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CA DOUAI (ch. 8 sect. 1), 2 mai 2019

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (ch. 8 sect. 1), 2 mai 2019
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 8e ch. sect. 1
Demande : 18/00649
Décision : 19/487
Date : 2/05/2019
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 29/01/2018
Numéro de la décision : 487
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7948

CA DOUAI (ch. 8 sect. 1), 2 mai 2019 : RG n° 18/00649 ; arrêt n° 19/487

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Le Crédit agricole avance quatre arguments pour soutenir que les demandes de M. T. sont irrecevables. […]

Le Crédit agricole soutient ensuite que les demandes présentées à la cour, exprimées de façon peu claires, sont nouvelles au vu des conclusions de première instance. L'article 564 du code de procédure civile dispose que : «A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.». En l'espèce, il ressort tant de la déclaration d'appel de l'avocat de M. T. qui reprend ses conclusions de première instance que des conclusions de M. T. dont le dispositif est reproduit par le Crédit Agricole dans ses dernières conclusions du 14 novembre 2018 que la demande tendant à voir déclarer abusive et non écrite la stipulation d'intérêts a été présentée en première instance, l'appelant se bornant à modifier l'ordre des demandes. En appel, la demande tendant à voir déclarer abusive les clauses contractuelles est plus large, englobant notamment la clause relative à la période d'anticipation. Cependant, la possibilité d'invoquer le caractère abusif d'une clause contractuelle peut être soulevée en tout état de cause. Les demandes de M. T. sur ce point sont donc recevables.

Le Crédit Agricole prétend encore que les demandes de M. T. sont irrecevables car la seule sanction possible de l'inexactitude du taux effectif global est la déchéance du droit aux intérêts et non la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels. Effectivement si le taux effectif global est erroné dans l'offre de crédit immobilier, la déchéance du droit aux intérêts est encourue. Cependant, en cas d'erreur sur la sanction encourue, la demande sera rejetée et non déclarée irrecevable. Le moyen de l'intimé ne peut donc pas prospérer.

Le Crédit Agricole explique enfin que M. T. est irrecevable à agir car le prêt étant régulièrement remboursé, M. T. a ainsi ratifié la stipulation litigieuse au vu des dispositions de l'article 1338 du code civil dans sa version applicable aux contrats conclus avant le 1er octobre 2016. Or, à supposer que l'emprunteur puisse renoncer à la nullité relative de la stipulation d'intérêts conventionnels qui sanctionne la méconnaissance des dispositions des articles 1907 du code civil et L. 313-1 et R 313-1 du code de la consommation dans leur rédaction applicable au cas d'espèce, par une exécution volontaire de l'obligation de payer les intérêts conventionnels prétendument irréguliers, il reste que la renonciation de l'emprunteur à se prévaloir de la nullité de la stipulation d'intérêts par son exécution doit, dès lors que l'exécution a lieu après l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablement confirmée, en tout état de cause être caractérisée non seulement par sa connaissance préalable de la violation des dispositions destinées à le protéger mais également par son intention de la réparer. S'il n'est pas contesté qu'aucun incident de paiement n'entache l'exécution du contrat, la connaissance des irrégularités qui affecteraient le taux effectif global découle des rapports d'expertise sollicités pour chaque prêt par M. T.. Ces rapports ne sont pas datés mais dans la mesure où ils analysent le trop perçu d'intérêts jusqu'au 31 décembre 2016 et sur la base de tableaux d'amortissement fournis par le prêteur les 5 mars et 1er octobre 2016, ils ont été établis postérieurement. M. T. a introduit l'action le 19 janvier 2017, excluant toute volonté de confirmer ou ratifier la stipulation d'intérêts. Le Crédit agricole échoue donc à rapporter la double preuve que lui imposent les dispositions de l'article 1338 du code civil. Au vu de l'ensemble de ces éléments, les demandes de M. T. seront déclarées recevables. »

2/ « Sur les clauses abusives : Selon l'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa version en vigueur lors de l'acceptation des offres de crédit, « […] ». S'il est exact que M. X. ne se prévaut d'aucun décret présumant la clause litigieuse abusive et qu'il ne peut se fonder sur la recommandation n° 2005-02 de la commission des clauses abusives qui ne concerne que les comptes à vue et le découvert associé, pas plus que sur la directive 2014/17/UE adoptée à la suite des difficultés liées aux emprunts libellés en devise étrangère qui, si elle porte sur les crédits immobiliers, n'aborde pas l'interdiction de calcul des intérêts conventionnels sur une période autre que l'année civile, les dispositions précitées ne sont pas limitatives et permettent à un consommateur d'invoquer l'existence de clauses abusives figurant dans le contrat qu'il a souscrit, à condition de prouver l'existence d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

En ce qui concerne « le recours à un diviseur de marché financier de 360 jours », la lecture des deux offres de crédit montre que ces dernières ne contiennent pas de clause mentionnant une telle utilisation de l'année lombarde, de sorte qu'il est impossible de déclarer non écrite une clause inexistante.

En ce qui concerne la clause liée aux dispositions de l'offre proposant les modalités d'amortissement précédées d'un différé, il est soutenu par l'appelant que la stipulation de différé d'amortissement induit le consommateur en erreur, le poussant à croire qu'en utilisant à son maximum la période d'anticipation convenue, il bénéficiera finalement d'un taux effectif global moins élevé, ce qui serait l'inverse, compte tenu d'un coût accru d'intérêts.

La clause concernant la période d'anticipation mentionnée en page 2 ou 3 de chaque offre de façon identique et citée supra concerne les modalités d'une part de libération des fonds prêtés et d'autre leur remboursement, de telle sorte que cette clause concerne l'objet principal du crédit. Elle repose sur un mécanisme simple permettant, pour l'exécution des travaux de rénovation, le déblocage de la somme prêtée par fractions successives sur une durée de 24 mois maximum et prévoit durant ce temps le paiement des seuls intérêts, à l'exclusion d'une part de capital. Cette clause est rédigée de façon claire et compréhensible. En conséquence la clause «période d'anticipation» ne peut donner lieu à une appréciation de son caractère abusif.

En ce qui concerne les informations sur le coût total du crédit, soit par exemple pour le prêt de 121.663 euros, un coût maximum de l'anticipation : 10.511,52 euros dont 729,84 euros correspondant au coût de l'assurance décès invalidité obligatoire pendant la période maximum de l'anticipation et un coût maximum du crédit avec assurance décès invalidité obligatoire : 75 6661,37 euros, outre le fait qu'aucun élément n'est versé aux débats permettant de remettre en cause ces données chiffrées, il est certain que le coût total du crédit concerne l'élément principal du crédit. Un exemple chiffré rend forcément la compréhension du coût du crédit plus claire et compréhensible pour tout emprunteur, de telle sorte que cette clause ne peut être abusive.

Dès lors, M. X. sera donc débouté de sa demande tendant à voir déclarer ces clauses non écrites. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 2 MAI 2019