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CA AMIENS (1re ch. 1re sect.), 23 février 2012

Nature : Décision
Titre : CA AMIENS (1re ch. 1re sect.), 23 février 2012
Pays : France
Juridiction : Amiens (CA), 1re ch. sect. 1
Demande : 11/01265
Date : 23/02/2012
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 25/03/2011
Décision antérieure : CASS. CIV. 1re, 12 mai 2016
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7352

CA AMIENS (1re ch. 1re sect.), 23 février 2012 : RG n° 11/01265 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Dès lors qu'il est établi par le procès-verbal de gendarmerie que M. Y. conduisait sous l'empire d'un état alcoolique au sens de l'article R. 234-1 du code de la route précité au moment de l'accident et qu'il n'est pas démontré que le sinistre est sans relation avec cet état, démonstration incombant contractuellement aux ayant-droit de l'assuré et non à l'assureur comme retenu par les premiers juges, la Mutuelle des Motards est fondée à opposer à l'intimée ces deux exclusions de garantie. »

 

COUR D’APPEL D’AMIENS

PREMIÈRE CHAMBRE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 23 FÉVRIER 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11/01265. APPEL D'UN JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D’AMIENS DU 11 MARS 2011.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE :

Compagnie d'assurances MUTUELLE DES MOTARDS

Représentée par la SCP S.-B. ET A., avoués à la Cour et plaidant par Maître P., avocat au barreau d'AMIENS

 

ET :

INTIMÉE :

Madame X. veuve Y.

Représentée par la SCP T.-M. ET DE S., avoués à la Cour et plaidant par Maître H., avocat au barreau d'AMIENS, Bénéficiaire d'une aide juridictionnelle partielle numéro 2011/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AMIENS

 

DÉBATS : A l'audience publique du 8 décembre 2011 devant Mme BELFORT, Présidente, entendue en son rapport et Mme PIET, Conseillère, magistrats rapporteurs siégeant, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui ont avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 23 février 2012.

GREFFIER : M. DROUVIN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Mme La Présidente et Mme La Conseillère en ont rendu compte à la Cour composée de : Mme BELFORT, Présidente, Mme PIET et Mme LORPHELIN, Conseillères, qui en ont délibéré conformément à la Loi.

PRONONCÉ PUBLIQUEMENT : Le 23 février 2012 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; Mme BELFORT, Présidente, a signé la minute avec M. DROUVIN, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DÉCISION :

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

M. Y. a été victime d'un accident de la circulation le 19 juillet 2007 alors qu'il pilotait une motocyclette.

Par acte du 12 novembre 2009, Mme X., veuve de M. Y. a assigné la Mutuelle des Motards en exécution du contrat d'assurances dont son conjoint était titulaire.

Par un jugement du 11 mars 2011, le tribunal de grande instance d'Amiens, au visa de l'article L. 113-11 du code des assurances a :

- dit que la Mutuelle des Motards doit indemniser intégralement Mme X. du préjudice subi tant par elle que par ses enfants, du fait de l'accident mortel de son époux survenu le 19 juillet 2007 et ce, en considération des clauses et conditions du contrat d'assurance,

- débouté la Mutuelle des Motards de ses demandes reconventionnelles,

- ordonné la réouverture des débats pour l'intervention volontaire de Mme X. en qualité de représentante légale de ses deux enfants mineurs et pour formulation de demandes chiffrées ;

- sursis à statuer sur le surplus des demandes et retiré l'affaire du rôle,

- condamné la Mutuelle des Motards provisoirement aux entiers dépens.

Le 25 mars 2011, la Mutuelle des Motards a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières écritures du 2 août 2011, l'appelante qui poursuit l'infirmation de la décision attaquée, demande à la cour de débouter Mme Y. de ses demandes et à titre reconventionnel de la condamner à lui payer la quote-part de la somme de 8.900 euros reçue par elle au titre de la succession de M. Y. soit la somme de 4.450 euros et celle de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Dans ses conclusions du 7 juin 2011, Mme Y. demande à la cour de confirmer le jugement entrepris et de condamner l'appelante à lui payer une somme de 4.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de la SCP T.-M. & de S.

 

Une ordonnance de clôture est intervenue le 5 octobre 2011.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE,

Sur les faits :

Il est acquis des débats que :

- M. Y. est décédé des suites de l'accident de circulation dont il a été victime le 19 juillet 2007,

- le 10 août 2007, la Mutuelle des Motards informait Mme Veuve Y. qu'elle diligentait le cabinet P. pour expertiser le véhicule et qu'elle était en l'attente de différents renseignements et notamment des procès-verbaux de gendarmerie pour le versement du capital décès aux ayant-droit ;

- le 27 septembre 2007, la Mutuelle des Motards réitérait sa demande de renseignements ;

- le 25 octobre 2007, la Mutuelle des Motards a payé à Mme Veuve Y. une indemnité d'un montant de 8.900 euros en réparation du préjudice matériel relatif à la motocyclette,

- le 20 novembre 2007, cette Mutuelle indiquait à Mme Veuve Y. que compte-tenu du taux d'alcoolémie relevé lors de l'accident sur son époux décédé (0,88 grammes pour mille), information contenue dans le procès-verbal de gendarmerie dont elle venait d'avoir connaissance, elle ne verserait pas le capital décès prévu au contrat, s'engageant à ne pas revenir sur le remboursement de la moto.

 

Sur les clauses contractuelles :

Il ressort :

* de l'article 19 des conditions générales du contrat souscrit par M. Y. que sont exclus de la garantie les dommages aux véhicules assurés s'il est établi que le conducteur se trouvait lors du sinistre sous l'emprise d'un état alcoolique dont le seuil est fixé par l'article R. 234-1 du code de la route, sauf s'il est établi par l'assuré que le sinistre est sans relation avec cet état ;

* de l'article 27 de ces mêmes conditions que sont exclus de la garantie les dommages corporel résultant de la conduite sous l'emprise d'un état alcoolique, sauf s'il est prouvé par l'assuré que le sinistre est sans relation avec cet état.

Dès lors qu'il est établi par le procès-verbal de gendarmerie que M. Y. conduisait sous l'empire d'un état alcoolique au sens de l'article R. 234-1 du code de la route précité au moment de l'accident et qu'il n'est pas démontré que le sinistre est sans relation avec cet état, démonstration incombant contractuellement aux ayant-droit de l'assuré et non à l'assureur comme retenu par les premiers juges, la Mutuelle des Motards est fondée à opposer à l'intimée ces deux exclusions de garantie.

Pour échapper à ces exclusions, Mme Veuve Y. soutient que la Mutuelle des Motards en l'indemnisant des dégâts matériels de la motocyclette a renoncé à s'en prévaloir.

Il est constant que la renonciation à un droit ne se présume pas et qu'elle ne résulte que d'actes de son titulaire manifestant sans équivoque la volonté d'y renoncer.

Il apparaît des pièces du dossier que lors du versement de l'indemnité le 25 octobre 2007, la Mutuelle des Motards ne connaissait pas l'état d'alcoolémie de M. Y., copie du procès-verbal de gendarmerie n'ayant été faite que le 30 octobre 2007 et à elle transmise par Trans-PV le 6 novembre suivant ainsi que cela ressort des cachets portés sur ce document. De plus, il n'est nullement démontré que l'assureur aurait pu détenir cette information avant cette dernière date.

Aussi, le paiement de l'indemnité au titre des dommages matériels du véhicule assuré ne saurait être considéré comme un acte de renonciation non équivoque de l'assureur à opposer les exclusions de garantie, étant relevé que ce paiement rapide est intervenu postérieurement à une conversation téléphonique avec le notaire, laissant supposer la transmission d'informations sur l'état de nécessité de la veuve et des enfants de l'assuré, diligence qui ne saurait lui être reprochée aujourd'hui.

Dès lors, la cour infirme le jugement en ce qu'il a écarté les exclusions de garantie précitées et condamné la Mutuelle des Motards à exécuter le contrat d'assurance au titre de l'accident du 19 juillet 2007 dans lequel son assuré M. Y. est décédé.

 

Sur la répétition de l'indû :

Si en application de l'article 1235 du code civil, ce qui a été payé sans être dû est sujet à répétition, la cour considère que par son courrier du 20 novembre 2007, la Mutuelle des Motards a renoncé à obtenir la répétition de l'indemnité versée aux héritiers Y. au titre des dommages matériels du véhicule assuré. En effet, elle écrit dans ce courrier « néanmoins, compte-tenu de votre situation, nous ne revenons pas sur ce règlement ».

Sa demande de ce chef est en conséquence rejetée.

 

Sur les autres demandes :

Aucune considération d'équité ne commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

Chaque partie garde à sa charge ses frais et dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

la Cour,

statuant après débats publics, contradictoirement, en dernier ressort et par décision mise à disposition du public au greffe,

Infirme le jugement rendu le 11mars 2011 par le tribunal de grande instance d'Amiens entre les mêmes parties,

Statuant à nouveau,

Déboute Mme X., Veuve Y. de ses demandes,

Y ajoutant,

Déboute la Mutuelle des Motards de sa demande en répétition de l'indû,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que chaque partie conserve la charge de ses frais et dépens,

Fait application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit des avoués de la cause, pour la part des dépens d'appel dont ils ont fait l'avance sans en avoir reçu préalablement provision.

LE GREFFIER,                   LE PRÉSIDENT,