CA NÎMES (2e ch. sect. A), 21 avril 2005
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1056
CA NÎMES (2e ch. sect. A), 21 avril 2005 : RG n° 03/02179 ; arrêt n° 222
Publication : Juris-Data n° 279280
Extrait : « Cette clause n'a pour but que de fidéliser le client, puisqu'elle tend à le contraindre à poursuivre l'exécution du contrat avec la banque où il a souscrit le PEA. En effet, privé de la faculté de clore son PEA pour en ouvrir un autre dans un établissement concurrent, il est contraint de demander son transfert et de régler l'indemnité imposée par le banquier dont le montant peut être dissuasif, puisqu'en l'espèce les deux PEA étaient créditeurs de titres et de liquidités à hauteur de 179.000 euros, d'où une indemnité de 6.444 euros. Cette clause revêt donc le caractère d'une clause pénale limitant les possibilités de rupture de la convention. [examen du caractère manifestement excessif]. Ainsi il y a lieu de réduire le montant de cette clause pénale manifestement excessive, à la somme de 444 euros. »
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE 2 A
ARRÊT DU 21 AVRIL 2005
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 03/02179. Arrêt n° 222. Sur appel de TRIBUNAL D’INSTANCE D’AVIGNON 6 mai 2003.
APPELANTE :
SA BANQUE SANPAOLO
poursuites et diligences de son Président Directeur Général en exercice, domicilié en cette qualité audit siège, [adresse], représentée par la SCP M. TARDIEU, avoués à la Cour, assistée de la SCP ROUSSEL CABAYE ROUSSEL, avocats au barreau de MARSEILLE substituée par Maître MULLER, avocat
INTIMÉS :
- Monsieur X.
né le [date] à [ville], [adresse], représenté par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Cour, assisté de Maître Françoise ARNAUD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Maître FORCADE, avocat
- Madame Y. épouse X.
[adresse], représentée par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Cour, assistée de Maître Françoise ARNAUD, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE substituée par Maître FORCADE, avocat
[minute page 2]
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 2 Février 2005.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS : Monsieur Jean-Loup OTTAVY, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 786 du NCPC, sans opposition des avocats. Il en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Jean-Loup OTTAVY, Président, Monsieur Daniel BACHASSON, Conseiller, Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Vice Président Placé, siégeant en remplacement de tous autres magistrats du siège légitimement empêchés.
GREFFIER : Madame Mireille DERNAT, Premier Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS : à l'audience publique du 3 février 2005, où l'affaire a été mise en délibéré au 22 mars 2005, prorogé à celle de ce jour, Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
ARRÊT : Arrêt contradictoire, prononcé et signé par Monsieur Jean-Loup OTTAVY, Président, publiquement, le 21 avril 2005, par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 3] La SA Banque Sanpaolo a régulièrement relevé appel du jugement du Tribunal d'Instance d'AVIGNON du 6 mai 2003 qui, sur la demande de ses clients Madame et Monsieur X., a déclaré abusive la clause VI des contrats d'ouverture de leur PEA qui stipulait le paiement par le client d'une indemnité de 3 % des actifs, en cas de transfert du PEA dans un autre établissement, a réputé non écrite ladite clause et a condamné la banque à reverser aux époux X. 6.163,40 euros sur les 6.444 euros perçus à l'occasion du transfert des deux Plans d'Épargne en Action, en se fondant sur les prix de la même opération pratiqués par des établissements bancaires concurrents.
Par conclusions déposées le 3 septembre 2004, la SA Banque Sanpaolo reproche au premier juge d'avoir fait une fausse application de l'article L. 131-1 du Code de la Consommation [N.B. lire sans doute 132-1] en recherchant seulement si les autres banques étaient moins chères pour ce service, mais n'a pas caractérisé le déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, et de surcroît, en analysant des tarifs pour des prestations non comparables sur des périodes différentes. Elle conteste la qualification de clause pénale invoquée par les intimés, fait état des charges générées par l'opération, de la perte de revenus escomptés, et du caractère contractuel de l'indemnité prévue lorsque le client décide d'exercer la faculté de transfert de son plan.
Ainsi elle demande d'infirmer le jugement, de débouter les époux X. de leur demande et de les condamner à lui payer 1.500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Madame et Monsieur X., par conclusions déposées le 27 septembre 2004, soutiennent que la clause litigieuse est exceptionnelle dans son quantum, dont le montant est 30 fois plus élevé que chez certains concurrents, qu'elle est disproportionnée aux services fournis par la banque, qu'elle est génératrice d'un déséquilibre contractuel puisqu'aucune contrepartie n'est imposée à la banque. Ils estiment qu'une telle pratique, qui leur fait perdre un an de rendement de leurs comptes, dans le but de dissuader le passage à la concurrence, est constitutive d'une entrave à la libre concurrence.
Au visa des articles L. 132-20 du Code de la Consommation [N.B. lire sans doute 132-1], 1131, 1134, 113 [N.B. lire sans doute 1135] et 1152 du Code Civil, ils demandent de confirmer le jugement sauf à porter la somme allouée à 6.444 euros, sinon de réduire [minute page 4] le montant de cette clause pénale à 100 euros, et en tout cas de condamner la banque à leur payer 1.500 euros de dommages-intérêts pour appel abusif et 2.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Les deux Plans d'Épargne en Action ouverts le 8 octobre 1992 par chacun des époux X. auprès de la SA Banque Sanpaolo contiennent une clause (Article VI / Transfert) qui stipule « Pour le cas où le client demanderait le transfert de son PEA dans un autre établissement, il sera perçu, au profit de la banque, une indemnité égale à 3 % Hors Taxes des actifs transférés... ».
Cette clause n'a pour but que de fidéliser le client, puisqu'elle tend à le contraindre à poursuivre l'exécution du contrat avec la banque où il a souscrit le PEA. En effet, privé de la faculté de clore son PEA pour en ouvrir un autre dans un établissement concurrent, il est contraint de demander son transfert et de régler l'indemnité imposée par le banquier dont le montant peut être dissuasif, puisqu'en l'espèce les deux PEA étaient créditeurs de titres et de liquidités à hauteur de 179.000 euros, d'où une indemnité de 6.444 euros.
Cette clause revêt donc le caractère d'une clause pénale limitant les possibilités de rupture de la convention.
Il n'est pas établi que le montant de 3 % Hors Taxes, et en l'espèce 3, 60 % TTC, corresponde aux frais de transfert effectivement supportés par la banque. D'autant que d'autres établissements bancaires pratiquent des taux bien inférieurs, calculés généralement par lignes d'actions ou d'avoir.
Du moins la Banque Sanpaolo est défaillante dans l'administration de cette preuve faute de démontrer que le transfert d'un compte de cette nature diffère sensiblement du transfert d'un compte titres ordinaires, dont la gestion est centralisée et effectuée par l'outil informatique.
[minute page 5] La Banque Sanpaolo semble faire état d'une évolution à la baisse, dans le temps, des frais de transfert, mais dans ce cas, elle n'explique pas les raisons qui lui ont fait maintenir l'indemnité forfaitaire de 3 % des actifs, fixée en 1992, au détriment des époux X.
La Banque Sanpaolo, qui affirme pratiquer par ailleurs des tarifs avantageux pour le fonctionnement des comptes de cette nature, n'explique pas à combien d'années de profit escomptées correspondrait ladite indemnité.
De surcroît, les époux X. ont été privés, du fait de ce transfert, de la possibilité de faire fonctionner les deux PEA pendant plusieurs semaines.
Enfin, il n'est pas discuté que le transfert des comptes des époux X. à la Société Générale a été motivé, pour l'essentiel, par la fermeture de l'agence de la Banque Sanpaolo à CAVAILLON.
Ainsi il y a lieu de réduire le montant de cette clause pénale manifestement excessive, à la somme de 444 euros.
Le jugement sera réformé en ce sens.
La mauvaise foi procédurale de l'appelante n'est pas parfaitement caractérisée et la demande de dommages-intérêts ne peut prospérer.
Succombant encore pour l'essentiel en cause d'appel, la SA Banque Sanpaolo supporte les dépens d'appel et doit payer une somme équitable de 500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
[minute page 6] Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,
Réforme le jugement déféré.
Condamne la SA Banque Sanpaolo à payer 6.000 euros aux époux X. outre 500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Déboute les parties de leurs autres demandes.
Condamne l'appelante aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Arrêt signé par Monsieur OTTAVY, Président et par Madame DERNAT, Premier Greffier présent lors du prononcé.
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