CA PARIS (8e ch. sect. A), 19 février 2009
CERCLAB - DOCUMENT N° 1653
CA PARIS (8e ch. sect. A), 19 février 2009 : RG n° 07/17213 ; arrêt n° 104
Publication : Juris-Data n° 2009-002388
Extraits : 1/ « Considérant que l'article L. 132-1 du Code de la Consommation prévoit que « […] » ; Considérant que, si le contractant exerce une profession, il est cependant protégé lorsque l'objet du contrat n'a pas un rapport direct avec son activité professionnelle ; Considérant que M. X. exerce la profession d'exploitant agricole et il n'est pas indiqué en quoi la location d'un piqueur perforateur électrique et un nettoyeur haute pression a un rapport direct avec cette profession ; qu’en conséquence, M. X. doit être protégé comme un consommateur ordinaire ».
2/ « Considérant que M. X. estime abusive les clauses du contrat ayant pour objet de permettre aux professionnels de proroger automatiquement un contrat à durée déterminée en l'absence d'expression contraire du consommateur ; Considérant qu'en l'espèce, l'article 4 du contrat prévoit : « la durée de la location par du jour de la mise à disposition que la totalité du matériel loué au locataire dans les entrepôts du loueur ou tout autre lieu défini aux conditions particulières. Elle prend fin le jour où la totalité du matériel loué est restitué au loueur dans les conditions définies à l'article 12-2 » [N.B. première phrase conforme à la minute] mais ajoute : « la durée prévisible de la location à partir d'une date initiale peut être exprimée en toutes unités de temps. Toute modification de cette durée fera l'objet d'un nouvel accord entre les parties. La location peut également être conclue pour une durée indéterminée... » ; que le contrat prévoit une date de retour prévu, mais qui est la même date que celle du contrat ce qui fait du contrat un contrat à durée indéterminée ; que dès lors, il n'y a pas lieu de dire abusive et donc non écrite la clause de durée du contrat ;
Considérant que M. X. fait également valoir que les dispositions du contrat ne sont ni claires ni lisibles ; qu'il n'est pas contesté d'une part que M. X. avait déjà utilisé les services de la société LOXAM ; que d'autre part, M. X. se borne à affirmer que les dispositions ne sont pas claires et qu'il faut une loupe pour les déchiffrer ; mais considérant que la taille des lettres n'est précisée qu'en ce qui concerne les contrats de crédit ; qu'il n'en est pas de même pour les contrats de location ; que les termes du contrat ne sont pas incompréhensibles pour un consommateur moyen ;
Considérant qu'il est en tout cas établi que M. X. n'a pas prévenu la société LOXAM de la disparition des biens loués à tout le moins lorsqu'il a déposé une plainte pour vol ; qu'il ne saurait en conséquence reprocher à la société LOXAM d'avoir continué à exécuter le contrat alors qu'il est seul à l'origine de son dommage ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
HUITIÈME CHAMBRE SECTION A
ARRÊT DU 19 FÉVRIER 2009
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Numéro d'inscription au répertoire général : R.G. n° 07/17213. Arrêt n° 104 (5 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 9 mai 2007 -Tribunal d'Instance de MELUN - R.G. n° 11-06-000875.
APPELANT :
Monsieur X.
représenté par la SCP LAMARCHE-BEQUET - REGNIER-AUBERT - REGNIER - MOISAN, avoués à la Cour, assisté de Maître Guy PAMART, avocat au barreau de MELUN (dépôt de dossier)
INTIMÉE :
Société LOXAM prise en la personne de son représentant légal
[adresse], représentée par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avoués à la cour (dépôt de dossier)
COMPOSITION DE LA COUR : Après rapport oral de Madame Catherine BONNAN-GARÇON, l'affaire a été débattue le 6 janvier 2009, en audience publique, devant la cour composée de : Madame Catherine BONNAN-GARÇON, conseillère faisant fonction de présidente, Madame Viviane GRAEVE, conseillère, Madame Catherine BOUSCANT, conseillère, qui en ont délibéré
Greffier : lors des débats et du prononcé de l'arrêt Mademoiselle Hélène BODY
ARRÊT : CONTRADICTOIRE - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. [minute page 2] - signé par Madame Catherine BONNAN-GARÇON, conseillère faisant fonction de présidente, et par Mademoiselle Hélène BODY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
M. X. a loué auprès de la société LOXAM le 21 mai 2004 un nettoyeur haute pression eau froide (contrat N° XX) et le 30 juin 2004 un piqueur-perforateur (contrat N° YY).
Le 4 janvier 2005, un prélèvement a été impayé et la société LOXAM a invité M. X. à régulariser la situation.
Par télécopie du 8 février 2005, M. X. a indiqué à la société LOXAM que le matériel a été volé en juillet 2004.
La société LOXAM a fait assigner M. X. devant le tribunal d'instance de Melun en paiement.
Par jugement du 9 mai 2007, le tribunal d'instance a condamné M. X. à payer à la société LOXAM la somme de 5.130,57 € avec intérêts au taux légal à compter du 12 avril 2006 et 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
M. X. a relevé appel de cette décision.
PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Vu les conclusions de l'appelant en date du 18 novembre 2008 tendant à l'infirmation du jugement, à la résiliation des deux contrats litigieux, à la restitution des sommes par lui réglées après déduction de la valeur du matériel neuf soit 12.993 € subsidiairement à la résolution du contrat, à la restitution par la société LOXAM de la somme indûment prélevée après le vol (10.175 €) diminuée de la valeur du matériel (3.000 €) avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2005 et à la condamnation de la société LOXAM à lui payer 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions de la société LOXAM en date du 10 avril 2008 tendant au débouté de M. X. de l'ensemble de ses demandes, à la confirmation du jugement déféré, à la condamnation de M. X. à lui payer 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
SUR CE, LA COUR :
Considérant que M. X. fait valoir :
- qu'il a été victime d'un vol du matériel loué le 23 juillet 2004 mais qu'il [ne] s'en est rendu compte qu'à la mi-août et qu'il a à la fois avisé verbalement la société LOXAM et déposé une plainte le 17 août,
- qu'il ne s'est aperçu qu'au mois de novembre 2004 que la société LOXAM continuait à lui prélever 2.625,67 € chaque mois,
- que le dépôt de plainte a été communiqué en février 2005 à la société LOXAM, qu'en dépit de l'appel régularisé le 10 octobre 2007, la société LOXAM a mis en œuvre le recouvrement forcé de la somme de 5.297,91 €,
- que le contrat est léonin en ce que les sommes réclamées sont supérieures à la valeur à l'état neuf du matériel,
- que sont abusives les clauses ayant pour objet de permettre aux professionnels [minute page 3] de proroger automatiquement le contrat à durée déterminée en l'absence d'expression contraire du consommateur,
- que ces clauses doivent être rédigées de façon claire et compréhensible,
- que tel n'est pas le cas en l'espèce puisque les clauses figurant au dos du contrat de la société LOXAM sont particulièrement illisibles,
- que les dispositions de L. 132-1 du code de la consommation ne protègent pas le consommateur professionnel dans un contrat ayant un rapport direct avec son activité professionnelle,
- qu'en l'espèce, la société LOXAM se contente d'affirmer que la location d'un piqueur perforateur électrique et un nettoyeur haute pression a un rapport direct avec son activité professionnelle,
- que la location de ces deux machines résulte d'un besoin conjoncturel lié à un chantier complètement indépendant de son activité d'entreprise,
- que les contrats de location de matériel n'étaient nullement à durée indéterminée puisqu'y figurait la date de retour prévue,
- qu'il demande la résolution du contrat et la restitution des sommes réglées,
- qu'à titre subsidiaire, le préjudice effectif de la société est bien inférieur à la somme réclamée,
- que, de surcroît, la société LOXAM bénéficie du contrat d'assurance souscrit par lui dans le cadre du contrat de location ;
Considérant que la société LOXAM fait valoir quant à elle :
- qu'elle a fait procéder le 4 décembre 2007 à une saisie attribution sur les comptes détenus par le débiteur au crédit mutuel de [ville A.],
- qu'un certificat de non-contestation lui a été délivré le 14 janvier 2008,
- qu'à réception des fonds saisis attribués il a été procédé à la mainlevée de la saisie,
- que les articles L. 132-1 et L. 133-2 du code de la consommation ne sont pas applicables aux professionnels lorsque le contrat qu'ils ont souscrit a rapport direct avec l'exercice de leur activité professionnelle,
- qu'en l'espèce, le locataire est exploitant agricole et loue régulièrement du matériel à la société LOXAM,
- qu'en tout état de cause, si doivent être réputées abusives les clauses ayant pour objet de permettre aux professionnels de proroger automatiquement un contrat à durée déterminée, il n'en est pas de même lorsque le contrat a été conclu comme en l'espèce pour une durée indéterminée et pouvait prendre fin sur simple demande du locataire,
- que la réglementation n'exige pas que les clauses des contrats soient rédigées en caractères apparents ou très apparents mais simplement en caractères lisibles ce qui est le cas des conditions générales de location,
- que la lésion ne vicie les conventions que dans certains contrats ou à l'égard de certaines personnes qui sont strictement énumérées,
- que le contrat n'a en l'espèce aucune raison d'être rétroactivement anéanti,
- qu'il ne saurait non plus être résilié à compter du 1er août 2004, date présumée du vol,
- que l'article 10-3 des conditions générales LOXAM prévoit le cas de vol de l'objet du contrat et qu'en ce cas le contrat prend fin le jour de la réception de la déclaration de sinistre,
- qu'en l'espèce, alors que le vol a été constaté dès le 23 juillet 2004, M. X. a attendu le 17 août 2004 pour porter plainte,
- qu'au demeurant il n'a pas informé la société LOXAM du vol et n'a pas non plus réagi lorsque le montant de location a continué à lui être prélevé postérieurement au 31 juillet 2004,
- que la société LOXAM n'a été informée du dépôt de plainte que par télécopie du 8 février 2005 reçue le 9 février ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 4] Considérant que l'article L. 132-1 du Code de la Consommation prévoit que « dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat » ;
Considérant que, si le contractant exerce une profession, il est cependant protégé lorsque l'objet du contrat n'a pas un rapport direct avec son activité professionnelle ;
Considérant que M. X. exerce la profession d'exploitant agricole et il n'est pas indiqué en quoi la location d'un piqueur perforateur électrique et un nettoyeur haute pression a un rapport direct avec cette profession ; qu’en conséquence, M. X. doit être protégé comme un consommateur ordinaire ;
Considérant que M. X. estime abusive les clauses du contrat ayant pour objet de permettre aux professionnels de proroger automatiquement un contrat à durée déterminée en l'absence d'expression contraire du consommateur ;
Considérant qu'en l'espèce, l'article 4 du contrat prévoit : « la durée de la location par du jour de la mise à disposition que la totalité du matériel loué au locataire dans les entrepôts du loueur ou tout autre lieu défini aux conditions particulières. Elle prend fin le jour où la totalité du matériel loué est restitué au loueur dans les conditions définies à l'article 12-2 » [N.B. première phrase conforme à la minute] mais ajoute : « la durée prévisible de la location à partir d'une date initiale peut être exprimée en toutes unités de temps. Toute modification de cette durée fera l'objet d'un nouvel accord entre les parties. La location peut également être conclue pour une durée indéterminée... » ; que le contrat prévoit une date de retour prévu, mais qui est la même date que celle du contrat ce qui fait du contrat un contrat à durée indéterminée ; que dès lors, il n'y a pas lieu de dire abusive et donc non écrite la clause de durée du contrat ;
Considérant que M. X. fait également valoir que les dispositions du contrat ne sont ni claires ni lisibles ; qu'il n'est pas contesté d'une part que M. X. avait déjà utilisé les services de la société LOXAM ; que d'autre part, M. X. se borne à affirmer que les dispositions ne sont pas claires et qu'il faut une loupe pour les déchiffrer ; mais considérant que la taille des lettres n'est précisée qu'en ce qui concerne les contrats de crédit ; qu'il n'en est pas de même pour les contrats de location ; que les termes du contrat ne sont pas incompréhensibles pour un consommateur moyen ;
Considérant qu'il est en tout cas établi que M. X. n'a pas prévenu la société LOXAM de la disparition des biens loués à tout le moins lorsqu'il a déposé une plainte pour vol ; qu'il ne saurait en conséquence reprocher à la société LOXAM d'avoir continué à exécuter le contrat alors qu'il est seul à l'origine de son dommage ;
Considérant qu'ainsi que l'a retenu le premier juge par des motifs pertinents que la cour adopte, le caractère prétendument léonin du contrat n'est nullement prouvé ; qu'il y a lieu en conséquence, contentant la décision déférée, de débouter M. X. de l'ensemble de ses demandes, de le condamner à payer à la société LOXAM la somme de 5.130,57 € avec intérêts au taux légal à compter du 12 avril 2006 ;
Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :
Considérant que les circonstances de la cause et l'équité justifient l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; qu'il convient de confirmer le jugement déféré de ce chef et, y ajoutant, de condamner M. X. au paiement d'une somme supplémentaire de 800 € de ce chef ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 5] PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement entrepris ;
Y ajoutant,
Condamne M. X. à payer à la société LOXAM la somme de 800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. X. aux dépens et dit qu'ils pourront être recouvrés en application de l'article 699 du code de procédure civile ;
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
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