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CA PARIS (pôle 4 ch. 8), 5 avril 2012

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 4 ch. 8), 5 avril 2012
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 4 ch. 8
Demande : 11/10904
Date : 5/04/2012
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 9/06/2011
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3770

CA PARIS (pôle 4 ch. 8), 5 avril 2012 : RG n° 11/10904 ; arrêt n° 201 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Considérant que s'il est exact que l'article L. 132-1 du Code de la Consommation permet au juge de relever d'office le moyen tiré du caractère abusif d'une clause d'un contrat conclu entre un professionnel et un non professionnel, encore est-il nécessaire que la contestation introduite en ce sens ne soit pas atteinte par la prescription décennale édictée par l'article L. 110-4 du Code de Commerce dans sa rédaction alors applicable et que les dispositions dont se prévalent les appelants soient applicables au contrat de prêt litigieux ; Considérant que le contrat de prêt a été conclu le 20 mai 1988 ; que la contestation de Monsieur et Madame X. tendant à voir déclarer non écrite la clause figurant à l'article 5 du contrat a été formée pour la première fois devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de CRETEIL par assignation du 22 décembre 2009, soit plus de dix ans après la conclusion du contrat point de départ du délai de l'article L. 110-4 du Code de Commerce, dès lors que les emprunteurs ont eu connaissance de la clause le jour de la signature de l'acte authentique ; Considérant que la demande des époux X. est atteinte par la prescription décennale ;

Considérant par ailleurs que les dispositions relatives aux clauses abusives, aujourd'hui reprises dans l'article L. 132-1 du Code de la Consommation ont été instaurées par la loi du n° 95-96 du 1er février 1995 et ne peuvent s'appliquer de manière rétroactive a un acte conclu avant leur entrée en vigueur, étant observé au surplus que :

- la clause critiquée, outre qu'elle est rédigée de façon claire et compréhensible, ne peut s'analyser comme une clause abusive dès lors que, permettant un report des échéances du prêt sans intérêts supplémentaires à l'issue de la période de chômage, elle bénéficie aux emprunteurs, même si cette période est limitée à 18 mois ;

- les souscripteurs du prêt n'ont pu méconnaître les dispositions du contrat alors qu'ils ont paraphé chaque page de l'acte et qu'est versé aux débats le récépissé d'acceptation de l'offre de prêt, par lequel ils déclarent avoir reçu l'offre le 30 avril 1988 et l'avoir acceptée le 11 mai suivant ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 4 CHAMBRE 8

ARRÊT DU 5 AVRIL 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11/10904. Arrêt n° 201 (5 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 5 avril 2011 - Tribunal de Grande Instance de CRÉTEIL : R.G. n° 11/01397.

 

APPELANTS :

Monsieur X.

et

Madame Y. épouse X.

Représentés par Maître Frédéric INGOLD, avocat au barreau de PARIS (toque : B1055)

 

INTIMÉES :

Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

Représentée par la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIÉS, avocats au barreau de PARIS (toque : K0148), Assistée de Maître Patrice LEOPOLD, avocat au barreau de PARIS (toque : R 029)

SCP C. ET S.

prise en la personne de son représentant légal, Représentée par la SCP KIEFFER JOLY - BELLICHACH, avocats au barreau de PARIS (toque : L0028), Assistée de Maître Lucien MAIXOSSO, avocat au barreau de CRETEIL (toque : PC 370)

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 1re mars 2012, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Alain CHAUVET, Président, Madame Martine FOREST-HORNECKER, Conseiller, Madame Hélène SARBOURG, Conseiller, qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Emilie GUICHARD

ARRÊT CONTRADICTOIRE - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile - signé par Monsieur Alain CHAUVET, président et par Madame Sabine DAYAN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par jugement du 5 avril 2011 auquel la Cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de CRETEIL a :

- déclaré irrecevable le moyen tendant à voir reconnaître la responsabilité de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE pour défaut d'information et de conseil lors de la souscription du crédit immobilier le 20 mai 1988,

- déclaré recevables les autres contestations soulevées par Monsieur et Madame X. à l'encontre de la saisie attribution pratiquée le 14 janvier 2011 sur leur compte, auprès de la Société Générale,

- dit que la clause souscrite au titre de la garantie chômage dans le cadre du prêt consenti le 20 mai 1988 est valable et applicable,

- débouté Monsieur et Madame X. de l'ensemble de leurs contestations et demandes,

- les a condamnés à payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens.

Monsieur et Madame X. ont relevé appel du jugement par déclaration reçue au greffe de la Cour le 9 juin 2011.

 

Vu les dernières conclusions du 2 décembre 2011 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de leurs moyens et arguments, par lesquelles Monsieur et Madame X. demandent à la Cour de :

- réformer le jugement entrepris,

- statuant à nouveau, dire que la clause du contrat destinée à réduire la portée de l'assurance chômage souscrite par Monsieur et Madame X. aux seuls intérêts du prêt est réputée non écrite,

- ordonner la mainlevée de la saisie attribution pratiquée par la Banque le 14 janvier 2011,

- débouter la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de toutes ses demandes fins et prétentions,

- la condamner au paiement des sommes de 5.000 euros pour procédure abusive et de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

 

Vu les dernières conclusions du 6 décembre 2011 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments, par lesquelles la Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE SA demande à la Cour de :

- confirmer in parte qua le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable le moyen tendant à voir reconnaître la responsabilité du prêteur pour défaut d'information et de conseil lors de la souscription du crédit immobilier le 20 mai 1998 et ce en raison de l'acquisition de la prescription depuis le 21 mai 1998,

- le réformant et statuant à nouveau, dire que :

* la demande de nullité des pages 11 à 15 de l'acte notarié du 20 mai 1988,

* les critiques concernant la clause de report chômage, son prétendu caractère de clause abusive sont irrecevables car prescrites,

- subsidiairement, si la prescription n'était pas reconnue, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré valable et applicable la clause souscrite au titre de la garantie chômage dans le cadre du prêt du 20 mai 1988 et a débouté Monsieur et Madame X. de l'ensemble de leurs contestations et demandes,

- les débouter de l'ensemble de leurs demandes fins et prétentions,

- les condamner au paiement d'une somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

 

Vu les dernières conclusions du 6 décembre 2011 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments, par lesquelles la SCP C. ET S. demande à la Cour de :

- confirmer le jugement déféré,

- condamner conjointement et solidairement Monsieur et Madame X. au paiement des sommes suivantes :

* 5.000 euros pour procédure abusive

* 3.000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Considérant qu'aux termes d'un acte authentiques reçu le 20 mai 1988 par Maître A. notaire à [ville C.], L'UNION DE CRÉDIT POUR LE BÂTIMENT (UCB) a consenti à Monsieur et Madame X. un prêt de 768.000 francs (117.080,84 euros) pour leur permettre d'acquérir un terrain et de financer une construction à [ville B.] ;

Considérant que les emprunteurs ayant cessé le remboursement des échéances, la déchéance du terme est intervenue en août 2009 ; qu'en exécution d'une copie exécutoire de l'acte du 20 mai 1988 la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la société UCB a fait pratiquer par acte du 14 janvier 2011 une saisie attribution entre les mains de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE pour paiement de la somme totale de 30.318,53 euros ;

Considérant que l'acte notarié de prêt du 20 mai 1988 comporte en son article 5 intitulé Assurances, une clause au paragraphe B c) Chômage indiquant : « Report en fin de prêt des mensualités venant à échéance pendant la période de chômage à compter de la quatrième échéance mensuelle suivant la date de départ du service des prestations ASSEDIC, mais dans la limite de dix huit mois par période de chômage pour un assuré, licencié, percevant des allocations ASSEDIC ou assimilées... » ;

Ce report sera acquitté mensuellement par l'Emprunteur :

- en fin de crédit sur la base de la dernière échéance contractuelle...

- ou lors du remboursement total par anticipation volontaire ou forcée en totalité au moment de ce remboursement étant précisé que « les périodes successives de chômage ouvrant droit au bénéfice de la garantie ne peuvent par assuré, dépasser au total 36 mois. »

Considérant que Monsieur X. a fait l'objet le 21 novembre 2001d'un licenciement économique dont il a informé la société UCB par lettre du 5 mars 2002 ;

Considérant que les appelants qui prétendent n'avoir pas été informés par la banque de façon claire et explicite sur la portée de la clause figurant à l'article 5 du contrat et qui estiment celle-ci abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, demandent à la Cour, aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions, de dire non écrite cette clause et d'ordonner la mainlevée de la saisie ;

Considérant que s'il est exact que l'article L. 132-1 du Code de la Consommation permet au juge de relever d'office le moyen tiré du caractère abusif d'une clause d'un contrat conclu entre un professionnel et un non professionnel, encore est-il nécessaire que la contestation introduite en ce sens ne soit pas atteinte par la prescription décennale édictée par l'article L. 110-4 du Code de Commerce dans sa rédaction alors applicable et que les dispositions dont se prévalent les appelants soient applicables au contrat de prêt litigieux ;

Considérant que le contrat de prêt a été conclu le 20 mai 1988 ; que la contestation de Monsieur et Madame X. tendant à voir déclarer non écrite la clause figurant à l'article 5 du contrat a été formée pour la première fois devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de CRETEIL par assignation du 22 décembre 2009, soit plus de dix ans après la conclusion du contrat point de départ du délai de l'article L. 110-4 du Code de Commerce, dès lors que les emprunteurs ont eu connaissance de la clause le jour de la signature de l'acte authentique ;

Considérant que la demande des époux X. est atteinte par la prescription décennale ;

Considérant par ailleurs que les dispositions relatives aux clauses abusives, aujourd'hui reprises dans l'article L. 132-1 du Code de la Consommation ont été instaurées par la loi du n° 95-96 du 1er février 1995 et ne peuvent s'appliquer de manière rétroactive a un acte conclu avant leur entrée en vigueur, étant observé au surplus que :

- la clause critiquée, outre qu'elle est rédigée de façon claire et compréhensible, ne peut s'analyser comme une clause abusive dès lors que, permettant un report des échéances du prêt sans intérêts supplémentaires à l'issue de la période de chômage, elle bénéficie aux emprunteurs, même si cette période est limitée à 18 mois ;

- les souscripteurs du prêt n'ont pu méconnaître les dispositions du contrat alors qu'ils ont paraphé chaque page de l'acte et qu'est versé aux débats le récépissé d'acceptation de l'offre de prêt, par lequel ils déclarent avoir reçu l'offre le 30 avril 1988 et l'avoir acceptée le 11 mai suivant ;

Considérant enfin que le décompte de créance tel qu'arrêté au 30 octobre 2009 détaille suffisamment le montant des sommes devenues exigibles en capital, intérêts et accessoires dont le recouvrement est poursuivi dans le cadre de la saisie-attribution ;

Considérant, s'agissant du risque « incapacité de travail », que selon l'article 5 du contrat chacun des époux n'est assuré qu'à concurrence de 50 % du prêt soit pour la somme de 384.000 francs (58.540,42 euros) chacun ;

Considérant qu'il résulte des lettres échangées entre les parties (cf. notamment lettre CETELEM du 3 mars 2009) que les appelants ont bénéficié de la prise en charge assurance au titre de l'invalidité reconnue à Monsieur X. du 10 janvier 2007 au 10 mai 2008 à hauteur de 50 %, la quote-part restant à la charge des emprunteurs étant de 746,84 euros ; que Monsieur et Madame X. ne justifient pas du prélèvement de la totalité des mensualités pendant cette période, ainsi qu'ils le prétendent dans leurs écritures ; que leur contestation de ce chef doit être également rejetée ;

Considérant que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur et Madame X. de l'ensemble de leurs contestations et demandes ;

Considérant que Monsieur et Madame X. qui succombent supporteront les dépens d'appel ;

Considérant que la SCP C. ET S. huissiers associés ne fait l'objet d'aucune demande ; qu'elle n'indique pas l'acte en vertu duquel elle est mise en cause, l'assignation introductive d'instance la visant seulement « Pour dénonciation en vertu de l'article 66 du décret du 31 juillet 1992... par LRAR. »

Considérant que l'action en justice, comme l'exercice du droit d'appel, ne dégénère en abus de nature à justifier l'allocation de dommages-intérêts qu'en cas d'une attitude fautive génératrice d'un dommage ; qu'une telle preuve n'est pas rapportée à l'encontre des époux X. ; que la demande de dommages-intérêts de la SCP doit être rejetée ;

Que pour des motifs de situation économique il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile à l'encontre de Monsieur et Madame X. ; que le jugement sera donc infirmé sur ce point ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement

DÉBOUTE Monsieur et Madame X. de l'ensemble de leurs contestations et demandes ;

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur et Madame X. de leurs contestations et demandes ;

INFIRME le jugement déféré en ses dispositions relatives à l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNE Monsieur et Madame X. aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés selon les modalités de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LA GREFFIÈRE,      LE PRÉSIDENT,