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CA DOUAI (ch. 8 sect. 1), 16 mai 2013

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (ch. 8 sect. 1), 16 mai 2013
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 8e ch. sect. 1
Demande : 12/05949
Date : 16/05/2013
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 24/08/2012
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4458

CA DOUAI (ch. 8 sect. 1), 16 mai 2013 : RG n° 12/05949

Publication : Jurica

 

Extrait : « Que cette clause est en tous point identiques à la clause de variabilité du taux d'intérêt figurant dans le modèle-type n° 5 d'offre préalable de crédit utilisable par fractions et assortie d'une carte de crédit applicable jusqu'au 1er octobre 2007, et donc aux faits de la cause, figurant à l'annexe de l'article R. 311-6 ancien du code de la consommation et visé à l'article L. 311-13 ancien dudit code, sans qu'il soit démontré que la clause précédemment explicitée caractérise au détriment de l'emprunteur un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat dès lors qu'elle n'est pas incompatible avec le respect des obligations légales relatives au taux effectif global qui imposent au prêteur d'informer ultérieurement l'emprunteur de chaque variation de celui-ci ; Que les relevés de compte transmis par le prêteur informent bien l'emprunteur, comme le contrat initial, des taux pratiqués selon le montant emprunté de sorte que Madame Y. a eu une connaissance précise du taux pratiqué ; Que dans la mesure en conséquence où elle est parfaitement conforme aux prévisions du modèle-type applicable, aucune déchéance du droit aux intérêts du prêteur n'est encourue, la sanction prévue à l'article L. 311-33 ancien du code de la consommation ne s'appliquant qu'au non-respect des dispositions prévues aux articles L. 311-8 à L. 311-13 anciens dudit code, non établi en l'espèce ;

Attendu ensuite que si la clause figurant à l'article 17 des conditions de fonctionnement de la carte bleue VISA TEOZ selon laquelle « toute fausse déclaration ou usage abusif de la carte peut ['] entraîner la perte du bénéfice des dispositions contractuelles » est abusive en ce que, par sa généralité et l'imprécision de la notion d'usage abusif, elle confère à la société de crédit un pouvoir discrétionnaire de suppression d'un service prévu au contrat et crée ainsi un déséquilibre significatif au détriment du consommateur, et doit dès lors être réputée non écrite, aucune déchéance du droit aux intérêts du prêteur ne saurait davantage être encourue de ce chef en l'absence là encore de manquement démontré de l'offre préalable de crédit aux prescriptions des articles L. 311-8 à L. 311-13 anciens du code de la consommation ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 16 MAI 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 12/05949. Jugement (R.G. n° 11-000321), rendu le 29 septembre 2011 par le Tribunal d'Instance de LENS.

 

APPELANTE :

SA NATIXIS FINANCEMENT

agissant en la personne de son représentant légal domicilié audit siège, ayant son siège social : [adresse], Représentée par Maître Francis DEFFRENNES (avocat au barreau de LILLE)

 

INTIMÉS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville] - de nationalité Française, demeurant : [adresse], N'a pas constitué avocat

Madame Y.

née le date] à [ville] - de nationalité Française, demeurant : [adresse], Représentée par Maître Jean-Guy VOISIN (avocat au barreau de DOUAI) (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro XX/12/YY du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI)

 

DÉBATS à l'audience publique du 6 mars 2013 tenue par Hélène BILLIERES magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Annie DESBUISSONS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Pierre CHARBONNIER, Président de chambre, Benoît PETY, Conseiller, Hélène BILLIERES, Conseiller

ARRÊT RENDU PAR DÉFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 16 mai 2013 après prorogation du délibéré du 2 mai 2013 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Annie DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Suivant offre préalable acceptée le 9 décembre 2005, la société CAISSE D’ÉPARGNE FINANCEMENT a consenti à Monsieur X. une ouverture de crédit d'un montant de 10.000 euros utilisable par fractions et remboursable par échéances mensuelles fixées en fonction du solde dû, le taux effectif global de 13,88 % lors de la souscription du contrat étant révisable suivant les variations en plus ou en moins du taux de base que le prêteur applique aux opérations de même nature.

Alléguant le défaut de paiement des échéances mensuelles, la société NATIXIS FINANCEMENT venant aux droits de la société CAISSE D’ÉPARGNE FINANCEMENT a prononcé la déchéance du terme puis a assigné Monsieur X. en paiement des sommes dues au titre de ses engagements.

Par jugement contradictoire du 17 novembre 2011, le tribunal d'instance de Lens, après avoir donné acte à Madame Y. de son intervention volontaire à l'instance, a prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels du prêteur et condamné solidairement Monsieur X. et Madame Y. à payer à l'établissement de crédit la somme de 4.549,92 euros avec intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2010. Il a en outre autorisé les débiteurs à se libérer du paiement de leur dette par vingt-trois versements mensuels de 180 euros et par un vingt-quatrième versement comprenant le solde.

La société NATIXIS FINANCEMENT a relevé appel de ce jugement le 24 août 2012.

Elle conteste le jugement en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts au motif qu'elle ne justifiait pas avoir présenté à l'emprunteur trois mois avant échéance les conditions de reconduction du contrat et l'avoir mis en mesure de se rétracter pour le renouvellement au moyen d'un bordereau détachable alors qu'elle a pleinement satisfait à son obligation d'information annuelle de l'emprunteur avant chaque reconduction conformément aux prescriptions de l’article L. 311-9 du code de la consommation.

Elle soutient par ailleurs que l'offre préalable ne comporte aucune clause abusive.

Réitérant devant la cour les prétentions qu'elle avait initialement soumises au premier juge, la société NATIXIS FINANCEMENT sollicite en conséquence la condamnation solidaire de Monsieur X. et Madame Y. au paiement de la somme de 11.470,32 euros avec intérêts au taux contractuel de 13 % à compter du 18 novembre 2010, outre une somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Madame Y. conclut pour part à la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Bien qu'assigné en l'étude de l'huissier instrumentaire le 17 décembre 2012, Monsieur X. n'a pas constitué avocat.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Attendu que le premier juge a relevé l'existence de deux clauses abusives et a prononcé à l'encontre de la société NATIXIS FINANCEMENT la sanction de la déchéance du droit aux intérêts ; que la société NATIXIS FINANCEMENT conteste cette analyse et soutient que l'offre litigieuse est régulière et ses demandes justifiées ;

Attendu que l'offre préalable de crédit acceptée le 9 décembre 2005 par Monsieur X. prévoit le paiement d'intérêts « calculés au taux nominal conventionnel et au taux effectif global annuels indiqués ci-dessous, le cas échéant déterminés en fonction du montant du solde débiteur [du compte] » ;

Qu'elle contient en outre une clause aux termes de laquelle il est prévu que le taux est révisable et que « le taux nominal conventionnel et le taux effectif global annuels suivront les variations (en plus ou moins) du taux de base que le prêteur applique aux opérations de même nature et qui figure dans les barèmes qu'il diffuse auprès du public » ;

Qu'il est ensuite précisé qu'au 10 novembre 2005, date de l'offre préalable, le taux effectif global annuel est de 16,18 % jusqu'à 2.000 euros, de 15,60 % de 2.001 à 4.500 euros, puis de 15,02 % de 4.501 à 7.000 euros, et enfin de 13,88 % au-delà ; que le taux nominal conventionnel annuel est pour sa part de 15 % jusqu'à 2.000 euros, de 14,50 % de 2.001 à 4.500 euros, puis de 14 % de 4.501 à 7.000 euros, et enfin de 13 % au-delà ;

Que cette clause est en tous point identiques à la clause de variabilité du taux d'intérêt figurant dans le modèle-type n° 5 d'offre préalable de crédit utilisable par fractions et assortie d'une carte de crédit applicable jusqu'au 1er octobre 2007, et donc aux faits de la cause, figurant à l'annexe de l'article R. 311-6 ancien du code de la consommation et visé à l'article L. 311-13 ancien dudit code, sans qu'il soit démontré que la clause précédemment explicitée caractérise au détriment de l'emprunteur un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat dès lors qu'elle n'est pas incompatible avec le respect des obligations légales relatives au taux effectif global qui imposent au prêteur d'informer ultérieurement l'emprunteur de chaque variation de celui-ci ;

Que les relevés de compte transmis par le prêteur informent bien l'emprunteur, comme le contrat initial, des taux pratiqués selon le montant emprunté de sorte que Madame Y. a eu une connaissance précise du taux pratiqué ;

Que dans la mesure en conséquence où elle est parfaitement conforme aux prévisions du modèle-type applicable, aucune déchéance du droit aux intérêts du prêteur n'est encourue, la sanction prévue à l'article L. 311-33 ancien du code de la consommation ne s'appliquant qu'au non-respect des dispositions prévues aux articles L. 311-8 à L. 311-13 anciens dudit code, non établi en l'espèce ;

Attendu ensuite que si la clause figurant à l'article 17 des conditions de fonctionnement de la carte bleue VISA TEOZ selon laquelle « toute fausse déclaration ou usage abusif de la carte peut ['] entraîner la perte du bénéfice des dispositions contractuelles » est abusive en ce que, par sa généralité et l'imprécision de la notion d'usage abusif, elle confère à la société de crédit un pouvoir discrétionnaire de suppression d'un service prévu au contrat et crée ainsi un déséquilibre significatif au détriment du consommateur, et doit dès lors être réputée non écrite, aucune déchéance du droit aux intérêts du prêteur ne saurait davantage être encourue de ce chef en l'absence là encore de manquement démontré de l'offre préalable de crédit aux prescriptions des articles L. 311-8 à L. 311-13 anciens du code de la consommation ;

Que la décision entreprise doit en conséquence être infirmée de ce chef ;

Attendu en revanche, sur l'information annuelle de reconduction du crédit, qu'en application de l'article L. 311-9 ancien du code de la consommation, l'offre préalable de crédit utilisable par fractions précise que la durée du contrat est limitée à un an renouvelable et que le prêteur devra indiquer, trois mois avant l'échéance, les conditions de reconduction du contrat ; que ce texte, modifié par la loi du 1er août 2003, prévoit également que l'emprunteur doit pouvoir s'opposer aux modifications proposées, lors de la reconduction du contrat, jusqu'au moins vingt jours avant la date où celles-ci deviennent effectives, en utilisant un bordereau-réponse annexé aux informations écrites communiquées par le prêteur ; que le décret précisant les caractéristiques de ce bordereau et les mentions devant y figurer est en date du 4 mars 2004, un modèle de ce bordereau de refus figurant en annexe ;

Que la méconnaissance de l'obligation d'informer l'emprunteur sur les conditions de renouvellement est sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts sur les sommes prêtées en exécution du contrat reconduit ;

Attendu que l'offre de renouvellement imposée par le texte précité vient se substituer à l'offre préalable exigée par les articles L. 311-8 et suivants du même code ; que si aucun formalisme n'est prévu et que la preuve est libre, l’article 1315 du code civil met néanmoins à la charge du prêteur la preuve de la réalité de l'information des conditions de renouvellement, laquelle conditionne la tacite reconduction ;

Attendu en l'espèce que la société NATIXIS FINANCEMENT produit les courriers adressés à Monsieur X. les 24 mai 2006, 25 juin 2007, 23 juillet 2008 et 25 août 2009 l'informant que son contrat est reconduit pour une période d'un an à compter de la date anniversaire de sa conclusion dans les mêmes termes et aux mêmes conditions de fonctionnement ;

Que s'ils indiquent tous une réserve de 10.000 euros, le courrier de renouvellement de 2006 mentionne toutefois un taux effectif global de 14,74 % au-delà de 7.000 euros, ceux de 2007 et de 2008 un taux effectif global de 16,41 %, et celui de 2009 un taux effectif global de 16,88 % ;

Attendu qu'ainsi que l'a à juste titre relevé le premier juge, ces courriers ne comportent aucun bordereau-réponse alors qu'il apparaît que les lettres d'information de 2006 à 2009 proposent une reconduction du contrat de crédit dans des conditions différentes de celles du contrat initial avec modification du taux effectif global ;

Qu'il n'est en outre justifié d'aucun courrier de renouvellement au-delà du 25 août 2009 ;

Qu'en conséquence, en application de l'article L. 311-33 ancien du code de la consommation, la société NATIXIS FINANCEMENT est déchue de son droit aux intérêts à compter de la première reconduction du contrat, soit à compter du 9 décembre 2006 ;

Qu'en conséquence de ce qui précède, et au vu des pièces produites, il convient de condamner solidairement Monsieur X. et Madame Y. à payer à la société NATIXIS FINANCEMENT la somme de 5.204,95 euros avec intérêts au taux légal à compter du 18 novembre 2010, date de la mise en demeure ;

Attendu que le jugement n'étant pas autrement contesté, il sera conformé en ce qu'il a autorisé les débiteurs à s'acquitter du paiement de leur dette par paiements échelonnés sur vingt-quatre mois ;

Attendu enfin qu'il ne parait pas inéquitable de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en cause d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et par défaut ;

Réforme le jugement sur le montant de la condamnation prononcée au titre de l'ouverture de crédit consentie le 9 décembre 2005 par la société CAISSE D’ÉPARGNE FINANCEMENT à Monsieur X. ;

Condamne solidairement Monsieur X. et Madame Y. à payer à la S.A. NATIXIS FINANCEMENT venant aux droits de la SA CAISSE D’ÉPARGNE FINANCEMENT la somme de 5.204,95 euros avec intérêts au taux légal à compter du 18 novembre 2010 ;

Le confirme pour le surplus ;

Dit n'y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur X. et Madame Y. aux dépens d'appel qui seront recouvrés par Maître DEFFRENNES, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT,

A. DESBUISSONS   P. CHARBONNIER