CA GRENOBLE (ch. com.), 3 septembre 2009
CERCLAB - DOCUMENT N° 2269
CA GRENOBLE (ch. com.), 3 septembre 2009 : RG n° 06/03385
Extraits : « Attendu qu'il ne saurait être contesté que lesdits contrats qui avaient pour objet de prévenir les incidents pouvant être dommageables à son magasin avaient bien de ce fait un rapport direct avec l'activité professionnelle de Madame Y. épouse X. au sens de l'article L. 121-22 4° du Code de la consommation, n'étant justifiés que par l'existence de cette activité et la volonté de la protéger ; Attendu que la souscription par un commerçant d'un contrat dont l'objet a un rapport direct avec son activité professionnelle exclut qu'il puisse se prévaloir des dispositions protectrices du Code de la consommation ;
Attendu que le rappel des dispositions des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du Code de la consommation dans les deux contrats 158XX001 et158XX002 n'implique nullement la volonté de la société CIPE FRANCE d'attribuer à l'ensemble de ses clients la qualité de consommateur avec le bénéfice de la protection du Code de la consommation et donc de soumettre lesdits contrats conclus avec Madame Y. épouse X., commerçante, pour les besoins de son activité professionnelle, au Code de la consommation ; qu'il s'explique par le fait que ces contrats-type sont indifféremment proposés aux particuliers, aux commerçants et aux professions libérales ainsi qu'en témoignent les trois cases figurant sur la première page dont celle « commerçant » a été cochée et que partie de ses cocontractants ont donc vocation à bénéficier du Code de la consommation ; Attendu dans ces conditions que Madame Y. épouse X. ne peut valablement invoquer les dispositions des articles L. 122-1, L. 121-23, L. 114-1, L. 132-1 et L. 133-2 du Code de la consommation ;
Attendu en tout état de cause qu'à supposer même que le rappel dans les contrats des dispositions des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du Code de la consommation implique soumission volontaire de la société CIPE FRANCE à celles-ci (cette soumission volontaire ne pouvant de toute façon être étendue aux dispositions non expressément visées et d'une façon générale à l'ensemble des dispositions du Code de la consommation), force est de constater que Madame Y. épouse X. n'invoque, comme manquement aux textes cités, que l'ignorance de l'identité de son co-contractant et l'absence d'indication du délai de livraison ».
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 3 SEPTEMBRE 2009
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 06/03385. Appel d'une décision (N° RG 2005J197) rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE en date du 24 juillet 2006 suivant déclaration d'appel du 28 août 2006.
APPELANTE :
Madame Y. épouse X.
[adresse], représentée par la SELARL DAUPHIN & MIHAJLOVIC, avoués à la Cour, assistée de la SCP GUIDETTI / BOZZARELLI / LE MAT, substituée par Maître ZAKAR, avocats au barreau de GRENOBLE.
INTIMÉE :
[minute Jurica page 2]
SA SOCIÉTÉ ADT FRANCE, venant aux droits de la Société ADT TELESURVEILLANCE,
prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège [adresse], représentée par la SCP HERVE-JEAN POUGNAND, avoués à la Cour.
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DÉBATS ET DU DELIBÉRÉ : Monsieur Daniel MULLER, Président de Chambre, Monsieur Jean-Louis BERNAUD, Conseiller, Madame Françoise CUNY, Conseiller,
Assistés lors des débats de Madame Nadine LEICKNER, Greffier.
DÉBATS : Audience publique du 20 mai 2009, Monsieur MULLER, Président a été entendu en son rapport. Les avoués et l'avocat ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries. Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu ce jour.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu le jugement du Tribunal de Commerce en date du 24 juillet 2006,
Vu l'appel formé par Madame Y. épouse X. à l'encontre de ce jugement,
Vu l'arrêt de cette Cour en date du 30 janvier 2008 qui a statué comme suit :
« Avant dire droit, tous droits et moyens des parties réservés,
Ordonne la réouverture des débats, la révocation de l'ordonnance de clôture et le renvoi de la cause et des parties à la conférence de mise en état du Mercredi 12 mars 2008 à 9 heures 30, aux fins ci-après:
- que la société CIPE s'explique sur les deux contrats versés au dossier par Madame X. et d'une façon générale sur l'existence de quatre contrats et sur la relation des faits qui figure à cet égard dans les écritures de Madame X. et qu'elle indique dans quelles conditions et par qui ont été signés les deux contrats sur lesquels Madame X. dénie sa signature,
- que cette société précise expressément au titre de quels contrats elle agit et produise un décompte détaillé de sa réclamation, avec, dans l'hypothèse d'une location du matériel et d'une prestation de télésurveillance, toute justification utile de la ventilation des mensualités entre les deux prestations de location d'une part et de télésurveillance d'autre part,
- [minute Jurica page 3] qu'elle produise les pièces ci-après visées dans son bordereau de communication de pièces:
* pièce 5 : autorisation de prélèvement
* pièce 6 : lettre de Madame X. du 24 février 1999
* pièce 7 : lettre de ClPE du 1er mars 1999
* pièce 8 : mise en demeure en date du 25 octobre 1999 contrat n° 158-XX-001
* pièce 9 : mise en demeure en date du 25 octobre 1999 contrat n°158-XX-002,
- que les parties s'expliquent sur l'existence de deux procès-verbaux de réception de matériels différents en date du 30 juin 1998 portant sur des matériels différents et sur le rapport de ceux-ci avec les quatre contrats susvisés,
- qu'elles s'expliquent aussi sur l'incidence sur les demandes de la société ADT TELESURVEILLANCE de l'absence de tout contrat de location des matériels dans la mesure où cette société agit en exécution de deux contrats de prestations de télésurveillance à l'exclusion de tout contrat de location de matériels,
- que Madame X. conclue au regard des contrats sur le fondement desquels la société ADT TELESURVEILLANCE déclarera expressément agir,
Réserve les dépens. »
Vu les dernières conclusions signifiées par Madame X. le 7 janvier 2009 aux termes desquelles elle explique :
- qu'en son absence, Monsieur A., démarcheur de la société ADT TELESURVEILLANCE, s'est adressé à un ouvrier présent sur le chantier en lui assurant qu'elle avait d'ores et déjà donné son accord pour la conclusion d'un contrat de location et d'un contrat de prestations de télésurveillance et l'a convaincu de contrefaire sa signature, qu'il a usé du même procédé le 30 juin 1998 pour obtenir la signature du procès-verbal de réception de matériels,
- qu'informée des différents passages de Monsieur A., elle n'a pu que constater la contrefaçon de sa signature,
- que convaincue d'être tenue par ces documents, elle a donc signé de sa propre main cette fois les doubles des contrats qui lui avaient été donnés et a commencé à payer les loyers réclamés par la société ADT TELESURVEILLANCE,
- que tandis que Monsieur A. lui avait toujours assuré que le montant des prestations fournies ne dépasserait pas 300 francs HT, elle a constaté qu'il lui était prélevé 900 francs HT par mois, que dans un premier temps Monsieur A. lui a expliqué qu'il s'agissait d'une situation temporaire, que cependant, les prélèvements étant beaucoup plus importants que prévu, elle a rapidement informé celui-ci de son intention de résilier le contrat, que c'est sous sa dictée qu'elle a rédigé la lettre en date du 24 février 1999,
- qu'elle a souscrit les contrats litigieux en tant que consommatrice, que les contrats-types visent les articles L. 121-23 et suivants du Code de la consommation, qu'elle n'a apposé aucun cachet commercial et que les seules mentions faisant allusion à son activité commerciale ne se rapportent qu'à la désignation des lieux à équiper, que la rédaction et la présentation des contrats-types proposés sont de nature à induire en erreur, que les contrats litigieux portent sur un objet sans lien direct avec [minute Jurica page 4] son activité, qu'au jour de la signature des contrats litigieux, elle n'avait pas encore inscrit son activité au RCS, qu'elle n'avait aucune connaissance particulière dans le domaine de la télésurveillance, que c'est le tribunal d'instance qui doit être déclaré compétent,
- que la société CIPE a violé les dispositions de l'article L. 122-1 du Code de la consommation,
- qu'elle a également violé les dispositions des articles L. 121-23, L. 114-1 et L. 133-2 du Code de la consommation, que les contrats-types ne permettent pas au client de connaître l'identité de son co-contractant, qu'ils ne précisent pas le prix de chaque prestation, location de matériel et télésurveillance, qu'ils n'indiquent pas le délai de livraison, qu'elle n'a jamais eu l'intention de contracter avec une autre société que la société ADT TELESURVEILLANCE, que la confusion s'explique aussi bien par les pratiques de démarchage unique de deux sociétés que par la présentation faite des contrats au client ou encore par le contenu pour le moins ambigu des clauses du contrat, que le prix d'une seule des prestations apparaît sur la première page du contrat, que la clause 5 du contrat permet à la société ADT TELESURVEILLANCE de se dédouaner de tout engagement en matière de délai de livraison,
- que les articles 4 et 8 du contrat créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, que ces clauses doivent être réputées non écrites,
- que son consentement a été vicié par des manœuvres et réticences dolosives,
- que la société ADT TELESURVEILLANCE n'a apporté aucune explication plausible aux interrogations de la Cour, et demande à la Cour de :
« RÉFORMER le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE le 24 juillet 2006,
Et statuant de nouveau,
SUR LA COMPETENCE
Vu l'article 75,78 et suivants et suivants du Code de Procédure Civile,
- Réformer le jugement du 24 juillet 2006 en ce qu'il déclare le Tribunal de Commerce compétent pour connaître du présent litige et déclarer compétent le Tribunal d'Instance.
A TITRE PRINCIPAL
Vu les articles L. 122-1, L. 121-23, L. 114-1, L. 133-2 et L. 132-1 du Code de la Consommation,
- Prononcer la nullité des contrats de location et de prestation de télésurveillance que la société ADT TELESURVEILLANCE oppose à Madame X.
- Juger réputées non écrites les clauses 4 et 8 du contrat d'abonnement de télésurveillance invoquées par la société ADT TELESURVEILLANCE comme fondement de sa demande en paiement.
A TITRE SUBSIDIAIRE
Vu les article 1109 et 1116 du Code Civil,
[minute Jurica page 5]. Juger comme dolosives les pratiques commerciales de la société ADT TELESURVEILLANCE. En l'espèce,
- Prononcer la nullité absolue des contrats qui sont aujourd'hui opposés à Madame X.,
S'AGISSANT DE LA RESTITUTION DU MATERIEL
- Ordonner à la société ADT TELESURVEILLANCE, de reprendre, à ses frais, le matériel lui appartenant et que Madame X. tient à sa disposition.
A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE :
Vu l'article 1244-1 et 1244-2 du Code Civil,
- Accorder à Madame X. les plus larges délais de paiement ainsi que la diminution des majorations d'intérêts ou autre pénalités qui pourront lui être réclamés
Enfin et en tout état de cause,
Condamner la société ADT TELESURVEILLANCE à payer à Madame X. la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'en tout les dépens distraits au profit de la SELARL DAUPHIN MIHAJLOVIC avoué et autoriser celle-ci à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. »
Vu les écritures signifiées le 15 décembre 2008 par la société ADT FRANCE venant aux droits de la société ADT TELESURVEILLANCE qui venait elle-même aux droits de la société CIPE FRANCE, laquelle réplique :
- que Madame X. n'a jamais contracté comme simple consommateur mais bien comme commerçante dans le cadre de son activité professionnelle, que contrairement à ce qu'elle affirme, l'objet avait bien un lien direct avec son activité, qu'au surplus, même si le Tribunal de Commerce était incompétent, le Tribunal d'Instance est compétent et que la Cour est juridiction d'appel tant du Tribunal d'Instance que du Tribunal de Commerce,
- qu'ayant contracté en qualité de commerçante, Madame X. ne peut invoquer les dispositions du Code de la consommation,
- que les contrats ne comportent aucune irrégularité et que ses allégations sur l'attitude du commercial ne sont étayées d'aucun élément de preuve,
- que si elle a choisi de cesser son activité, il lui appartient d'assumer les conséquences de ses actes,
- que les deux autres contrats dont Madame X. a fait état n'ont rien à voir avec la demande car ces deux contrats n'ont jamais été exécutés, qu'ils sont donc hors débats, et demande à la Cour de :
« Rejeter l'appel de Madame X. et confirmer le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Ordonner la capitalisation des intérêts à compter du 29 octobre 2000 en application de l'article 1154 du Code civil.
[minute Jurica page 6] Condamner Madame X. à payer une nouvelle indemnité de 1.500 € en application de l'article 700 du NCPC et aux dépens d'appel que la SCP Hervé-Jean POUGNAND pourra recouvrer conformément à l'article 699 du NCPC »
Vu l'ordonnance de clôture en date du 1er avril 2009.
Vu les nouvelles écritures signifiées le 6 avril 2009, postérieurement à l'ordonnance de clôture, mais strictement identiques à celles signifiée s le 15 décembre 2008, aux termes desquelles la société ADT FRANCE a déclaré venir aux droits de la société ADT TELESURVEILLANCE, ces écritures étant recevables par application de l'article 783 alinéa 2 du Code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR :
Attendu que pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il y a lieu de se référer à leurs dernières écritures devant la Cour ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé ;
Attendu qu'il appartient à la Cour de statuer en l'état des éléments dont elle dispose suite à l'arrêt de réouverture des débats du 30 janvier 2008 ;
Sur l'incompétence du Tribunal de Commerce au profit du Tribunal d'Instance
Attendu que les deux contrats dont se prévaut la société ADT FRANCE SA venant aux droits de la société ADT TELESURVEILLANCE sont ceux en date du 12 juin 1998 portant les numéros informatiques 158XX001 et 1581XX002 ;
Attendu que ces contrats ont été conclus entre « Le Beverly Hills » [adresse] et la société CIPE FRANCE ;
Attendu qu'il est constant que « Le Beverly Hills » est l'enseigne du commerce exploité par Madame Y. épouse X. et que l'adresse […] est l'adresse de ce commerce et non celle du domicile personnel de Madame Y. épouse X. ;
Attendu que parmi les 3 cases « particulier », « commerçant » et « profession libérale » figurant sur les contrats, c'est la case « commerçant » qui a été cochée ;
Attendu qu'il était mentionné sur les contrats les jours et heures d'ouverture du commerce ;
Attendu qu'il ressort de ces éléments que c'est bien en qualité de commerçante que Madame Y. épouse X. a conclu les contrats litigieux ;
Attendu que peu importe :
- que les contrats rappellent dans leurs clauses pré-imprimées les dispositions des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-6 du Code de la consommation,
- que n'ait pas été apposé le cachet commercial du commerce dans la case réservée à cet effet sur les contrats,
- que les contrats proposés ne soient pas différents selon que le client est consommateur ou professionnel et que leur rédaction et leur présentation soient de nature à induire en erreur,
- que l'objet des contrats aient un lien direct ou non avec son activité,
- [minute Jurica page 7] que l'immatriculation de l'intéressée au registre du commerce soit intervenue le 27 octobre 1998 ;
Attendu que la qualité de commerçant de Madame Y. épouse X. ne dépend pas de ces éléments, le défaut d'inscription au registre du commerce lui-même n'excluant pas la qualité de commerçant telle que définie par l'article L. 121-1 du Code de commerce ;
que l'intéressée ne peut, alors qu'elle s'est prévalue de cette qualité lors de la signature du contrat en cochant la case correspondante, la contester actuellement ;
Attendu que le Tribunal de Commerce a à bon droit rejeté l'exception d'incompétence soulevée par Madame Y. épouse X. et s'est à bon droit déclaré compétent pour connaître de l'action de la société ADT TELESURVEILLANCE ;
Sur la nullité des contrats
Non respect par la société CIPE des dispositions des articles L. 122-1, L. 121-23, L. 114-1, L. 33-2 et L. 132-1 du Code de la consommation
Attendu que les deux contrats dont la société ADT FRANCE poursuit l'exécution sont l'un et l'autre des contrats intitulés « contrat d'abonnement de télésurveillance avec option de prestation de service » ;
que le contrat 158XX001 mentionne en son article 1 que le choix de l'abonné porte sur les appareils et prestations ci-après désignés dans un tableau à savoir :
« Télésurveillance »
- centrale/transmetteur téléphonique 1
- centrale d'alarme complémentaire 1
- détecteur infrarouge radar-microphone 2
- prestation télésurveillance
- convention d'assistance »
que le contrat 158XX002 mentionne en son article 1 que le choix de l'abonné porte sur les appareils ci-après désignés dans le tableau à savoir :
« Télésurveillance »
- microphone 1
- carte PTT 1
- prestation de télésurveillance ;
Attendu que chacun de ces deux contrats dispose :
en son article 2 : « objet du contrat » :
« Ce contrat d'abonnement de télésurveillance est un contrat synallagmatique ayant pour objet :
- l'installation,
- [minute Jurica page 8] la mise en service,
- la démonstration »,
en son article 5 qu'il est conclu sous la condition suspensive constituée par l'acceptation du dossier de location financière relatif au matériel désigné à l'article 1 que CIPE s'engage à soumettre à la Société devant en faire l'acquisition pour le louer à l'abonné,
en son article 11 que le montant de la mensualité stipulée à l'article 1 du contrat de télésurveillance représente la rémunération de la prestation de télésurveillance par CIPE ainsi que le coût de location et de maintenance du matériel dont l'abonné a fait choix pour équiper les locaux à surveiller et que dans le cas où le matériel est acheté par l'abonné, le montant de la redevance mensuelle ne concerne que l'installation, la maintenance et la prestation de télésurveillance ;
Attendu que contrairement aux affirmations de Madame Y. épouse X., l'on n'est pas en présence d'un contrat de location télévidéo et d'un contrat de prestation de télévidéo ; que ces deux contrats qu'elle évoque et qu'elle produit ne comportant aucun numéro sont ceux qui, selon ses dires, auraient été signés par un ouvrier exécutant des travaux dans son magasin, lequel aurait imité sa signature, et dont la société ADT FRANCE précise qu'ils n'ont rien à voir avec la demande principale car ils n'ont jamais été exécutés ;
Attendu que la Cour ne peut donc se référer qu'aux deux contrats numéro 158XX001 et 158XX002 en vertu desquels la société ADT FRANCE précise agir et qui sont d'ailleurs ceux qui étaient visés dans les mises en demeure délivrées préalablement à l'introduction de la présente action ; que s'ils ont été conclus sous la condition suspensive de l'acceptation du dossier de location financière relatif au matériel désigné à l'article 1, il n'apparaît pas pour autant que la société CIPE subordonnait la conclusion d'un contrat de prestation à un autre contrat de location puisque ces contrats prévoient expressément en leur article 8 l'hypothèse où l'abonné est propriétaire du matériel de détection et de transmission ;
Attendu qu'il ne saurait être contesté que lesdits contrats qui avaient pour objet de prévenir les incidents pouvant être dommageables à son magasin avaient bien de ce fait un rapport direct avec l'activité professionnelle de Madame Y. épouse X. au sens de l'article L. 121-22 4° du Code de la consommation, n'étant justifiés que par l'existence de cette activité et la volonté de la protéger ;
Attendu que la souscription par un commerçant d'un contrat dont l'objet a un rapport direct avec son activité professionnelle exclut qu'il puisse se prévaloir des dispositions protectrices du Code de la consommation ;
Attendu que le rappel des dispositions des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du Code de la consommation dans les deux contrats 158XX001 et158XX002 n'implique nullement la volonté de la société CIPE FRANCE d'attribuer à l'ensemble de ses clients la qualité de consommateur avec le bénéfice de la protection du Code de la consommation et donc de soumettre lesdits contrats conclus avec Madame Y. épouse X., commerçante, pour les besoins de son activité professionnelle, au Code de la consommation ; qu'il s'explique par le fait que ces contrats-type sont indifféremment proposés aux particuliers, aux commerçants et aux professions libérales ainsi qu'en témoignent les trois cases figurant sur la première page dont celle « commerçant » a été cochée et que partie de ses co-contractants ont donc vocation à bénéficier du Code de la consommation ;
Attendu dans ces conditions que Madame Y. épouse X. ne peut valablement invoquer les dispositions des articles L. 122-1, L. 121-23, L. 114-1, L. 132-1 et L. 133-2 du Code de la consommation ;
[minute page 9] Attendu en tout état de cause qu'à supposer même que le rappel dans les contrats des dispositions des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du Code de la consommation implique soumission volontaire de la société CIPE FRANCE à celles-ci (cette soumission volontaire ne pouvant de toute façon être étendue aux dispositions non expressément visées et d'une façon générale à l'ensemble des dispositions du Code de la consommation), force est de constater que Madame Y. épouse X. n'invoque, comme manquement aux textes cités, que l'ignorance de l'identité de son co-contractant et l'absence d'indication du délai de livraison ; qu'en effet, l'absence de ventilation du prix apparaît être invoquée au visa de l'article L. 133-2 du Code de la consommation qui ne fait pas partie des textes cités et que l'article L. 121-23 du Code de la consommation ne prévoit à peine de nullité, s'agissant du prix, que le prix global à payer ; que de plus, en l'état des contrats l58XX001 et 158XX001 sur lesquels se fonde la société CIPE, la société CIPE apparaît comme le seul co-contractant de Madame Y. épouse X., la société FIRENT, n'étant intervenue dans le recouvrement des sommes dues (les prélèvements ont été effectués à son bénéfice) et ayant adressé les mises en demeure préalables à la présente action que dans le cadre de l'article 11 des contrats qui prévoient que CIPE ou toute société mandatée par elle à cet effet se chargera du recouvrement des loyers ; qu'enfin, l'article 5 prévoyait bien un délai de livraison puisqu'il y était précisé qu'à l'expiration d'un délai maximum de soixante jours à compter de la signature du contrat, l'absence d'installation par CIPE des matériels vaudrait notification de rejet du dossier de location financière et que le présent contrat serait de plein droit nul d'effet et ne pourrait servir de fondement à une quelconque obligation ou responsabilité à la charge de l'une ou l'autre des parties ;
Attendu en conséquence que Madame Y. épouse X. est mal fondée en ses moyens de nullité tirés du non-respect de dispositions du Code de la consommation ;
Sur la violation des articles 1109 et 1116 du Code civil
Attendu que Madame Nassira Y. épouse X. invoque à titre subsidiaire les dispositions des articles 1109 et 1116 du Code civil ;
Attendu que s'il résulte des pièces du dossier :
- qu'ont été signés successivement à la date du 12 juin 1998 au nom et pour le compte de Beverly Hills :
* un contrat de location et un contrat de prestation télévidéo ,
* les contrats d'abonnement de télésurveillance avec option de prestation sécuritaire 15813288001 et 15813288002 sur le fondement desquels la société ADT FRANCE poursuit la présente action,
- que le contrat de location et le contrat de prestation télévidéo dénués de tout numéro portent une signature qui n'apparaît pas être celle de Madame Nassira Y. épouse X. à l'inverse des deux contrats 15813288001 et 15813288002, les conditions dans lesquelles ces différents contrats ont été signés ne sont pas formellement déterminées, la société ADT FRANCE n'ayant pas cru devoir fournir d'éléments d'information sur la signature ;
Attendu que la présentation des contrats ne peut être considérée comme caractérisant en soi une manoeuvre frauduleuse et comme étant de nature à induire en erreur ;
Attendu qu'à supposer établi que le représentant de la société CIPE ait obtenu la signature des contrats ne portant pas de numéro dans les conditions relatées par Madame Nassira Y. épouse [minute page 10] X., celle-ci ne peut sérieusement et valablement soutenir que convaincue d'être tenue contractuellement par ces documents, elle a signé de sa propre main cette fois les doubles des contrats qui lui avaient été donnés et commencé à payer les loyers ; que l'on ne voit pas pourquoi elle aurait signé de nouveaux contrats si elle s'estimait tenue par les précédents ;
Attendu qu'elle affirme sans l'établir que Monsieur A. lui a expliqué le double prélèvement de 600 et 300 francs HT par mois comme une situation temporaire nécessitée par la mise en place du système de télésurveillance ;
Attendu qu'elle ne démontre pas davantage que c'est sous la dictée de Monsieur A. qu'elle aurait rédigé la lettre en date du 24 février 1999 dans laquelle elle faisait part de ses difficultés, exprimait le souhait de pouvoir mettre un terme aux contrats 158132881 et 15813288 2 (cités en référence) « en attendant de meilleurs jours » et se disait dans l'attente d'une réponse favorable ;
Attendu que force est en tout cas de constater que dans ce courrier qu'elle a écrit environ 8 mois après la signature, elle ne faisait état d'aucun vice de son consentement lors de la souscription des contrats ;
Attendu qu'elle ne rapporte pas la preuve de la réalité d'un vice de son consentement ;
Attendu que sa demande de nullité des contrats sur le fondement des articles 1109 et 1116 du Code civil ne peut prospérer ;
Sur les demandes de la société ADT FRANCE TELESURVEILLANCE
Attendu qu'il est établi et non contesté que Madame Nassira Y. épouse ATTALLAH a reçu les matériels visés aux contrats litigieux 15813288001 et 15813288002 et a bénéficié des prestations de la société CIPE en matière de télésurveillance ;
Attendu que par courrier du 24 février 1999 ci-dessus évoqué, elle a sollicité de pouvoir mettre un terme à ces contrats ;
Attendu que par courrier en date du 1er mars 1999, la société CIPE lui a répondu que le contrat était conclu pour une durée de 48 mois et que la résiliation entraînait outre la restitution du matériel le versement d'une indemnité égale à la totalité des loyers restant à courir et ce, sans préjudice de tous dommages et intérêts, et lui a en conséquence demandé de respecter scrupuleusement ses engagements contractuels ;
Attendu qu'il n'y a donc eu aucun accord entre les parties sur le principe d'une résiliation amiable des contrats ;
Attendu que par lettres recommandées en date du 25 octobre 1999 non réclamées par la destinataire, la société FIRENT agissant en application de l'article 8 des contrats a mis en demeure Madame Nassira Y. épouse X. de lui régler sous huit jours :
- au titre du contrat 15813288001 :
* les loyers échus de février à octobre 1999 inclus
723,60 Francs x 8 = 5.788,80 Francs
* les frais 723,60 Francs
[minute page 11] soit la somme totale de 6.512,40 Francs
- au titre du contrat 15813288002 :
* les loyers échus d'avril à octobre 1999 inclus
361, 80 Francs x 7 = 2.532,60 Francs
* les frais 723,60 Francs
soit la somme totale de 3.256,20 Francs
en lui précisant qu'à défaut de paiement dans le délai imparti et, conformément aux clauses du contrat, celui-ci serait résilié à ses torts exclusifs et la créance deviendrait immédiatement exigible en totalité de sorte qu'elle devrait, outre les sommes ci-dessus, les 32 échéances à échoir au titre de chacun des contrats soit :
* au titre du contrat 15813288001 : la somme complémentaire de 23.155,20 Francs
* au titre du contrat 15813288002 : la somme complémentaire de 11.577,60 Francs ;
qu'ainsi il serait dû au total :
* 29.667,60 Francs (4.522,80 €) au titre du contrat 15813288001,
* 14.833,80 Francs (2.261,40 €) au titre du contrat 15813288002 ;
Attendu qu'il n'est pas justifié du paiement des échéances échues et impayées ; que les échéances échues et impayées sont donc dues ;
Attendu que la société ADT FRANCE ne justifie pas des frais compris dans son décompte, soit 723,60 + 723,60 = 1.447,20 Francs, soit 220,62 € ; que sa réclamation à ce titre doit être rejetée ;
Attendu que l'indemnité de résiliation est conforme aux stipulations de l'article 8 des contrats ; qu'il ne saurait être contesté que cette indemnité était destinée à assurer l'exécution de la convention et à dissuader le client de tout manquement à celle-ci et qu'elle constitue une sanction contractuelle du manquement du client à ses obligations ; qu'elle a donc bien le caractère d'une clause pénale pouvant être réduite si elle apparaît excessive ; qu'en l'espèce, l'indemnité contractuelle apparaît manifestement excessive au regard du préjudice subi par la société CIPE dès lors qu'il n'apparaît pas que postérieurement aux lettres de mise en demeure elle ait poursuivi sa prestation de télésurveillance étant par ailleurs observé que Madame Nassira Y. a cessé d'honorer le contrat en raison d'une activité déficitaire et qu'elle a finalement cessé cette activité le 30 septembre 2001 ;
Attendu qu'en l'état des éléments du dossier et faute de plus ample éléments fournis par la société ADT FRANCE qui en dépit de la demande de la Cour n'a pas cru devoir ventiler le coût de la prestation de location et maintenance et celui de la prestation de télésurveillance, il y a lieu de réduire la clause pénale à la somme de 2.000 € en ce qui concerne le contrat 15813288001 et à celle de 1.000 € en ce qui concerne le contrat 15813288002 ;
Attendu en définitive que Madame Nassira Y. doit être condamnée à payer à la société ADT FRANCE les sommes suivantes :
[minute page 12]- 5.788,80 Francs (882,49 €) + 2.000 € = 2.882,49 € au titre du contrat 15813288001
- 2.532,60 Francs (386,09 €) + 1.000 € = 1.386,09 € au titre du contrat 15813288002
soit la somme totale de 4.268,58 € ;
que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 octobre 1999 date de la mise en demeure avec capitalisation de ceux dus au moins pour une année entière à compter de la demande de capitalisation formée par conclusions du 12 avril 2007 ;
que cette société sera déboutée du surplus de sa demande ;
Attendu que Madame Nassira Y. épouse X. ne fournit aucun élément quant à sa situation professionnelle et financière ; qu'elle ne justifie pas des conditions dans lesquelles elle pourrait se libérer de sa dette ;
qu'elle a bénéficié de fait de très larges délais de paiement puisque la dette remonte à novembre 1999 ;
qu'il n'y a pas lieu à application des articles 1244 et 1244-1 du Code civil ;
Attendu que le Tribunal a ordonné à la société ADT TELESURVEILLANCE de reprendre à ses frais le matériel lui appartenant ; que le jugement dont appel sera confirmé de ce chef, les deux parties en sollicitant la confirmation sur ce point ;
Attendu que vu les éléments du litige et la situation respective des parties, l'équité commande que chacune conserve la charge de ses frais irrépétibles ;
Attendu que Madame Nassira Y. épouse X. sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR
Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement dont appel en ce qu'il a :
- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par Madame X. et s'est déclaré compétent,
- ordonné à la société ADT TELESURVEILLANCE de reprendre à ses frais le matériel lui appartenant,
- condamné Madame X. aux dépens,
Le réformant pour le surplus et y ajoutant,
Condamne Madame X. à payer à la société ADT FRANCE venant aux droits de la société ADT TELESURVEILLANCE :
- la somme de 4.268,58 € outre intérêts au taux légal à compter du 25 octobre 1999, avec [minute page 13]capitalisation des intérêts dus au moins pour une année entière à compter du 12 avril 2007,
Déboute les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires,
Condamne Madame X. aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Hervé-Jean POUGNAND, conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
SIGNÉ par Monsieur MULLER, Président et par Madame LEICKNER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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