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6090 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Opposabilité des conditions générales - Absence de document signé par le consommateur (affichage ; tickets)

Nature : Synthèse
Titre : 6090 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Opposabilité des conditions générales - Absence de document signé par le consommateur (affichage ; tickets)
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6090 (10 juillet 2020)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CLAUSE

CONTENU INITIAL DU CONTRAT - OPPOSABILITÉ DES CONDITIONS GÉNÉRALES

ABSENCE DE DOCUMENT SIGNÉ PAR LE CONSOMMATEUR (AFFICHAGE ; TICKETS)

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2020)

 

Présentation. L’opposabilité des conditions générales est souvent liée à la signature d’un document qui les contient (Cerclab n° 6087) ou qui y renvoie (Cerclab n° 6089). Mais cette situation n’est pas la seule qui puisse se rencontrer en pratique. Ainsi, lorsque le contrat est conclu de façon rapide et avec un minimum de documents, les conditions générales font parfois uniquement l’objet d’un affichage (A). Dans d’autres situations, elles sont réduites à l’essentiel et mentionnées sur un ticket (B) ou une pochette (C).

N.B. Rappr. le nouvel art. L. 111-2 C. consom. dans sa rédaction résultant de l’ordonnance du 14 mars 2016 : « Outre les mentions prévues à l'article L. 111-1, tout professionnel, avant la conclusion d'un contrat de fourniture de services et, lorsqu'il n'y a pas de contrat écrit, avant l'exécution de la prestation de services, met à la disposition du consommateur ou lui communique, de manière lisible et compréhensible, les informations complémentaires relatives à ses coordonnées, à son activité de prestation de services et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'Etat. [alinéa 1] Les informations complémentaires qui ne sont communiquées qu'à la demande du consommateur sont également précisées par décret en Conseil d'Etat. [alinéa 2] ».

A. AFFICHAGE

Présentation. L’hypothèse peut concerner des contrats de la vie quotidienne et des conditions souvent d’ampleur réduites (ex. teinturier). Elle vise aussi des situations où les conditions générales résultent de dispositions contrôlées et d’application permanente et publique (transport ferroviaire). L’hypothèse peut donc soulever des difficultés de natures différentes : soit l’ignorance de l’existence de ces conditions générales, soit le fait que l’affichage n’est que partiel (sur la communication d’extraits).

Les règles applicables en la matière sont conformes aux principes généraux :

1/ le consommateur doit connaître l’existence de ces conditions (V. art. 1119 C. civ.), ce qui suppose soit une clause de renvoi (pour les contrats signés, V. Cerclab n° 6089), soit une visibilité de l’affiche au moment et dans le lieu de conclusion du contrat (affichette exposée à un endroit accessible, existence des conditions mentionnée près du comptoir, etc.) ;

2/ le consommateur doit pouvoir en prendre connaissance (affiche présente, lisible et accessible), en principe de façon complète.

N.B. Compte tenu de l’absence de toute signature d’une clause expresse par le consommateur, la preuve de l’existence de l’affichage au jour de la conclusion, de son contenu et de son accessibilité repose sur le professionnel.

Affichage et information du consommateur. V. pour la Commission, plutôt sous l’angle de l’information du consommateur lorsque les conditions générales sont en tout état de cause applicables : la Commission des clauses abusives recommande que les conditions générales des transporteurs et commissionnaires soient affichées de façon apparente auprès de tous les guichets où est perçu le prix du transport. Recomm. n° 82-01/A-1° : Cerclab n° 2150 (considérant n° 5 ; l’affichage ne dispense pas de la reproduction sur le document remis au client). § V. aussi : la Commission des clauses abusives recommande que les conditions générales concernant les droits ou les obligations réciproques des voyageurs et des transporteurs soient portées à la connaissance des voyageurs, et notamment par affichage de façon apparente à proximité du lieu de délivrance des billets. Recomm. n° 84-02/A, 1° : Cerclab n° 2175 (contrats de transport terrestres de voyageurs ; considérant n° 2 : n’est pas satisfaisante une publicité partielle par le biais d’extraits, oubliant souvent de mentionner les droits des voyageurs).

Comp. : dès lors que la clause litigieuse figure clairement sur le contrat de location (clause au recto, en caractère gras parfaitement lisibles et en français), il ne saurait être reproché au professionnel d’avoir manqué à son obligation d’information et de conseil en ne l’affichant pas dans ses locaux, dans ceux de ses mandataires ou en la mentionnant dans tout autre document à destination de ses clients. TGI Pontoise (1re ch.), 20 novembre 2007 : RG n° 05/09025 ; Cerclab n° 592 (location de véhicule), confirmé par CA Versailles (19e ch.), 9 janvier 2009 : RG n° 07/08866 ; Cerclab n° 2731 (manquement à l’obligation d’information implicitement repris, sans que l’argument soit détaillé).

Inopposabilité des conditions en l’absence d’affichage. Caractère abusif d’une clause de non responsabilité en cas de vol des objets laissés pendant l’utilisation d’une piscine, dont il n’est pas prouvé qu’elle était portée à la connaissance du public par un affichage visible. CA Paris (8e ch. D), 29 juin 2000 : RG n° 1998/09533 ; Cerclab n° 923 ; Juris-Data n° 2000-141026 (la commune prétendait que le règlement était affiché visiblement à l’attention du public au-dessus de la caisse, mais elle n’en rapporte pas la preuve selon l’arrêt, ce qui impute la charge de celle-ci au professionnel), cassé par Cass. civ. 1re, 28 octobre 2003 : pourvoi n° 00-18770 ; arrêt n° 1307 ; Cerclab n° 2019 (compétence administrative).

Inopposabilité des conditions en l’absence de connaissance de l’affichage. Est abusive, au sens de l’ancien art. L. 132-1 [L. 212-1] C. consom. et de son annexe 1.b), la clause limitative de la responsabilité d’un pressing prévue par les conditions générales affichées dans le magasin, dans la mesure où elle limite de façon inappropriée les droits légaux du consommateur vis-à-vis d’un professionnel en cas d’exécution défectueuse par celui-ci d’une quelconque des obligations contractuelles, et qu’en tout état de cause, il apparaît que le ticket remis au consommateur ne comporte aucun renvoi à ces conditions générales, ce qui n’a dès lors pas permis à celui-ci d’avoir vraiment l’occasion de prendre connaissances des clauses figurant dans ces conditions. TI Niort, 7 août 1996 : RG n° 1 96 00 233 ; Cerclab n° 98.

B. CLAUSES FIGURANT SUR UN TICKET

Présentation. La conclusion rapide de certains contrats se réalise souvent sans véritables conditions générales, les quelques clauses étant présentes sur le ticket, reçu ou facturette remis au consommateur (teinturier, développement de pellicules, places de spectacle).

Figurant dans un document conservé par le consommateur, d’ampleur nécessairement réduite compte tenu de la taille du support, les clauses figurant sur ces tickets ne soulèvent pas de difficultés quant à la possibilité de connaître l’existence de la clause et d’en prendre connaissance. La difficulté concerne la date de cette connaissance. En toute rigueur, l’existence de la clause n’est connue qu’après la conclusion du contrat et devrait donc être déclarée inopposable, sauf à permettre au consommateur de se retirer du contrat en cas de refus de la stipulation. Les décisions recensées montrent un certain pragmatisme en tolérant ce léger décalage. Pour échapper à toute discussion, il serait de bonne pratique que le professionnel informe au préalable le consommateur en affichant près du lieu de conclusion ou de paiement le contenu des clauses figurant sur le ticket, ce qui ne présente guère de difficultés compte tenu de leur volume très limité.

Clauses non abusives. Absence de caractère abusif d’une clause d’indemnisation forfaitaire d’un contrat de développement de pellicules autorisant le consommateur à faire une déclaration de valeur. CA Aix-en-Provence (1re ch. C), 6 septembre 2005 : RG n° 01/04276 ; arrêt n° 2005/431 ; Cerclab n° 723 ; Juris-Data n° 2005-305908 (la décision estime que le fait que la clause figure au verso du ticket remis après la remise des clichés n’équivaut pas à imposer une clause après la conclusion du contrat, celui-ci n’étant formé qu’après acceptation des travaux par le prestataire et acceptation des conditions par le consommateur ; la décision constate par ailleurs que le consommateur était représenté par un parent, photographe et client habituel qui connaissait l’existence de cette clause), infirmant TGI Marseille (10e ch. civ.), 4 octobre 2000 : RG n° 99/2524 ; jugt n° 723 ; Cerclab n° 506 (clause d’option peu claire ; le jugement semble insister sur le fait que la clause implique une déclaration de la valeur particulière des clichés remis).

Opposabilité au voyageur de la clause imposant d’effectuer les voyages dans l’ordre imposé pour bénéficier du tarif préférentiel accordé, dès lors que les billets et les pochettes portent mention à leur verso que le porteur du billet doit vérifier que le trajet emprunté est conforme à ce qu’il a acheté, en précisant que toute compagnie peut refuser à bord un passager qui ne détient pas un billet conforme au vol. CA Paris (pôle 5 ch. 11), 10 décembre 2010 : RG n° 08/14529 ; arrêt n° 395 ; Cerclab n° 2999, confirmant TGI Bobigny (7e ch. sect. 3), 27 mai 2008 : RG n° 06/07941 ; Cerclab n° 3971 (absence de caractère abusif de la clause d’adhésion aux conditions générales, dès lors que le billet de transport aérien fait référence aux conditions générales de transport de la compagnie comme partie intégrante du contrat et qu’il est constant que le client est en l’espèce un voyageur fréquent comme le démontre sa possession d’une carte de fidélisation et qu’en conséquence, le client n’établit pas qu’il n’aurait pas eu « l’occasion »de prendre connaissance de la clause, en contravention à l’annexe 1.i), le tribunal jugeant non établi un décalage entre la formation du contrat et la remise du billet).

Clauses abusives. La clause figurant sur le second ticket, aux termes de laquelle « seul le montant reconnu sera crédité », est abusive dans la mesure où elle figure sur un document remis après le dépôt et qu’elle conduit à faire peser la faute résultant des erreurs ou des imperfections du système de remise de fonds, sur le seul usager. TI Bourg-en-Bresse, 17 février 2005 : RG n° 04-000547 ; jugt n° 95/05 ; Cerclab n° 43 (dépôt d’espèce dans un automate). § Caractère abusif d’une clause figurant au dos d’un ticket constatant la remise des pellicules à développer. CA Aix-en-Provence (11e ch.), 20 septembre 1995 : RG n° 94/19269 ; arrêt n° 877/95 ; Cerclab n° 760 ; Juris-Data n° 1995-047069 ; Contr. conc. consom. 1996, n° 172, note Raymond (comp. la position différente prise ultérieurement par une autre chambre de la même Cour), infirmant TI Marseille, 6 septembre 1994 : RG n° 1091/94 ; Cerclab n° 83.

C. CLAUSES FIGURANT SUR UNE POCHETTE

Présentation. La présence de clauses sur les pochettes permettant de conserver des titres ou des documents remis au consommateur soulève des problèmes pour partie spécifiques. Tout d’abord, leur volume en général plus conséquent permet une lisibilité des clauses meilleures que sur un ticket. La remise de la pochette soulève des difficultés similaires quant à la date de la connaissance de la clause. Mais, les décisions recensées, qui se concentrent dans le secteur du transport, montrent que ces pochettes peuvent aussi avoir un rôle d’information du consommateur sur des clauses importantes des conditions générales, rendues opposables par ailleurs, selon des procédés classiques. La solution peut être importante pour des clauses impliquant que le consommateur adopte un comportement spécifique lors de l’exécution du contrat.

Clauses non abusives. Le passager d’un contrat de transport maritime ne peut prétendre ne pas avoir eu connaissance de la clause exonératoire figurant dans les conditions générales, alors qu’est versé au dossier dans ses propres pièces, l’étui d’un titre de transport qui ne peut que lui appartenir et sur lequel est imprimé cette clause. TGI Toulouse (4e ch. cab. 1), 17 juin 2005 : RG n° 03/03074 ; jugt n° 05/422 ; Cerclab n° 777 (le caractère minuscule des caractères et la date tardive de remise semblent cependant participer du caractère abusif admis par le jugement), confirmé sur l’opposabilité par CA Toulouse (2e ch. sect. 1), 22 mars 2007 : RG n° 05/04387 ; arrêt n° 139 ; Legifrance ; Cerclab n° 815 ; Juris-Data n° 2007-332025 (clause non abusive). § Dans le même sens pour un contrat de transport maritime : TGI Bastia (2e ch. civ.), 13 mars 2008 : RG n° 07/00184 ; Cerclab n° 3791 (application de la loi italienne pour un contrat de transport maritime de passagers entre Toulon et Bastia), confirmé par CA Bastia (ch. civ. A), 2 février2011 : RG n° 08/00291 ; Legifrance ; Cerclab n° 2631.

Opposabilité au voyageur de la clause imposant d’effectuer les voyages dans l’ordre imposé pour bénéficier du tarif préférentiel accordé, dès lors que les billets et les pochettes portent mention à leur verso que le porteur du billet doit vérifier que le trajet emprunté est conforme à ce qu’il a acheté en précisant que toute compagnie peut refuser à bord un passager qui ne détient pas un billet conforme au vol. CA Paris (pôle 5 ch. 11), 10 décembre 2010 : RG n° 08/14529 ; arrêt n° 395 ; Cerclab n° 2999, confirmant TGI Bobigny (7e ch. sect. 3), 27 mai 2008 : RG n° 06/07941 ; Cerclab n° 3971 (résumé ci-dessus). § V. aussi : CA Paris (25e ch. B), 8 avril 2005 : RG n° 02/19385 ; Cerclab n° 1335 ; Juris-Data n° 2005-277192 ; Lamyline (information satisfaisante sur la possibilité d’une surréservation sur la pochette et sur la possibilité d’une indemnisation dans ce cas, par référence au règlement européen en la matière), confirmant sur ce point TGI Bobigny (7e ch.), 17 septembre 2002 : RG n° 01/03107 ; Cerclab n° 497 - TI Aulnay-sous-Bois, 24 février 2000 : RG n° 11-99-001036 ; Cerclab n° 26 (de jurisprudence constante, les clauses des conditions générales ont un caractère contractuel et sont opposables au souscripteur d’un contrat d’adhésion, même lorsqu’elles figurent sur des documents annexes, à la double condition que le co-contractant connaisse leur existence et soit informé des conditions dans lesquelles il peut les consulter ; conditions respectées pour l’indication sur la pochette IATA - International Air Transport Association -, dans laquelle était inséré son titre de transport, comprenant quatre pages recto verso rédigées en langue française et anglaise, et stipulant notamment que « le transport effectué et tous autres services rendus par chaque transporteur sont régis par (I) les stipulations figurant sur le présent billet, (II) les tarifs applicables, (III) les conditions de transport du transporteur et la réglementation applicable, lesquelles sont réputées faire partie intégrante des présentes et peuvent être consultées sur demande dans les bureaux du transporteur » ; N.B. la clause imposant le respect de l’ordre des vols était sur le billet, ce qui rend la solution acceptable, l’admissibilité des points II et surtout III étant contestables).