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CA NANCY (2e ch. com.), 9 juin 2010

Nature : Décision
Titre : CA NANCY (2e ch. com.), 9 juin 2010
Pays : France
Juridiction : Nancy (CA), 2e ch. com.
Demande : 08/02915
Date : 9/06/2010
Nature de la décision : Confirmation
Numéro de la décision : 1712
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2596

CA NANCY (2e ch. com.), 9 juin 2010 : RG n° 08/02915 ; arrêt n° 1712

 

Extraits : 1/ « Mais attendu que les premiers Juges ont considéré que la société Pharmacie de la X. est une société commerciale qui a accompli des actes de commerce en signant les conventions litigieuses et que, de ce fait, elle ne pouvait pas bénéficier de la protection au profit du consommateur prévue par le code de la consommation ; Attendu qu'en statuant par ces motifs, les premiers Juges n'ont pas posé une norme en contravention de l'article 5 du code civil, ni excédé leurs pouvoirs ; que le moyen développé par la société Pharmacie de la X. sera rejeté ».

2/ « Attendu que le contrat souscrit, s'il est étranger au domaine spécifique de la pharmacie, est en lien direct avec l'exploitation de l'officine, puisqu'il tend à assurer la protection des locaux professionnels, protection d'autant plus nécessaire qu'il s'agit de l'exploitation d'une pharmacie, qui est par nature exposée au risque d'intrusion ;

Attendu qu'il suit que la société Pharmacie de la X., qui a contracté pour les besoins de son commerce doit être considérée comme un professionnel au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation ; qu'elle ne bénéficie donc pas de la protection instituée par les dispositions de ce texte ; que la nullité des clauses tenues pour abusives n'est donc pas encourue ;

Attendu que, dans ces conditions, la société Financiel n'était pas tenue de faire application des dispositions de l'article L. 136-1 du code de la consommation qui font obligation au professionnel d'informer le consommateur de la possibilité de ne pas reconduire le contrat conclu avec une clause de tacite reconduction ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 9 JUIN 2010

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 08/02915. Arrêt n° 1712/10. Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Commerce de SAINT-DIÉ DES VOSGES, R.G. n° 07/1702, en date du 8 octobre 2008,

 

APPELANTE :

SELARL PHARMACIE DE LA X.,

prise en la personne de ses représentants légaux pour ce domiciliés audit siège, sise [adresse], représentée par Maître GRÉTÉRÉ, avoué à la Cour, assistée de Maître Hervé STOURBE, avocat au barreau de SAINT-DIE-DES-VOSGES

 

INTIMÉE :

SARL FINANCIEL,

prise en la personne de ses représentants légaux pour ce domiciliés audit siège, sise [adresse], représentée par la SCP MILLOT-LOGIER & FONTAINE, avoués à la Cour, assistée de Maître Denis JEANNEL, avocat au barreau de SAINT-DIE-DES-VOSGES, substitué à l'audience par Maître BURRUS Maxime, avocat au barreau de SAINT-DIE-DES-VOSGES

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 11 mai 2010, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Bernard CUNIN, Président de Chambre.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de Monsieur Bernard CUNIN, Président de Chambre, Madame Patricia POMONTI, Conseiller, Madame Marie-Hélène DELTORT, Conseiller,

Greffier, Madame Caroline HUSSON, lors des débats ;

A l'issue des débats, le Président a informé les parties que le délibéré serait prononcé le 9 juin 2010.

ARRÊT : Contradictoire, prononcé à l'audience publique du 9 juin 2010, par Monsieur Bernard CUNIN, Président, conformément à l'article 452 du Code de Procédure Civile ; signé par Monsieur Bernard CUNIN, Président, et par Madame Caroline HUSSON, faisant fonction de greffier présent lors du prononcé ;

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :

La Selarl Pharmacie de la X. a souscrit le 18 juillet 2002 auprès de la société Financiel un contrat de location de matériel de surveillance électronique d'une durée de 48 mois moyennant le payement d'un loyer mensuel de 109,51 euros.

Le même jour un contrat d'abonnement portant sur ce matériel de surveillance a été souscrit avec la société Diffus'Est pour la même durée.

La Selarl Pharmacie de la X. a fait connaître le 10 juillet 2006 à la société Diffus'Est par lettre recommandée avec demande d'avis de réception qu'elle ne souhaitait pas renouveler le contrat et désirait bénéficier de l'option d'achat.

Les contrats Financiel et Diffus'Est arrivaient à échéance le 18 juillet 2006. Ils avaient été initialement conclus le 18 juillet 1998, mais avaient été renouvelés en 2002.

La Selarl Pharmacie de la X. a refusé de payer les loyers au-delà du 18 juillet 2006, malgré les mises en demeure de la société Financiel.

La société Financiel a fait assigner, par exploit du 16 août 2007, la Selarl Pharmacie de la X. pour obtenir sa condamnation à lui payer la somme principale de 4.834,36 euros.

Par jugement en date du 8 octobre 2008, le Tribunal de commerce de Saint Dié s'est déclaré compétent pour statuer sur le litige et a jugé que la résiliation du contrat est intervenue le 16 août 2007 aux torts de la Selarl Pharmacie de la X.

Le tribunal a condamné avec exécution provisoire la Selarl Pharmacie de la X. à payer à la société Financiel la somme de 1.605,73 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 août 2007, outre la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a ordonné sous astreinte la restitution du matériel.

La Selarl Pharmacie de la X. a relevé appel de ce jugement et demande à la Cour de l'infirmer.

Elle demande à la Cour de dire que la juridiction territorialement compétente est le Tribunal de commerce de Nancy et sollicite le renvoi de l'affaire devant cette juridiction. Elle demande que soit prononcée la nullité du jugement pour violation de l'article 5 du code civil.

Elle prétend que certaines clauses du contrat sont abusives et doivent être annulées et estime qu'elle était en droit de mettre un terme à tout moment au contrat à compter de la date de reconduction tacite. Elle demande à la Cour de débouter la société Financiel de ses demandes et de la condamner à lui rembourser les sommes payées en exécution du jugement, outre une indemnité de 5.000 euros et une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

[minute page 3] La société Financiel demande à la Cour de confirmer le jugement déféré, sauf à fixer à la somme de 4.834,36 euros, outre les intérêts, la condamnation de la société Pharmacie de la X. Elle réclame une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que la clause attributive de compétence aux Tribunaux de Saint Dié insérée au contrat est valable, de sorte que le Tribunal de commerce de Saint Dié était compétent pour statuer sur le litige. Elle estime que les premiers Juges n'ont pas enfreint les dispositions de l'article 5 du code civil, de sorte que la nullité du jugement n'est pas encourue.

Elle prétend que, s'agissant d'un contrat souscrit entre commerçants et pour les besoins de l'activité commerciale de la société Pharmacie de la X., les dispositions du code de la consommation revendiquées ne sont pas applicables.

Elle fait observer que la société Pharmacie de la X. n'a pas résilié le contrat dans les formes prévues, de sorte que ce contrat a été reconduit tacitement.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la compétence :

Attendu que la société Pharmacie de la X. revendique la compétence du Tribunal de commerce de Nancy et demande le renvoi de l'affaire devant cette juridiction ; qu'elle s'appuie sur les dispositions de l'article 48 du code de procédure civile qui exige que la clause attributive de compétence dérogatoire soit spécifiée dans le contrat de manière très apparente ;

Attendu que l'article 48 du code de procédure civile dispose que toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite, à moins qu'elle n'ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu'elle n'ait été spécifiée de façon très apparente dans l'engagement de la partie à qui elle est opposée ;

Attendu qu'en l'espèce le contrat, qui a été conclu entre commerçants, contient une clause attributive de compétence précisant que tout litige auquel peut donner lieu l'exécution des obligations du loueur et du locataire sont de la compétence exclusive des tribunaux de Saint Dié ;

Attendu qu'il résulte de l'examen du contrat signé par les parties que cette clause est placée à l'article 16 intitulé « Élection de domicile - Compétence » et apparaît en caractères très apparents ; qu'elle est donc valable et s'impose aux parties ; que c'est donc à bon droit que les premiers Juges ont retenu la compétence du Tribunal de commerce de Saint Dié ;

 

Sur l'article 5 du code civil :

Attendu que la société Pharmacie de la X. demande à la Cour d'annuler le jugement sur le fondement de l'article 5 du code civil, qui interdit aux Juges de prononcer par [minute page 4] voie de disposition générale et réglementaire sur les causes qui leur sont soumises ; qu'elle prétend en effet qu'en énonçant que la société Pharmacie de la X. est une Selarl inscrite au registre du commerce et qu'en tant que telle, elle ne peut se prévaloir d'être un consommateur au titre des articles du code de la consommation, les premiers Juges ont violé ce texte ;

Mais attendu que les premiers Juges ont considéré que la société Pharmacie de la X. est une société commerciale qui a accompli des actes de commerce en signant les conventions litigieuses et que, de ce fait, elle ne pouvait pas bénéficier de la protection au profit du consommateur prévue par le code de la consommation ;

Attendu qu'en statuant par ces motifs, les premiers Juges n'ont pas posé une norme en contravention de l'article 5 du code civil, ni excédé leurs pouvoirs ; que le moyen développé par la société Pharmacie de la X. sera rejeté ;

 

Sur la protection du code de la consommation :

Attendu que la société Pharmacie de la X. prétend qu'elle bénéficie des dispositions protectrices de l'article L. 132-1 du code de la consommation qui prévoient que, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu'elle fait valoir que le contrat souscrit en vue d'assurer la protection électronique de ses locaux professionnels est étranger à son domaine de compétence, de sorte qu'elle doit être considérée comme un non professionnel ; qu'elle ajoute que la durée obligatoire du contrat, l'impossibilité de résiliation avant terme, le mécanisme de reconduction tacite et l'existence d'une clause pénale constituent des clauses abusives qui doivent être annulées ;

Attendu que la société Pharmacie de la X. a souscrit le 18 juillet 2002 auprès de la société Financiel un contrat de location d'une centrale électronique en vue de protéger ses locaux professionnels ; que les parties s'opposent sur la qualification de consommateur ou de non professionnel qu'il convient d'attribuer à la société Pharmacie de la X. dans le cadre du contrat litigieux ;

Attendu que le contrat souscrit, s'il est étranger au domaine spécifique de la pharmacie, est en lien direct avec l'exploitation de l'officine, puisqu'il tend à assurer la protection des locaux professionnels, protection d'autant plus nécessaire qu'il s'agit de l'exploitation d'une pharmacie, qui est par nature exposée au risque d'intrusion ;

Attendu qu'il suit que la société Pharmacie de la X., qui a contracté pour les besoins de son commerce doit être considérée comme un professionnel au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation ; qu'elle ne bénéficie donc pas de la protection instituée par les dispositions de ce texte ; que la nullité des clauses tenues pour abusives n'est donc pas encourue ;

Attendu que, dans ces conditions, la société Financiel n'était pas tenue de faire application des dispositions de l'article L. 136-1 du code de la consommation qui font obligation au professionnel d'informer le consommateur de la possibilité de ne pas reconduire le contrat conclu avec une clause de tacite reconduction ;

[minute page 5] Attendu que la société Pharmacie de la X. n'a pas dénoncé le contrat selon les modalités fixées dans l'article 11 relatif à la fin de la location ; qu'en application de cet article le contrat était donc reconduit sous réserve de la possibilité de résiliation par le bailleur en cas de non-paiement du loyer ;

 

Sur l'absence de cause :

Attendu que la société Pharmacie de la X. demande à la Cour de prononcer l'annulation du contrat pour absence de cause, dans la mesure où le bailleur n'assume aucune obligation ;

Mais attendu qu'il n'est pas contesté que la société Financiel a mis à la disposition de la société Pharmacie de la X. du matériel de protection conformément aux clauses du contrat ; que ce contrat ne peut donc pas être annulé pour absence de cause ;

 

Sur l'indemnité de résiliation :

Attendu que la société Financiel demande l'infirmation du jugement en ce que les premiers Juges ont limité à la somme de 1.605,73 euros la condamnation de la société Pharmacie de la X., alors qu'en application des clauses du contrat, l'indemnité de résiliation s'élève à la somme de 4.834,36 euros ;

Attendu que le contrat prévoit en son article 10 qu'en cas de résiliation, le locataire s'oblige à verser au loueur, en sus de toute autre somme due en vertu du contrat, une indemnité de résiliation égale au total des loyers TTC non encore échus majorés de 10 % tels que ces chiffres ressortent des conditions particulières

Attendu que, la société Pharmacie de la X. ne réglant plus ses loyers à compter du mois d'août 2006, la société Financiel l'a mise en demeure par lettre en date du 21 septembre 2006, puis l'a fait assigner le 16 août 2007 afin notamment de faire constater la résiliation du contrat ;

Attendu que les premiers Juges ont réduit le montant de l'indemnité réclamée en exposant que les contrats signés par la société Pharmacie de la X. et la société Diffus'Est étaient interdépendants, de sorte que la dénonciation de l'un a mis fin à l'autre ; que ce moyen n'est cependant pas repris devant la Cour ;

Attendu en conséquence qu'il convient de faire droit à la demande de la société Financiel ; qu'en effet le montant de l'indemnité réclamée est conforme à la clause du contrat relative à la résiliation aux torts de locataire ;

 

Sur les autres demandes :

Attendu que la société Pharmacie de la X., qui succombe en son appel, sera déboutée de ses demandes, notamment de sa demande d'indemnités pour procédure abusive et au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et sera condamnée aux dépens d'appel ; qu'elle sera condamnée au payement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 6] PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort,

Déboute la société Pharmacie de la X. de sa demande de nullité du jugement ;

Confirme le jugement en date du 8 octobre 2008 du Tribunal de commerce de Saint Dié, honnis en ce qu'elle a condamné la société Pharmarcie de la X. à payer à la société Financiel la somme de MILLE SIX CENT CINQ EUROS ET SOIXANTE TREIZE CENTIMES (1.605,73 e) outre les intérêts ;

Et statuant à nouveau sur ce chef de demande :

Condamne la société Pharmacie de la X. à payer à la société Financiel la somme de QUATRE MILLE HUIT CENT TRENTE QUATRE EUROS ET TRENTE SIX CENTIMES (4.834,36 €) avec intérêts au taux légal à compter du 16 août 2007, date de l'assignation ;

Déboute la société Pharmacie de la X. du surplus de ses demandes, notamment de sa demande d'indemnités et au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Pharmacie de la X. à payer à la société Financiel la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500  €) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Pharmacie de la X. aux dépens d'appel et autorise la SCP Millot, Logier et Fontaine, avoués associés, à les recouvrer directement, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

L'arrêt a été prononcé à l'audience du neuf juin deux mille dix par Monsieur CUNIN, Président de la deuxième chambre commerciale à la Cour d'Appel de NANCY, conformément à l'article 452 du Code de Procédure Civile, assisté de Madame HUSSON, faisant fonction de greffier.

Et Monsieur le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT,

Minute en six pages.

 

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