CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 31 août 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 9807
CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 31 août 2022 : RG n° 20/06389
Publication : Judilibre
Extraits : 1/ « Le présent litige est relatif à un crédit soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.
L'article L. 141-4 (R. 632-1 dans la nouvelle numérotation) du code de la consommation permet au juge de relever d'office tous les moyens tirés de l'application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par le premier juge, étant rappelé qu'en ce qu'il tend à faire rejeter comme non justifiée la demande en paiement du prêteur ayant consenti un crédit à la consommation, le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts opposé par l'emprunteur, ou soulevé d'office par le juge, constitue une défense au fond et n'est donc pas soumis à la prescription (article 72 du code de procédure civile et Avis n° 15014 du 18 septembre 2019 de la première chambre civile de la Cour de cassation). »
2/ « En matière de crédit à la consommation en particulier, il résulte des dispositions de l'article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation, que si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.
En l'espèce, le contrat de prêt contient une clause d'exigibilité anticipée en cas de défaut de paiement (article 2) - défaillance dans les remboursements) et une mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme de payer la somme de 1.868,79 euros précisant le délai de régularisation (de 30 jours) a bien été envoyée le 2 novembre 2018 ainsi qu'il en ressort de l'avis de recommandé produit (l'avis de réception envoyé à l'adresse figurant au contrat de prêt étant revenu pli avisé et non réclamé) de sorte qu'en l'absence de régularisation dans le délai, ainsi qu'il en ressort de l'historique de compte, la société Cofidis a pu régulièrement prononcer et notifier la déchéance du terme le 20 février 2019 étant précisé que la déchéance du terme a elle-même été notifiée avec une mise en demeure de payer le solde dû. »
3/ « En application de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. Il écarte d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat.
Ce texte confère au juge une simple possibilité de relever d'office toute violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation tandis qu'il lui impose d'écarter d'office une clause abusive. En revanche, il ne pose aucune restriction à l'exercice des prérogatives ainsi conférées au juge pour autant que l'irrégularité résulte des faits litigieux dont l'allégation comme la preuve incombent aux parties.
Par ailleurs, au regard de sa date de conclusion, le contrat signé le 26 juin 2013 est soumis aux dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 qui a porté ratification de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil. Il a été dit pour droit par la Cour de justice de l'Union européenne que les articles 8 et 23 de cette directive doivent être interprétés en ce sens qu'ils imposent à une juridiction nationale d'examiner d'office l'existence d'une violation de l'obligation précontractuelle du prêteur d'évaluer la solvabilité du consommateur, prévue à l'article 8 de cette directive et de tirer les conséquences qui découlent en droit national d'une violation de cette obligation, à condition que les sanctions satisfassent aux exigences dudit article 23.
Il s'en déduit que dans le rôle qui lui est conféré tant par la loi et le règlement internes que par le droit européen, le juge peut soulever d'office toute irrégularité heurtant une disposition d'ordre public et sanctionnée par la déchéance d'un droit qui fonde la demande d'une partie sans être enfermé dans quelque délai. »
4/ « Il appartient au créancier qui réclame des sommes au titre d'un crédit à la consommation de justifier du strict respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation, en produisant des documents contractuels conformes, ainsi que la copie des pièces nécessaires, et notamment, à peine de déchéance totale du droit aux intérêts (article L. 311-48 devenu L. 341-1 du code de la consommation) ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 4 CHAMBRE 9-A
ARRÊT DU 31 AOÛT 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 20/06389 (10 pages). N° Portalis 35L7-V-B7E-CBYCV. Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 décembre 2019 - Tribunal d'Instance de JUVISY-SUR-ORGE - RG n° 11-19-001375.
APPELANTE :
La société COFIDIS
société à directoire et conseil de surveillance agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège N° SIRET : XXX, [Adresse 3], [Adresse 3], [Localité 2], représentée par Maître Olivier HASCOET de la SELARL HAUSSMANN-KAINIC-HASCOET-HELAI, avocat au barreau de l'ESSONNE
INTIMÉE :
Madame X.
née le [Date naissance 1] à [Localité 8] (Pays), [Adresse 5], [Localité 7], DÉFAILLANTE
PARTIE INTERVENANTE :
L'association TUTÉLAIRE DE L'ESSONNE en qualité de tutrice de madame X.
[Adresse 4], [Localité 6], DÉFAILLANTE
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 7juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Christophe BACONNIER, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Christophe BACONNIER, Président de chambre, Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère.
Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE
ARRÊT : - DÉFAUT - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Selon offre préalable acceptée le 23 mars 2013, la société Cofidis a consenti à Mme X. un prêt personnel sous forme de rachat de crédits d'un montant en capital de 22.100 euros remboursable au taux nominal conventionnel de 10,68 % l'an (soit un TAEG de 11,22 % l'an) en 120 mensualités.
Par ordonnance en date du 11 février 2016, le juge du tribunal d'instance de Juvisy-sur-Orge a conféré force exécutoire aux mesures recommandées par la commission de surendettement des particuliers de l'Essonne selon tableau daté du 27 octobre 2015, à savoir la suspension de l'exigibilité de la créance pour une durée de 24 mois.
Des échéances étant demeurées impayées, la société Cofidis a fait assigner Mme X. devant le tribunal d'instance de Juvisy-sur-Orge, par acte d'huissier en date du 20 août 2019, en paiement des sommes suivantes, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- 24.233,04 euros, outre intérêts au taux contractuel annuel de 10,68 % à compter de la mise en demeure du 20 février 2019 outre la capitalisation des intérêts ;
- en cas de résolution judiciaire du contrat, 24.233,04 euros au taux légal à compter du jugement ;
- 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Devant le premier juge, la forclusion et la déchéance du droit aux intérêts contractuels ont été mises dans le débat d'office.
Par jugement réputé contradictoire du 31 décembre 2019 auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le tribunal d'instance de Juvisy-sur-Orge a rendu la décision suivante :
« - DIT la société Cofidis recevable en ses demandes ;
- PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts de la société Cofidis au titre du contrat de crédit conclu le 23 mars 2013 avec Mme X., à compter de la date de conclusion du prêt ;
- CONDAMNE Mme X. à payer à la société Cofidis la somme de 18.100,13 euros pour solde du contrat de crédit en date du 23 mars 2013, outre intérêts au taux légal à compter du 11 mars 2019 ;
- DÉBOUTE la société Cofidis de sa demande de capitalisation des intérêts ;
- DÉBOUTE la société Cofidis de ses autres demandes ;
- RAPPELLE qu'en cas de mise en place d'une procédure de surendettement, la créance sera remboursée selon les termes et conditions fixées dans la dite procédure ;
- DÉBOUTE la société Cofidis de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- CONDAMNE Mme X. aux entiers dépens de l'instance ;
DIT n'y avoir lieu à exécution provisoire ».
Le tribunal a principalement retenu que la déchéance du droit aux intérêts pour irrégularité du formalisme précontractuel doit être prononcée en raison du manquement du prêteur de deniers à ses obligations relatives à la vérification de solvabilité du débiteur. En outre, ne figure pas l'intégralité des hypothèses utilisées pour calculer le TAEG dans l'encadré informant l'emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit.
La société Cofidis a relevé appel de ce jugement par déclaration du 16 mai 2020.
[*]
Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 14 décembre 2020, la société Cofidis demande à la cour de :
« Voir déclarer la SA Cofidis recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,
Y faire droit,
Voir infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts, a rejeté les demandes de capitalisation des intérêts et d'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau sur ces points :
Voir condamner l'Association Tutélaire de l'Essonne (ATE), es qualité de tutrice de Mme X. à payer à la SA Cofidis la somme de 24 233,04 euros, avec intérêts au taux contractuel de 10,68 % l'an à compter de la mise en demeure du 20 février 2019,
Voir ordonner la capitalisation annuelle des intérêts par application de l'article 1343-2 du code civil,
Voir condamner l'Association Tutélaire de l'Essonne (ATE), es qualité de tutrice de Mme X. à payer à la SA Cofidis la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Voir condamner l'intimée aux entiers dépens ».
L'appelante soutient que :
- le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel est irrecevable en ce que le délai de prescription quinquennal est acquis, le moyen ne pouvant être soulevé que jusqu'au 23 mars 2018,
- le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel est mal fondé en ce qu'elle n'a pas violé ses obligations issues du code de la consommation, ne prévoyant aucunement de sanction en cas d'absence ou d'insuffisance du document propre au regroupement de crédits. En tout état de cause, elle verse aux débats le document d'information propre au regroupement de crédits,
- le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel est mal fondé relativement à l'absence des hypothèses de calcul du TAEG dans l'encadré informant l'emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
[*]
La déclaration d'appel et les conclusions d'appel de la société Cofidis ont été régulièrement signifiées à Mme X. par procès-verbal de remise à étude délivré le 9 juillet 2020 et à personne morale le 23 décembre 2020 pour l'association tutélaire de l'Essonne (ATE) désignée tutrice de Mme X. par ordonnance du 10 janvier 2019 ; Mme X. et l'association ATE n'ont pas constitué avocat.
[*]
L'ordonnance de clôture a été rendue à la date du 22 mars 2022.
L'affaire a été appelée à l'audience du 7 juin 2022.
Lors de l'audience, l'affaire a été examinée et mise en délibéré à la date du 31 août 2022 par mise à disposition de la décision au greffe (Art. 450 code de procédure civile).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Il résulte de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.
Sur la demande en paiement :
Le présent litige est relatif à un crédit soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.
L'article L. 141-4 (R. 632-1 dans la nouvelle numérotation) du code de la consommation permet au juge de relever d'office tous les moyens tirés de l'application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par le premier juge, étant rappelé qu'en ce qu'il tend à faire rejeter comme non justifiée la demande en paiement du prêteur ayant consenti un crédit à la consommation, le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts opposé par l'emprunteur, ou soulevé d'office par le juge, constitue une défense au fond et n'est donc pas soumis à la prescription (article 72 du code de procédure civile et Avis n° 15014 du 18 septembre 2019 de la première chambre civile de la Cour de cassation).
L'article L. 311-24 (L. 312-39 dans la nouvelle numérotation) du code de la consommation prévoit qu'en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application des articles 1152 et 1231 (dans leur rédaction alors applicable) du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret. L'article D. 311-6 (D. 312-16 dans la nouvelle numérotation) du même code précise que lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l'article L. 311-24 (L. 312-39 dans la nouvelle numérotation), il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.
Ce texte n'a toutefois vocation à être appliqué au titre du calcul des sommes dues qu'après vérification de l'absence de forclusion de la créance, de ce que le terme du contrat est bien échu et de l'absence de déchéance du droit aux intérêts conventionnels.
Sur la forclusion :
L'article L. 311-52 devenu R. 312-35 du code de la consommation dispose que les actions en paiement à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur dans le cadre d'un crédit à la consommation, doivent être engagées devant le tribunal d'instance dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.
La recevabilité de l'action de la société Cofidis au regard de la forclusion, vérifiée par le premier juge, ne fait pas l'objet de contestation.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a déclaré que la société Cofidis est recevable en son action en paiement.
Sur la déchéance du terme :
Aux termes de l'article 1315 (devenu l'article 1353) du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Par ailleurs, selon l'article 1134 (devenu l'article 1103) du code civil, les conventions légalement formées engagent leurs signataires et en application de l'article 1184 (devenu l'article 1224) du même code, lorsque l'emprunteur cesse de verser les mensualités stipulées, le prêteur est en droit de se prévaloir de la déchéance du terme et de demander le remboursement des fonds avancés soit en raison de l'existence d'une clause résolutoire soit en cas d'inexécution suffisamment grave. L'article 1184 (devenu l'article 1225) précise qu'en présence d'une clause résolutoire, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution.
En matière de crédit à la consommation en particulier, il résulte des dispositions de l'article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation, que si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.
En l'espèce, le contrat de prêt contient une clause d'exigibilité anticipée en cas de défaut de paiement (article 2) - défaillance dans les remboursements) et une mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme de payer la somme de 1.868,79 euros précisant le délai de régularisation (de 30 jours) a bien été envoyée le 2 novembre 2018 ainsi qu'il en ressort de l'avis de recommandé produit (l'avis de réception envoyé à l'adresse figurant au contrat de prêt étant revenu pli avisé et non réclamé) de sorte qu'en l'absence de régularisation dans le délai, ainsi qu'il en ressort de l'historique de compte, la société Cofidis a pu régulièrement prononcer et notifier la déchéance du terme le 20 février 2019 étant précisé que la déchéance du terme a elle-même été notifiée avec une mise en demeure de payer le solde dû.
Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels :
Sur la recevabilité du moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts :
En application de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. Il écarte d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat.
Ce texte confère au juge une simple possibilité de relever d'office toute violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation tandis qu'il lui impose d'écarter d'office une clause abusive. En revanche, il ne pose aucune restriction à l'exercice des prérogatives ainsi conférées au juge pour autant que l'irrégularité résulte des faits litigieux dont l'allégation comme la preuve incombent aux parties.
Par ailleurs, au regard de sa date de conclusion, le contrat signé le 26 juin 2013 est soumis aux dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 qui a porté ratification de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil. Il a été dit pour droit par la Cour de justice de l'Union européenne que les articles 8 et 23 de cette directive doivent être interprétés en ce sens qu'ils imposent à une juridiction nationale d'examiner d'office l'existence d'une violation de l'obligation précontractuelle du prêteur d'évaluer la solvabilité du consommateur, prévue à l'article 8 de cette directive et de tirer les conséquences qui découlent en droit national d'une violation de cette obligation, à condition que les sanctions satisfassent aux exigences dudit article 23.
Il s'en déduit que dans le rôle qui lui est conféré tant par la loi et le règlement internes que par le droit européen, le juge peut soulever d'office toute irrégularité heurtant une disposition d'ordre public et sanctionnée par la déchéance d'un droit qui fonde la demande d'une partie sans être enfermé dans quelque délai.
C'est donc à bon droit que le premier juge, en respectant le principe de contradiction, a examiné la conformité du contrat litigieux à l'article L. 311-12 devenu L. 312-21 ; la société Cofidis est donc mal fondée à invoquer la prescription du moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts.
Sur le fond de la déchéance du droit aux intérêts :
La société Cofidis produit :
- l'offre de contrat de crédit « prêt de regroupement de crédits »,
- la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées,
- la fiche de solvabilité,
- la notice d'assurance,
- la fiche d'explications et de mise en garde « regroupements de crédis »,
- le justificatif de consultation du fichier des incidents de paiement,
- le tableau d'amortissement,
- l'historique de prêt,
- un décompte de créance,
- les pièces justificatives d'identité, de domicile et de revenus de Mme X..
Il appartient au créancier qui réclame des sommes au titre d'un crédit à la consommation de justifier du strict respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation, en produisant des documents contractuels conformes, ainsi que la copie des pièces nécessaires, et notamment, à peine de déchéance totale du droit aux intérêts (article L. 311-48 devenu L. 341-1 du code de la consommation) :
- la fiche d'informations précontractuelles -FIPEN- (article L. 311-6 devenu L. 312-12),
- la notice d'assurance comportant les conditions générales (article L. 311-19 devenu L. 312-29),
- la justification de la consultation du fichier des incidents de paiements -FICP- (article L. 311-9 devenu L. 312-16),
- la justification, quel que soit le montant du crédit, de la vérification de la solvabilité de l'emprunteur au moyen d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur (article L. 311-9 devenu L. 312-16),
- la justification de la fourniture à l'emprunteur des explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière et attirant son attention sur les caractéristiques essentielles du ou des crédits proposés et sur les conséquences que ces crédits peuvent avoir sur sa situation financière, y compris en cas de défaut de paiement (article L. 311-8 devenu L. 312-14).
En l'espèce, à l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que la société Cofidis produit la FIPEN, la notice assurance, le justificatif de la consultation du FICP et suffisamment d'éléments de preuve pour justifier qu'il a effectué la vérification de la solvabilité de l'emprunteur exigée par la loi.
En outre, c'est à tort que le premier juge a retenu que la banque encourrait la déchéance du droit aux intérêts en raison du manquement du prêteur de deniers à ses obligations relatives au document d'information prévu dans le cadre d'un regroupement de crédits par l'article R. 313-12 devenu R. 314-19 du code de la consommation au motif que la déchéance du droit aux intérêts n'est pas encourue en cas de violation des obligations relatives au formalisme informatif en matière de regroupement de crédits, issues les articles R. 313-12 à R. 313-14 du code de la consommation applicables au contrat de regroupement de crédits litigieux ; en effet selon l'article L. 312-33 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, le prêteur peut être déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge, en cas de non-respect des différentes obligations visées par cet article, parmi lesquelles ne figurent pas les modalités d'information de l'emprunteur énumérées aux articles R. 313-12 à R. 313-14 du même code, relatifs au regroupement de crédits prévu à l'article L. 313-15, ces textes dans leur rédaction alors applicable.
Enfin c'est aussi à tort que le premier juge a retenu que la banque encourrait la déchéance du droit aux intérêts en raison du manquement du prêteur de deniers à ses obligations relatives aux mentions des hypothèses de calcul du TAEG dans l'encadré prévu par l'article L. 311-18 devenu L. 312-28 du code de la consommation au motif que cette obligation est inopérante pour les TAEG quand le taux est fixe.
Compte tenu de ce qui précède, la cour dit que la sanction de la déchéance du droit aux intérêts n'est pas encourue.
Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts, et statuant à nouveau de ce chef, la cour dit n'y avoir lieu à prononcer d'office la déchéance du droit aux intérêts.
Sur le montant de la créance :
La cour constate que la somme demandée dans les limites de 24.233,04 euros se décompose notamment en :
- 3.161,52 euros au titre des échéances échues impayées,
- 19.310,81 euros au titre du capital à échoir restant dû,
- 1.681,60 euros au titre de l'indemnité légale de 8 %.
En application de l'article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation et au regard du décompte de créance, du tableau d'amortissement et de l'historique de compte, il résulte qu'à la date de la déchéance du terme, il est dû à la société Cofidis :
- 3.161,52 euros au titre des échéances échues impayées, avec intérêts au taux contractuel à compter du 20 février 2019 portant uniquement sur la part en capital soit sur 1.709,20 euros,
- 19.310,81 euros au titre du capital à échoir restant dû, avec intérêts au taux contractuel à compter du 20 février 2019.
Le contrat de prêt prévoit une indemnité forfaitaire due au prêteur en cas de prononcé de la déchéance du terme égale à 8 % du capital dû à la date de la défaillance, soit la somme de 1 544,86 euros calculée comme suit : 8 % x 19.310,81 ; cependant, en application de l'article 1152 devenu 1231-5 du code civil, le juge peut réduire d'office le montant de la clause pénale par le juge si elle est manifestement excessive. En l'espèce, la clause pénale de 8 % du capital dû à la date de la défaillance contenue au contrat de prêt est manifestement excessive compte tenu de ce que des indemnités ont déjà été retenues lors de l'opération de regroupement des crédits, du préjudice réellement subi par la société Cofidis et du taux d'intérêt pratiqué ; elle sera donc réduite à la somme de 10 euros.
Mme X. est ainsi tenue dans les limites de la demande au paiement de la somme totale de 24.233,04 euros avec intérêts au taux contractuel de 10,68 % l'an portant sur la somme de 21.020,01 euros (1.709,20 + 19 310,81) à compter du 20 février 2019 et au taux légal pour le surplus.
Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a condamné Mme X. à payer à la société Cofidis la somme de 18.100,13 euros au titre du crédit impayé, et statuant à nouveau de ce chef, la cour condamne l'ATE en qualité de tutrice de Mme X. à payer à la société Cofidis la somme de 24.233,04 euros avec intérêts au taux contractuel de 10,68 % l'an portant sur la somme de 21.020,01 euros à compter du 20 février 2019 et au taux légal pour le surplus.
Sur la capitalisation des intérêts :
La capitalisation des intérêts, dit encore anatocisme, est prohibée concernant les crédits à la consommation, matière dans laquelle les sommes qui peuvent être réclamées sont strictement et limitativement énumérées. En effet, l'article L. 311-23 devenu L. 312-38 du code de la consommation rappelle qu'aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L. 311-24 et L. 311-25 devenus L. 312-39 et L. 312-40 ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles.
La demande de capitalisation sera par conséquent rejetée.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Cofidis de sa demande de capitalisation des intérêts.
Sur les autres demandes :
La cour condamne l'ATE en qualité de tutrice de Mme X. aux dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile.
Le jugement déféré est confirmé en ce qui concerne l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
Il n'apparaît pas inéquitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de laisser à la charge de la société Cofidis les frais irrépétibles de la procédure d'appel.
L'ensemble des autres demandes plus amples ou contraires formées en demande ou en défense est rejeté, leur rejet découlant des motifs amplement développés dans tout l'arrêt.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort, mis à disposition au greffe,
Infirme le jugement mais seulement en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts et condamné Mme X. à payer à la société Cofidis la somme de 18.100,13 euros au titre du crédit impayé ;
Statuant à nouveau de ces chefs, et ajoutant,
Dit que la société Cofidis est donc mal fondée à invoquer la prescription du moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts ;
Dit n'y avoir lieu à prononcer d'office la déchéance du droit aux intérêts ;
Condamne l'association tutélaire de l'Essonne en qualité de tutrice de Mme X. à payer à la société Cofidis la somme de 24.233,04 euros avec intérêts au taux contractuel de 10,68 % l'an portant sur la somme de 21.020,01 euros à compter du 20 février 2019 et au taux légal pour le surplus ;
Confirme le jugement pour le surplus dans les limites de l'appel ;
Déboute la société Cofidis de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette le surplus des demandes ;
Condamne l'association tutélaire de l'Essonne es qualité de tutrice de Mme X. aux dépens.
La greffière Le président
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