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TI PARIS (17e arrdt), 21 janvier 2005

Nature : Décision
Titre : TI PARIS (17e arrdt), 21 janvier 2005
Pays : France
Juridiction : Paris (TI) 17e arrdt
Demande : 11-04-001019
Décision : 138/05
Date : 25/01/2005
Nature de la décision : Admission
Date de la demande : 20/04/2004
Décision antérieure : CA PARIS (8e ch. sect. A), 15 novembre 2007
Numéro de la décision : 138
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CERCLAB - DOCUMENT N° 475

TI PARIS (17e arrdt), 25 janvier 2005 : RG n° 11-04-001019 ; jugement n° 138/05

(sur appel CA Paris (8e ch. A), 15 novembre 2007 : RG n° 05/10701 ; arrêt n° 628)

 

Extrait : « Attendu que les époux X., non satisfaits des conditions d'hébergement, ont quitté l'hôtel Annabelle le 30 juillet et se sont installés dans un autre hôtel de la région jusqu'à la fin du séjour ; que ce séjour leur a été facturé 2.908 euros ; Attendu que par courrier du 12 septembre 2003 ils ont demandé à l’agence le remboursement total de leur voyage, demande réitérée le 21 novembre et restée sans réponse ; Attendu que la société COULEUR PASTEL soulève l'irrecevabilité de l'action et de l'appel en garantie en faisant valoir que l'art. 15 des conditions de vente stipule qu'une réclamation non adressée dans les trois semaines suivant le retour du client sera rejetée ; Mais attendu que le bulletin d'inscription du 24 juillet, qui indique in fine que le client a pris connaissance des conditions générales de vente figurant au verso (verso non produit) et avoir reçu la brochure de l'organisateur (où figurent ses propres conditions de vente) n'a pas été signé par les époux et que ces conditions leur sont donc inopposables ; qu'au demeurant, cette clause ne vise que les « réclamations » et serait abusive, et réputée non écrite, comme réduisant l'exercice d'une action en justice ».

 

TRIBUNAL D’INSTANCE DE PARIS

DIX-SEPTIÈME ARRONDISSMENT

JUGEMENT DU 25 JANVIER 2005

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

RG n° 11-04-001019 (jonction avec R.G. n° 11-04-002231).  Minute n° 138/05.

 

DEMANDEURS :

Monsieur X.

[adresse], représenté par Maître BENICHOU Vanessa, avocat au barreau de PARIS

Madame X.

[adresse], représentée par Maître BENICHOU Vanessa, avocat au barreau de PARIS

 

DÉFENDEURS :

SARL AGENCE NIEL'S VOYAGE

[adresse], représentée par Maître BARANES Véronique, avocat au barreau de PARIS

 

INTERVENANT FORCÉ :

SARL COULEUR PASTEL

exerçant sous l'enseigne SOUS LE SOLEIL [adresse], représentée par Maître BARBOUCH Fouad, avocat au barreau de PARIS

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : IMBERT Jean-Marie

Greffier lors des débats et du prononcé : PENICHON David

DÉBATS : Audience publique du 30 novembre 2004

JUGEMENT : Contradictoire et en premier ressort, prononcé publiquement le 25 janvier 2005 par IMBERT Jean-Marie, Président, assisté de PENICHON David, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Par acte d'huissier en date du 20 avril 2004 (dossier N°04-1019) M. et Mme X. ont fait assigner l'agence NIEL’S VOYAGE aux fins de la voir déclarer responsable du préjudice qu'ils ont subi et de la voir condamner à leur payer la somme de 5.490 euros, avec intérêts légaux, de celle de 1.000 euros en réparation de leur préjudice moral et de la même somme au titre de l'art. 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Au soutien de leur demande, M. et Mme X. exposent :

- que l'agence NIEL’S Voyage leur a proposé un séjour en Crête du 28 juillet au 11 août 2003, pour le prix de 5.490 euros, comprenant notamment l'hébergement en pension complète pour eux et leurs trois enfants en bas âge dans un hôtel 5 étoiles, l'hôtel Annabelle

- qu'ils ont réservé une chambre quadruple

- que la chambre qui leur a été donnée n'était pas conforme aux prestations promises ; que ni la direction de l'hôtel ni le correspondant de l'agence n'ont donné suite à leurs réclamations

- que, faute de nouvelles de l'agence, ils ont loué une voiture et cherché un autre hôtel, qu'ils ont trouvé le 30 juillet

- que leur demande de remboursement est restée sans réponse

- qu'en application de l'art. 22 de la loi du 13 juillet 1992 l'agence, qui n'a pas rempli ses obligations, a engagé sa responsabilité

- que l'hôtel est un 4 étoiles et non un 5 étoiles comme indiqué ; que la chambre était une chambre double et non quadruple, située à proximité d'une route très passante et sans vue sur la mer ou sur les jardins ; que la piscine et la mer n'étaient accessibles que par des escaliers très raides

- qu'ils sont fondés à demander le remboursement du séjour et la réparation de leur préjudice moral ;

Par acte d'huissier du 4 octobre 2004 (dossier N° 04-2231) l'agence NIEL’S VOYAGE a appelé en garantie la société COULEUR PASTEL, exerçant sous l'enseigne SOUS LE SOLEIL ;

Par conclusions reprises à l'audience l'agence NIEL’S VOYAGE fait valoir :

- qu'elle n'a été que l'intermédiaire entre ses clients et la société COULEUR PASTEL, qui n'a pas fourni les prestations promises

- qu'elle avait commandé une chambre quadruple et que l'attribution d'une chambre composée de trois lits simples et d'un lit bébé relève d'une erreur de cette société

- que les prestations annoncées dans la brochure de la société n'ont été fournies ;

- que la chambre ne donnait pas sur jardin ou sur mer mais sur une route ;

- qu'elle n'est pas responsable du nombre d'étoiles figurant dans le catalogue dont la responsabilité incombe à la société

- que la société COULEUR PASTEL doit être condamnée, en tant que conceptrice du produit touristique et du catalogue trompeur, à la garantir des condamnations prononcées contre elle

- [minute page 3] que les époux X. ne peuvent pas demander le remboursement de l'intégralité du voyage dès lors que les prestations de transport aérien ont été exécutées et que seule la somme de 3.890 euros peut leur être remboursée ;

Elle demande au Tribunal de condamner la société COULEUR PASTEL à la garantir de toutes condamnations prononcées contre elle et à lui payer la somme de 3.000 euros à titre de dommages intérêts au titre du préjudice commercial subi et celle de 1.000 euros au titre de ses frais irrépétibles ;

Par écritures réitérées l'audience, la société COULEUR PASTEL fait valoir :

- que les époux X. n'ont pas présenté leur réclamation dans les trois semaines de leur retour comme le prévoit l'art. 15 des conditions particulières de vente et que leur action et l'appel en garantie doivent être déclarés irrecevables

- que, subsidiairement, leurs griefs sont mal fondés

- que la classification de l'hôtel en catégorie 5 étoiles est incontestable

- que les conditions particulières de vente précisent que les chambres triple ou quadruple sont généralement des chambres doubles avec un ou deux lits d'appoint, pratique hôtelière courante

- que la chambre avait une vue sur le jardin et que la route en cause n'est pas source de nuisances

- que les époux X. ont quitté l'hôtel sans en informer quiconque et sans lui permettre d'étudier la possibilité de changer d'hôtel, enfreignant ainsi les dispositions de l'art. 8 al. 2 des conditions particulières de vente,

- qu'elle a rempli ses obligations d'information et de bonne exécution du contrat ;

Elle conclut à l'irrecevabilité des demandes, subsidiairement à leur mal fondé et à leur rejet et réclame la somme de 1.500 euros au titre de ses frais irrépétibles ;

Les demandeurs ont répliqué à l'audience :

- que leur action était recevable, le bulletin d'inscription émis par l'agence n'ayant pas été signé par eux et les conditions de vente, non acceptées par eux, leur étant inopposables ;

- qu'au demeurant la clause invoquée par la société est abusive dans la mesure où elle tend à réduire l'exercice d'une action en justice par un non professionnel ;

 

MOTIFS (justification de la décision)    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LE TRIBUNAL :

Attendu que, selon bulletin d'inscription du 24 juillet 2003, les époux X. ont acheté à l'agence NIEL’S VOYAGE un séjour en Crête à l'hôtel Annabelle Village, du 28 juillet au 11 août 2003, organisé par la société COULEUR PASTEL (Tour Operator), comprenant un forfait chambre quadruple, vols AR, transferts, pension complète pour eux et leurs trois enfants (6 et 5 ans et un bébé), pour le prix de 5.490 euros ;

[minute page 4] Attendu que les époux X., non satisfaits des conditions d'hébergement, ont quitté l'hôtel Annabelle le 30 juillet et se sont installés dans un autre hôtel de la région jusqu'à la fin du séjour ; que ce séjour leur a été facturé 2.908 euros ;

Attendu que par courrier du 12 septembre 2003 ils ont demandé à l’agence le remboursement total de leur voyage, demande réitérée le 21 novembre et restée sans réponse ;

Attendu que la société COULEUR PASTEL soulève l'irrecevabilité de l'action et de l'appel en garantie en faisant valoir que l'art. 15 des conditions de vente stipule qu'une réclamation non adressée dans les trois semaines suivant le retour du client sera rejetée ;

Mais attendu que le bulletin d'inscription du 24 juillet, qui indique in fine que le client a pris connaissance des conditions générales de vente figurant au verso (verso non produit) et avoir reçu la brochure de l'organisateur (où figurent ses propres conditions de vente) n'a pas été signé par les époux et que ces conditions leur sont donc inopposables ; qu'au demeurant, cette clause ne vise que les « réclamations » et serait abusive, et réputée non écrite, comme réduisant l'exercice d'une action en justice ;

Attendu que le bulletin d'inscription, qui précisait l'âge des trois enfants, spécifiait, pour l'hébergement : « une chambre (pour) 4 personnes + un bébé » ; qu'il ressort des pièces produites que l'agence a bien commandé à la société une chambre quadruple + un lit bébé ;

Attendu qu'il ressort des photographies produites que la chambre N° 401 attribuée à la famille X. ne comportait que trois lits simples et un lit pliant pour bébé, et qu'un lit de camp, obstruant le passage, a été rajouté à terre pour l'un des enfants ; que, comme l'admet l'agence, il n'a pas été fourni aux demandeurs la chambre quadruple convenue ;

Attendu que la société fait vainement valoir que ses conditions particulières de vente précisent que les chambres triple ou quadruple sont « généralement des chambres doubles avec un ou deux lits d'appoint » ; que non seulement, ainsi qu'il a été dit, ces conditions ne sont pas opposables aux époux X., mais qu'il se déduit du terme « généralement » qu’il existe quelques véritables chambres quadruple ; qu'il ressort d'un courrier de l'hôtel du 19 novembre 2004 affirmant que « la chambre 401 est une de nos plus grandes chambres » que l'hôtel ne comporte aucune véritable chambre quadruple ;

[minute page 5] Attendu, par ailleurs, que les époux X. font justement valoir que la chambre ne comportait pas, comme annoncé, un balcon donnant sur la mer ou les jardins ; que les photographies produites établissent que le balcon donnait en fait sur la route longeant l'enceinte de l'hôtel, agrémentée de plantations, ce que confirme le plan versé aux débats ; que, par contre, les griefs concernant l'accès à la mer et à la piscine ne sont pas établis ; qu'enfin, si la société produit des pièces indiquant que, comme l'énonce sa brochure, l'hôtel est classé 5 étoiles, il est troublant de constater qu'il est vendu par d'autres agences comme un 4 étoiles ;

Attendu que la fourniture d'une véritable chambre quadruple, seule de nature à permettre le séjour et le repos de toute la famille dans de bonnes conditions et à justifier le prix du séjour, constituait un élément essentiel du contrat et que les époux X. ont donc légitimement quitté l'hôtel après avoir vainement tenté d'obtenir satisfaction et en avoir informé l'agence, la société ne justifiant pas leur avoir proposé une telle chambre dans l'un de ses autres hôtels de Crête ; que, toutefois, comme le fait valoir l'agence, ils ne peuvent prétendre au remboursement des prestations de transport aérien, exécutées ; que l'agence sera donc condamnée à leur verser la somme de 3.890 euros correspondant aux prestations hôtelières dont ils n'ont pas bénéficié ;

Attendu que le préjudice moral résultant des désagréments subis et du temps consacré à la recherche d'un autre hôtel sera réparé par l'allocation d'une somme de 400 euros à titre de dommages intérêts ;

Attendu que l'agence, qui succombe, sera condamnée à verser aux demandeurs une indemnité de procédure de 400 euros au titre de l'art. 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Attendu que la société COULEUR PASTEL, en sa qualité de Tour Opérateur et d'organisatrice responsable de la mauvaise exécution du forfait touristique, sera condamnée à garantir l'agence NIEL'S VOYAGE des condamnations prononcées contre elle ; que, par contre, l'agence, qui ne justifie pas du préjudice commercial allégué, sera déboutée de sa demande en dommages intérêts ;

Attendu qu'il n'apparaît inéquitable de laisser à la charge de l'agence et de la société les frais irrépétibles qu'elles ont exposés ;

Attendu que l'exécution provisoire sera ordonnée à hauteur de la moitié des condamnations prononcées contre l'agence ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 6] PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort

Prononce la jonction des instances 04-1019 et 04-2231 sous le N° 04-1019 ;

Déclare la demande et l'appel en garantie recevables ;

Condamne l'agence NIEL’S VOYAGE à payer aux demandeurs la somme de 3.890 euros (TROIS MILLE HUIT CENT QUATRE VINGT DIX EUROS) en principal, celle de 400 euros (QUATRE CENTS EUROS) en réparation de leur préjudice moral et celle de 400 euros (QUATRE CENTS EUROS) au titre de l'art. 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Ordonne l'exécution provisoire à hauteur de la moitié des condamnations prononcées ;

Condamne la société COULEUR PASTEL à garantir l'agence NIEL’S VOYAGE des condamnations prononcées contre elle ;

Rejette les autres demandes ;

Condamne la société COULEUR PASTEL aux dépens.

LE GREFFIER            LE PRÉSIDENT

D. PENICHON          J.M. IMBERT