CA COLMAR (3e ch. civ. sect. A), 7 mai 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 3859
CA COLMAR (3e ch. civ. sect. A), 7 mai 2012 : RG n° 11/03340 ; arrêt n° 12/0377
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation que dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs le clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations du consommateur sont nulles ; que cependant Mme X. ayant souscrit le contrat en qualité de professionnelle exploitant un fonds de commerce et pour les besoins de son commerce ne peut revendiquer la qualité de consommateur au sens des dispositions précitées ; qu'il n'y a pas lieu de rechercher si Mme X. disposait de compétences particulières dans le domaine de la télésurveillance, alors qu'il est admis que le contrat avait pour objet de protéger son fonds de commerce de bar-restaurant et que ce seul lien suffit à exclure l'application du code de la consommation. »
2/ « Attendu que si Mme X. se prévaut d'indices sérieux d'indivisibilité des contrats conclus d'une part avec la société Mondys d'autre part avec la SAS Grenke Location, pour autant, le débat relatif à la défaillance du prestataire de services et à ses conséquences juridiques ne peut avoir lieu qu'en présence de la société Mondys ; que les griefs allégués et en particulier l'inexécution de la prestation de maintenance ne sauraient entraîner la résiliation du contrat de location qu'à titre de conséquence de la résiliation préalable du contrat conclu avec le prestataire ;
que cependant la résiliation judiciaire du contrat de fourniture n'a jamais été prononcée, qu'elle ne peut l'être hors la présence de la société Mondys ; qu'en l'absence de mise en cause de la société Mondys aucun argument ne peut être tiré de l'indivisibilité des contrats, et que la résiliation du contrat de location ne peut être prononcée à raison du défaut d'exécution de ses prestations par la société Mondys ; que la jurisprudence est clairement fixée en ce sens (Cour de cassation du 10 novembre 2009, 17 février 2009) … ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE COLMAR
TROISIÈME CHAMBRE CIVILE SECTION A
ARRÊT DU 7 MAI 2012
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 3 A 11/03340. Arrêt n° 12/0377. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 18 novembre 2009 par le tribunal d'instance de STRASBOURG.
APPELANTE :
Madame X.
demeurant [adresse], Représentée par Maître Noura TASSEL-BENCHABANE (avocat à la cour)
INTIMÉE :
SAS GRENKE LOCATION
ayant son siège social [adresse], Représentée par Maître Stéphanie THIERY (avocat au barreau de STRASBOURG)
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 février 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme RASTEGAR, président de chambre, et Mme MAZARIN-GEORGIN, conseiller, chargées du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Mme RASTEGAR, président de chambre, Mme MAZARIN-GEORGIN, conseiller, Mme SCHNEIDER, conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : M. UTTARD
ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme F. RASTEGAR, président et M. Christian UTTARD, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu le rapport ;
Le 22 février 2008, Mme X. a souscrit auprès de la SAS Grenke Location un contrat de location de longue durée portant sur du matériel de télésurveillance moyennant le paiement de 21 loyers trimestriels de 460,70 euros.
La SAS Grenke Location s'est prévalue de la déchéance du terme par lettre recommandée du 20 avril 2009 à défaut de paiement des loyers depuis le 1er janvier 2009.
Par acte du 1er octobre 2009, la SAS Grenke Location a fait assigner Mme X. devant le tribunal d'instance de Strasbourg pour obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 7.346,96 euros correspondant aux loyers exigibles jusqu'au terme du contrat ainsi que la restitution du matériel loué sous astreinte.
Par jugement réputé contradictoire du 18 novembre 2009, le tribunal a condamné Mme X. à payer à la SAS Grenke Location la somme de 7.346,96 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 avril 2009, l'a condamnée à restituer le matériel loué dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement sous astreinte de 15 euros par jour de retard et l'a condamnée en outre au paiement d'une somme de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme X. a régulièrement interjeté appel de ce jugement.
Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions de l'appelante Mme X. reçues au greffe le 5 juillet 2011 tendant à l'infirmation du jugement déféré, à ce que la cour prononce l'annulation du contrat à raison de clauses abusives insérées dans le contrat, constate la résiliation contractuelle et condamne la SAS Grenke Location à lui restituer le trop-perçu sur loyers de 385,20 euros, constate l'indivisibilité des contrats, prononce la résiliation judiciaire du contrat de fourniture et de maintenance conclu avec la société Mondys et du mandat d'encaissement conclu entre cette société et la SAS Grenke Location, déboute la SAS Grenke Location de ses demandes et la condamne à lui payer la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions de l'intimée la SAS Grenke Location reçues au greffe le 8 août 2011 tendant à la confirmation du jugement déféré et à l'allocation d'une somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les pièces de la procédure ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu qu'au soutien de son appel, Mme X. fait valoir que la demande de la SAS Grenke Location dirigée contre elle est irrecevable, alors que le contrat de location a été conclu par la société Y. ;
qu'elle se prévaut de la qualité de consommateur, le contrat ne concernant en rien sa sphère de compétence puisqu'elle exploite un bar-restaurant et soutient que le contrat doit être annulé comme contenant de nombreuses clauses abusives, en ce que les conditions générales sont imprimés en petits caractères illisibles, en ce que le loueur se dégage abusivement de toute responsabilité en cas de défaillance du matériel, en ce que la clause de variation du prix des produits est contraire aux recommandations de la commission des clauses abusives, en ce que la clause de pénalité contractuelle à la charge du consommateur défaillant ne prévoit aucune réciprocité en cas de défaillance du loueur, et en ce que le contrat prévoit une durée de location irrévocable de 48 mois ;
qu'elle considère que les contrats de location et de fourniture des prestations de maintenance et de télésurveillance sont indivisibles en raison de la signature concomitante des deux contrats et du paiement d'un loyer global ;
qu'elle affirme que la société Mondys n'a jamais réalisé de visite de maintenance ni d'interventions suite aux mises en route du poste de télésurveillance, de sorte que la résolution du contrat de fourniture et de maintenance doit être prononcée, entraînait la résolution du mandat d'encaissement conclu entre la SAS Grenke Location et la société Mondys.
Attendu que le contrat de location indique qu'il a été conclu par « Y. » dirigé par Mme X. et que la consultation du registre du commerce et des sociétés révèle que Y. n'est que l'enseigne commerciale d'un fonds exploité par Mme X. ;
que la demande a été à juste titre dirigée contre Mme X. signataire du contrat de location.
Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation que dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs le clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations du consommateur sont nulles ;
que cependant Mme X. ayant souscrit le contrat en qualité de professionnelle exploitant un fonds de commerce et pour les besoins de son commerce ne peut revendiquer la qualité de consommateur au sens des dispositions précitées ;
qu'il n'y a pas lieu de rechercher si Mme X. disposait de compétences particulières dans le domaine de la télésurveillance, alors qu'il est admis que le contrat avait pour objet de protéger son fonds de commerce de bar-restaurant et que ce seul lien suffit à exclure l'application du code de la consommation.
Attendu que si Mme X. se prévaut d'indices sérieux d'indivisibilité des contrats conclus d'une part avec la société Mondys d'autre part avec la SAS Grenke Location, pour autant, le débat relatif à la défaillance du prestataire de services et à ses conséquences juridiques ne peut avoir lieu qu'en présence de la société Mondys ;
que les griefs allégués et en particulier l'inexécution de la prestation de maintenance ne sauraient entraîner la résiliation du contrat de location qu'à titre de conséquence de la résiliation préalable du contrat conclu avec le prestataire ;
que cependant la résiliation judiciaire du contrat de fourniture n'a jamais été prononcée, qu'elle ne peut l'être hors la présence de la société Mondys ;
qu'en l'absence de mise en cause de la société Mondys aucun argument ne peut être tiré de l'indivisibilité des contrats, et que la résiliation du contrat de location ne peut être prononcée à raison du défaut d'exécution de ses prestations par la société Mondys ;
que la jurisprudence est clairement fixée en ce sens (Cour de cassation du 10 novembre 2009, 17 février 2009) et que la Cour de cassation a censuré les décisions ayant prononcé la résiliation judiciaire de contrats de location après avoir considéré que la résiliation du contrat conclu avec le prestataire en liquidation judiciaire était acquise et que les parties avaient rendu les opérations indivisibles, en retenant « qu'en statuant ainsi, alors que le contrat de prestation de service n'était pas résilié du seul fait de la liquidation judiciaire de la société prestataire, et que cette résiliation n'avait pas été prononcée et ne pouvait l'être qu'en présence du liquidateur de la société, la cour d'appel a violé l'article 1184 du code civil ».
Attendu qu'ainsi hors la présence de la société Mondys, la résiliation du contrat de location ne peut être prononcée qu'à raison des manquements de la SAS Grenke Location à ses propres obligations ;
qu'il résulte des stipulations du contrat de location que la SAS Grenke Location avait pour obligation de se porter acquéreur du matériel en payant le prix au fournisseur, et de le mettre à la disposition du locataire, et qu'il est constant que ces obligations ont été respectées au vu de l'attestation signée par Mme X. indiquant que le matériel a été fourni et installé ;
qu'ainsi la demande de résiliation judiciaire du contrat de location doit être rejetée.
Attendu que pour le surplus, Mme X. avait le 24 novembre 2008 adressé un courrier de résiliation à la SAS Grenke Location en indiquant avoir vendu son fonds de commerce ;
que cependant elle n'a jamais justifié de la réalité de cette cession ni de la cession du contrat à l'acquéreur du fonds, de sorte qu'elle reste tenue de ses engagements ;
qu'il convient de rappeler que selon l'article 12 des conditions générales, le locataire ne peut mettre fin de façon anticipée qu'avec l'accord du bailleur ou après paiement de l'indemnité de résiliation anticipée ;
que de ce fait, la résiliation opérée le 24 novembre 2008 est inopérante ;
que le jugement déféré doit être confirmé.
Attendu qu'il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais exposés et non compris dans les dépens ;
qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
DÉCLARE l'appel recevable ;
Au fond le DIT mal fondé et le rejette ;
CONFIRME le jugement déféré ;
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme X. aux dépens d'appel.
Le greffier Le président
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