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CA MONTPELLIER (2e ch. sect. A), 7 février 2006

Nature : Décision
Titre : CA MONTPELLIER (2e ch. sect. A), 7 février 2006
Pays : France
Juridiction : Montpellier (CA), 2e ch. sect. A
Demande : 05/00707
Décision : A06 2A 0648
Date : 7/02/2006
Nature de la décision : Réformation
Décision antérieure : T. COM. MONTPELLIER, 12 janvier 2005
Numéro de la décision : 648
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 889

CA MONTPELLIER (2e ch. sect. A), 7 février 2006 : RG n° 05/00707 ; arrêt n° A06 2A 0648

 

Extraits : 1/ « Le 24 novembre 2000 la Société X., soucieuse de satisfaire la clientèle de son auto-école, prenait en location auprès de la Société FONTEX deux machines à café et souscrivait deux contrats de « service plus » afférents à la fourniture des produits nécessaires au fonctionnement de ces deux appareils. […] Attendu que la Société X. ayant conclu les contrats litigieux dans le cadre de son activité professionnelle, elle ne saurait réclamer le bénéfice des dispositions du Code de la Consommation ». […] Attendu que les contrats conclus entre la Société X. d'une part et les Sociétés FONTEX et KBC d'autre part ne relevant pas du champ d'application du Code de la Consommation, la Société X. ne saurait se prévaloir du fait que la clause n° 5 des conditions générales du contrat de location de longue durée présenterait un caractère abusif ».

2/ « Attendu que l'article 5 des conditions générales de location longue durée stipule : « ....l’attention du locataire a par ailleurs été attirée sur l'indépendance juridique du contrat de location et de prestation liant le locataire au fournisseur... » ; Attendu que les distributeurs de café et les consommables nécessaires à leur fonctionnement ne sont ni des appareils, ni des produits d'une spécificité telle que ces machines deviennent inexploitables à la suite d'une défaillance du prestataire puisque le locataire peut s'adresser à un autre prestataire et obtenir sans aucune difficulté les livraisons de consommables et l'exécution des opérations d'entretien nécessaires à leur fonctionnement ; que les contrats de service plus et les contrats de location longue durée sont donc divisibles et indépendants les uns des autres ».

 

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

DEUXIÈME CHAMBRE SECTION A

ARRÊT DU 7 FÉVRIER 2006

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 05/00707. Arrêt n° A06.2A 0648. Réf. 1ère instance : Tribunal de Commerce de Montpellier, 12 janvier 2005, N° 2003002794.

 

APPELANTE :

SARL SOCIETE X.

représentée par son gérant en exercice domicilié es qualité audit siège social [adresse], représentée par la SCP NEGRE - PEPRATX-NEGRE, avoués à la Cour, assistée de Maître Henri TEMPLE, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Maître Virginie TEMPLE, avocate

 

INTIMÉS :

Maître Jean-Pierre LOUIS agissant es qualité de Liquidateur à la liquidation judiciaire de la SA FONTEX

[adresse], représenté par la SCP CAPDEVILA - VEDEL-SALLES, avoués à la Cour,

SA Société KBC LEASE FRANCE

représentée par son Président du Conseil d'Administration eu exercice domicilié es qualité audit siège social (anciennement SOCREA LOCATION) [adresse], représentée par la SCP SALVIGNOL - GUILHEM, avoués à la Cour, assistée de Maître Michel MOREAU, avocat au barreau de LYON

 

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 29 décembre 2005

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : M. Guy SCHMITT, Président, M. Hervé CHASSERY, Conseiller, M. Christian MAGNE, Conseiller,

GREFFIER : Melle Colette ROBIN, Greffier lors des débats et Melle Colette ROBIN, Greffier lors du prononcé

[minute page 2] DÉBATS : en audience publique le TROIS JANVIER DEUX MILLE SIX L'affaire a été mise en délibéré au 07 février 2006.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE - prononcé en audience publique le SEPT FÉVRIER DEUX MILLE SIX par M. Guy SCHMITT, Président. Le présent arrêt a été signé par M. Guy SCHMITT, Président, et par le greffier présent à l'audience.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS-PROCÉDURE-PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Le 24 novembre 2000 la Société X., soucieuse de satisfaire la clientèle de son auto-école, prenait en location auprès de la Société FONTEX deux machines à café et souscrivait deux contrats de « service plus » afférents à la fourniture des produits nécessaires au fonctionnement de ces deux appareils.

Les contrats de location seront cédés par la Société FONTEX à la Société KBC et la Société FONTEX cessera d'exécuter les contrats de « service plus » au mois de mai 2002 où une procédure collective sera ouverte à son égard, situation qui la conduira à cesser de facto l'exécution des deux contrats de service plus ; cette interruption conduira au mois d'août 2002 la Société X. à cesser de verser les loyers convenus à la Société KBC qui prendra l'initiative d'une procédure judiciaire à l'encontre de la Société X. qui appellera Maître LOUIS en sa qualité de liquidateur judiciaire en intervention forcée,

La Société X. est appelante d'un jugement rendu le 12 janvier 2005 par le Tribunal de Commerce de Montpellier qui, après l'avoir déboutée de l'ensemble de ses prétentions, a constaté la résiliation des contrats de bail à ses torts exclusifs, l'a condamnée à payer à la Société KBC la somme totale de 14.486,55 € avec intérêt au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation et avec application de l'article 1154 du Code Civil, la somme de 800 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, à lui restituer les matériels loués sous astreinte de 155 € par jour de retard passé le 15ème jour suivant la signification du jugement, à payer à Maître LOUIS ès qualité de liquidateur judiciaire de la société FONTEX la somme de 800 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'à supporter les dépens de l'instance.

[minute page 3] Elle demande à la Cour de réformer ce jugement et :

A titre principal,

- d'annuler les contrats de prestation des services et de location passés avec les Sociétés FONTEX et KBC ;

A titre subsidiaire,

- de prononcer la résolution des dits contrats aux torts exclusifs des Sociétés FONTEX et KBC ;

A titre infiniment subsidiaire,

- de déclarer abusives et non écrites les clauses de cession contenues dans les contrats de location, de déclarer manifestement excessives les clauses pénales contenues dans les contrats de location et de les réduire au franc symbolique ;

En toute hypothèse,

- de débouter la Société KBC de l'ensemble de ses demandes, de la recevoir dans son action exercée à l'encontre de la Société FONTEX, de condamner la Société FONTEX à lui restituer les sommes de 621,96 € et de 1.429,16 € perçues du mois de mai au mois de juillet 2002, de condamner solidairement les Sociétés FONTEX et KBC à lui payer la somme de 14.486,55 € à titre de dommages et intérêts correspondant à la somme réclamée par la Société KBC en son assignation du 10 février 2003, d'ordonner à cette dernière de récupérer à ses frais les deux machines à café source du présent litige sous astreinte de 155 € par jour de retard passé le 3ème jour suivant la signification du présent arrêt, enfin de condamner solidairement les Sociétés FONTEX et KBC à lui verser 3.000 € sur la base de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens dont distraction au profit de la SCP NEGRE.

Elle fait valoir :

- que la Société FONTEX a manqué à l'obligation d'information prévue par les articles 1602 du Code Civil et L. 111-1 du Code de la Consommation dans la mesure où elle n'a reçu de double ni des contrats de service, ni des contrats de location et où la cession des contrats de location s'est opérée à son insu ;

- que la Société FONTEX a commis un dol ayant entraîné une erreur sur les qualités substantielles et sur l'équilibre des prestations fournies ;

- que la Société FONTEX a cessé d'exécuter ses prestations à partir du mois de mai 2002 ;

- que les contrats de service et les contrats de location sont indivisibles ;

- que la cession de contrat prévue à l'article 5 des conditions générales de location est abusive et doit donc être considérée comme non écrite ;

- que la clause pénale prévue à l'article 9 des conditions générales de location est excessive et doit être ramenée à une somme symbolique ;

- [minute page 4] qu'elle ne peut utiliser le matériel litigieux à la suite de la liquidation judiciaire de la Société FONTEX, situation qui lui est préjudiciable (concl. 20 décembre 2005).

La Société KBC conteste l'ensemble des arguments présentés par la Société X. et demande à la Cour de constater la résiliation des contrats de location aux torts de la Société X. ainsi que de condamner cette dernière à lui verser la somme de 14.486,55 € avec intérêt au taux légal à compter de l'assignation et application de l'article 1154 du Code Civil, la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, à lui restituer les matériels en cause sous astreinte de 155 € par jour de retard passé le 3ème jour suivant la signification du présent arrêt, et à supporter les entiers dépens de l'instance avec application de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile (concl. 22 décembre 2005).

Maître LOUIS agissant en qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation de la Société FONTEX demande la confirmation du jugement querellé ainsi que la condamnation de la Société X. à lui verser la somme de 2.000 € en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et à payer les entiers dépens avec droit de recouvrement direct pour la SCP CAPDEVILA.

Maître LOUIS se prévaut des articles L. 621-40 et L. 621-41 du Code de Commerce ; il fait valoir que les contrats de location on été cédés à la Société KBC, que les contrats de prestation de services et de location sont indépendants, que la Société X. a reçu toutes les informations utiles et ne peut se prévaloir du Code de la Consommation (concl. 25 juillet 2005).

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI :

Attendu que la Société X. allègue sans en apporter le moindre élément de preuve que les contrats de location longue durée ne lui ont pas été remis le 28 décembre 2000 en même temps que les contrats de service plus ;

Attendu que l'article 6 des conditions générales du contrat de location longue durée imprimées de manière lisible au verso de ce document stipule : « le locataire reconnaît au fournisseur le droit de transférer la propriété des équipements et de céder les droits résultant du présent contrat au profit du cessionnaire et il accepte dès aujourd'hui ce transfert sous la seule condition suspensive de l'accord du cessionnaire. Le locataire sera informé de la cession par tout moyen et notamment par le libellé de la facture unique de loyer ou de l'avis de prélèvement qui sera émis... » ;

Attendu que le locataire disposait donc par la seule lecture du contrat de l'information relative à l'éventualité de la cession du [minute page 5] contrat ; que la Société X. ne saurait être admise à prétendre qu'elle n'a pas lu les contrats de question avant de les signer ; qu'une telle attitude n'est pas admise de la part d'un commerçant personne avisée et rompue à la pratique des affaires qui, en cette qualité, à pour obligation de lire les documents sur lesquels elle appose sa signature ;

Attendu qu'à la suite de la cession des contrats de location longue durée la Société KBC a adressé à la Société X. le 15 décembre 2000 deux échéanciers valant facturation portant l'en-tête KBC LEASE FRANCE ainsi que la désignation des matériels concernés ; que par ailleurs ces contrats ont été publiés au RCS de Montpellier le 15 décembre 2000 ;

que la Société X. ne peut donc sérieusement affirmer qu'elle n'a eu connaissance de cette cession que deux ans plus tard ;

Attendu que la Société X. ayant conclu les contrats litigieux dans le cadre de son activité professionnelle, elle ne saurait réclamer le bénéfice des dispositions du Code de la Consommation ;

Attendu que l'économie de l'opération litigieuse ne correspondant pas aux conditions de mise en oeuvre de l'article L. 342-2 du Code Monétaire et Financier ;

Attendu en conséquence que la Société X. sera déboutée de sa demande d'annulation des contrats de location longue durée signés le 24 novembre 2000 ;

Attendu que tenant l'interruption des livraisons de consommables et des opérations d'entretien des machines, la Société X. demande à la Cour de dire et juger que les contrats de service et les contrats de location de longue durée sont indivisibles et de prononcer leur résiliation à la date du 18 avril 2002 aux torts des Sociétés FONTEX et KBC ;

Attendu qu'à la suite de la procédure collective ouverte à l'encontre de la Société FONTEX, la Société X. n'a pas exigé la continuation des contrats « service plus » puisqu'en raison de sa teneur le courrier du 25 mars 2002 ne saurait constituer la mise en demeure prévue par l'article L. 621-28 du Code de Commerce ; que les contrats de service plus seront donc résiliés aux torts de la Société X. ;

Attendu que l'article 5 des conditions générales de location longue durée stipule : « ....l’attention du locataire a par ailleurs été attirée sur l'indépendance juridique du contrat de location et de prestation liant le locataire au fournisseur... » ;

Attendu que les distributeurs de café et les consommables nécessaires à leur fonctionnement ne sont ni des appareils, ni des produits d'une spécificité telle que ces machines deviennent inexploitables à la suite d'une défaillance du prestataire puisque le [minute page 6] locataire peut s'adresser à un autre prestataire et obtenir sans aucune difficulté les livraisons de consommables et l'exécution des opérations d'entretien nécessaires à leur fonctionnement ; que les contrats de service plus et les contrats de location longue durée sont donc divisibles et indépendants les uns des autres ;

Attendu que la Société X. sera déboutée de sa demande en résiliation judiciaire à la date du 18 avril 2002 des contrats de service plus et des contrats de location longue durée signés le 24 novembre 2000 ;

Attendu que l'article 6 des conditions générales des contrats de location longue durée prévoit : « ... par dérogation aux dispositions de l'article 1724 du Code Civil le locataire renonce à demander au bailleur toute indemnité ou diminution de loyer si pour une raison quelconque le matériel devenait temporairement ou définitivement inutilisable ... » ;

Attendu qu'il est constant en fait et d'ailleurs non contesté que la Société X. a cessé à compter du mois d'août 2002 de verser à la Société KBC les loyers convenus malgré un courrier recommandé avec accusé de réception de mise en demeure ; que le paiement des loyers constitue l'obligation principale du locataire ; que son inexécution prolongée conduit à prononcer la résiliation des contrats de location de longue durée aux torts exclusifs de la Société X. avec toutes ses conséquences de droit ;

Attendu que les contrats conclus entre la Société X. d'une part et les Sociétés FONTEX et KBC d'autre part ne relevant pas du champ d'application du Code de la Consommation, la Société X. ne saurait se prévaloir du fait que la clause n° 5 des conditions générales du contrat de location de longue durée présenterait un caractère abusif ;

Attendu que c'est par des motifs pertinents que la Cour adopte que les premiers juges ont décidé que la Société X. ne saurait se dispenser de payer à la Société KBC le loyer dû jusqu'à l'échéance finale des contrats et à restituer à ses frais les biens loués et que les demandes présentées par la Société X. à l'encontre de la Société FONTEX ne pouvaient prospérer en application des dispositions des articles L. 621-40, L. 621-41 et L. 621-43 du Code de Commerce ;

Attendu que les circonstances de la cause ne conduisent pas à faire application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile sur la demande d'aucune des parties ;

Attendu que la Société X. succombant en ses prétentions sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel avec application de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 7] PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

STATUANT publiquement, contradictoirement,

REFORME le jugement déféré en ce qu'il a condamné la Société X. à payer à la Société KBC la somme de 800 € et à Maître LOUIS ès qualité, la somme de 800 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

LE CONFIRME pour le surplus,

STATUANT à nouveau,

DÉBOUTE la Société X., la Société KBC et Maître LOUIS ès qualité de leurs demandes présentées sur la base de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Y ajoutant,

CONDAMNE la Société X. aux dépens d'appel dont distraction au profit des avoués de la cause.

LE GREFFIER            LE PRÉSIDENT