CA LYON (1re ch. civ. sect. B), 9 novembre 2010
CERCLAB - DOCUMENT N° 2936
CA LYON (1re ch. civ. sect. B), 9 novembre 2010 : RG n° 09/03801
Publication : Jurica
Extrait : « La société Triumsport a souscrit auprès de la société Générali Assurances un contrat la garantissant contre le vol et le vandalisme pour ses locaux professionnels situés à [ville V.]. […]
Attendu que les conditions générales de la police prévoient que sont garanties la disparition, la détérioration ou la destruction du matériel et des marchandises renfermés dans les locaux suite à un vol ou un acte de vandalisme commis : - avec effraction des locaux, - par escalade des locaux, - suite au vol des propres clés de l'assuré, - avec violences ou menace de violences corporelles, - au cours de l'incendie de tout ou partie du bâtiment,
que cette clause constitue une délimitation du risque garanti, et non une exclusion de risque ; qu'elle ne peut être sanctionnée au titre d'une clause abusive, dès lors que l'assuré a souscrit un contrat à risques déterminés, et non un contrat « tout risques », en contrepartie de primes calculées en fonction des risques garantis, et que la clause de délimitation des risques ne crée pas de déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, l'assuré bénéficiant des garanties clairement définies, notamment dans un certain nombre d'hypothèses de vols couramment perpétrés ; que la société Générali Assurances souligne à juste titre qu'il n'est pas abusif de limiter la garantie aux circonstances échappant totalement au contrôle de l'assuré ».
COUR D’APPEL DE LYON
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION B
ARRÊT DU 9 NOVEMBRE 2010
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)
R.G : 09/03801. Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON - Au fond - du 19 mai 2009 - RG : 08/02971.
APPELANTE :
SARL TRIUMSPORT,
représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour, assistée par Maître CARON avocat au barreau de Lyon
INTIMÉE :
SA GROUPE GÉNÉRALI ASSUANCES,
représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour, assistée de Maître Jean-françois CARLOT, avocat au barreau de LYON
Date de clôture de l'instruction : 21 septembre 2010
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 11 octobre 2010
Date de mise à disposition : 9 novembre 2010
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : - Jean-Jacques BAIZET, président - Dominique ROUX, conseiller - Claude MORIN, conseiller, assistés pendant les débats de Frédérique JANKOV, greffier
A l'audience, M. BAIZET a fait le rapport, conformément à l'article 785 du Code de procédure civile.
ARRÊT : Contradictoire, rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile, signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Frédérique JANKOV, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DE L'AFFAIRE :
La société Triumsport a souscrit auprès de la société Générali Assurances un contrat la garantissant contre le vol et le vandalisme pour ses locaux professionnels situés à [ville V.]. Le contrat garantit la disparition de marchandises renfermées dans les locaux suite à un vol par effraction à la suite d'un vol commis avec effraction ou suite au vol de ses propres clés.
La société Générali Assurances ayant refusé de garantir un vol commis le 18 septembre 2007 en l'absence d'effraction ou de vol de clés, la société Triumsport l'a assignée en indemnisation de son préjudice.
Par jugement du 19 mai 2009, le tribunal de grande instance de Lyon l'a déboutée de sa demande.
La société Triumsport, appelante, conclut à la réformation du jugement et sollicite la condamnation de la société Générali Assurances, à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice commercial. Elle fait valoir que les conditions générales de la police doivent s'interpréter en faveur de l'assuré, que la preuve du vol étant libre, elle ne peut être limitée par le contrat, que le voleur a agi par ruse puisqu'il a désactivé les Codes de sécurité des locaux et qu'il s'agit donc d'une introduction clandestine. Elle considère qu'aucun reproche ne peut lui être adressé sur la fermeture des locaux, puisque la protection électrique qu'elle avait mise en place a été jugée suffisante par l'assureur. Elle soutient que la clause définissant le vol est abusive au sens de l’article L. 132-1 du Code de la consommation, dès lors que ne prévoyant pas la notion d'introduction clandestine, qui est un mode de preuve du vol, elle permet à l'assureur de bénéficier d'un avantage certain sur son assuré. Elle estime en outre que les clauses d'exclusion devant être formelles et limitées, les clauses d'exclusion de garantie sont limitées à un certain nombre de cas, parmi lesquels ne figure pas l'introduction clandestine, de sorte que le contrat doit recevoir application. Elle soutient enfin que la notion même d'effraction doit trouver application puisque l'auteur a utilisé frauduleusement les Codes d'accès pour entrer dans les locaux.
La société Générali Assurances, intimée, conclut à la confirmation du jugement. Elle fait valoir que les conditions de la garantie ne peuvent trouver application, puisque le société Triumsport reconnaît que le vol a été commis par un auteur qu'elle hébergeait dans ses locaux et qui disposait de tous les Codes d'accès lui permettant d'aller et venir dans ses locaux. Elle considère que la condition de garantie n'a aucun caractère abusif en l'absence de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, dès lors qu'il n'est pas abusif de limiter la garantie aux circonstances échappant totalement au contrôle de l'assuré, telles l'effraction ou le vol de clés. Elle souligne que la condition de garantie n'est pas une exclusion de risque. Elle estime que l'effraction n'est pas caractérisée au sens de l’article 132-73 du Code pénal, puisque la société Triumsport avait remis les Codes et moyens d'accès à l'auteur du vol, en sa qualité de gérant d'une société à laquelle elle avait consenti un bail commercial, en sous-location, sans l'accord du propriétaire et sans en aviser l'assureur.
Elle ajoute que les moyens de protection que la société Triumsport s'était engagée à mettre en oeuvre ne fonctionnaient pas au moment du sinistre, alors qu'elle avait déjà été victime de deux cambriolages.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Attendu que les conditions générales de la police prévoient que sont garanties la disparition, la détérioration ou la destruction du matériel et des marchandises renfermés dans les locaux suite à un vol ou un acte de vandalisme commis :
- avec effraction des locaux,
- par escalade des locaux,
- suite au vol des propres clés de l'assuré,
- avec violences ou menace de violences corporelles,
- au cours de l'incendie de tout ou partie du bâtiment,
que cette clause constitue une délimitation du risque garanti, et non une exclusion de risque ; qu'elle ne peut être sanctionnée au titre d'une clause abusive, dès lors que l'assuré a souscrit un contrat à risques déterminés, et non un contrat « tout risques », en contrepartie de primes calculées en fonction des risques garantis, et que la clause de délimitation des risques ne crée pas de déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, l'assuré bénéficiant des garanties clairement définies, notamment dans un certain nombre d'hypothèses de vols couramment perpétrés ; que la société Générali Assurances souligne à juste titre qu'il n'est pas abusif de limiter la garantie aux circonstances échappant totalement au contrôle de l'assuré ;
Attendu que le procès-verbal d'enquête de police fait apparaître que, comme l'admet la société Triumsport, le vol a été commis par le gérant d'une société à laquelle elle sous-louait des locaux, et qui possédait un double des clés des locaux, les Codes d'ouverture de la porte d'entrée et du rideau, ainsi que les Codes confidentiels de l'alarme sonore et du système de vidéosurveillance ; que celui-ci a pu désactiver les Codes de sécurité après la surveillance des locaux ; qu'il en découle que le vol n'a été commis ni par effraction, ni par usage de fausses clés ou vol des clés de l'assuré, mais par utilisation des clés et des Codes confidentiels confiés par l'assuré à l'auteur qui disposait d'un libre accès aux locaux; que contrairement à ce que soutient la société Triumsport, le mode opératoire utilisé ne peut être assimilé à une effraction au sens de l’article 132-73 du Code pénal ; que l'entrée dans les locaux, même si elle s'est produite en soirée à une heure non déterminée avec précision, n'est pas en elle-même frauduleuse, dès lors que l'auteur disposait d'un accès libre en vertu du contrat de sous-location que lui avait consenti la société Triumsport ; qu'en conséquence, le vol tel qu'il a été perpétré ni figurant pas parmi les risques garantis, cette dernière a été à juste titre déboutée de sa demande ;
Attendu qu'elle doit supporter les dépens et une indemnité en application de l’article 700 du Code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Condamne la société Triumsport à payer à la société Générali Assurances la somme supplémentaire de 1.200 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.
Condamne la société Triumsport aux dépens, avec droit de recouvrement direct par la SCP Brondel-Tudela, avoués.
Le Greffier Le Président
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