6433 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Prestations de services - Photographie - Vidéos (1) - Présentation générale
- 6430 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Prestations de services - Illustrations
- 6431 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Prestations de services - Diagnostic et traitement antiparasitaire
- 6432 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Prestations de services - Maintenance et entretien
- 6030 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Acceptation des clauses - Clauses offrant une option
- 6139 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Délai pour agir - Délai de réclamation
- 6142 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Preuve - Encadrement des modes de preuve
- 6434 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Prestations de services - Photographie - Vidéos (2) - Description des clauses (droit antérieur au décret du 18 mars 2008)
- 6000 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Normes de référence - Autres références (CNC - AFNOR - Réponse ministérielle - Certification professionnelle)
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6433 (10 juillet 2020)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CONTRAT
PRESTATIONS DE SERVICES (CONTRAT D’ENTREPRISE) - PHOTOGRAPHIES-VIDÉOS (DÉVELOPPEMENT DE PELLICULES - DUPLICATION DE VIDÉOS) (1) - PRÉSENTATION GÉNÉRALE
Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2020)
Présentation. Les contrats de développement de pellicules, de retirage sur papier le cas échéant pour un agrandissement, de duplications de vidéos ou de support informatiques, ainsi que de transferts de vidéos ont suscité un contentieux non négligeable essentiellement centré sur les clauses déterminant la responsabilité des prestataires en cas de perte ou de détérioration des objets qui leur ont été remis.
L’évolution des techniques et notamment le développement de la photographie numérique semblent avoir tari ce contentieux, puisque la perte de l’original est désormais exceptionnelle. Soit l’impression est réalisée en « self-service » par le client et c’est alors l’éventuel dysfonctionnement de l’automate qui peut poser problème. Soit le fichier image est envoyé par internet et, en l’absence de réception, il peut être à nouveau communiqué à l’imprimeur. Quant à la perte des tirages papiers ou albums réalisés par ce dernier, la modification du transfert des risques de transport réalisée par l’art. L. 216-4 C. consom. protège efficacement le consommateur.
Avant de décrire les solutions adoptées par les décisions recensées (Cerclab n° 6434), il convient de présenter les différents fondements utilisés (A) et de rappeler les prises de position en la matière de la Commission des clauses abusives (B) et du Conseil national de la Consommation (C), qui ne sont pas à l’abri de la critique (D).
A. FONDEMENTS DE L’ÉLIMINATION
Décret du 18 mars 2009. Depuis le décret du 18 mars 2009, l’art. R. 212-1-6° C. consom. (reprenant l’ancien art. R. 132-1-6° C. consom. dans sa rédaction résultant du décret n° 2009-302 du 18 mars 2009, sauf pour la protection des non-professionnels transférée à l’art. R. 212-5 C. consom.), dispose qu’est de manière irréfragable présumée abusive et dès lors interdite, la clause ayant pour objet ou pour effet de « supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations ». Depuis ce texte, les clauses exonérant le professionnel de toute responsabilité ou limitant cette responsabilité, y compris par le biais d’une clause d’indemnisation forfaitaire d’un montant très inférieur au préjudice sont donc interdites et réputées non écrites (l’art. R. 212-2-3° C. consom. ne concerne que les clauses d’indemnisation forfaitaire manifestement disproportionnées sanctionnant le consommateur : les clauses faibles protégeant le professionnel ne sont pas concernées).
Cette solution ne peut être tempérée que si les clauses réservent la possibilité au consommateur de solliciter la réparation de son préjudice en justice (solution conseillée par les organismes précités, mais dont la pratique semble loin d’être unanime, V. Cerclab n° 6434) ou si elle offrent une faculté d’option réelle au consommateur, ce qui suppose de vérifier de façon rigoureuse que cette option était connue de ce dernier (et encore, une telle possibilité n’étant pas certaine V. Cerclab n° 6114).
Décret du 24 mars 1978 : référence au contrat de vente pour les contrats complexes. Certaines décisions, rendues avant la réforme du 1er février 1995 et avant l’arrêt du 14 mai 1991 (admettant l’application directe de l’art. 35 de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 en autorisant le juge à déclarer abusive une clause exonératoire dans tout contrat, à condition que la clause, imposée par un abus de puissance économique, crée un avantage excessif), ont admis, lorsque le contrat associait la vente d’une pellicule et son développement, l’application de l’art. 2 du décret du 24 mars 1978, normalement réservé aux contrats de vente, permettant d’écarter les clauses limitant ou exonérant le vendeur de sa responsabilité pour l’une quelconque de ses obligations.
V. : le tribunal d’instance a relevé que l’offre faite par la société de traiter le film a été connue et acceptée, non pas au moment du dépôt du film pour son développement, mais au moment de l’achat du film, et que le prix global ne distinguait pas entre le coût de la pellicule et le coût de son traitement, puis ensuite a énoncé, par une appréciation souveraine, que, par la volonté des parties, l’acte juridique passé par était indivisible ; dès lors, le caractère de vente qu’il présentait, fût-ce de manière partielle, entraînait l’application de l’art. 2 du décret du 24 mars 1978. Cass. civ. 1re, 25 janvier 1989 : pourvoi n° 87-13640 ; arrêt n° 166 ; Bull. civ. I, n° 43 ; Cerclab n° 2110 ; D. 1989. 253, note Malaurie ; ibid. Somm. 303, obs. Hassler et 337, Aubert ; JCP 1989. II. 21357, note Paisant ; Gaz. Pal. 4 janvier 1990, note Panhaleux ; RTD civ. 1989. 574, obs. Rémy ; Les Petites Affiches 31 mai 1989, note Hassler, rejetant le pourvoi contre TI Mulhouse, 23 janvier 1987 : Dnd (la clause limitative de responsabilité invoquée par la société s’inscrit en réalité dans un contrat de vente, et doit dès lors être déclarée abusive et réputée non écrite en application de l’art. 2 du décret du 24 mars 1978 et de l’art. 35 alinéa 2 de la loi n° 7823 du 10 janvier 1978). § V. aussi : en estimant, pour écarter l’application de l’art. 2 du décret du 24 mars 1978, que le contrat litigieux devait, dans son ensemble, être qualifié de contrat de louage d’ouvrage, alors que la propriété des films étant transférée à l’acheteur avant que ces films soient soumis au travail du professionnel, cette convention présentait pour partie le caractère d’une vente qui entraînait l’application du texte susvisé, la cour d’appel a violé celui-ci. Cass. civ. 1re, 6 juin 1990 : pourvoi n° 88-18150 ; arrêt n° 718 ; Bull. civ. I, n° 145 ; Cerclab n° 2108 ; JCP 1991. II. 21594, note Hassler Les Petites Affiches, 3 août 1990, note C. Giaume ; RTD civ. 1991. 359, note Rémy ; Le Quotidien juridique, 12 septembre 1991, n° 110, p. 5, note X, cassant CA Toulouse, 23 juin 1988 : Dnd.
N.B. L’absence généralisée de contrôle judiciaire à cette époque peut expliquer cette entorse à la technique des qualifications car, dans l’absolu, le caractère composite du contrat n’autorise qu’une application distributive des règles des contrats d’emprunt pour le régime de chaque obligation, ce qui, en l’espèce, aurait dû conduire à déclarer abusive la clause en ce qui concerne la vente de la pellicule (ex. pellicule défectueuse), mais non pour son développement à l’occasion duquel la perte a nécesssairement eu lieu.
Art. 35 L. 10 janvier 1978 – ancien art. L. 132-1 C. consom. Sur l’abandon de cette jurisprudence : clause déclarée abusive dans un contrat de remise de diapositives pour un tirage sur papier par référence, implicite, directe à l’art. 35 de la loi du 10 janvier 1978. Cass. civ. 1re, 14 mai 1991 : pourvoi n° 89-20999 ; arrêt n° 741 ; Bull. civ. I, n° 153 ; Cerclab n° 2106 ; D. 1991. 449, note J. Ghestin ; JCP 1991. II. 21763, note Villaceque ; JCP E 1992, n° 239, note G. Paisant ; Contr. Conc. Consom. 1991, n° 7, note L. Leveneur ; Les Petites Affiches, 8 juillet 1991, note Th. Hassler (contrat constituant un pur contrat d’entreprise).
Absence de réglementation spécifique. Sur l’opportunité de créer une réglementation spécifique pour l’indemnisation du consommateur dans le cadre des contrats de développement photographiques, V. dans le sens de la négative : Rép. Min., Quest. 8 janvier 2001 n° 56212 : JOAN 8 janvier 2001, p. 142 (quest.) et JOAN 9 avril 2001, p. 2112 (rép.) ; Cerclab n° 4401 (arg. : la recommandation et suivie par la jurisprudence et le CNC a rendu un avis le 1er décembre 1988).
B. COMMISSION DES CLAUSES ABUSIVES
N.B. Si la recommandation et les avis du CNC concernent le développement des pellicules, les décisions ont eu l’occasion d’aborder des difficultés similaires pour le tirage sur papier de diapositives, la remise de négatifs pour agrandissement ou la duplication de cassettes vidéos, qui appellent des raisonnements et des solutions comparables.
Recommandation. Recommandation n° 82-04, du 14 mai 1982, relative au droit à réparation des consommateurs en cas de perte ou détérioration des films confiés à des laboratoires photographiques ou cinématographiques et à des négociants : Boccrf 22 décembre 1982 ; Cerclab n° 2153.
Clauses de réparation forfaitaire. Dans les considérants de sa recommandation, la Commission expose qu’elle n’a pas voulu condamner toute clause de réparation forfaitaire (considérant n° 7), notamment parce qu’une telle indemnisation peut être simple et rapide, tant pour le professionnel que pour le consommateur, et que la clause pénale peut dispenser le consommateur d’avoir à prouver une faute du professionnel (considérant n° 8), solution avantageuse pour lui sur le plan probatoire. Mais la Commission a subordonné l’absence de caractère abusif à une série de conditions, en formulant plusieurs propositions, sans aller toutefois jusqu’à la rédaction précise d’une clause type.
Ainsi, la Commission recommande que figurent dans les documents contractuels des clauses permettant une juste réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de pertes ou d'avaries des films, aux termes desquelles :
- le consommateur a le choix entre un système de réparation forfaitaire et la mise en jeu de la responsabilité du professionnel sur le fondement du droit commun de la responsabilité ;
- la réparation forfaitaire résulte elle-même d'une option offerte au consommateur entre deux ou plusieurs valeurs déclarées au moment de la conclusion du contrat en fonction de l'importance qu'il donne à ses travaux, sa valeur minimum ne pouvant être inférieure au prix des films vierges majoré des frais occasionnés et la valeur maximum ne pouvant être inférieure au préjudice normalement prévisible causé par la perte ou la détérioration de films jugés importants pour un consommateur ;
- après la réalisation du dommage, si la preuve de la faute est apportée, le consommateur, quand bien même aurait-il choisi le système de réparation forfaitaire, peut encore mettre en jeu la responsabilité du professionnel sur le fondement du droit commun de la responsabilité . Recomm. n° 82-04/B : Cerclab n° 2153 (considérant n° 11 ; consommateur devant prouver la faute du professionnel, ainsi que la réalité et l'importance du préjudice subi).
N.B. La recommandation proprement dite n’a pas repris une condition mentionnée dans le considérant n° 12 : « le consommateur doit recevoir une information claire sur les choix qui lui sont offerts ». Cette question a été en revanche évoquée par les juges du fond (Cerclab n° 6434, pour les contrats de pellicule et plus généralement Cerclab n° 6030).
Avis du 7 avril 1995. Pour le rejet du caractère abusif de la clause type CNC (examinée infra), V. pour la Commission des clauses abusive : il résulte de la combinaison des stipulations que la clause, qui offre en toute hypothèse au consommateur, sans supplément de prix, la possibilité d'une indemnisation négociée de son préjudice et déclare expressément ne pas empêcher le recours devant les tribunaux, n'est pas imposée par un abus de la puissance économique du professionnel et ne confère pas un avantage excessif à ce dernier, qui reste tenu dans les termes du droit commun. CCA (avis), 7 avril 1995 : avis n° 95-01 ; Cerclab n° 3364, suivi sur ce point par TI Lagny-sur-Marne, 25 septembre 1995 : RG n° 1004/93 ; arrêt n° 1721 ; Cerclab n° 65 (clause déclarée abusive non en raison de son contenu mais de sa présentation).
C. CONSEIL NATIONAL DE LA CONSOMMATION
Avis du 1er décembre 1988. À la suite de la recommandation, un groupe de travail a été constitué, après avis du bureau du CNC, à la demande du collège Professionnels afin de trouver une solution satisfaisante, dans ce domaine, pour les deux parties (cf. rapport 1988) Le Conseil national de la consommation, après avoir entendu le rapport de ce groupe de travail « travaux photographiques », a émis un premier avis favorable à l'inscription d’un texte sur le reçu délivré aux consommateurs lors de la remise de films photographiques à des négociants « traditionnels », assurant personnellement la réception des négatifs, par opposition aux dépôts en libre service ou aux ventes par correspondance qui ont fait l’objet d’un second avis. CNC (avis), 1er décembre 1988 : Boccrf/Bosp 1989/4, p. 45 ; Cerclab n° 3958 (avis définitivement adopté à l'unanimité par les deux collèges professionnels et consommateurs).
Cet avis valide la formulation du texte du récépissé devant être remis au consommateur lors d'un dépôt de pellicule chez un commerçant. Pour l’essentiel il dispose que : « Dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle la pochette a été réclamée, la non-restitution ou la détérioration totale de tous clichés, films ou documents confiés donnera lieu à un dédommagement représenté par un film vierge et son traitement gratuit, ou par leur contre-valeur (avoir ou espèces), au choix du client. Cette disposition ne sera applicable que si la réclamation intervient dans un délai de trois mois à compter du dépôt initial.
Dans le cas de travaux ayant une importance exceptionnelle, il est recommandé d'en faire la déclaration lors de leur remise afin de faciliter une négociation de gré à gré.
Le fait de nous confier films, clichés ou documents vaut acceptation des présentes dispositions, qui n'empêchent pas le recours devant les tribunaux ».
L’avis du CNC, souvent évoqué par les juridictions, diffère donc de la recommandation et repose sur quatre éléments essentiels : 1/ une réparation forfaitaire fixée à un film vierge et son traitement gratuit, ou à leur contre-valeur ; 2/ la possibilité de signaler l’importance exceptionnelle des travaux, ouvrant la possibilité d’une négociation de gré à gré ; 3/ subsidiairement, mais en tout état de cause, la possibilité d’une action judiciaire visant à engager la responsabilité de droit commun du prestataire ; 4/ la stipulation de délais, tant pour la réclamation que pour la réponse, sans que leur sanction ne soit précisée (N.B. le maintien d’un recours judiciaire implique que le non respect du délai ne peut faire perdre l’action au consommateur, conformément à la solution générale en la matière, la perte totale de l’action étant une entrave abusive à l’accès au juge, V. Cerclab n° 6139).
* Portée de l’avis et du rapport CNC. La portée de l’avis du CNC a été contesté par plusieurs décisions, pour des raisons différentes. Pour une décision écartant l’influence de l’avis du CNC du 1er décembre 1988 compte tenu de la différence entre la clause de l’espèce et celle évoquée par le CNC. CA Aix-en-Provence (11e ch. B), 24 mai 2005 : RG n° 02/22180 ; arrêt n° 2005/300 ; Cerclab n° 725 ; Juris-Data n° 277659, sur appel de TI Nice 4 septembre 2002 : RG n° 01/5620 ; Dnd. § … Ou du fait que l’avis du 1er décembre 1988 a été expressément mentionné comme ne concernant pas le dépôt de pellicules en libre service. CA Aix-en-Provence (11e ch.), 3 septembre 1997 : RG n° 96/11477 ; arrêt n° 965/97 ; Cerclab n° 754 ; Juris-Data n° 055219 (N.B. cette affirmation est exacte, mais omet le fait qu’un second avis a été pris le 4 juillet 1989 - Boccrf/Bosp 1989/17, p. 306 ; Cerclab n° 3959 - qui a repris quasiment à l’identique le précédent, sauf à préciser les règles sur le dépôt dans un sens… défavorable au consommateur). § … Ou de son caractère provisoire : le rapport d’activité du Conseil National de la Consommation pour 1988 (Boccrf/Bosp 1989/3, p. 35), qui a élaboré un projet de clause dont la rédaction est littéralement reproduite sur les récépissés remis en l’espèce aux consommateurs, lie d’autant moins le Tribunal, que ledit rapport ne paraît pas considérer ce projet de clause comme abouti puisqu’il dispose, à la suite dudit projet : « sur la demande des participants (...) le mandat du groupe de travail a été prorogé afin qu’une solution satisfaisante (dans le cas d’une détérioration de pellicule à caractère « exceptionnel »), soit dégagée au sein des travaux du CNC ». TI Tours, 23 janvier 1997 : RG n° 11-95-00631 ; Cerclab n° 161 (clause jugée abusive ; sur la pertinence de cette affirmation, V. ci-dessous), confirmé sur ce point par CA Orléans (ch. civ.), 31 août 1999 : RG n° 98/00019 ; arrêt n° 1463 ; Cerclab n° 699 (arrêt rappelant que le rapport 1988 du CNC indiquait qu'une prorogation des travaux était nécessaire et que d'évidence par la suite, aucune solution « réglementaire » n'a été formulée ; clause non abusive mais interprétée comme permettant à tout moment la preuve du caractère exceptionnel des travaux, la charge de la preuve étant simplement reportée sur le consommateur), pourvoi rejeté par Cass. civ. 1re, 5 février 2002 : pourvoi n° 00-10250 ; arrêt n° 218 ; Cerclab n° 2037 ; JCP 2002. IV. 1476 (interprétation souveraine d’une clause ambiguë). § … Ou du fait qu’il a été rendu antérieurement à la loi du 1er février 1995. TGI Marseille (10e ch. civ.), 4 octobre 2000 : RG n° 99/2524 ; jugt n° 723 ; Cerclab n° 506, infirmé par CA Aix-en-Provence (1re ch. C), 6 septembre 2005 : RG n° 01/04276 ; arrêt n° 2005/431 ; Cerclab n° 723 ; Juris-Data n° 305908 (clause conforme à celle validée par l’avis).
* Décisions se référant à l’avis. Pour des décisions visant l’avis du 1er décembre 1988 du Conseil National de la consommation (développement de pellicules) : CA Lyon (1re ch.), 18 juillet 1991 : RG n° 955-90 ; Cerclab n° 1153 (clause jugée abusive, l’arrêt affirmant ensuite « que, du reste, l'avis en date du 1er décembre 1988 du Conseil national de la consommation […] préconise l'emploi, après la clause d'indemnisation forfaitaire, des deux stipulations suivantes… », absentes en l’espèce) - CA Paris (8e ch D), 1er décembre 1998 : RG n° 1996/02324 ; arrêt n° 726 ; Cerclab n° 1097 ; Juris-Data n° 024234 (clause non abusive dès lors qu’elle ne figure pas dans l'annexe de l’art. L. 132-1 C. consom. répertoriant les clauses abusives, qu’un avis adopté le 7 avril 1995 par la Commission des clauses abusives décide qu'une telle clause n'est pas abusive et qu'au surplus, le libellé de cette clause a été expressément adopté par le Conseil National de la consommation dans un rapport adopté le 1er décembre 1988) - CA Aix-en-Provence (1re ch. C), 6 septembre 2005 : RG n° 01/04276 ; arrêt n° 2005/431 ; Cerclab n° 723 ; Juris-Data n° 305908 (le professionnel « fait en effet justement remarquer que le texte de la clause sus-citée n'est que la reproduction du texte préconisé par le Conseil National de la consommation dans son avis du 1er décembre 1988 relatif au droit à réparation du consommateur en cas de perte ou de détérioration de films photographiques » ; clause jugée non abusive après vérification de sa conformité au regard de la recommandation et de sa présentation), infirmant TGI Marseille (10e ch. civ.), 4 octobre 2000 : RG n° 99/2524 ; jugt n° 723 ; Cerclab n° 506 (jugement notant que la loi du 1er février 1995 est postérieure à l'avis donné en 1988 par le Conseil National de la Consommation).
Rapport d’activité 1988. Dans son rapport d’activité du 11 février 1989, pour l’année 1988 (Boccrf/Bosp 1989/3, p. 35), il a été mentionné qu’à la demande des participants, et sur proposition de Mme Neiertz, le mandat du groupe de travail avait été prorogé afin qu'une solution satisfaisante (dans le cas d'une détérioration de pellicule à caractère « exceptionnel »), soit dégagée au sein des travaux du CNC. Cette assertion a été parfois interprétée comme la preuve du caractère provisoire de cet avis (TI Tours, 23 janvier 1997 : RG n° 11-95-00631 ; Cerclab n° 161, résumé supra). En réalité, si la discussion s’est poursuivie sur l’indemnisation des travaux exceptionnels, elle a débouché sur un constat d’échec et sur le refus de consacrer des barèmes d’indemnisation de ces travaux.
Avis du 4 juillet 1989. En revanche, les travaux consacrés à l’examen des hypothèses laissées de côté par le premier avis, concernant les dépôts en libre service et les envois par correspondance, ont abouti à une second avis. CNC (avis), 4 juillet 1989 : Boccrf/Bosp 1989/17, p. 306 ; Cerclab n° 3959 (avis voté à l’unanimité par le collège Professionnels, mais à la majorité et avec deux amendements pour le collège Consommateurs et usagers). § Cet avis est beaucoup moins connu que le premier. V. par exemple : CA Aix-en-Provence (11e ch.), 3 septembre 1997 : RG n° 96/11477 ; arrêt n° 965/97 ; Cerclab n° 754 ; Juris-Data n° 055219 (arrêt estimant l’avis de 1988 inapplicable au libre service, sans citer celui de 1989).
* Libre service. Pour les remises en « libre-service », lorsque le dépôt de films est effectué à l'aide d'une pochette sur laquelle les indications sont apposées par le consommateur, c'est à dire sans intervention de personnel, le groupe de travail puis l’avis ont retenu un texte presque identique à celui adopté pour les négociants traditionnels.
La modification concerne la preuve du dépôt : « 2°) S'agissant de films déposés en « libre-service », c'est à dire sans intervention du personnel, l'enregistrement dans les documents du laboratoire qui traite les travaux du magasin vaudra attestation du dépôt. » Selon le rapport, « il serait anormal que la preuve du dépôt résulte du seul ticket détachable que le consommateur s'autodélivre dans le cadre du « libre-service » ». § Sur les clauses relatives à la preuve du dépôt dans des automates, V. plus généralement Cerclab n° 6142.
Par ailleurs, le collège Consommateurs et usagers a proposé un amendement au 3° de l’avis en ajoutant à la réparation forfaitaire par un « film vierge et son traitement gratuit » la possibilité d’une réparation « par deux films diapositives ».
* Contrat par correspondance. Pour les développements de pellicules envoyées par la poste, l’avis propose la formulation suivante : « La non restitution ou détérioration totale des pellicules arrivées au laboratoire donnera lieu, au choix du client, à la remise d'un film vierge et son traitement gratuit ou leur contrevaleur (frais de port éventuels inclus). Pour les travaux d'une importance exceptionnelle, il est recommandé d'obtenir, avant l'envoi, l'acceptation écrite du laboratoire. Dispositions non exclusives de recours en responsabilité. » Selon le rapport, la contrevaleur inclut les frais de port, si le consommateur en a engagés. Le collège Consommateurs et usagers a proposé un amendement visant à substituer à la formule finale la phrase suivante : « Dispositions non exclusives de recours en responsabilité devant le juge ».
D. OBSERVATIONS CRITIQUES
Présentation. Les prises de positions des organismes tels que la Commission des clauses abusives et du Conseil national de la consommation sont normalement protectrices des intérêts des consommateurs. En l’occurrence, les positions adoptées, notamment celles du CNC, semblent pourtant adopter une conception plutôt minimaliste de cette protection, sur plusieurs points.
Nature de la clause. Les clauses offrant une pellicule vierge et un développement gratuit sont présentées, aussi bien par la Commission que par le CNC comme des clauses de réparation forfaitaire.
* Si le consommateur a conclu un contrat mixte comprenant la vente de la pellicule et son développement, l’offre d’une pellicule vierge et d’un traitement gratuit n’est que la proposition de remplacement d’une prestation non exécutée par une autre, alors que le paiement de la contrevaleur n’est qu’un remboursement du consommateur sans indemnité. En réalité, il est clair que dans ce cas, le consommateur n’est absolument pas indemnisé de la perte des négatifs, qui sont un objet unique sans aucun rapport avec une pellicule vierge. La situation pourrait être comparée à celle par laquelle un dépositaire qui aurait perdu l’objet remis, offrirait au déposant le dépôt d’un nouvel objet pour la même durée. L’économie de l’indemnisation n’est d’ailleurs dans ces cas pas très éloignée du premier arrêt Chronopost qui avait réputé la clause non écrite.
* Si le consommateur a conclu un simple contrat de développement, l’offre d’un développement gratuit ou sa contrevaleur n’est qu’un remboursement d’une prestation non exécutée. La proposition d’une pellicule vierge est ici effectivement une indemnisation forfaitaire du préjudice causé par la perte de la pellicule. Mais, ici encore, les négatifs exposés n’ont rien à voir avec une pellicule vierge. Leur perte entraîne aussi la perte de droits intellectuels sur les photographies. Il faut noter à cet égard que, dans le rapport 1988 du CNC, le collège Professionnels estime que la réparation du préjudice matériel est désormais acquise puisque le consommateur reçoit « en dédommagement, une pellicule vierge et une somme de 150 F » et que seul le problème du préjudice moral est encore posé, position qui n’est pas radicalement contestée par le collège Consommateurs, qui se contente d’affirmer que le préjudice moral ne peut pas être toujours réduit à 150 franc. Or, si la somme de 150 francs, déduction faite du coût du développement, peut s’apparenter à une faible indemnisation forfaitaire de la perte de la pellicule, ce n’est pas cette stipulation qui a été retenue par le CNC et la mention d’un simple développement gratuit rapproche la clause d’une indemnisation dérisoire, voire d’une clause d’exonération pure et simple pour la perte des droits sur les négatifs.
Déclaration de la valeur exceptionnelle. L’économie de la clause repose en grande partie sur la possibilité pour le consommateur de faire une déclaration de la valeur exceptionnelle des travaux. Toutefois, la formule proposée « il est recommandé d'en faire la déclaration lors de leur remise afin de faciliter une négociation de gré à gré » ne donne aucune garantie quant à la connaissance de cette faculté par le consommateur, d’autant qu’elle ne se présente pas comme une véritable option avec deux prix différents. Par ailleurs, il n’est pas davantage imposé, lorsque cette déclaration est faite, de recueillir des éléments sur le contenu des pellicules (mariage, voyages, etc.), alors que s’agissant de la définition du contenu d’un récépissé, il était utile d’en définir les mentions obligatoires.
Libre service. La seule modification apportée est défavorable au consommateur puisque, pour éviter sans doute des fraudes dont la possibilité n’est pas contestable, la clause sur la preuve aboutit à transférer au consommateur les risques de perte entre le dépôt et le laboratoire, alors que c’est sans doute à ce moment qu’ils sont les plus importants (il n’est guère étonnant que le collège Professionnels ait approuvé le second avis à l’unanimité…).
Recours judiciaire. Tant la recommandation que les avis reposent sur le maintien d’un recours judiciaire. Cette condition ne semble pas toujours respectée (ni forcément vérifiée) par les juridictions qui reproduisent des clauses éludant parfois la mention finale, sans qu’il soit toujours possible de déterminer si cette absence vient de la clause elle-même ou d’une reproduction partielle par les juridictions. Or, elle est essentielle, car lorsque cette action judiciaire est exercée, les professionnels réclament systématiquement l’application de la pénalité forfaitaire.
Par ailleurs, concernant les contrats par correspondance, il est quelque peu surprenant - le mot est faible - de lire dans le rapport sous l’avis du 4 juillet 2009 qu’« afin d'éviter toute connotation dévalorisante d'une mention relative au recours devant les tribunaux sur la pochette qui est un outil publicitaire et le seul lien entre la société de vente par correspondance et le consommateur, cette mention a été reformulée ainsi : « Dispositions non exclusives de recours en responsabilité. », conception qui privilégie l’aspect publicitaire du document constatant les droits et obligations du consommateur…