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CA GRENOBLE (1re ch. civ.), 13 février 2007

Nature : Décision
Titre : CA GRENOBLE (1re ch. civ.), 13 février 2007
Pays : France
Juridiction : Grenoble (CA), 1re ch. civ.
Demande : 05/02995
Date : 13/02/2007
Nature de la décision : Avant dire droit
Date de la demande : 4/07/2005
Décision antérieure : TI SAINT-MARCELLIN, 24 mai 2005
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2263

CA GRENOBLE (1re ch. civ.), 13 février 2007 : RG n° 05/02995

 

Extraits : 1/ « Attendu que le premier juge a retenu que la clause de révision du taux d'intérêt à la discrétion du prêteur était abusive ; Qu'on ne saurait assimiler une irrégularité formelle qui entache une offre de crédit et se trouve sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts, à une clause abusive qui, constituant aux termes de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation un déséquilibre au détriment du consommateur entre les droits et les obligations des cocontractants, affecte donc le fond du contrat ; Que si le juge n'a pas le pouvoir de relever d'office de telles irrégularités formelles, il n'en est pas de même en matière de clause abusive, sauf à permettre aux parties de s'expliquer contradictoirement sur le moyen soulevé ».

2/ « Attendu qu'aux termes de cette offre il est prévu que les intérêts sont calculés au taux effectif global en vigueur au jour de l'offre qui varie en fonction du montant du crédit utilisé lors de l'arrêté mensuel soit pour un crédit de : - 0 à 7.500 Francs un TEG de 18,80 % - 7.501 à 10.000 Francs un TEG de 18,80 % - 10.001 à 20.000 Francs un TEG de 17,48 % ; Qu'il est en outre précisé que « le taux est révisable et suivra les variations en hausse ou en baisse du taux de base que COFINOGA applique aux opérations de même nature et qui figure dans les barèmes qu'elle diffuse auprès du public. En cas de révision des taux, l'emprunteur informé au moment de son relevé de compte pourra ne pas l'accepter moyennant le préavis d'un mois par lettre recommandée avec accusé de réception devant être reçu par COFINOGA avant l'expiration du délai de préavis sus-mentionné. Ce refus est irrévocable et entraîne la clôture immédiate de l'ouverture de crédit, l'emprunteur conservant toute possibilité de rembourser les sommes dues selon les modalités aux conditions de taux en vigueur au jour du point de départ du préavis » ;

Attendu que la clause litigieuse qui laisse à la discrétion du prêteur le choix des modalités de variation du taux du crédit, assortie au surplus de modalités restreignant l'intérêt, pour l'emprunteur, d'opter pour le maintien des conditions initiales du crédit, entraîne un déséquilibre significatif au détriment de celui-ci et constitue de ce fait une clause abusive dont la seule suppression doit être ordonnée et non pas la suppression de la clause d'intérêts ».

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 13 FÉVRIER 2007

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 05/02995. Appel d'un Jugement rendu par le Tribunal d'Instance de ST-MARCELLIN en date du 24 mai 2005, R.G. n° 11-04-309, suivant déclaration d'appel du 4 juillet 2005

 

APPELANTE :

SOCIÉTÉ MÉDIATIS SA

poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège [adresse], représentée par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour, assistée de Maître BOULLOUD, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Maître DUBRAY, avocat au même barreau

 

INTIMÉ :

Monsieur X.

[adresse] [minute Jurica page 2] défaillant

 

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Madame Françoise LANDOZ, Président, Madame Claude-Françoise KUENY, Conseiller, Madame Véronique KLAJNBERG, Conseiller,

Assistées lors des débats de Madame Hélène PAGANON, Greffier.

DÉBATS : À l'audience publique du 16 janvier 2007, Madame KLAJNBERG a été entendue en son rapport. L'avoué a été entendu en ses conclusions et Maître DUBRAY en sa plaidoirie. Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. X. a signé le 12 janvier 1995, une offre préalable d'ouverture de crédit par découvert en compte auprès de la Société COFINOGA.

Le montant du découvert autorisé à l'ouverture du compte était fixé à la somme de 20.000 Francs, le montant maximum du découvert étant fixé à la somme de 140.000 Francs.

La déchéance du terme est intervenue le 12 février 2004 suite à des impayés.

La Société MÉDIATIS, cessionnaire des créances de la Société COFINOGA, a le 9 juillet 2004 assigné M. X. devant le Tribunal d'Instance de SAINT-MARCELLIN, en paiement de sa créance.

Par jugement réputé contradictoire du 24 mai 2005 le Tribunal a condamné M. X. à payer à la Société MÉDIATIS une somme de 2.922,99 € avec intérêts au taux légal à compter du14 février 2004 sur la somme de 2.706,47 €.

Le 4 juillet 2005 la Société MÉDIATIS a interjeté appel de cette décision et demande à la Cour de :

« Condamner M. X. à lui payer la somme de 14.872,37 € outre intérêts au taux de 15,28 % sur la somme de 13.052,40 € à compter du 13 mars 2004,

Ordonner la capitalisation des intérêts à compter du 9 juillet 2004,

Condamner Monsieur X. au paiement de la somme de 750 € selon article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'en tous les dépens de première instance et d'appel ».

Au soutien des son recours elle fait valoir en substance que :

- la méconnaissance des exigences du Code de la Consommation même d'ordre public ne peut être opposée qu'à la demande de la personne que ces dispositions ont pour objet de protéger,

- [minute Jurica page 3] la clause invoquée (art. 8 de l'offre préalable) n'est nullement abusive, dès lors que les variations du taux d'intérêts à la hausse comme à la baisse sont portées à la connaissance de l'emprunteur par le biais de ses relevés de compte,

- les clauses abusives sont réputées non écrites de sorte que cela rend intangibles les conditions d'intérêts fixées dans l'offre préalable, les conditions de la révision étant anéanties.

Régulièrement assigné en l'étude de la SCP BOULANGE huissier de justice, M. X. n'a pas constitué avoué ; le présent arrêt sera rendu par défaut.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS ET DÉCISION :

Sur l'office du juge :

Attendu que le premier juge a retenu que la clause de révision du taux d'intérêt à la discrétion du prêteur était abusive ;

Qu'on ne saurait assimiler une irrégularité formelle qui entache une offre de crédit et se trouve sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts, à une clause abusive qui, constituant aux termes de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation un déséquilibre au détriment du consommateur entre les droits et les obligations des cocontractants, affecte donc le fond du contrat ;

Que si le juge n'a pas le pouvoir de relever d'office de telles irrégularités formelles, il n'en est pas de même en matière de clause abusive, sauf à permettre aux parties de s'expliquer contradictoirement sur le moyen soulevé ;

 

Sur l'existence d'une clause abusive affectant le contrat du 29 décembre 1994 :

Attendu qu'en l'espèce M. X. a accepté le 29 décembre 1994 une offre préalable d'ouverture de crédit par découvert en compte, utilisable par fractions d'un montant de 20.000 Francs remboursable par mensualités de 250 Francs au taux effectif global de 17,64 % l'an ; que l'offre préalable a été modifiée à deux reprises le 16 septembre 1994 et le 17 mars 1999 pour augmenter plafond du découvert autorisé ;

Attendu qu'aux termes de cette offre il est prévu que les intérêts sont calculés au taux effectif global en vigueur au jour de l'offre qui varie en fonction du montant du crédit utilisé lors de l'arrêté mensuel soit pour un crédit de :

- 0 à 7.500 Francs un TEG de 18,80 %

- 7.501 à 10.000 Francs un TEG de 18,80 %

- 10.001 à 20.000 Francs un TEG de 17,48 %

Qu'il est en outre précisé que « le taux est révisable et suivra les variations en hausse ou en baisse du taux de base que COFINOGA applique aux opérations de même nature et qui figure dans les barèmes qu'elle diffuse auprès du public. En cas de révision des taux, l'emprunteur informé au moment de son relevé de compte pourra ne pas l'accepter moyennant le préavis d'un mois par lettre recommandée avec accusé de réception devant être reçu par COFINOGA avant l'expiration du délai de préavis sus-mentionné. Ce refus est irrévocable et entraîne la clôture immédiate de l'ouverture de crédit, l'emprunteur conservant toute possibilité de rembourser les sommes dues selon les modalités aux conditions de taux en vigueur au jour du point de départ du préavis » ;

Attendu que la clause litigieuse qui laisse à la discrétion du prêteur le choix des modalités de [minute Jurica page 4] variation du taux du crédit, assortie au surplus de modalités restreignant l'intérêt, pour l'emprunteur, d'opter pour le maintien des conditions initiales du crédit, entraîne un déséquilibre significatif au détriment de celui-ci et constitue de ce fait une clause abusive dont la seule suppression doit être ordonnée et non pas la suppression de la clause d'intérêts ;

Que néanmoins l'historique du compte produit par la société MÉDIATIS ne porte aucune mention du taux d'intérêt appliqué ; que si les quelques relevés mensuels produits (un par an) révèlent que le taux appliqué a pu être inférieur au taux contractuel, ils révèlent également qu'il a aussi été supérieur en septembre 2002 et août 2003 et ne permettent pas en tout cas de vérifier mois par mois le montant du taux d'intérêt appliqué et si le TEG annuel était supérieur au taux conventionnel tel qu'il est ci-dessus rappelé ;

Que dans ces conditions, il appartiendra à la SA MÉDIATIS après réouverture des débats, de recalculer le montant des intérêts depuis la naissance du compte, en faisant application d'un TEG qui ne soit pas supérieur aux TEG conventionnel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant publiquement par arrêt par défaut après en avoir délibéré conformément à la loi,

Dit que la clause de variation du taux effectif global stipulée à l'article 3 de l'offre préalable de crédit par découvert en compte est abusive et doit être déclarée non écrite,

Sursoit à statuer sur le quantum de la créance et les demandes accessoires de la SA MÉDIATIS

Ordonne la réouverture des débats,

Dit que la SA MÉDIATIS devra produire d'une part tous les relevés de compte mensuels sur lesquels apparaîtront le taux d'intérêt appliqué, d'autre part recalculer le montant des intérêts au taux effectif global contractuel pour les périodes où le taux conventionnel a été dépassé,

Renvoie la cause à l'audience de plaidoirie du mardi 22 mai 2007, l'ordonnance de clôture intervenant le 15 mai 2007,

Réserve les dépens.

PRONONCÉ en audience publique par Madame LANDOZ, Président, qui a signé avec Madame PAGANON, Greffier.