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CA DOUAI (8e ch. 1re sect.), 14 mai 2009

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (8e ch. 1re sect.), 14 mai 2009
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 8e ch. sect. 1
Demande : 08/02660
Date : 14/05/2009
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 17/04/2008
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2419

CA DOUAI (8e ch. 1re sect.), 14 mai 2009 : RG n° 08/02660

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « 1. Par application des dispositions de l'article L. 141-4 du Code de la consommation le juge peut désormais soulever d'office toutes les dispositions du Code de la consommation dans les litiges nés de son application. » […] « Par ailleurs, il convient de rappeler qu'aux termes des dispositions de l'article L. 132 -1 du Code de la consommation, […]. Le juge doit relever d'office l'existence de telles clauses. »

2/ « Ainsi que l'a exactement relevé le premier juge, eu égard à la teneur de cette clause, l'exigibilité immédiate des sommes prêtées, qui découle nécessairement de la résiliation préalable du contrat de crédit par le préteur peut résulter non pas d'un manquement de l'emprunteur à une obligation essentielle du contrat mais de l'une des causes sus-énoncées extérieure à son exécution. Or, si la défaillance de l'emprunteur dans le remboursement du crédit figure bien aux conditions de résiliation apparaissant au modèle type n°3 annexé à l'article R. 311-6 du Code de la consommation, comme étant d'ailleurs la seule possible, tel n'est pas le cas des autres causes sus-énoncées telles que : les renseignements erronés ou inexacts, l'existence d'une procédure collective, l'émission de chèques sans provisions, le décès du co-emprunteur... qui permettent non seulement la résiliation du contrat alors même que celui-ci pourrait être normalement remboursé mais également qui dispensent le préteur de toute mise en demeure préalable et ce alors notamment que le contrat ne comporte par exemple aucune indication ou définition des renseignements que le préteur estime indispensables à son acceptation du co-contractant et à la formation du contrat.

Cette clause prévoit dans des termes généraux des conditions de résiliation pour des causes extérieures au contrat et en dehors du mécanisme de la condition résolutoire, elle est donc sans lien avec la capacité de l'emprunteur à rembourser le crédit et elle crée en conséquence au profit du préteur et au détriment de l'emprunteur un déséquilibre significatif entre leurs droits et obligations respectifs ; elle a donc exactement été déclarée abusive par le premier juge. Par ailleurs, non prévue au modèle type et aux dispositions légales et réglementaires, cette clause contrevient donc au formalisme en la matière et rend dès lors le contrat irrégulier au regard des dispositions précitées des articles L. 311-8 et s et R. 311-6 du Code de la consommation ; le premier juge en a donc tout aussi exactement tiré les conséquences en prononçant la déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels. »

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

HUITIÈME CHAMBRE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 14 MAI 2009

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

RG n° 08/02660. Jugement (N° 07-00054) rendu le 28 mars 2008 par le Tribunal d'Instance de SAINT POL SUR TERNOISE.

 

APPELANTE :

CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE MONTREUIL SUR MER

agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, ayant son siège social [adresse], représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour, assistée de Maître Philippe MEILLIER, avocat au barreau d'ARRAS

 

INTIMÉ :

Monsieur X.

demeurant [adresse], représenté par Maître QUIGNON, avoué à la Cour, assisté de Maître Antoine VAAST, avocat au barreau d'ARRAS

 

DÉBATS : Audience publique du 4 mars 2009, tenue par Madame PAOLI magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : LORS DES DÉBATS : Madame DESBUISSONS

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ : M. CHARBONNIER, Président de chambre, [minute Jurica page 2] Madame PAOLI, Conseiller, Madame VEJUX, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 14 mai 2009 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par M. CHARBONNIER, Président et Madame DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement contradictoire du Tribunal d'instance de SAINT POL SUR TERNOISE en date du 28 mars 2008 ;

Vu l'appel formalisé le 17 avril 2008 par la Caisse de Crédit Mutuel de MONTREUIL SUR MER ;

Vu les conclusions signifiées par la Caisse de Crédit Mutuel de MONTREUIL SUR MER le 18 août 2008 ;

Vu les conclusions de M. X. en date du 18 décembre 2008 ;

Par acte d'huissier en date du 28 février 2007 la Caisse de Crédit Mutuel de MONTREUIL SUR MER a fait assigner M. X., en paiement de la somme de 13.590,39 € outre les intérêts, en exécution d'une offre préalable de prêt acceptée le 12 septembre 2002, devant le Tribunal d'instance de SAINT POL SUR TERNOISE, lequel par jugement dont appel, après avoir soulevé l'irrégularité de l'offre préalable et déchu le prêteur du droit aux intérêts conventionnels a :

* condamné M. X. à payer, en deniers ou quittances, à la Caisse de Crédit Mutuel de MONTREUIL SUR MER, la somme de 7.319,89 € au titre du solde du contrat de crédit, suivant décompte arrêté au 8 février 2007, avec intérêts au taux légal à compter du 3 janvier 2007 ;

* autorisé M. X. à se libérer de sa dette en 24 échéances de 300 € la dernière échéance étant majorée du solde de la dette en principal et intérêts ;

* dit que les mensualités devront être payées en deniers ou quittances, le 10 de chaque mois, à compter du premier mois suivant la signification de la décision ;

* dit qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité à son terme exact le solde de la dette deviendra immédiatement exigible ;

* rejeté les autres demandes ;

* dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

* condamné M. X. aux dépens.

La Caisse de Crédit Mutuel de MONTREUIL SUR MER rappelle la teneur de l'article L. 311-33 du Code de la consommation et conteste, d'une part, que la clause litigieuse puisse être qualifiée d'abusive et, d'autre part, que la sanction si cela était avéré puisse être la déchéance du droit aux intérêts, tout au plus doit-elle être réputée non écrite, le contrat subsistant par ailleurs.

Sa demande est fondée au regard des pièces produites elle sollicite donc la condamnation de l'emprunteur au principal restant dû et ce, avec intérêts au taux conventionnel.

Elle indique enfin s'opposer aux demandes de délais sollicités par M. X.

Aux termes de ses écritures la banque conclut à l'infirmation du jugement et demande à la Cour de :

* condamner M. X. à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de MONTREUIL SUR MER la somme de 13.590,39 € avec intérêts à compter du 27 décembre 2006 au taux de 7,5 % sur la [minute Jurica page 3] somme de 11.894,85 € en capital et au taux légal sur le surplus jusqu'au parfait règlement ;

* réformer le jugement en ce qu'il a accordé des délais de paiement à M. X. ;

* condamner M. X. à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de MONTREUIL SUR MER la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles ;

* condamner M. X. aux dépens de première instance et de ceux d'appel.

M. X. fait siennes les motivations du premier juge et conclut à la confirmation du jugement.

Si la Cour devait l'infirmer il sollicite le rejet des demandes formulées en application de l'article 700 du Code de procédure civile et le partage des dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 janvier 2009 ; l'affaire est venue à l'audience de plaidoirie du 4 mars 2009 à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré au 14 mai 2009.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

1. Par application des dispositions de l'article L. 141-4 du Code de la consommation le juge peut désormais soulever d'office toutes les dispositions du Code de la consommation dans les litiges nés de son application.

Il résulte d'une mention du jugement, qui n'est pas arguée de faux, qu'à l'audience du 4 décembre 2007 le Tribunal a invité les parties et notamment la Caisse de Crédit Mutuel de MONTREUIL SUR MER à s'expliquer sur l'irrégularité de l'offre préalable tirée du manquement aux dispositions des articles L. 311-8 à L. 311-13 et R. 311-6 et R. 311-7 du Code de la consommation résultant de l'existence d'une clause abusive et les conséquences juridiques qui en découlent.

Il a, ce faisant, respecté les dispositions de l'article 16 du Code de procédure civile et le principe procédural du contradictoire.

2. L'article L. 311-33 du Code de la consommation dispose que : « le prêteur qui accorde un crédit sans saisir l'emprunteur d'une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-8 à L. 311-13 est déchu du droit aux intérêts et l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement, seront restitués par le prêteur ou imputé sur le capital restant dû ». L'article R. 311-6 comprend en annexe les modèles types d'offres auxquels celles des préteurs doivent se conformer.

Par ailleurs, il convient de rappeler qu'aux termes des dispositions de l'article L. 132 -1 du Code de la consommation, est réputé non écrite comme étant abusive toute clause qui a pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et des obligations des parties au contrat. Le juge doit relever d'office l'existence de telles clauses.

Au cas d'espèce, la Caisse de Crédit Mutuel de MONTREUIL SUR MER a consentie le 12 septembre 2002 à M X. un prêt personnel ; celui-ci doit donc répondre aux dispositions du modèle type n° 3 figurant en annexe de l'article R. 311-6 du Code de la consommation.

L'examen des conditions générales de l'offre préalable et plus particulièrement de la clause 4 relative à l'exécution du contrat stipule que :

« les sommes dues sont de plein droit et immédiatement exigibles, si bon semble au préteur, sans formalité ni mise en demeure, dans les cas suivants :

- si l'emprunteur est en retard de plus de 30 jours pour le paiement d'un terme en principal, intérêts [minute Jurica page 4] ou accessoires, ou de tout autre crédit accordé par lui,

- si l'emprunteur est l'objet d'une procédure collective ou si même en dehors de ce cas il suspend ses paiements pour quelque cause que ce soit, s'il émet des chèques sans provisions, s'il fait l'objet de saisies mobilières ou immobilières, s'il est inscrit au fichier de la Banque de France crée par les articles L. 333-1 et suivants du Code de la consommation,

- si l'emprunteur ou coemprunteur décède,

- si les déclarations faites par l'emprunteur tant dans les présentes qu'à l'appui de sa demande de crédit sont reconnues fausses ou inexactes,

- en cas de non respect de l'une quelconque des obligations ou clause du présent contrat, ou de tout autre engagement souscrit, ou de toute disposition réglementaire,

- si l'emprunteur n'est plus sociétaire du préteur pour quelque cause que ce soit.

Dans ces différents cas, les indemnités prévues au point 5 ci-après trouvent à s'appliquer. ».

Ainsi que l'a exactement relevé le premier juge, eu égard à la teneur de cette clause, l'exigibilité immédiate des sommes prêtées, qui découle nécessairement de la résiliation préalable du contrat de crédit par le préteur peut résulter non pas d'un manquement de l'emprunteur à une obligation essentielle du contrat mais de l'une des causes sus-énoncées extérieure à son exécution. Or, si la défaillance de l'emprunteur dans le remboursement du crédit figure bien aux conditions de résiliation apparaissant au modèle type n°3 annexé à l'article R. 311-6 du Code de la consommation, comme étant d'ailleurs la seule possible, tel n'est pas le cas des autres causes sus-énoncées telles que : les renseignements erronés ou inexacts, l'existence d'une procédure collective, l'émission de chèques sans provisions, le décès du co-emprunteur... qui permettent non seulement la résiliation du contrat alors même que celui-ci pourrait être normalement remboursé mais également qui dispensent le préteur de toute mise en demeure préalable et ce alors notamment que le contrat ne comporte par exemple aucune indication ou définition des renseignements que le préteur estime indispensables à son acceptation du co-contractant et à la formation du contrat.

Cette clause prévoit dans des termes généraux des conditions de résiliation pour des causes extérieures au contrat et en dehors du mécanisme de la condition résolutoire, elle est donc sans lien avec la capacité de l'emprunteur à rembourser le crédit et elle crée en conséquence au profit du préteur et au détriment de l'emprunteur un déséquilibre significatif entre leurs droits et obligations respectifs ; elle a donc exactement été déclarée abusive par le premier juge. Par ailleurs, non prévue au modèle type et aux dispositions légales et réglementaires, cette clause contrevient donc au formalisme en la matière et rend dès lors le contrat irrégulier au regard des dispositions précitées des articles L. 311-8 et s et R. 311-6 du Code de la consommation ; le premier juge en a donc tout aussi exactement tiré les conséquences en prononçant la déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels.

Dès lors c'est par des calculs exacts que la cour reprend que le premier juge tirant les conséquences de la déchéance du droit aux intérêts contractuels a condamné l'emprunteur à payer à la banque la somme de 7.319,89 € avec intérêts au taux légal à compter du 3 janvier 2007.

La Caisse de Crédit Mutuel de MONTREUIL SUR MER succombe dans ses prétentions elle supportera la charge des dépens d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement ;

[minute Jurica page 5] Confirme le jugement ;

Condamne la Caisse de Crédit Mutuel de MONTREUIL SUR MER aux dépens de l'instance d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER,              LE PRÉSIDENT,

A. DESBUISSONS       P. CHARBONNIER