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TJ NÎMES, 7 janvier 2025

Nature : Décision
Titre : TJ NÎMES, 7 janvier 2025
Pays : France
Juridiction : T. jud. Nîmes
Demande : 24/00505
Date : 7/01/2025
Nature de la décision : Admission, Rejet
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 26/03/2024
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CERCLAB - DOCUMENT N° 24411

TJ NÎMES, 7 janvier 2025 : RG n° 24/00505 

Publication : Judilibre

 

Extrait (rappel de procédure) : « A l’audience du 15 octobre 2024, le juge soulève d’office le caractère abusif de la clause de réserve de propriété. »

Extrait (motifs) : « L’article R. 632-1 du Code de la consommation dispose que « le juge écarte d’office, après avoir recueilli les observations des parties, l’application d’une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat ». Selon l’article 1171 du Code civil, « dans un contrat d’adhésion, toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non-écrit. L’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix à la prestation ». Le juge doit examiner d’office le caractère abusif d’une clause incluse dans un contrat conclu entre un consommateur et un professionnel.

En l’espèce, le prêteur sollicite le bénéfice de la subrogation dans les droits du créancier en exécution de la clause de réserve de propriété aux termes de laquelle le vendeur du véhicule, conformément aux dispositions de l’article 1346-2 du Code civil, subroge le prêteur dans tous les droits et actions contre l’acheteur. Or, un paiement fait par le débiteur ne peut emporter subrogation, et ce même si la quittance énonce que ce paiement est fait au moyen de deniers empruntés à un tiers. Le créancier subrogeant doit recevoir son paiement d’une tierce personne, ce qui n’est pas le cas en l’espèce puisque l’auteur du paiement est l’acquéreur-emprunteur devenu, dès la conclusion du contrat, propriétaire des fonds ainsi libérés entre les mains du vendeur par le prêteur. La clause insérée au contrat, est donc une clause de « laisser croire » qui donne l’impression à l’acquéreur que la réserve de propriété a été régulièrement transférée. Or, la subrogation étant inopérante, cette clause sera déclarée abusive en ce qu’elle crée un déséquilibre significatif entre les parties.

La demande de restitution du véhicule formulée en application de la clause litigieuse sera donc rejetée. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NÎMES

JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION

JUGEMENT DU 7 JANVIER 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 24/00505. N° Portalis DBX2-W-B7I-KN76.

 

DEMANDERESSE :

SA CREDIPAR

RCS VERSAILLES N° XXX. [adresse], représentée par Maître Laure REINHARD de la SCP RD AVOCATS & ASSOCIES, avocats au barreau de NÎMES

 

DÉFENDEUR :

M. X.

Né Le [date] à [ville], [adresse], non comparant, ni représenté

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Laurence ALBERT, juge des contentieux de la protection

Greffier : Coraline MEYNIER, lors des débats et de la mise à disposition au greffe.

DÉBATS :

Date de la première évocation : 21 mai 2024

Date des Débats : 15 octobre 2024

Date du Délibéré : 7 janvier 2025

DÉCISION : réputée contradictoire conformément à l'article 473 du code de procédure civile, en premier ressort, rendue publiquement par mise à disposition au greffe du tribunal judiciaire de Nîmes, le 7 janvier 2025 en vertu de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Suivant offre préalable acceptée le 18 mai 2021, la SA CREDIPAR a consenti à M.X. un prêt affecté à l’acquisition d’un véhicule de marque Mercedes modèle Classe B, d’un montant de 11 800 euros au taux contractuel annuel de 5,09 %.

Le véhicule a été livré le 5 juin 2021.

A la suite d’impayés, une mise en demeure lui a été adressée par lettre recommandée avec accusé de réception, reçue le 30 septembre 2023, d’avoir à payer sous huit jours la somme de 1.027,20 euros au titre des échéances impayées.

La déchéance du terme a été prononcée.

Par acte du 26 mars 2024, la SA CREDIPAR a cité M.X. devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nîmes aux fins de voir condamner le défendeur au paiement de la somme de 11.570,81 euros portant intérêts contractuels de 5,09 % à compter du 22 mars 2024 et jusqu’à complet paiement.

Elle sollicite que M.X. soit condamné à restituer à l’emprunteur le véhicule, muni de ses accessoires, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision, en exécution de la clause de réserve de propriété.

Elle demande la condamnation de M.X. au paiement de la somme de 800 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.

A l’audience du 15 octobre 2024, le juge soulève d’office le caractère abusif de la clause de réserve de propriété.

La SA CREDIPAR comparaît, représentée par son avocat, et poursuit le bénéfice de son assignation.

M.X., régulièrement cité, ne comparaît pas.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Selon l'article 472 du Code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Le présent litige est relatif à un crédit soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu’il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur numérotation et rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et au jour du contrat.

 

Sur la recevabilité :

La forclusion de l’action en paiement est une fin de non-recevoir qui doit être relevée d’office par le juge en application de l’article 125 du Code de procédure civile comme étant d’ordre public selon l’article L. 314-24 du Code de la consommation.

En l’espèce, le premier incident de paiement non régularisé est daté du 5 juin 2022.

Au regard des pièces produites aux débats, en particulier du contrat et de l’historique du compte, il apparaît que la présente action a été engagée le 26 mars 2024 avant l’expiration d’un délai de deux années à compter du premier incident de paiement non régularisé, conformément aux dispositions de l’article R 312-35 du Code de la consommation.

En conséquence, la SA CREDIPAR sera jugée recevable en ses demandes.

 

Sur la demande en paiement :

Aux termes des dispositions de l’article 1353 du Code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver ; et, réciproquement, celui qui s’en prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

En l’espèce, la SA CREDIPAR produit au soutien de sa demande en paiement l’historique du compte et le décompte des sommes dues, dont il ressort que M.X. est débiteur au 22 mars 2024 de la somme de 10 151,90 euros au titre du capital restant dû et des échéances impayées.

La SA CREDIPAR sollicite le paiement de la somme de 688,93 euros au titre des intérêts de retard arrêtés au 22 mars 2024, mais ne produit aucun calcul des intérêts et sera déboutée de sa demande.

Il résulte de l’examen de ces pièces que la preuve de l’obligation dont le prêteur réclame l’exécution est partiellement rapportée, la créance pouvant être fixée en principal à la somme de10 151,90 euros.

M.X., non comparant, ne rapporte pas la preuve de sa libération.

En conséquence, il sera condamné à payer à la SA CREDIPAR la somme de 10 151,90 euros, portant intérêts contractuels au taux annuel de 5,09 % sur la somme de 9 124,70 euros, montant du capital restant dû, à compter du 22 mars 2024 et jusqu’à parfait paiement.

 

Sur la clause pénale :

Aux termes de l'article 1152 du Code civil, lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine si celle-ci est manifestement excessive ou dérisoire.

En l’espèce, il y a lieu de dire que cette indemnité d’un montant de 729,98 euros est manifestement disproportionnée au regard du préjudice réellement subi par la demanderesse et par ailleurs non justifié aux débats.

La clause pénale sera ainsi réduite à néant.

 

Sur la demande de restitution du véhicule en application de la clause contractuelle de réserve de propriété :

L’article R. 632-1 du Code de la consommation dispose que « le juge écarte d’office, après avoir recueilli les observations des parties, l’application d’une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat ».

Selon l’article 1171 du Code civil, « dans un contrat d’adhésion, toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non-écrit. L’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix à la prestation ».

Le juge doit examiner d’office le caractère abusif d’une clause incluse dans un contrat conclu entre un consommateur et un professionnel.

En l’espèce, le prêteur sollicite le bénéfice de la subrogation dans les droits du créancier en exécution de la clause de réserve de propriété aux termes de laquelle le vendeur du véhicule, conformément aux dispositions de l’article 1346-2 du Code civil, subroge le prêteur dans tous les droits et actions contre l’acheteur.

Or, un paiement fait par le débiteur ne peut emporter subrogation, et ce même si la quittance énonce que ce paiement est fait au moyen de deniers empruntés à un tiers. Le créancier subrogeant doit recevoir son paiement d’une tierce personne, ce qui n’est pas le cas en l’espèce puisque l’auteur du paiement est l’acquéreur-emprunteur devenu, dès la conclusion du contrat, propriétaire des fonds ainsi libérés entre les mains du vendeur par le prêteur.

La clause insérée au contrat, est donc une clause de “laisser croire” qui donne l’impression à l’acquéreur que la réserve de propriété a été régulièrement transférée.

Or, la subrogation étant inopérante, cette clause sera déclarée abusive en ce qu’elle crée un déséquilibre significatif entre les parties.

La demande de restitution du véhicule formulée en application de la clause litigieuse sera donc rejetée.

 

Sur les autres demandes :

Succombant à l’instance, M.X. sera condamné à payer à la SA CREDIPAR la somme de 200 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il supportera la charge des dépens de l’instance.

Il n’y a pas lieu de suspendre l’exécution provisoire de la décision de première instance.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le juge des contentieux de la protection siégeant au tribunal judiciaire de Nîmes, statuant par jugement réputé contradictoire et rendu en premier ressort,

Juge recevable les demandes de la SA CREDIPAR,

Condamne M.X. à payer à la SA CREDIPAR la somme de 10.151,90 euros, portant intérêts contractuels au taux annuel de 5,09 % sur la somme de 9.124,70 euros, à compter du 22 mars 2024 et jusqu’à parfait paiement,

Déboute la SA CREDIPAR de sa demande d’indemnité au titre de la clause pénale,

Déboute la SA CREDIPAR de sa demande de restitution du véhicule, en application de la clause contractuelle de réserve de propriété réputée non-écrite,

Condamne M.X. à payer à la SA CREDIPAR la somme de 200 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamne M.X. à supporter les dépens de l’instance,

Rappelle que la décision de première instance est de droit exécutoire à titre provisoire.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition du jugement au greffe du tribunal judiciaire de Nîmes le 7 janvier 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

La greffière                                       La présidente