRÊT DU 2 MAI 2003

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Numéro d'inscription au répertoire général : 2001/07908. Pas de jonction. Décision dont appel : Jugement rendu le 17 janvier 2001 par le TRIBUNAL DE COMMERCE de PARIS 3ème Ch. RG n° : 2000/14001.

Date ordonnance de clôture : 16 janvier 2003. Nature de la décision : CONTRADICTOIRE. Décision : INFIRMATION PARTIELLE.

 

APPELANTE :

LA SOCIETE EUROPE COMPUTER SYSTEMS « ECS », SA

prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège [adresse], représentée par la SCP NARRAT-PEYTAVI, avoué, assistée de Maître DUFOUR, Toque B22, Avocat au Barreau de PARIS

 

INTIMÉE :

LA SA QUEMENER HYGIÈNE « HYGIADIS »

prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège [adresse], [minute page 2] représentée par la SCP ANNIE BASKAL, avoué, assistée de Maître HOCHE-DELCHET, Avocat au Barreau de QUIMPER,

 

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Président : Monsieur POTOCKI ; Conseiller : Madame DAVID ; Conseiller : Madame MOUILLARD.

DÉBATS : à l'audience publique du 14 mars 2003.

GREFFIER : Lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Monsieur VERGEROLLE, Greffier

ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement par Mme MOUILLARD, Conseiller qui, en l'empêchement du Président, a signé la minute du présent arrêt avec Mr. VERGEROLLE, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par contrats du 7 juin 1996 et du 16 septembre 1997, respectivement n° 6 L 103700 et n° 7 H 002400, la société EUROPE COMPUTER SYSTEMS (ci-après la société ECS) a donné en crédit-bail à la société QUEMENER HYGIÈNE HYGIADIS (ci-après la société HYGIADIS) des matériels informatiques pour une durée de 36 mois pour le premier et de 25 mois pour le second, qui sont venus tous deux à échéance le 31 mai 1999.

L'article 12 de ces contrats stipulait que le locataire aurait la faculté, avec un préavis de neuf mois, d'acquérir l'équipement ou de le restituer ou de demander le renouvellement du contrat, et que, s'il omettait d'aviser le loueur de son choix, dans les formes et délais requis, la location se poursuivrait par tacite reconduction et chacune des parties pourrait y mettre fin en respectant un préavis de neuf mois, sauf si le loueur s'opposait à cette tacite reconduction en avisant le locataire par lettre recommandée avec accusé de réception postée un mois au moins avant la date d'expiration de la location.

La société HYGIADIS ne s'étant pas manifestée neuf mois avant [minute page 3] la date d'échéance du 31 mai 1999, la société ECS l'a mise en demeure de lui payer les loyers qu'elle estimait lui être dus puis l'a assignée aux mêmes fins devant le tribunal de commerce de Paris qui, par un jugement du 17 janvier 2001, a décidé que la clause prévue par l'article 12 était manifestement abusive et donc limité la condamnation de la société HYGIADIS à la valeur résiduelle prévue aux contrats, soit à 21.499 francs, avec intérêts au taux légal à compter du 2 août 1999, a débouté les parties du surplus de leurs demandes et dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

La société ECS a interjeté appel le 9 mars 2001.

Les dernières écritures des parties, prises en compte au titre de l'article 954 du nouveau Code de procédure civile, ont été déposées le

- 27 juin 2001 pour la société ECS,

- 1er octobre 2002 pour la société HYGIADIS.

La société ECS demande à la cour de réformer le jugement déféré sauf en ce qu'il a écarté la fin de non-recevoir soulevée par la société HYGIADIS, de débouter la société HYGIADIS de ses conclusions et de condamner cette dernière à lui payer la somme de 697.646,88 francs TTC au titre des loyers restant dus au 18 janvier 2000, ainsi que le montant correspondant au 9éme mois du préavis soit 87.205,86 francs, l'ensemble avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure reçue le 2 août 1999, ainsi que la somme de 50.000 francs à titre de dommages et intérêts et celle de 12.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société HYGIADIS demande à la cour

- de la recevoir en son appel incident,

- de déclarer irrecevable la demande de la société ECS, faute de justifier d'une qualité à agir,

- sur le fond :

* à titre principal, de juger abusive la clause insérée à l'article 12 des contrats et la déclarer non écrite, de débouter en conséquence la société ECS de ses demandes,

* à titre subsidiaire, de juger que cette clause s'analyse en une clause pénale susceptible de réduction conformément aux dispositions de l'article 1152 du Code civil et la réduire à la somme de 3.277,50 euros, correspondant à l'option d'achat sur les deux contrats.

* à titre extrêmement subsidiaire, de dire qu'il devra être déduit des sommes dont elle serait susceptible d'être redevable la somme de 16.452,13 euros,

- de condamner la société ECS à lui payer une somme de 3.048,98 euros HT sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 4] CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR :

- Sur la recevabilité de l'action de la société ECS :

Considérant que la société HYGIADIS fonde sa fin de non-recevoir sur plusieurs factures qui lui ont été adressées au titre des contrats litigieux, à en tête de la société FRANFINANCE, pour les échéances d'août, septembre, octobre, novembre et décembre 1999 puis qui ont fait l'objet d'avoirs de cette même société ;

Considérant que c'est à juste titre que le tribunal a considéré que cette facturation par la société FRANFINANCE, annulée par les avoirs postérieurs, n'avait pas privé la société ECS, unique cocontractant conclu de la société HYGIADIS, de sa qualité à agir en vertu des contrats de crédit-bail ; qu'au demeurant, la cession initiale des contrats à la société FRANFINANCE n'étant pas démontrée, la société HYGIADIS ne peut utilement reprocher à la société ECS de ne pas justifier de la rétrocession qui lui aurait permis de recouvrer ses droits ;

Considérant enfin que la demande de dommages et intérêts formée par la société ECS à l'encontre de la société HYGIADIS à qui elle reproche, sur le fondement de l'article 123 du nouveau Code de procédure civile, d'avoir soulevé tardivement la fin de non-recevoir, soit quelques jours avant la date des plaidoiries de première instance, ne peut être accueillie, faute de préjudice établi ;

 

- Sur le fond :

Considérant que, pour échapper à l'application de l'article 12 des contrats, la société HYGIADIS soutient, tout d'abord, qu'il constitue une clause abusive, tant au regard de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, qu'en ce qu'il a pour effet de procurer « un avantage excessif à un entrepreneur qui, du fait de sa position économique, se trouvait en mesure de l'imposer à sa cliente » ;

Mais considérant, d'une part, que la société ECS soutient, sans être contredite, que la société HYGIADIS est une importante entreprise de fabrication et commerce de gros de produits d'entretien pour l'aménagement et l'habitat ; qu'il est constant que cette dernière a souscrit les contrats litigieux, portant sur du matériel informatique, pour les besoins de son activité, ce qui lui interdit de se présenter comme une non-professionnelle au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ; que, d'autre part, elle ne précise pas quelles circonstances l'auraient privée de la faculté de discuter les conditions de sortie des contrats en cause voire de s'adresser à une entreprise concurrente de la société ECS si celles que lui proposait cette dernière ne lui convenaient pas ; qu'elle ne peut donc être suivie lorsqu'elle invoque le caractère abusif de cette clause ;

[minute page 5] Considérant que la société HYGIADIS prétend encore que cet article institue une clause pénale excessive qui doit être modérée ;

Mais considérant qu'il ne peut être considéré que l'article 12 avait pour objet d'évaluer forfaitairement et à l'avance l'indemnité à laquelle donnerait lieu l'inexécution de l'obligation contractée par la société HYGIADIS, puisqu'il avait seulement pour objet d'organiser les conditions de sortie du contrat de crédit-bail et de fixer un délai à l'exercice, par le preneur, de son option, sans prévoir l'indemnisation d'un quelconque préjudice ;

Considérant, sur le montant des sommes dues, que, si c'est à bon droit que la société ECS réclame le paiement des neuf mois écoulés après le 31 mai 1999 dès lors qu'il est constant que la société HYGIADIS s'est abstenue d'exercer son option dans le délai contractuel, elle ne justifie pas d'une mise en demeure valable pour les deux contrats, celle du 2 août 1999 sur laquelle elle se fonde ayant été délivrée pour deux loyers mensuels du contrat n° 6L 103700 ; qu'il s'ensuit qu'elle ne peut prétendre aux intérêts au taux légal à compter de cette date que pour ces deux loyers, les 6 autres mensualités dues pour ce contrat et les 8 autres relatives au second contrat ne pouvant produire intérêts au même taux qu'à compter de l'assignation, soit du 26 janvier 2000, et le 9ème mois, échu après l'assignation, qu'à compter de son échéance, soit du 28 février 2000 ;

Considérant enfin que la société HYGIADIS ne peut être suivie lorsqu'elle demande la déduction de la somme de 16.452,13 euros correspondant au total des avoirs établis par la société FRANFINANCE, puisqu'elle ne démontre pas les avoir antérieurement payés ;

Et considérant qu'il n'y a pas lieu de faire application en la cause des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

INFIRME le jugement déféré, sauf en ce qu'il a débouté la société HYGIADIS de sa fin de non-recevoir ;

Condamne la société HYGIADIS à payer à la société ECS la somme de 106.355,58 euros (697.646,88 francs) avec intérêts au taux légal à compter du 2 août 1999 sur la somme de 20.008,04 euros (31.244,15 francs) et à compter du 26 janvier 2000 sur le surplus, ainsi que celle de 13.294,45 euros (87.205,90 francs) avec intérêts au taux légal à compter du 28 février 2000 ;

[minute page 6] Déboute la société ECS de sa demande de dommages et intérêts;

Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne la société HYGIADIS aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.