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TA GRENOBLE (1re ch.), 29 juillet 2022

Nature : Décision
Titre : TA GRENOBLE (1re ch.), 29 juillet 2022
Pays : France
Juridiction : Grenoble (TA)
Demande : 1905463
Décision : 43338
Date : 29/07/2022
Nature de la décision : Rejet
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 14/08/2019
Numéro de la décision : 43338
Référence bibliographique : 5701 (procédure administrative), 5705 (prescription de l’action), 5846 (domaine, contrôle des règlements), 6036 (appréciation du caractère abusif dans un service public), 6314 (eau, obligations de l’usager), 6315 (eau, obligations du fournisseur)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9741

TA GRENOBLE (1re ch.), 29 juillet 2022 : req. n° 1905463 ; jugt n° 43338 

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « 3. Le règlement du service des eaux a été approuvé par une délibération du conseil communautaire du 20 novembre 2017, laquelle a été transmise en préfecture le 30 novembre 2017 et affichée le même jour. Il ressort des pièces du dossier qu'elle a été publiée sous format papier dans le recueil des actes administratifs de novembre 2017 de la communauté de communes Le Grésivaudan le 30 novembre 2017. Il ressort en outre des pièces du dossier que la délibération du 20 novembre 2017 a été mise en ligne sur le site internet de cette communauté de communes dans l'onglet « délibérations ». Un certificat établi le 24 juin 2022 par le président de la communauté atteste de l'accomplissement de ces modalités de publication. Dès lors, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les deux autres fins de non-recevoir tirées du caractère nouveau de ces conclusions et du défaut de production de la décision attaquée, les conclusions d'annulation présentées par M. X. le 23 février 2021 à l'encontre des articles 3.1, 3.3 et 5.1 du règlement du service des eaux ont été présentées au-delà du délai de deux mois qui lui était imparti par les dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative et doivent être rejetées comme tardives. »

2/ « 4. En premier lieu, M. X. établit que la communauté de communes a reçu le 29 avril 2019 sa lettre du 23 avril 2019 par laquelle il a demandé au président de cette collectivité publique l'abrogation de l'article 3.1 du règlement du service des eaux. Dès lors, la fin-de-non-recevoir tirée de l'absence de demande préalable d'abrogation doit être écartée.

5. En second lieu, la requête de M. X. énonce que le règlement du service public des eaux dont il demande l'abrogation est illégal en ce qu'il comporte des clauses abusives. Elle est donc suffisamment motivée au sens de l'article R. 411-1 du code de justice administrative.

6. En revanche, la lettre du 23 avril 2019 de M. X. ne demande à la communauté de communes que l'abrogation de l'article 3.1 du règlement du service des eaux. Dès lors, aucune décision de refus d'abroger les articles 3.3 et 5.1 du règlement de service des eaux ne saurait être née du rejet de cette demande. L'obligation pour l'administration d'abroger un règlement illégal ne saurait dispenser le requérant de la nécessité de former recours dans les deux mois contre une décision préalable conformément aux dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative. Il s'ensuit que le requérant est seulement recevable à demander l'annulation de la décision par laquelle le président de la communauté a implicitement refusé d'abroger l'article 3.1 du règlement du service des eaux mais non en tant qu'il aurait refusé d'abroger les articles 3.3 et 5.1 de ce règlement. »

3/ « 7. Dès lors qu'il n'est pas saisi d'une question préjudicielle en appréciation de validité d'un acte administratif, il n'appartient pas au juge administratif de « déclarer illégal » des dispositions réglementaires. Dès lors, le requérant n'est pas recevable à demander, à titre subsidiaire, de déclarer les articles 3.1, 3.3 et 5.1 du règlement du service des eaux illégaux. »

4/ « 9. Le caractère abusif d'une clause s'apprécie non seulement au regard de cette clause elle-même mais aussi compte tenu de l'ensemble des stipulations du contrat et, lorsque celui-ci a pour objet l'exécution d'un service public, des caractéristiques particulières de ce service. »

5/ « 15. M. X. fait valoir que la canalisation d'eau située avant le compteur constitue un ouvrage public, que ce compteur soit placé ou pas en limite de propriété et même si une partie du branchement avant compteur se trouve ainsi sur la propriété privée de l'usager. Il est vrai qu'un tel branchement, accessoire des conduites principales constitue un ouvrage public tant pour la partie située sous la voie publique que pour celle située dans sa propriété. Un ouvrage public peut cependant appartenir à un propriétaire privé et, en l'espèce, la partie du branchement litigieux située sur la propriété privée de M. X. a été réalisée pour son compte, à ses frais, à son usage exclusif et sans faire l'objet d'une intégration ultérieure dans le domaine public. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient le requérant, la seule qualification d'ouvrage public n'impose pas nécessairement que l'entretien de ce branchement soit mis à la charge du service public de l'eau potable. »

6/ « 16. La clause contestée, correspondant à la dernière phrase de l'article 3.1 du règlement, qui permet de mettre à la charge de l'abonné des frais de réparation ou des dommages de la partie du branchement située avant compteur et sur la propriété privée de l'usager sauf faute prouvée du service des eaux du Grésivaudan. Elle s'applique donc à des installations anciennes et non conformes du fait qu'une partie ou la totalité des éléments du branchement est située sur la propriété privée et non sur le domaine public dès lors que le règlement impose en principe l'installation de compteurs d'eau aux limites extérieures des propriétés privées desservies, pour permettre de constituer la délimitation entre la partie privée du réseau et sa partie publique.

17. Il résulte de la rédaction de cette clause, interprétée au regard des dispositions des articles 3.3 et 5.1, que les usagers peuvent être amenés à prendre en charge les dommages imputables à leur propre fait à l'exclusion toutefois des dommages qui seraient imputables à une faute commise par le service. La clause contestée n'a donc pas pour effet d'exonérer le service de sa responsabilité à raison de sa propre faute. Elle n'a pas non plus pour effet d'exclure la possibilité, pour un abonné, de rechercher la responsabilité d'un tiers à raison des dommages subis. Dès lors, la clause contestée n'a pas pour effet de faire supporter aux usagers des dommages qui ne leur seraient pas imputables et ne créée donc pas de déséquilibre significatif dans les relations contractuelles. Elle s'applique d'ailleurs à des situations transitoires, la commune ayant prévu de rendre ces installations conformes en déplaçant le branchement et le compteur sur le domaine public, comme il ressort des dispositions de l'article 3.4 du règlement. »

7/ « 18. Le droit applicable aux relations contractuelles nouées entre un service public industriel et commercial et un usager laisse à chacune des parties la charge de la preuve des fautes qu'elle impute à l'autre partie. Ainsi, en ouvrant la possibilité de mettre des réparations à la charge d'un abonné, à raison d'un branchement non conforme, au cas où aucune faute n'a été commise par le service sans mettre à la charge de celui-ci la preuve de l'absence de faute, la dernière phrase de l'article 3.1 du règlement du service de l'eau potable n'impose pas à l'abonné la charge de la preuve qui devrait incomber normalement à l'autre partie au contrat en application du droit applicable.

19. Par ailleurs, il résulte de la dernière phrase de l'article 3.1 ainsi que du B) de l'article 3.3 que, pour les travaux portant sur la partie privative du branchement, l'usager pourra faire appel à l'entreprise de son choix sous réserve d'informer le service des eaux du Grésivaudan de toutes les interventions qu'il réalise, de le prévenir de toute fuite d'eau, affouillement du sol ou de toute anomalie de fonctionnement et de ne pas manipuler le compteur qui est fourni, posé, vérifié, entretenu, relevé et renouvelé par le service des eaux du Grésivaudan sous sa responsabilité. Ces limites apparaissent justifiées par les caractéristiques particulières de ce service public et ne s'opposent pas à ce que l'usager fasse dresser des constats notamment sur l'origine des fuites survenues dans la partie privative du branchement. Aussi, malgré les contraintes imposées pour le bon fonctionnement du service public, l'usager dispose des moyens suffisants pour établir la preuve d'une faute éventuelle de l'exploitant ou d'un tiers. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE GRENOBLE

PREMIÈRE CHAMBRE

JUGEMENT DU 29 JUILLET 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Numéro de requête : 1905463. Numéro de rôle : 43338.

 

DEMANDEUR :

M. X.

Représenté par SARL PY CONSEIL, Avocat

 

DÉFENDEUR :

Communauté de communes Le Grésivaudan

Représentée par Maître Senegas

 

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2022, à laquelle siégeaient : Mme Paquet, présidente, M. Ban, premier conseiller. Mme Letellier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juillet 2022.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 14 août 2019, le 23 février 2021, le 28 juin 2021 et le 30 novembre 2021, M. X., représenté par Maître Py, demande au tribunal dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler les articles 3.1, 3.3 et 5.1 du règlement de service des eaux de la communauté de communes Le Grésivaudan ;

2°) d'annuler la décision par laquelle le président de la communauté de communes Le Grésivaudan a implicitement refusé d'abroger les articles 3.1, 3.3 et 5.1 du règlement de service des eaux de la communauté de communes Le Grésivaudan ;

3°) de déclarer illégaux, à titre subsidiaire, les articles 3.1, 3.3 et 5.1 du même règlement ;

4°) d'enjoindre à l'administration de procéder à l'abrogation de ces dispositions illégales du règlement de service des eaux ou, à titre subsidiaire, de les déclarer illégales ;

5°) de mettre à la charge de la communauté de communes Le Grésivaudan une somme de 1.800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient :

- la requête, qui indique que le règlement du service des eaux est illégal, est suffisamment motivée au sens de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

- l'administration est tenue d'abroger un règlement illégal ; il importe peu, dès lors, que sa demande d'abrogation ne visait pas les articles 3.3 et 5.1 du règlement de service des eaux ;

- l'illégalité des articles 3.3 et 5.1 est, en outre, la conséquence de l'illégalité de l'article 3.1 ;

- l'appréciation, par voie d'exception, de la légalité de certaines clauses qui n'auraient pas été mentionnées dans la demande préalable adressée à l'administrative, relève de la même cause juridique ;

- la demande d'abrogation de l'article 3. 1 du règlement de service des eaux, fait suite au refus de la collectivité de réparer une fuite d'eau située en amont du compteur ; cette décision de refus est une décision individuelle prise en application des articles litigieux du règlement de service des eaux ; par conséquent, il est fondé à contester par voie d'exception les articles 3.3 et 5.1 contre lesquels il n'a pas exercé de recours, à l'occasion du recours dirigé contre l'article 3.1 du règlement de service des eaux ; ces articles doivent être déclarés illégaux.

- les articles 3.1, 3.3 et 5.1 du règlement de service des eaux de la communauté de communes Le Grésivaudan comportent des clauses abusives qui doivent être abrogées.

[*]

Par des mémoires en défense enregistrés le 13 février 2020, le 25 mars 2021, le 2 août 2021 et le 20 janvier 2022, la communauté de communes Le Grésivaudan, représentée par Maître Senegas, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. X. de la somme de 4.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que le requérant n'a pas produit d'accusé de réception de la demande d'abrogation qu'il aurait adressé à la communauté ;

- la requête n'énonce aucun moyen contre le refus d'abrogation mais comporte un seul moyen dirigé contre le règlement du service des eaux ; elle est, à ce titre, également irrecevable ;

- la demande d'abrogation du 23 avril 2019 n'a porté que sur l'article 3.1 du règlement du service des eaux ; dès lors, les conclusions à l'encontre des articles 3.3 et 5.1 du règlement de service des eaux sont irrecevables ;

- les conclusions d'annulation des articles du règlement du service de l'eau sont irrecevables aux motifs qu'elles sont nouvelles, que le règlement n'a pas été produit en méconnaissance de l'article R. 412-1 du code de justice administrative et qu'elles sont tardives ;

- les conclusions d'abrogation des articles du règlement du service de l'eau sont irrecevables dès lors qu'elles ne relèvent pas du pouvoir du juge administratif ;

- le requérant ne peut changer l'objet du litige à chaque mémoire ;

- il n'appartient pas au juge administratif de déclarer illégal des dispositions réglementaires en l'absence de question préjudicielle ;

- les clauses du règlement du service de l'eau dont il est demandé l'abrogation ne sont pas abusives.

[*]

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la consommation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A,

- les conclusions de M. Morel, rapporteur public,

- les conclusions de Maître Mattana-Basset représentant M. X. et de Maître Djeffal représentant la communauté de communes Le Grésivaudan.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Considérant ce qui suit :

1. M. X., demeurant [adresse], est abonné aux services d'eau potable et d'assainissement collectif gérés par la communauté de communes Le Grésivaudan compétente en ce domaine depuis le 1er janvier 2018. Par une lettre du 23 avril 2019, il a demandé au président de la communauté la réparation de la fuite d'eau affectant son branchement ainsi que l'abrogation de l'article 3.1 du règlement du service des eaux. Par sa requête, M. X. demande l'annulation de la décision par laquelle le président de la communauté de communes Le Grésivaudan a implicitement rejeté cette demande. Il sollicite également l'annulation des articles 3.1, 3.3 et 5.1 du règlement de service des eaux de la communauté de communes Le Grésivaudan et, à titre subsidiaire de les déclarer illégaux.

 

Sur la recevabilité des conclusions d'annulation des articles 3.1, 3.3 et 5.1 du règlement du service des eaux :

2. Aux termes de l'article L. 5211-1 du code général des collectivités territoriales : « Les dispositions du chapitre Ier du titre II du livre Ier de la deuxième partie relatives au fonctionnement du conseil municipal sont applicables au fonctionnement de l'organe délibérant des établissements publics de coopération intercommunale, en tant qu'elles ne sont pas contraires aux dispositions du présent titre ». Parmi ces dispositions, l'article R. 2121-10 du même code prévoit que : « Dans les communes de 3.500 habitants et plus, le dispositif des délibérations du conseil municipal visé au second alinéa de l'article L. 2121-24 () sont publiés dans un recueil des actes administratifs ayant une périodicité au moins trimestrielle. () ». L'article L. 2121-24 du même code dispose : « () Dans les communes de 3 500 habitants et plus, le dispositif des délibérations à caractère réglementaire est publié dans un recueil des actes administratifs dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. La publication au recueil des actes administratifs du dispositif des délibérations mentionnées au deuxième alinéa est assurée sur papier. Elle peut l'être également, dans des conditions de nature à garantir leur authenticité, sous forme électronique. La version électronique est mise à la disposition du public de manière permanente et gratuite. »

3. Le règlement du service des eaux a été approuvé par une délibération du conseil communautaire du 20 novembre 2017, laquelle a été transmise en préfecture le 30 novembre 2017 et affichée le même jour. Il ressort des pièces du dossier qu'elle a été publiée sous format papier dans le recueil des actes administratifs de novembre 2017 de la communauté de communes Le Grésivaudan le 30 novembre 2017. Il ressort en outre des pièces du dossier que la délibération du 20 novembre 2017 a été mise en ligne sur le site internet de cette communauté de communes dans l'onglet « délibérations ». Un certificat établi le 24 juin 2022 par le président de la communauté atteste de l'accomplissement de ces modalités de publication. Dès lors, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les deux autres fins de non-recevoir tirées du caractère nouveau de ces conclusions et du défaut de production de la décision attaquée, les conclusions d'annulation présentées par M. X. le 23 février 2021 à l'encontre des articles 3.1, 3.3 et 5.1 du règlement du service des eaux ont été présentées au-delà du délai de deux mois qui lui était imparti par les dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative et doivent être rejetées comme tardives.

 

Sur la recevabilité des conclusions d'annulation de la décision implicite de rejet de la demande d'abrogation :

4. En premier lieu, M. X. établit que la communauté de communes a reçu le 29 avril 2019 sa lettre du 23 avril 2019 par laquelle il a demandé au président de cette collectivité publique l'abrogation de l'article 3.1 du règlement du service des eaux. Dès lors, la fin-de-non-recevoir tirée de l'absence de demande préalable d'abrogation doit être écartée.

5. En second lieu, la requête de M. X. énonce que le règlement du service public des eaux dont il demande l'abrogation est illégal en ce qu'il comporte des clauses abusives. Elle est donc suffisamment motivée au sens de l'article R. 411-1 du code de justice administrative.

6. En revanche, la lettre du 23 avril 2019 de M. X. ne demande à la communauté de communes que l'abrogation de l'article 3.1 du règlement du service des eaux. Dès lors, aucune décision de refus d'abroger les articles 3.3 et 5.1 du règlement de service des eaux ne saurait être née du rejet de cette demande. L'obligation pour l'administration d'abroger un règlement illégal ne saurait dispenser le requérant de la nécessité de former recours dans les deux mois contre une décision préalable conformément aux dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative. Il s'ensuit que le requérant est seulement recevable à demander l'annulation de la décision par laquelle le président de la communauté a implicitement refusé d'abroger l'article 3.1 du règlement du service des eaux mais non en tant qu'il aurait refusé d'abroger les articles 3.3 et 5.1 de ce règlement.

 

Sur la recevabilité des conclusions tendant à « déclarer illégaux » les articles 3.1, 3.3 et 5.1 du règlement :

7. Dès lors qu'il n'est pas saisi d'une question préjudicielle en appréciation de validité d'un acte administratif, il n'appartient pas au juge administratif de « déclarer illégal » des dispositions réglementaires. Dès lors, le requérant n'est pas recevable à demander, à titre subsidiaire, de déclarer les articles 3.1, 3.3 et 5.1 du règlement du service des eaux illégaux.

 

Sur le bien-fondé des conclusions d'annulation du refus implicite d'abroger l'article 3.1 du règlement :

8. Aux termes de l'article L. 212-1 du code de la consommation : « Dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. () ». Aux termes de l'article R. 212-1 du même code : « Dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont de manière irréfragable présumées abusives, au sens des dispositions des premier et quatrième alinéas de l'article L. 212-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de : () 3° Réserver au professionnel le droit de modifier unilatéralement les clauses du contrat relatives à sa durée, aux caractéristiques ou au prix du bien à livrer ou du service à rendre ; 4° Accorder au seul professionnel le droit de déterminer si la chose livrée ou les services fournis sont conformes ou non aux stipulations du contrat ou lui conférer le droit exclusif d'interpréter une quelconque clause du contrat ; () 6° Supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations ; () 12° Imposer au consommateur la charge de la preuve, qui, en application du droit applicable, devrait incomber normalement à l'autre partie au contrat. ». Aux termes de l'article R. 212-2 du même code : « Dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont présumées abusives au sens des dispositions des premier et cinquième alinéas de l'article L. 212-1, sauf au professionnel à rapporter la preuve contraire, les clauses ayant pour objet ou pour effet de : 1° Prévoir un engagement ferme du consommateur, alors que l'exécution des prestations du professionnel est assujettie à une condition dont la réalisation dépend de sa seule volonté ; () 9° Limiter indûment les moyens de preuve à la disposition du consommateur () ».

9. Le caractère abusif d'une clause s'apprécie non seulement au regard de cette clause elle-même mais aussi compte tenu de l'ensemble des stipulations du contrat et, lorsque celui-ci a pour objet l'exécution d'un service public, des caractéristiques particulières de ce service.

10. Aux termes de l'article 3.1 du règlement du service des eaux du Grésivaudan : « L'accès à l'eau potable se fait par un « branchement » reliant le lieu à desservir à la canalisation publique. Le branchement public conforme comprend, depuis le réseau public ; la prise d'eau sur la conduite de distribution publique ; le robinet sous bouche à clé, dont le Service des eaux du Grésivaudan est le seul à posséder la clé et en faire usage. la canalisation de branchement située sous le domaine public ; du dispositif de comptage qui comprend : Le robinet d'arrêt avant compteur ; Le compteur avec sa capsule de plombage ou cachet ; Le système de relevé à distance fixé au compteur(le cas échéant) ; Le joint aval de compteur (inclus). Le compteur doit être placé : - en limite de propriété publique / privée sur propriété privée dans un regard accessible depuis le domaine public. Toutes les dispositions doivent être prises pour une accessibilité depuis le domaine public, Lorsque le regard du compteur est installé sur la partie privative, il appartient à l'abonné, qui doit en assurer l'accessibilité et l'entretien à ses frais. De la même façon, les colonnes montantes sont de la responsabilité de l'abonné. Lorsque le branchement n'est pas conforme, c'est-à-dire que le compteur n'est pas placé en limite de propriété et qu'une partie du branchement avant compteur est située sur la propriété privée de l'usager, de l'abonné ou du propriétaire, cette partie relève de sa responsabilité, en particulier s'agissant des réparations ou dommages y afférant sauf faute prouvée du Service des eaux du Grésivaudan ».

11. Cet article se termine par le commentaire suivant « Vous n'avez pas le droit de manipuler, le compteur même s'il est situé sous votre propriété privée. Il est recommandé à l'abonné de s'assurer périodiquement du bon fonctionnement du robinet avant compteur et d'avertir le Service des eaux du Grésivaudan. Le remplacement du robinet après compteur reste à votre charge ».

12. L'article 4.2 de ce règlement dispose que le compteur « doit être placé aussi près que possible des limites du domaine public ». Aux termes de l'article 4.7 : « En cas de travaux sur le domaine public, le Service des eaux du Grésivaudan pourra être amené à déplacer, à ses frais, les compteurs en limite de propriété ».

13. L'article 3.3 dispose en ce qui concerne l'entretien du branchement : « A. En partie publique Le Service des eaux du Grésivaudan est seul habilité à entretenir et renouveler la partie publique du branchement. Il prend à sa charge les frais d'entretien, de réparations ou de renouvellement, y compris les travaux de fouille et de remblai. Les interventions sur la partie privative de votre branchement ne seront pas prises en charge par le Service des eaux du Grésivaudan. B. En partie privée Le propriétaire prend à sa charge les frais d'entretien, de réparations ou de renouvellement du coffret ou du regard abritant le compteur situé en propriété privée. Ceci inclut les travaux de fouille et de remblai. Le propriétaire doit informer le Service des eaux du Grésivaudan de toutes les interventions qu'il réalise. C. Cas de sinistre résultant d'une négligence En cas de sinistre sur la partie publique du branchement résultant d'une faute ou d'une négligence de votre part, vous supportez les conséquences financières et autres dommages, notamment aux tiers. Sont considérées comme négligences : une anomalie de fonctionnement non signalée, des travaux au droit de la conduite () ».

14. L'article 5.1 inclus dans le chapitre V « Installations privées » dispose enfin que : « Vous êtes seul responsable de tous les dommages causés à vous-même, au Service des eaux du Grésivaudan ou aux tiers tant par l'établissement que par le fonctionnement de vos installations privées sauf s'il apparaît qu'ils résultent d'une faute ou d'une négligence de la part du Service des eaux du Grésivaudan ».

 

En ce qui concerne le caractère d'ouvrage public des branchements d'eau :

15. M. X. fait valoir que la canalisation d'eau située avant le compteur constitue un ouvrage public, que ce compteur soit placé ou pas en limite de propriété et même si une partie du branchement avant compteur se trouve ainsi sur la propriété privée de l'usager. Il est vrai qu'un tel branchement, accessoire des conduites principales constitue un ouvrage public tant pour la partie située sous la voie publique que pour celle située dans sa propriété. Un ouvrage public peut cependant appartenir à un propriétaire privé et, en l'espèce, la partie du branchement litigieux située sur la propriété privée de M. X. a été réalisée pour son compte, à ses frais, à son usage exclusif et sans faire l'objet d'une intégration ultérieure dans le domaine public. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient le requérant, la seule qualification d'ouvrage public n'impose pas nécessairement que l'entretien de ce branchement soit mis à la charge du service public de l'eau potable.

 

En ce qui concerne la portée de la clause d'exonération de responsabilité :

16. La clause contestée, correspondant à la dernière phrase de l'article 3.1 du règlement, qui permet de mettre à la charge de l'abonné des frais de réparation ou des dommages de la partie du branchement située avant compteur et sur la propriété privée de l'usager sauf faute prouvée du service des eaux du Grésivaudan. Elle s'applique donc à des installations anciennes et non conformes du fait qu'une partie ou la totalité des éléments du branchement est située sur la propriété privée et non sur le domaine public dès lors que le règlement impose en principe l'installation de compteurs d'eau aux limites extérieures des propriétés privées desservies, pour permettre de constituer la délimitation entre la partie privée du réseau et sa partie publique.

17. Il résulte de la rédaction de cette clause, interprétée au regard des dispositions des articles 3.3 et 5.1, que les usagers peuvent être amenés à prendre en charge les dommages imputables à leur propre fait à l'exclusion toutefois des dommages qui seraient imputables à une faute commise par le service. La clause contestée n'a donc pas pour effet d'exonérer le service de sa responsabilité à raison de sa propre faute. Elle n'a pas non plus pour effet d'exclure la possibilité, pour un abonné, de rechercher la responsabilité d'un tiers à raison des dommages subis. Dès lors, la clause contestée n'a pas pour effet de faire supporter aux usagers des dommages qui ne leur seraient pas imputables et ne créée donc pas de déséquilibre significatif dans les relations contractuelles. Elle s'applique d'ailleurs à des situations transitoires, la commune ayant prévu de rendre ces installations conformes en déplaçant le branchement et le compteur sur le domaine public, comme il ressort des dispositions de l'article 3.4 du règlement.

 

En ce qui concerne la charge de la preuve :

18. Le droit applicable aux relations contractuelles nouées entre un service public industriel et commercial et un usager laisse à chacune des parties la charge de la preuve des fautes qu'elle impute à l'autre partie. Ainsi, en ouvrant la possibilité de mettre des réparations à la charge d'un abonné, à raison d'un branchement non conforme, au cas où aucune faute n'a été commise par le service sans mettre à la charge de celui-ci la preuve de l'absence de faute, la dernière phrase de l'article 3.1 du règlement du service de l'eau potable n'impose pas à l'abonné la charge de la preuve qui devrait incomber normalement à l'autre partie au contrat en application du droit applicable.

19. Par ailleurs, il résulte de la dernière phrase de l'article 3.1 ainsi que du B) de l'article 3.3 que, pour les travaux portant sur la partie privative du branchement, l'usager pourra faire appel à l'entreprise de son choix sous réserve d'informer le service des eaux du Grésivaudan de toutes les interventions qu'il réalise, de le prévenir de toute fuite d'eau, affouillement du sol ou de toute anomalie de fonctionnement et de ne pas manipuler le compteur qui est fourni, posé, vérifié, entretenu, relevé et renouvelé par le service des eaux du Grésivaudan sous sa responsabilité. Ces limites apparaissent justifiées par les caractéristiques particulières de ce service public et ne s'opposent pas à ce que l'usager fasse dresser des constats notamment sur l'origine des fuites survenues dans la partie privative du branchement. Aussi, malgré les contraintes imposées pour le bon fonctionnement du service public, l'usager dispose des moyens suffisants pour établir la preuve d'une faute éventuelle de l'exploitant ou d'un tiers.

 

En qui concerne l'exception d'illégalité :

20. Pour demander l'annulation du refus d'abroger de l'article 3.1 du règlement de service des eaux, le requérant ne peut utilement invoquer l'exception tirée de l'illégalité des articles 3.3 et 5.1 dont l'article 3.1 ne fait pas application et n'en constitue pas davantage la base légale.

21. Il résulte de tout ce qui précède que M. X. n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision par laquelle le président de la communauté de communes du pays du Grésivaudan a implicitement rejeté sa demande d'abrogation.

 

Sur les frais liés à l'instance :

22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes Le Grésivaudan, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. X. demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. X. une somme de 1.500 euros au titre des frais exposés par la communauté de communes Le Grésivaudan.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X. est rejetée.

Article 2 : M. X. versera à la communauté de communes Le Grésivaudan une somme de 1.500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. X. et à la communauté de communes Le Grésivaudan.

Le rapporteur,                      La présidente,                       La greffière,

J-L. A                                    D. Paquet                              A. Zanon