CA PARIS (pôle 4 ch. 9), 1er avril 2010
CERCLAB - DOCUMENT N° 2482
CA PARIS (pôle 4 ch. 9), 1er avril 2010 : RG n° 07/16514
Publication : Jurica
Extrait : « Considérant cela exposé que, si le délai biennal de forclusion prévu par l'article L. 311-37 du Code de la consommation dans sa rédaction antérieure à la loi MURCEF du 11 décembre 2001 fait obstacle, pour les contrats conclus, comme en l'espèce, antérieurement à la promulgation de cette loi, à ce que l'irrégularité du contrat puisse être invoquée passé un délai de deux ans à compter de sa date, il ne peut recevoir application en ce qui concerne le moyen lié à la forclusion de l'action en paiement ;
Considérant qu'en première instance, Madame Y. n'avait pas comparu ; qu'en application des dispositions de l'article 472 du Code de procédure civile, lorsqu'un défendeur ne comparait pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée ; que c'est donc à bon droit que le premier juge a vérifié si l'action était recevable ;
Considérant que le point de départ à l'expiration duquel une action ne peut plus être exercée se situe à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance ; que le délai biennal de forclusion de l'article L. 311-37 du Code de la consommation court donc, dans le cas d'une ouverture de crédit d'un montant déterminé et reconstituable assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, à compter de la date à laquelle le montant du dépassement maximum convenu à l'ouverture, (crédit consenti au sens de l'article L. 311-9 du Code susvisé), n'est pas régularisé, cette situation constituant un incident qui caractérise la défaillance de l'emprunteur ;
Que l'offre préalable nécessaire pour toute augmentation de crédit ne saurait être utilement substituée par une clause du contrat prévoyant la possibilité d'utilisation du compte au delà du crédit utilisable, dans la limite du montant maximum du crédit autorisé ; que pas davantage la défaillance de l'emprunteur ne peut être utilement effacée par l'octroi d'un crédit complémentaire intervenu dans des conditions irrégulières et pour lesquelles la seule sanction serait la déchéance du droit aux intérêts ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 4 CHAMBRE 9
ARRÊT DU 1er AVRIL 2010
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 07/16514. Décision déférée à la Cour : Jugement du 6 juin 2007 - Tribunal d'Instance de SENS - RG n° 07/000091.
APPELANTE :
SOCIÉTÉ ANONYME LASER COFINOGA, anciennement dénommée S.A. COFINOGA,
représentée par son Président du Conseil d'Administration et tous représentants légaux [adresse], représentée par la SCP GARNIER, avoués à la Cour, assistée de Maître Rudy FARIA, avocat au barreau de SENS
INTIMÉS :
Monsieur X.
[adresse], représenté par la SCP MIRA - BETTAN, avoués à la Cour (dépôt de dossier)
Madame Y.
[adresse], représentée par la SCP MIRA - BETTAN, avoués à la Cour (dépôt de dossier)
COMPOSITION DE LA COUR : [minute Jurica page 2] Après rapport oral et en application des dispositions de l'article 786 et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 février 2010, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Geneviève REGNIEZ, conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Marie-José PERCHERON, présidente, Madame Catherine BONNAN-GARÇON, conseillère, Madame Geneviève REGNIEZ, conseillère
GREFFIERS : Lors des débats : Madame Sandra PEIGNIER - Lors du prononcé : Nicaise BONVARD
ARRÊT : CONTRADICTOIRE, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, signé par Madame Marie-José PERCHERON, présidente et par Madame Nicaise BONVARD, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu l'appel interjeté par la société COFINOGA (actuellement dénommée LASER COFINOGA) d'un jugement réputé contradictoire rendu par le tribunal d'instance de SENS le 6 juin 2007 qui l'a déclarée irrecevable en ses demandes en paiement, pour forclusion, et a rejeté toutes autres demandes,
Vu les conclusions de la société LASER COFINOGA en date du 19 janvier 2010 par lesquelles elle prie la cour d'infirmer le jugement et de condamner solidairement Monsieur X. et Madame Y. au paiement des sommes de 22.487,34 euros outre intérêts de retard au taux de 16,72 % sur la somme de 21.044,78 euros à compter du 13 septembre 2006 et de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
Vu les conclusions de Monsieur X. et de son épouse Madame Y. du 11 décembre 2009 par lesquelles ils demandent la confirmation du jugement,
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR :
Considérant que par contrat du 2 novembre 1998, la société COFINOGA a consenti à Monsieur X. et à Madame Y. une offre préalable d'ouverture de crédit par découvert en compte, pour un montant de 40.000 francs (soit 6.097,96 euros) utilisable par fractions, remboursable par mensualités, avec un découvert maximum autorisé de 140.000 francs (21.342,86 euros) ;
Considérant que la société COFINOGA, exposant que les emprunteurs n'avaient pas honoré le paiement des échéances de remboursement, ce qui l'avait conduite à prononcer la déchéance du terme, les a assignés, par acte d'huissier du 26 février 2007, devant le tribunal d'instance qui a déclaré son action forclose au motif que le montant du crédit autorisé avait été, depuis décembre 2003, constamment supérieur au découvert convenu de 40.000 francs, dépassement qui constituait le point de départ du délai de forclusion et que la société COFINOGA ne pouvait se prévaloir de la clause l'autorisant à augmenter le découvert autorisé sans communication d'une nouvelle offre, jugeant cette clause abusive ;
[minute Jurica page 3] Considérant qu'au soutien de son appel, la société COFINOGA fait essentiellement valoir que:
- le juge n'avait pas à soulever d'office le moyen de forclusion, s'agissant d'une disposition protectrice des seuls emprunteurs, qu'il était en outre forclos pour le faire, le contrat ayant été souscrit antérieurement à la loi du 11 décembre 2001 (loi MURCEF),
- il n'existe pas de dépassement de découvert, le contrat prévoyant un montant global de crédit de 21.342,86 euros que l'emprunteur utilise de façon fractionnée aux dates de son choix,
- il n'y a donc pas lieu de faire souscrire une nouvelle offre pour les évolutions du montant disponible initial convenu, dès lors que le montant du découvert reste dans la limite du crédit maximum consenti initialement,
- l'évolution du découvert utile initial ne constitue pas la « défaillance de l'emprunteur » au sens de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, la défaillance, point de départ du délai de forclusion étant caractérisée par la première échéance impayée non régularisée, soit en l'espèce, octobre 2005,
- la clause selon laquelle le montant de l'ouverture de crédit fixé initialement peut être dépassée avec l'accord du prêteur en fonction des tirages effectués a, à tort, été considérée comme abusive ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Considérant cela exposé que, si le délai biennal de forclusion prévu par l'article L. 311-37 du Code de la consommation dans sa rédaction antérieure à la loi MURCEF du 11 décembre 2001 fait obstacle, pour les contrats conclus, comme en l'espèce, antérieurement à la promulgation de cette loi, à ce que l'irrégularité du contrat puisse être invoquée passé un délai de deux ans à compter de sa date, il ne peut recevoir application en ce qui concerne le moyen lié à la forclusion de l'action en paiement ;
Considérant qu'en première instance, Madame Y. n'avait pas comparu ; qu'en application des dispositions de l'article 472 du Code de procédure civile, lorsqu'un défendeur ne comparait pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée ; que c'est donc à bon droit que le premier juge a vérifié si l'action était recevable ;
Considérant que le point de départ à l'expiration duquel une action ne peut plus être exercée se situe à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance ; que le délai biennal de forclusion de l'article L. 311-37 du Code de la consommation court donc, dans le cas d'une ouverture de crédit d'un montant déterminé et reconstituable assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, à compter de la date à laquelle le montant du dépassement maximum convenu à l'ouverture, (crédit consenti au sens de l'article L. 311-9 du Code susvisé), n'est pas régularisé, cette situation constituant un incident qui caractérise la défaillance de l'emprunteur ;
Que l'offre préalable nécessaire pour toute augmentation de crédit ne saurait être utilement substituée par une clause du contrat prévoyant la possibilité d'utilisation du compte au delà du crédit utilisable, dans la limite du montant maximum du crédit autorisé ; que pas davantage la défaillance de l'emprunteur ne peut être utilement effacée par l'octroi d'un crédit complémentaire intervenu dans des conditions irrégulières et pour lesquelles la seule sanction serait la déchéance du droit aux intérêts ;
Considérant qu'en l'espèce, le solde débiteur du compte, ainsi que le montrent l'historique du compte et les relevés de compte annuels mis aux débats, a constamment été supérieur à la somme de 6.097,96 euros à compter de décembre 2003, ce dépassement jamais restauré manifestant la défaillance de l'emprunteur et constituant le point de départ de la forclusion édictée par l'article L. 311-37 du Code de la consommation, laquelle était acquise à la date de l'assignation ; que le jugement sera en conséquence confirmé ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute Jurica page 4] PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement ;
Laisse les dépens à la charge de la société LASER COFINOGA.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
- 5707 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Recevabilité - Délai pour agir - Forclusion - Crédit à la consommation
- 5717 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Office du juge - Relevé d’office - Principe - Faculté - Jurisprudence antérieure - Clauses abusives
- 5719 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Office du juge - Relevé d’office - Principe - Faculté - Jurisprudence antérieure - Crédit à la consommation
- 5722 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Office du juge - Relevé d’office - Principe - Obligation - Jurisprudence antérieure à la loi du 17 mars 2014
- 5745 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Conséquences sur l’issue du litige - Effet rétroactif - Point de départ d’une forclusion - Illustrations
- 6631 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 2 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Obligation de faire une offre
- 6635 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 6 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Notion d’augmentation du crédit