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CASS. CIV. 1re, 7 juillet 1998

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 7 juillet 1998
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 96-17279
Date : 7/07/1998
Nature de la décision : Rejet
Mode de publication : Bulletins officiels
Décision antérieure : CA PARIS (7e ch.), 3 avril 1996
Numéro de la décision : 1268
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2058

CASS. CIV. 1re, 7 juillet 1998 : pourvoi n° 96-17279 ; arrêt n° 1268

Publication : Bull. civ. I, n° 240 ; D. Affaires 1998, 1309, note V. A.-R. ; Contr. Conc. consom. 1998, n° 120, note Raymond  D. 1999. Somm. 111, obs. D. Mazeaud ; Defrénois 1998. 1417, obs. D. Mazeaud

 

Extrait : « que la cour d’appel, après avoir rappelé la nécessité d’un déséquilibre des droits et obligations des parties, a estimé, d’abord, que les clauses précisaient clairement aux assurés leur obligation de faire la preuve de l’évènement garanti et des conditions posées le cas échéant pour permettre la mise en jeu de la garantie ; qu’elle a relevé ensuite, d’une part, à propos de l’une des polices en cause, que la clause incriminée emportait une extension du champ de la garantie, plus protectrice de l’assuré, dès lors qu’il était en mesure, en l’absence d’effraction, d’établir le vol par escalade, par usage de fausses clés ou par introduction clandestine, d’autre part, que, contrairement aux allégations de l’UFC, la preuve ainsi mise à la charge de l’assuré, dont l’arrêt énonce différents moyens de la rapporter, n’était nullement impossible ; qu’enfin, la cour d’appel a relevé que l’appréciation par l’assureur du risque de vol serait complètement faussée si l’assuré, n’étant plus tenu de rapporter la preuve des conditions dans lesquelles le vol s’est réalisé, pouvait prétendre au bénéfice d’une assurance vol tous risques, tout en réglant une prime très inférieure due au titre d’un contrat multirisque habitation ; que la cour d’appel a ainsi justement estimé que les clauses critiquées n’étaient pas abusives ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 7 JUILLET 1998

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 96-17279. Arrêt n° 1268.

DEMANDEUR à la cassation : Union Fédérale des consommateurs QUE CHOISIR

DÉFENDEUR à la cassation : 1°/ Société Préservatrice Foncière assurances PFA 2°/ Société Les assurances Mutuelles de France Groupe Azur

Président : M. Lemontey. Rapporteur : M. Aubert. Avocat général : M. Sainte-Rose. Avocats : la SCP Vier et Barthélemy, la SCP Coutard et Mayer, M. Parmentier.

 

Sur les trois moyens réunis, pris en leurs différentes branches :

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu, selon les énonciations des juges du fond (Paris, 3 avril 1996), que l’association de consommateurs Union fédérale des consommateurs « Que Choisir » (UFC) a assigné la société Préservatrice foncière assurances (PFA) et la société Assurance mutuelle de France-Groupe Azur (Groupe Azur) aux fins de faire déclarer abusives les clauses stipulées dans leurs contrats d’assurance multirisque habitation, garantissant le vol et obligeant l’assuré, lorsque le vol n’a pas eu lieu par effraction, à faire la preuve de ce qu’il a été commis par escalade, usage de fausses clés ou introduction clandestine ; que l’arrêt attaqué l’a déboutée de ses demandes ;

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu’aux termes de l’article L. 132-1, alinéa 1er, du Code de la consommation, pris dans sa rédaction résultant de la loi du 1er février 1995, sont abusives, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professsionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat ; que la cour d’appel, après avoir rappelé la nécessité d’un déséquilibre des droits et obligations des parties, a estimé, d’abord, que les clauses précisaient clairement aux assurés leur obligation de faire la preuve de l’évènement garanti et des conditions posées le cas échéant pour permettre la mise en jeu de la garantie ; qu’elle a relevé ensuite, d’une part, à propos de l’une des polices en cause, que la clause incriminée emportait une extension du champ de la garantie, plus protectrice de l’assuré, dès lors qu’il était en mesure, en l’absence d’effraction, d’établir le vol par escalade, par usage de fausses clés ou par introduction clandestine, d’autre part, que, contrairement aux allégations de l’UFC, la preuve ainsi mise à la charge de l’assuré, dont l’arrêt énonce différents moyens de la rapporter, n’était nullement impossible ; qu’enfin, la cour d’appel a relevé que l’appréciation par l’assureur du risque de vol serait complètement faussée si l’assuré, n’étant plus tenu de rapporter la preuve des conditions dans lesquelles le vol s’est réalisé, pouvait prétendre au bénéfice d’une assurance vol tous risques, tout en réglant une prime très inférieure due au titre d’un contrat multirisque habitation ; que la cour d’appel a ainsi justement estimé que les clauses critiquées n’étaient pas abusives ; qu’il s’ensuit que le premier moyen, en sa cinquième branche, le deuxième moyen en sa deuxième branche et le troisième moyen en sa seconde branche, ne sont pas fondés, et que les autres branches de ces trois moyens sont de ce fait inopérantes comme critiquant des motifs surabondants ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyens produits par la SCP Vier et Barthélémy, avocat aux Conseils pour l'Union fédérale des consommateurs Que Choisir.

 

PREMIER MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN     (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR rejeté la demande de l'Association "U.F.C. QUE CHOISIR" aux fins de faire déclarer abusives les clauses garantissant le vol figurant dans les contrats d'assurance de la société P.F.A. Assurances et de la Société Assurances Mutuelles de France-GROUPE AZUR ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QUE c'est l'ensemble du contrat qui est susceptible de tomber sous le coup de l'intention d'abus de puissance économique de la part de l'assureur s'il génère un déséquilibre entre les droits et obligations des parties découlant du contrat et non l'une de ses clauses, qui ne pourrait être annulée que si elle était rédigée de manière à induire l'assuré en erreur sur la nature et l'étendue de sa garantie ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QUE D'UNE PART il résulte de l'article L. 132-1 du code de la consommation dans la rédaction issue de la loi du 1er février 1995 qu'une seule ou plusieurs clauses d'un contrat peuvent revêtir un caractère abusif et que ledit contrat reste applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s'il peut subsister sans celles-ci ; qu'en n'envisageant tout au contraire que l'annulation de l'ensemble du contrat, la Cour d'appel a violé par refus d'application l'article L. 132-1 nouveau du code de la consommation  ;

ALORS QUE D'AUTRE PART il résulte de l'article L. 132-1 du code de la consommation dans la rédaction issue de la loi du 1er février 1995 que l'appréciation du caractère abusif des clauses ne porte pas sur l'objet principal du contrat ; qu'en affirmant néanmoins qu'une clause du contrat ne pourrait être annulée que si elle était rédigée de manière à induire l'assuré en erreur sur la nature et l'étendue de sa garantie, la Cour d'appel a violé de nouveau l'article L. 132-1 nouveau du Code de la consommation  ;

ALORS QUE DE TROISIEME PART, il résulte de l'article L. 132-1 du Code de la consommation dans la rédaction issue de la loi du 1er février 1995 que ce texte abandonne toute référence à la notion d'"abus de puissance économique" visée dans la rédaction antérieure de l'article L. 132-1 du code de la consommation  ; qu'en se référant néanmoins à la condition d'"interdiction d'abus de puissance économique" abandonnée par la loi nouvelle, la Cour d'appel a violé derechef par fausse interprétation l'article L. 132-1 du Code de la consommation  ;

ALORS QU'ENFIN il résulte de l'article L. 132-1 nouveau du Code de la consommation qu'est abusive la clause qui a pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ; qu'en exigeant par suite que le contrat "génère" un tel déséquilibre, la Cour d'appel a ajouté à la loi une condition qui n'y figure pas, le législateur ayant qualifié d'abusive la clause ayant seulement pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif ; qu'elle a par là encore violé l'article L. 132-1 du Code de la consommation .

 

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN     (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de l'Association "UFC QUE CHOISIR" aux fins de faire déclarer abusives les clauses garantissant le vol figurant dans les contrats d'assurance de la société P.F.A. Assurances et de l'Assurance Mutuelle de France-GROUPE AZUR ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1.- AUX MOTIFS QUE l'article 7-1 des conditions générales de la police Multirisques Habitation Multichoix de la Compagnie P.F.A. définit clairement la garantie vol de base et que de même l'article 49 de la convention spéciale du contrat AZUR Habitation Prestige est sans ambiguïté ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QU'il résulte de la combinaison des articles L. 132-1 et L. 133-2 du code de la consommation issus de la loi du 1er février 1995 que le législateur ne subordonne pas le caractère abusif des clauses du contrat à la condition qu'elles soient rédigées de manière ambiguë et incompréhensible ; qu'en se fondant néanmoins sur la rédaction claire et sans ambiguïté des clauses litigieuses pour écarter leur caractère abusif, la Cour d'appel a violé par fausse application les articles L. 132-1 et L. 133-2 nouveaux du code de la consommation  ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

2.- AUX MOTIFS QUE ces clauses ne sont non plus abusives ni équivoques en ce qu'elles rappellent qu'il appartient à l'assuré de faire la preuve de la survenance de l'événement garanti, voire des conditions requises par la police pour permettre la mise en jeu de la garantie-vol et que cette preuve n'est nullement impossible ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QUE D'UNE PART la Cour d'appel s'est totalement abstenue de répondre au moyen soulevé par l'U.F.C. QUE CHOISIR dans ses conclusions d'appel pris de ce que "la rédaction de ces contrats fait croire au consommateur que le vol est garanti même en l'absence d'effraction (conclusions d'appel p. 3, alinéa 3), violant ainsi l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

ALORS QUE D'AUTRE PART il résulte de la recommandation de synthèse du 23 mars 1990 de la Commission française des clauses abusives reprise dans "l'annexe aux code de la consommation" que les clauses qui ont pour effet d'imposer au consommateur une charge de preuve qui en vertu du droit applicable devrait revenir à l'autre partie au contrat sont des clauses présumées abusives ; qu'il ressort de la rédaction des clauses des contrats-types des compagnies d'assurance P.F.A. et GROUPE AZUR imposant à l'assuré la charge de prouver les circonstances du vol en l'absence d'effraction que celles-ci, constituant en réalité des clauses d'exclusion indirectes, ont pour effet de transférer au consommateur une charge de preuve qui devrait incomber à l'assureur ; qu'en s'abstenant par suite de rechercher si lesdites clauses, par les conditions de preuve auxquelles elles subordonnaient la garantie de l'assuré en l'absence d'effraction ne constituaient pas en réalité des clauses d'exclusion indirecte et partant abusives, la Cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 132-1 du code de la consommation .

 

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN     (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de l'Association "UFC QUE CHOISIR" aux fins de faire déclarer abusives les clauses garantissant le vol figurant dans les contrats d'assurance de la société P.F.A. Assurances et de l'Assurance Mutuelle de France-GROUPE AZUR ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES qu'aucun avantage excessif n'est conféré aux sociétés défenderesses du fait des clauses critiquées ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QUE D'UNE PART il résulte de l'article L. 132-1 du code de la consommation dans la rédaction issue de la loi du 1er février 1995 que ce texte abandonne toute référence à la notion d'"avantage excessif" visée par l'ancien article L. 132-1 du code de la consommation  ; qu'en se référant néanmoins à la condition d'avantage excessif abandonnée par la loi nouvelle, la Cour d'appel a violé par fausse application l'ancien article L. 132-1 du code de la consommation  ;

ALORS QUE D'AUTRE PART il résulte de l'article L. 132-1 nouveau du Code de la consommation qu'est abusive la clause qui a pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat ; qu'en se déterminant par suite sans rechercher si les clauses litigieuses n'avaient pas un tel objet ou un tel effet, la Cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 132-1 nouveau du code de la consommation .