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CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 13 janvier 2022

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 13 janvier 2022
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 8e ch. sect. 1
Demande : 19/00160
Décision : 22/44
Date : 13/01/2022
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 8/01/2019
Numéro de la décision : 44
Référence bibliographique : 6280 (location financière sans option d’achat), 5985 (réductibilité de la clause pénale et déséquilibre), 6024 (réciprocité des prérogatives, conditions différentes), 5856 (notion de non-professionnel, L. 17 mars 2014)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9344

CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 13 janvier 2022 : RG n° 19/00160 ; arrêt n° 22/44 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Considérant qu'il était démontré que la société Tech & Fi Solutions avait gravement manqué à son obligation de fourniture et de maintenance, le premier juge a prononcé la résiliation du contrat de maintenance et a prononcé en conséquence, retenant l'interdépendance entre les deux contrats, la caducité du contrat de location et rejeté la demande de Locam au titre de ce contrat.

Les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants et la résiliation de l'un quelconque d'entre eux entraîne la caducité, par voie de conséquence, des autres (Com., 13 février 2019, pourvoi n° 17-19.223) ; le locataire a la faculté de demander par voie d'action ou par voie d'exception en défense à une demande en paiement du bailleur, la résiliation du contrat de prestation dès lors qu'il a mis en cause le prestataire, puis la caducité, peu important que le bailleur ait préalablement fait application de la clause résolutoire (Com., 13 décembre 2017, pourvoi n° 16-21.362).

La société Locam ne peut dès lors opposer au Comité d'entreprise LME le défaut de « qualité à agir » en résiliation du contrat de prestation contre la société Tech & Fi Solutions compte tenu de l'antériorité de la résiliation du contrat de location et elle n'est pas fondée à remettre en cause la résiliation de ce contrat prononcée par le premier juge dès lors que la cour n'est pas saisie d'un appel contre cette disposition à raison de la caducité de l'appel formé contre la société Tech & Fi Solutions.

Elle ne soulève par ailleurs aucun moyen visant à remettre en cause la caducité du contrat de location retenue par le premier juge en raison de l'interdépendance des contrats et des conséquences qu'il en a tirées sur l'absence d'effet de la clause de résiliation.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la caducité du contrat de location et débouté en conséquence la société Locam de sa demande en paiement. »

2/ « Un comité d'entreprise, qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre d'une activité commerciale industrielle, artisanale, libérale ou agricole, doit être considéré comme un non-professionnel qui peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation. »

3/ « En premier lieu, le Comité d'entreprise LME conclut au caractère abusif de la clause parce qu'elle autorise la société Locam à se prévaloir de la résiliation automatique et anticipée sans formalité judiciaire et après une simple mise en demeure restée sans effet alors que le même article impose au preneur d'engager une procédure contentieuse pour parvenir à un résultat identique et le prive de la faculté de contester la résiliation anticipée par le bailleur. Néanmoins, dans la mesure où cette clause prévoit la possibilité pour le bailleur de résilier le contrat hors procédure judiciaire dans le cas d'un manquement du locataire à ses obligations, elle ne crée pas un déséquilibre significatif au profit du professionnel ; par ailleurs elle ne prévoit nullement que le locataire n'aurait pas la possibilité de contester la résiliation ainsi prononcée.

En deuxième lieu, le Comité d'entreprise LME conclut au caractère abusif de la clause qui laisse un délai de huit jours au locataire pour réserver une suite favorable à la mise en demeure, délai qui serait insuffisant pour lui permettre de prendre ses dispositions pour éviter la résiliation anticipée. Selon l'article R. 132-2 (3) du code de la consommation dans sa version applicable à la date du contrat, une clause qui a pour effet de reconnaître au professionnel la faculté de résilier le contrat sans préavis d'une durée raisonnable est présumée abusive au sens de l'article L. 132-1, le professionnel pouvant rapporter la preuve contraire. S'agissant toutefois de l'obligation de paiement du loyer, dont le manquement a motivé en l'espèce la résiliation par le bailleur, sa mise en œuvre ne nécessite aucun délai d'exécution spécifique de sorte que le délai de huit jours constitue une durée raisonnable.

En troisième lieu, le Comité d'entreprise LME soutient que la clause est abusive parce qu'elle impose une sanction manifestement disproportionnée qui a des conséquences pour le bailleur plus profitables qu'une bonne exécution du contrat et est présumée abusive en application de l'article R. 132-2 du code de la consommation. La clause critiquée ne crée pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat dès lors, d'une part, qu'elle tend à indemniser le bailleur des loyers qu'il ne pourra pas obtenir du fait de la résiliation et à inciter le locataire à exécuter le contrat, et d'autre part, que le montant des dommages-intérêts prévu dans une clause pénale reste soumis à l'appréciation du juge selon les effets de la clause appliqué au cas d'espèce. Il n'y a pas lieu en conséquence de considérer que la clause de résiliation serait réputée non écrite et d'écarter son application. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 13 JANVIER 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/00160. Arrêt n° 22/44. N° Portalis DBVT-V-B7D-SCHN. Jugement (R.G. n° 17/01061) rendu le 8 novembre 2018 par le tribunal de grande instance de Valenciennes.

 

APPELANTE :

Sas Locam Location Automobiles Matériels

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au dit siège [...], [...], Représentée par Maître Jean-Pierre C., avocat au barreau de Douai et la Selarl Lexi Conseil et Défense, avocat au barreau de Saint Etienne

 

INTIMÉS :

Comité d'Entreprise Laminés Marchands Européens

[...], [...], Représentée par Maître Éric T., avocat au barreau de Valenciennes et Maître Stéphane P., avocat au barreau de Marseille

Maître D. Selurl D. agissant es qualité de liquidateur judiciaire de la societé Tech et Fi solutions (Allburotic)

société en cours de liquidation, dont le siège social est [...], [...], [...], Auquel la déclaration d'appel a été signifiée à personne habilitée par acte du 22 mars 2019, n'a pas constitué avocat

Sarl Tech &Fi Solutions (Allburotic)

en liquidation judiciaire - représentée par la Selurl D. Sébastien en qualité de liquidateur judiciaire [...], [...], N'a pas constitué avocat

 

Ordonnance de caducité partielle en date du 17 septembre 2019

DÉBATS à l'audience publique du 20 octobre 2021 tenue par Pauline Mimiague magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Sylvie Collière, président de chambre, Pauline Mimiague, conseiller, Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 13 janvier 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Sylvie Collière, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 4 mars 2021

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par assignation du 20 mars 2017, rectifiée par un acte du 24 avril 2017, la société Locam a fait assigner la SA « Comité d'entreprise Laminés marchands européens » devant le tribunal de grande instance de Valenciennes aux fins de la voir condamner au paiement de la somme de 41.878,92 euros au titre de deux contrats de location :

- un contrat conclu le 14 février 2014 portant sur un photocopieur de marque Ricoh, modèle MPC 3000, prévoyant un loyer trimestriel de 536,54 euros TTC, pendant une durée de 21 trimestres (contrat n° 1095302),

- un contrat conclu le 12 mars 2015 portant sur du matériel « 1 Develop Ineo + 3110 + accessoires » (PC et fax), prévoyant un loyer trimestriel de 1.860,78 euros TTC pendant une durée de 21 trimestres (contrat n° 1186051).

Par acte du 15 janvier 2018 la SA Comité d'entreprise Laminés marchands européens a mis en cause la société Tech & Fi solutions (Allburotic), représentée par son liquidateur judiciaire Maître D., avec laquelle elle avait signé des contrats de maintenance concomitamment aux contrats de locations, afin de demander la résiliation de ces contrats et, en conséquence, la caducité des contrats de location financière. Maître D. ès qualités n'a pas constitué avocat.

Les deux procédures ont été jointes et par jugement réputé contradictoire du 18 novembre 2018 le tribunal de grande instance de Valenciennes a :

- dit que l'action du Comité d'entreprise Laminés marchands européens est recevable,

- prononcé la résiliation du contrat de maintenance n° 03139 entre le comité d'entreprise et la société Tech & fi solutions, daté du 14 février 2014,

- prononcé la caducité du contrat de location financière entre le comité d'entreprise et la société Locam daté du 14 février 2014 portant le n° 1095302,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné la société Locam à payer au comité d'entreprise la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 8 janvier 2019 la société Locam a relevé appel de l'ensemble des chefs de ce jugement.

[*]

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 8 avril 2019, la société Locam demande à la cour de :

- dire bien fondé son appel et condamner le comité d'entreprise laminés marchands européens (SA) à lui régler la somme de 7.082,33 euros au titre du contrat n° 1095302 ainsi que celle de 34.796,59 euros au titre de la convention n° 1186051,

- dire que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter des mises en demeure respectives des 16 et 28 décembre 2016,

- débouté le comité d'entreprise laminés marchands européens (SA) de toutes ses demandes,

- le condamner à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel.

La société Locam fait valoir qu'une demande de caducité du contrat de location en conséquence de la résolution du contrat de fourniture ou de prestation est soumise à la condition préalable d'une décision judiciaire prononçant la résolution de ce dernier ; elle estime qu'à défaut pour le comité d'entreprise d'avoir obtenu une telle décision, le Comité d'entreprise LME n'a plus qualité à agir en résiliation contre la société Tech & Fi Solutions, considérant que la liquidation judiciaire de celle-ci ne constitue pas un tel titre parce que la résiliation ne peut résulter de la procédure collective en application de l'article L. 641-11-1 du code de commerce. La société Locam fait valoir « surabondamment » que le Comité d'entreprise LME ne rapporte pas la preuve du dysfonctionnement du matériel justifiant une résiliation des contrats de maintenance. S'agissant du second contrat, elle fait valoir qu'il n'est ni allégué ni démontré un dysfonctionnement du matériel et précise que c'est suite à une erreur de plume que la demande en condamnation a été formée contre la société LME mais que c'est bien contre le Comité d'entreprise LME, qui est aussi une société, qu'il est réclamé une condamnation.

[*]

Par conclusions notifiées par voie électronique le 2 juillet 2019 la société Comité d'entreprise laminés marchands européens demande à la cour de :

- déclarer les demandes de la société Locam irrecevables,

- en conséquence, confirmer la décision en toutes ses dispositions et débouter la société Locam de l'intégralité de ses demandes,

- à titre subsidiaire :

- dire que la clause de résiliation prévue par les contrats de locations financières est une clause pénale,

- constater son caractère manifestement excessif et que la société Locam ne démontre pas l'exigence d'un préjudice,

- réduire le montant des condamnations financières à la somme d'un euro symbolique,

- en tout état de cause, condamner solidairement la société Tech & Fi Solutions et la société Locam à lui verser la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le comité d'entreprise fait valoir que la société Locam ne peut lui opposer la clause de résiliation prévue aux contrats s'agissant d'une clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, qu'elle est par ailleurs recevable à poursuivre la résolution des contrats de fourniture et de maintenance et à solliciter la caducité des contrats de location interdépendants. Il conclut au rejet des demandes, s'agissant du premier contrat, en conséquence de la résiliation du contrat de maintenance à raison des manquements de la société Tech & Fi Solutions à ses obligations et, s'agissant du second contrat, en raison du caractère non écrit de la clause de résiliation. Subsidiairement, il demande la réduction de la clause pénale à de plus justes proportions.

[*]

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé du surplus de leurs moyens.

[*]

Par ordonnance du 17 octobre 2019 le conseiller de la mise état, constatant que la société Locam et le Comité d'entreprise LME n'avaient pas fait signifier leurs conclusions à Maître D. ès qualités, a prononcé la caducité de la déclaration d'appel de la société Locam à l'égard de la société Tech & Fi Solutions représentée par Maître D. ès qualités et a déclaré irrecevables les conclusions de la société Comité d'entreprise LME à l'égard de la société Tech & Fi Solutions représentée par Maître D. ès qualités.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 mars 2021 et l'affaire a été fixée à l'audience de plaidoiries du 21 mars suivant.

Suivant arrêt du 17 juin 2021 la cour a ordonné la réouverture des débats à l'audience du 20 octobre 2021 et invité la société Locam à préciser contre quelle personne morale elle agissait et l'intimée à préciser sa dénomination exacte, sa forme juridique et son numéro d'immatriculation.

Le conseil de l'intimé a précisé que la partie intimée à l'instance était le « Comité d'entreprise laminés marchands européens SA », qui a le même numéro d'immatriculation que l'entreprise dont il fait partie à savoir XXX.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Sur la demande en paiement au titre du contrat de location du 14 février 2014 :

Considérant qu'il était démontré que la société Tech & Fi Solutions avait gravement manqué à son obligation de fourniture et de maintenance, le premier juge a prononcé la résiliation du contrat de maintenance et a prononcé en conséquence, retenant l'interdépendance entre les deux contrats, la caducité du contrat de location et rejeté la demande de Locam au titre de ce contrat.

Les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants et la résiliation de l'un quelconque d'entre eux entraîne la caducité, par voie de conséquence, des autres (Com., 13 février 2019, pourvoi n° 17-19.223) ; le locataire a la faculté de demander par voie d'action ou par voie d'exception en défense à une demande en paiement du bailleur, la résiliation du contrat de prestation dès lors qu'il a mis en cause le prestataire, puis la caducité, peu important que le bailleur ait préalablement fait application de la clause résolutoire (Com., 13 décembre 2017, pourvoi n° 16-21.362).

La société Locam ne peut dès lors opposer au Comité d'entreprise LME le défaut de « qualité à agir » en résiliation du contrat de prestation contre la société Tech & Fi Solutions compte tenu de l'antériorité de la résiliation du contrat de location et elle n'est pas fondée à remettre en cause la résiliation de ce contrat prononcée par le premier juge dès lors que la cour n'est pas saisie d'un appel contre cette disposition à raison de la caducité de l'appel formé contre la société Tech & Fi Solutions.

Elle ne soulève par ailleurs aucun moyen visant à remettre en cause la caducité du contrat de location retenue par le premier juge en raison de l'interdépendance des contrats et des conséquences qu'il en a tirées sur l'absence d'effet de la clause de résiliation.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la caducité du contrat de location et débouté en conséquence la société Locam de sa demande en paiement.

 

Sur la demande en paiement au titre du contrat de location du 12 mars 2015 :

Le premier juge a considéré que la société Locam ne rapportait pas la preuve d'impayés de la part de la société LME dans la mesure où le contrat de location avait été signé par le comité d'entreprise de la société LME et non par la société elle-même.

Il est désormais acquis aux débats que la société Locam agit contre le Comité d'entreprise laminés marchands européens, et non contre la société Laminé marchands européens, non partie à la procédure.

La société Locam fait valoir qu'à raison de plusieurs loyers restés impayés et non réglés dans les huit jours des mises en demeure adressées les 16 et 28 décembre 2016 le contrat s'est trouvé résolu de plein droit en application de son article 12.

 

Sur le caractère abusif de la clause de résiliation (article 12) :

Selon l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa version issue de la loi n°2010-737 du 1er juillet 2010 applicable à la date du contrat, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; elles sont réputées non écrites.

Un comité d'entreprise, qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre d'une activité commerciale industrielle, artisanale, libérale ou agricole, doit être considéré comme un non-professionnel qui peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation.

L'article 12 du contrat (« résiliation contractuelle du contrat ») prévoit dans son premier paragraphe :

a) pour défaut de respect dudit contrat, le contrat de location pourra notamment être résilié de plein droit par le loueur, sans aucune formalité judiciaire, huit jours après une mise en demeure restée sans effet, dans les cas suivants : inobservation par le locataire de l'une des conditions générales ou particulières du présent contrat, non-paiement d'un loyer ou d'une prime d'assurance à son échéance, l'arrivée du terme constituant à elle seule la mise en demeure, l'inexactitude des déclarations du locataire figurant sur la demande de location ou des pièces comptables jointes. Après mise en demeure, le loueur conserve le droit de résilier le contrat même si le locataire a proposé le paiement ou l'exécution de ses obligations ou même s'il y a procédé après le délai fixé, mais il peut y renoncer.

La clause prévoit par ailleurs que la résiliation du contrat emporte les conséquences suivantes :

« 1) le locataire sera tenu de restituer immédiatement le matériel au loueur au lieu fixé par ce dernier et supporter tous les frais occasionnés par cette résiliation : démontage, transport du matériel au lieu désigné par le loueur, formalités administratives. En cas de refus du locataire de restituer le matériel loué, il suffira, pour l'y contraindre, d'une simple ordonnance rendue par la juridiction compétente ;

2) outre la restitution du matériel, le locataire devra verser au loueur une somme égale au montant des loyers impayés au jour de la résiliation majorée d'une clause pénale de 10 % ainsi qu'une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'à la fin du contrat tel que prévu à l'origine, majorée d'une clause pénale de 10 % (sans préjudice de tous dommages et intérêts qu'il pourrait devoir). Les sommes réglées postérieurement à la résiliation du contrat seront affectées sur les sommes dues et n'emporteront pas novation de la résiliation ».

En premier lieu, le Comité d'entreprise LME conclut au caractère abusif de la clause parce qu'elle autorise la société Locam à se prévaloir de la résiliation automatique et anticipée sans formalité judiciaire et après une simple mise en demeure restée sans effet alors que le même article impose au preneur d'engager une procédure contentieuse pour parvenir à un résultat identique et le prive de la faculté de contester la résiliation anticipée par le bailleur. Néanmoins, dans la mesure où cette clause prévoit la possibilité pour le bailleur de résilier le contrat hors procédure judiciaire dans le cas d'un manquement du locataire à ses obligations, elle ne crée pas un déséquilibre significatif au profit du professionnel ; par ailleurs elle ne prévoit nullement que le locataire n'aurait pas la possibilité de contester la résiliation ainsi prononcée.

En deuxième lieu, le Comité d'entreprise LME conclut au caractère abusif de la clause qui laisse un délai de huit jours au locataire pour réserver une suite favorable à la mise en demeure, délai qui serait insuffisant pour lui permettre de prendre ses dispositions pour éviter la résiliation anticipée. Selon l'article R. 132-2 (3) du code de la consommation dans sa version applicable à la date du contrat, une clause qui a pour effet de reconnaître au professionnel la faculté de résilier le contrat sans préavis d'une durée raisonnable est présumée abusive au sens de l'article L. 132-1, le professionnel pouvant rapporter la preuve contraire. S'agissant toutefois de l'obligation de paiement du loyer, dont le manquement a motivé en l'espèce la résiliation par le bailleur, sa mise en œuvre ne nécessite aucun délai d'exécution spécifique de sorte que le délai de huit jours constitue une durée raisonnable.

En troisième lieu, le Comité d'entreprise LME soutient que la clause est abusive parce qu'elle impose une sanction manifestement disproportionnée qui a des conséquences pour le bailleur plus profitables qu'une bonne exécution du contrat et est présumée abusive en application de l'article R. 132-2 du code de la consommation. La clause critiquée ne crée pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat dès lors, d'une part, qu'elle tend à indemniser le bailleur des loyers qu'il ne pourra pas obtenir du fait de la résiliation et à inciter le locataire à exécuter le contrat, et d'autre part, que le montant des dommages-intérêts prévu dans une clause pénale reste soumis à l'appréciation du juge selon les effets de la clause appliqué au cas d'espèce.

Il n'y a pas lieu en conséquence de considérer que la clause de résiliation serait réputée non écrite et d'écarter son application.

 

Sur les sommes dues à la société Locam :

La société Locam sollicite les sommes suivantes :

- 5.582,34 euros au titre des loyers échus impayés (3 échéances du 30 juin au 30 décembre 2016),

- 26.050,92 euros au titre de l'indemnité de résiliation (14 loyers du 30 mars 2017 au 30 juin 2020)

- clause pénale de 10 % (sur les loyers échus et l'indemnité de résiliation) : 3.163,33 euros.

En application de l'article 1152, devenu l'article 1232-1, du code civil, lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre ; néanmoins le juge peut, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

En l'espèce, la majoration de 10 % appliquée aux loyers échus impayés ainsi que l'indemnité constituée par la totalité des loyers restant à courir augmentée d'une indemnité de 10 %, s'analysent en une clause pénale au sens des dispositions rappelées ci-dessus.

Compte tenu de la durée du contrat, prévue initialement sur une durée de 21 trimestres, et dans la mesure où, selon les indications de l'intimé non contestées, le matériel a été restitué, l'application de la clause pénale entraîne une pénalité manifestement excessive au regard du préjudice subi par la société Locam en raison de l'interruption du contrat ; il convient de réduire le montant de l'indemnité à la somme globale de 6.000 euros.

En conséquence il convient de condamner le Comité d'entreprise LME à payer à la société la somme de 5.582,34 euros au titre des loyers échus impayés outre la somme de 6.000 euros à titre d'indemnité de résiliation, sommes qui porteront intérêts au taux légal compter du 20 mars 2017, date de l'assignation, en l'absence d'élément permettant de déterminer la date de réception de la mise en demeure adressée au locataire.

 

Sur les demandes accessoires :

Les demandes de la société Locam ayant été jugées partiellement fondées, il y a lieu, en application de l'article 696 du code de procédure civile, de mettre les dépens de première instance et d'appel à la charge du Comité d'entreprise LME.

L'équité commande en revanche de laisser à chacune des parties la charge de ses frais non compris dans les dépens tant en première instance qu'en appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant dans les limites de l'appel, par arrêt contradictoire :

Confirme le jugement en ce qu'il a débouté la société Locam de sa demande au titre du contrat de location du 14 février 2014 portant le n° 1095302 ;

Infirme le jugement en ce qu'il a débouté la société Locam de sa demande au titre du contrat n° 1186051 du 12 mars 2015 et a condamné celle-ci à payer au Comité d'entreprise Laminés marchands européens la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Condamne le Comité d'entreprise Laminés marchands européens SA à payer à la société Locam la somme de 11.582,35 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 mars 2017 ;

Condamne le Comité d'entreprise Laminés marchands européens SA aux dépens de première instance et d'appel ;

Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier,                                        Le président,

G. Przedlacki                                    S. Collière