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CA BORDEAUX (5e ch.), 23 septembre 2004

Nature : Décision
Titre : CA BORDEAUX (5e ch.), 23 septembre 2004
Pays : France
Juridiction : Bordeaux (CA), 5e ch.
Demande : 03/02361
Date : 23/09/2004
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 28/04/2003
Décision antérieure : TI BORDEAUX, 14 février 2003
Décision antérieure :
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1038

CA BORDEAUX (5e ch.), 23 septembre 2004 : RG n° 03/02361

Publication : Juris-Data n° 274658

 

Extraits : 1/ « La clause dont la compagnie d'assurance MACIF demande l'application se trouve dans les conditions générales. Monsieur X. ne saurait soutenir que cette clause ne lui est pas opposable, dans la mesure où précisément les conclusions particulières dont il se prévaut, complètent les conditions générales, en effet, les conditions particulières figurent sur un document individuel, alors que les conditions générales font l'objet d'un imprimé beaucoup plus complet, remis à l'assuré qui doit s'y référer pour connaître les modalités pratiques du contrat (résiliation, exclusions etc.). En l'espèce, les conclusions particulières remises à Monsieur X. n'excluant pas l'application de la clause prévue à l'article 10-1 des conditions générales, celle-ci s'applique. »

2/ « Celle-ci stipule qu'en cas de découverte du véhicule, si ce dernier ne porte pas de traces d'effraction, l'assurance n'indemnise pas son assuré, et en cas de paiement demande à ce dernier de la rembourser. Cette clause réduit notablement la portée de l'assurance souscrite, notamment, par le fait qu'elle n'est pas limitée dans le temps. En effet, plusieurs années après un vol, un assuré peut se voir contraint de rembourser à son assureur le montant de son indemnisation, alors, même, que si le véhicule est retrouvé plusieurs années après sans porter des traces d'effraction. Ce n'est pas pour autant qu'au moment du vol cette effraction n'a pas eu lieu, qu'il est possible en effet que toute trace ait été effacée pour permettre une utilisation plus facile du véhicule. […]. En outre, comme le note le premier juge avec pertinence, cette clause tend à faire échec au délai de prescription, puisque précisément, il ne court dans ce cas qu'à compter de la découverte du véhicule. Une telle clause laisse l'assuré dans une incertitude juridique totale, alors même que le délai de prescription est stipulé pour éviter cette éventualité. En outre, soutenir comme le fait la compagnie d'assurance MACIF, qu'annuler cette clause entraînerait un déséquilibre à son détriment, n’est pas un argument sérieux. […]. L'annulation de cette clause du fait de sa non limite dans le temps, ne déséquilibre pas le contrat, puisque l'assureur garde toujours dans la limite de la prescription pénale, la possibilité de porter plainte pour escroquerie à l'assurance. La Cour comme le tribunal juge donc que cette clause est abusive et considère que celle-ci doit être réputée comme non écrite. »

 

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CINQUIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2004

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de rôle : 03/02361. Nature de la décision : AU FOND. [minute page 2] Prononcé en audience publique, Le 23 septembre 2004, Par Madame Josiane COLL, Conseiller, en présence de Monsieur Hervé GOUDOT, Greffier,

La COUR d'APPEL de BORDEAUX, CINQUIÈME CHAMBRE, a, dans l'affaire opposant :

 

La Compagnie d'assurances MACIF

représentée par la SCP ARSENE-HENRY ET LANCON, avoués à la Cour, assistée par Maître GARRAUD, loco Maître Benoît DEFFIEUX, avocats au Barreau de BORDEAUX. Appelante d'un jugement rendu le 14 février 2003 par le Tribunal d'Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel en date du 28 avril 2003,

 

à :

Monsieur X.,

[adresse] représenté par la SCP TOUTON-PINEAU ET FIGEROU, avoués à la Cour, assisté par Maître GAUTHIER-DELMAS, avocat au Barreau de BORDEAUX, Intimé,

 

Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause a été débattue en audience publique, le 1er juin 2004 devant : Monsieur Patrick MAIRÉ, Conseiller magistrat chargé du rapport tenant seul l'audience pour entendre les plaidoiries, les Avocats ne s'y étant pas opposés, en application de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, assisté de Hervé GOUDOT,

[minute page 3] Que Monsieur le Conseiller en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, celle-ci étant composée de : Monsieur Patrick GABORIAU, Président, Madame Josiane COLL, Conseiller, Monsieur Patrick MAIRÉ, Conseiller,

Et qu'il en a été délibéré par les Magistrats du Siège ci-dessus désignés.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement du Tribunal d'Instance de BORDEAUX en date du 14 février 2003.

Vu l'acte d'appel de la compagnie d'assurance MACIF en date du 28 avril 2003.

Vu les conclusions de la compagnie d'assurance MACIF, appelante en date du 26 novembre 2003.

Vu les conclusions de Monsieur X., intimé en date du 14 novembre 2003.

La procédure a été clôturée par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 18 mai 2004.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI :

La compagnie d'assurance MACIF a fait appel du jugement qui la déboutait de sa demande à l'encontre de Monsieur X.

Ce dernier, assuré auprès de la compagnie d'assurance MACIF, se faisait dérober son véhicule le 1er  septembre 1998, la compagnie d'assurance MACIF l'indemnisait.

Le 17 novembre 2000, le véhicule était retrouvé. La compagnie d'assurance MACIF demande par application de son contrat le remboursement des sommes versées à son assuré, le véhicule ne portant pas de traces d'effraction.

[minute page 4]

Sur la prescription :

Selon l'article L. 114-1 du code des assurances, les actions découlant du contrat d'assurances sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui a donné naissance. En l'espèce, l'événement qui doit être retenu, est non pas le vol du véhicule, mais la date de découverte puisque la compagnie d'assurance MACIF aux termes du contrat s'estime en droit de demander le remboursement des sommes versées à compter de cette découverte, si elle estime qu'il n'y a pas eu effraction. Le point de départ du délai de prescription était, donc, le 17 novembre 2000. Les parties ayant volontairement comparu à l'audience du tribunal d'instance le 9 avril 2002, la prescription n'est pas acquise.

 

Sur l'application des clauses particulières :

La clause dont la compagnie d'assurance MACIF demande l'application se trouve dans les conditions générales. Monsieur X. ne saurait soutenir que cette clause ne lui est pas opposable, dans la mesure où précisément les conclusions particulières dont il se prévaut, complètent les conditions générales, en effet, les conditions particulières figurent sur un document individuel, alors que les conditions générales font l'objet d'un imprimé beaucoup plus complet, remis à l'assuré qui doit s'y référer pour connaître les modalités pratiques du contrat (résiliation, exclusions etc.).

En l'espèce, les conclusions particulières remises à Monsieur X. n'excluant pas l'application de la clause prévue à l'article 10-1 des conditions générales, celle-ci s'applique.

 

Sur l'annulation de la clause :

Celle-ci stipule qu'en cas de découverte du véhicule, si ce dernier ne porte pas de traces d'effraction, l'assurance n'indemnise pas son assuré, et en cas de paiement demande à ce dernier de la rembourser.

Cette clause réduit notablement la portée de l'assurance souscrite, notamment, par le fait qu'elle n'est pas limitée dans le temps. En effet, plusieurs années après un vol, un assuré peut se voir contraint de rembourser à son assureur le montant de son indemnisation, alors, même, que si le véhicule est retrouvé plusieurs années après sans porter des traces d'effraction.

[minute page 5] Ce n'est pas pour autant qu'au moment du vol cette effraction n'a pas eu lieu, qu'il est possible en effet que toute trace ait été effacée pour permettre une utilisation plus facile du véhicule. En l’espèce, la cour constate que si le véhicule de Monsieur X. ne portait pas de traces visibles d'effraction au volant, son numéro de moteur avait été modifié et le véhicule portait des fausses plaques.

En outre, comme le note le premier juge avec pertinence, cette clause tend à faire échec au délai de prescription, puisque précisément, il ne court dans ce cas qu'à compter de la découverte du véhicule.

Une telle clause laisse l'assuré dans une incertitude juridique totale, alors même que le délai de prescription est stipulé pour éviter cette éventualité.

En outre, soutenir comme le fait la compagnie d'assurance MACIF, qu'annuler cette clause entraînerait un déséquilibre à son détriment, n’est pas un argument sérieux. D'une part, la grande majorité des véhicules volés sont retrouvés dans des délais assez brefs, ce qui permet à la compagnie d'assurance de vérifier les conditions du vol et d'autre part, pour ceux qui comme celui de Monsieur X. retrouvés longtemps après, exiger des traces d'effraction revient à priver l'assuré des bénéfices du contrat pour les raisons expliquées ci-dessus sur les conditions d'utilisation des véhicules volés. Au demeurant, il convient de rappeler que cette clause a pour but à la fois d'attirer l'attention des conducteurs imprudents sur la nécessité de ne pas laisser sur la voie publique un véhicule ouvert avec les clés sur le tableau de bord (hypothèse assez rare) et surtout de se garantir contre une éventuelle escroquerie à l'assurance.

L'annulation de cette clause du fait de sa non limite dans le temps, ne déséquilibre pas le contrat, puisque l'assureur garde toujours dans la limite de la prescription pénale, la possibilité de porter plainte pour escroquerie à l'assurance.

La Cour comme le tribunal juge donc que cette clause est abusive et considère que celle-ci doit être réputée comme non écrite.

Le jugement sera confirmé dans toutes ses dispositions.

L'équité permet de faire droit à la demande de Monsieur X. au titre de l'article du NCPC pour un montant de 1.200 €.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 6] PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme dans toutes ses dispositions le jugement du Tribunal d'Instance de BORDEAUX en date du 14 février 2003.

Condamne la Compagnie d'assurance MACIF à payer à Monsieur X. la somme de MILLE DEUX CENTS EUROS (1.200 €) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Condamne la Compagnie d'Assurances MACIF aux entiers dépens avec application des dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick GABORIAU, Président et par Monsieur Hervé GOUDOT, Greffier présent lors du prononcé.