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CA CHAMBÉRY (ch. civ. 1re sect.), 12 décembre 2023

Nature : Décision
Titre : CA CHAMBÉRY (ch. civ. 1re sect.), 12 décembre 2023
Pays : France
Juridiction : Chambery (CA), ch. civ. sect. 1
Demande : 21/01396
Date : 12/12/2023
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 2/07/2021
Référence bibliographique : 5851 (consommateur, contrat sans lien avec sa profession)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10621

CA CHAMBÉRY (ch. civ. 1re sect.), 12 décembre 2023 : RG n° 21/01396 

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « M. X. doit dans le présent litige bénéficier de la protection accordée à tout consommateur. En effet, il exerçait la profession de chauffeur salarié et taxi et ne dispose pas, malgré la souscription de deux contrats d'assurance antérieurs, de la qualité de professionnel. »

2/ « Enfin, la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne admet que la vigilance du consommateur puisse être appréciée de façon plus favorable dans le cas où les contrats d'assurance et de prêt sont conclus dans le même acte. Les clauses portant sur l'objet principal d'un contrat d'assurance sont ainsi considérées comme claires et compréhensibles si elles exposent de façon transparente le fonctionnement concret du mécanisme d'assurance, et informent le consommateur des conséquences économiques qui en découlent pour lui (CJUE, C-96/14, 23 avril 2015). »

3/ « Il est dès lors évident que M. X. devait cocher la case « je ne peux pas signer la déclaration », s'il répondait « non » à la première partie « je déclare : (...) ne pas être en arrêt de travail », et qu'il n'existait pas d'ambiguïté à ce sujet pour un consommateur normalement avisé prenant le temps de lire le contrat avant de le signer.  Le saut de quelques lignes entre le paragraphe « déclaration du candidat à l'assurance » et « toute fausse déclaration », qui met en valeur cette dernière phrase, ne permet pas de considérer, comme le fait M. X. que les deux phrases n'auraient pas de lien, pas plus que la question de l'incompréhension sur la case à cocher n'apparaît crédible. En effet, M. X. a su cocher une case moins visible, au sein du point « VIII- protection des données à caractère personnel et levée du secret professionnel », pour indiquer qu'il refusait que ses données soient utilisées à des fins de prospection.

Enfin, il y a lieu de rappeler que la sanction du non-respect de l'article R. 311-5 du code de la consommation et de la rédaction de l'offre de contrat de crédit en caractères d'imprimerie inférieur au corps 8 peut être la déchéance du droit aux intérêts du prêteur, et non l'inopposabilité de la clause concernée.

En tout dernier lieu sur ce point, sauf à démontrer que M. X. souffre d'une altération de ses facultés mentales justifiant qu'une mesure de protection judiciaire soit nécessaire pour lui permettre de protéger ses intérêts, il ne peut soutenir n'avoir fait que signer sans réfléchir aux endroits indiqués par le conseiller financier et sans comprendre le sens des signatures qu'il acceptait d'apposer. »

4/ « Si la détermination du taux d'invalidité professionnelle apparaît d'une certaine technicité, il y a lieu de relever que son mode de calcul est clairement expliqué, même s'il est incontournable d'avoir recours à un médecin pour déterminer les taux d'incapacité professionnelle et fonctionnelle. Enfin, la clause énonce très clairement que le taux d'invalidité doit être supérieur à 66 % pour obtenir la garantie par l'assureur du prêt, et que ce taux ne prenait pas seulement en compte l'incapacité professionnelle, de sorte que M. X. ne pouvait se méprendre sur le fait que l'incapacité physique devait être particulièrement importante pour ouvrir droit à prise en charge par la société Sogecap. »

 

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE CIVILE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 12 DÉCEMBRE 2023

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 21/01396. N° Portalis DBVY-V-B7F-GX2D. Décision attaquée : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CHAMBERY en date du 3 juin 2021.

 

Appelant :

M. X.

né le [Date naissance 3] à [Localité 7], demeurant [Adresse 4], Représenté par la SELARL CAMILLE DI-CINTIO AVOCAT, avocats au barreau de CHAMBÉRY, (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CHAMBÉRY)

 

Intimées :

SA LA BANQUE POSTALE FINANCEMENT

dont le siège social est situé [Adresse 1], Représentée par la SELARL COCHET FRANCOIS, avocats au barreau de CHAMBÉRY

SA SOGECAP

dont le siège social est situé [Adresse 2], Représentée par la SCP GIRARD-MADOUX ET ASSOCIES, avocats postulants au barreau de CHAMBÉRY, Représentée par Me Laurence GERARD, avocat plaidant au barreau de PARIS

 

Date de l'ordonnance de clôture : 4 septembre 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 3 octobre 2023

Date de mise à disposition : 12 décembre 2023

Composition de la cour : - Mme Hélène PIRAT, Présidente, - Mme Myriam REAIDY, Conseillère, - Madame Inès REAL DEL SARTE, Conseillère,  avec l'assistance lors des débats de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits et procédure :

Selon contrat du 27 mars 2015, M. X. a procédé au rachat et au regroupement de plusieurs crédits à la consommation auprès de la société Banque Postale Financement (Sa) pour un montant total de 45.825 euros, remboursable par 84 échéances mensuelles au taux d'intérêt annuel effectif global fixe de 8,76 %.

Le prêt a été assuré auprès de la société Sogecap (Sa), dont le courtier en assurances est la société Verlingue - QP ADE (Sas).

Le 8 juin 2015, M. X. a subi un accident du travail le plaçant en situation d'invalidité. Au titre du contrat d'assurance, la société Sogecap a pris en charge les échéances du prêt à l'issue du délai contractuel de carence de 90 jours, soit à compter du 20 septembre 2015. La société Sogecap a cessé de prendre en charge le prêt à partir du 30 septembre 2016, date de consolidation de l'état de M. X.

Par acte d'huissier des 24 et 26 décembre 2018, M. X. a assigné les sociétés Banque Postale Financement et Verlingue - QP ADE devant le tribunal de grande instance de Chambéry, devenu tribunal judiciaire à compter du 1er janvier 2020, notamment aux fins de faire déclencher la garantie du prêt par l'assureur.

Par conclusions du 5 septembre 2019, la société Sogecap est volontairement intervenue à l'instance.

Par jugement du 3 juin 2021, le tribunal judicaire de Chambéry, avec le bénéfice de l'exécution provisoire, a :

- Prononcé la mise hors de cause de la société Verlingue - QP Ade ;

- Déclaré recevable l'intervention volontaire formée par la société Sogecap à la présente instance ;

Avant dire droit,

- Ordonné une expertise médicale de Monsieur X. ;

- Commis pour y procéder : M. Y., Service Neurologie, Centre Hospitalier, [Adresse 5] [Courriel 6]

Avec pour mission :

- Après avoir recueilli les renseignements nécessaires sur l'identité de la victime et sa situation, les conditions de son activité professionnelle, son niveau scolaire s'il s'agit d'un enfant ou d'un étudiant, son statut et/ou sa formation s'il s'agit d'un demandeur d'emploi, son mode de vie antérieur à l'accident et sa situation actuelle :

1 : À partir des déclarations de la victime, au besoin de ses proches et de tout sachant, des documents médicaux fournis, décrire en détail les lésions initiales, les modalités de traitement, en précisant le cas échéant, les durées exactes d'hospitalisation et/ou de rééducation, et pour chaque période d'hospitalisation et/ou de rééducation, le nom de l'établissement, les services concernés et la nature des soins ;

2 : Recueillir les doléances de la victime et au besoin de ses proches ; l'interroger sur les conditions d'apparition des lésions, l'importance des douleurs, la gêne fonctionnelle subie et leurs conséquences ;

3 : Décrire au besoin un état antérieur en ne retenant que les seuls antécédents qui peuvent avoir une incidence sur les lésions ou leurs séquelles ;

4 : Procéder, en présence des médecins mandatés par les parties avec l'assentiment de la victime, à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime ;

5 : À l'issue de cet examen, analyser dans un exposé précis et synthétique, la réalité des lésions initiales, la réalité de l'état séquellaire et l'imputabilité directe et certaine des séquelles aux lésions initiales en précisant au besoin l'incidence d'un état antérieur ;

6 : Fixer la date de consolidation et, en l'absence de consolidation, dire à quelle date il conviendra de revoir la victime ; préciser, lorsque cela est possible, les dommages prévisibles pour l'évaluation d'une éventuelle provision ;

7 : Déterminer si la victime est en état d'incapacité totale définitive, définie selon les stipulations contractuelles lorsque les trois conditions suivantes sont réunies :

- La victime se trouve dans l'impossibilité totale et définitive médicalement constatée d'exercer une activité rémunérée ou un travail pouvant procurer gain ou profit sans que cet état ne nécessité pour autant l'assistance d'une tierce personne,

- Son état est consolidé (stabilisation de l'état) à une date fixée au plus au 1095ème jour d'incapacité de travail continue,

- Le taux d'invalidité fixé par l'expert est supérieur à 66 %, conformément au tableau suivant. Il est déterminé par le croisement du taux d'incapacité professionnelle et du taux d'incapacité fonctionnelle. Le taux d'incapacité professionnelle tient compte de la profession exercée, des conditions normales d'exercice, des aptitudes et des possibilités de reclassement dans une autre profession. Le taux d'incapacité fonctionnelle est établi en-dehors de toute considération professionnelle et est basé sur la diminution de la capacité physique ou mentale consécutive à l'accident ou à la maladie :

- Fait défense à la société Banque Postale Financement, la société Sogecap et la société Verlingue - QP Ade de transmettre tout élément médical concernant M. X., sans son accord, à l'expert, en ce compris le rapport d'expertise amiable effectué par le Docteur Z. le 8 février 2017,

Pour le surplus des demandes,

- Rejette les demandes formées par M. X. à l'encontre de la société Banque Postale Financement, de la société anonyme d'assurance et de capitalisation Sogecap et de la société par actions simplifiée Verlingue - QP Ade ;

- Réserve les demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

Au visa principalement des motifs suivants :

La clause prévoyant l'impossibilité de signer et celle concernant la garantie ITD remplissent les exigences de clarté et de compréhensibilité et la clause d'exclusion est rédigée en caractère gras permettant la mise en évidence de l'exclusion de garantie, dès lors ces clauses ne présentent pas un caractère abusif ;

Sur la demande de réparation du préjudice formée à l'encontre de la société Banque Postale Financement, celle-ci a agi comme un intermédiaire en assurance, en émettant au sein de l'offre de crédit une proposition d'assurance facultative portant sur les échéances du prêt. M. X., certes profane en la matière, pouvait cependant raisonnablement savoir que le taux d'invalidité minimum de 66 % en-dessous duquel l'assurance ne serait pas mise en jeu était un taux élevé, car supérieur à 50 %, dès lors qu'il s'agissait d'une assurance facultative, il lui appartenait de souscrire à une offre qui lui aurait offert une meilleure couverture s'il le souhaitait ;

Une expertise amiable a déjà été effectuée, or, d'une part il s'agit d'une part d'une expertise mandatée par l'une des parties, à savoir l'assureur, et, d'autre part, le rapport d'expertise amiable apparaît incomplet justifiant ainsi la réalisation d'une expertise judiciaire.

Par déclaration au greffe du 2 juillet 2021, M. X. a interjeté appel de la décision en ce qu'elle a :

Avant dire droit,

- Ordonné une expertise médicale ;

- Commis pour y procéder le M. Y. ;

Pour le surplus des demandes,

- Rejeté ses demandes à l'encontre de la société Banque Postale Financement, de la société Sogecap et de la société Verlingue - QP-ADE ;

- Réservé les demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

 

Prétentions et moyens des parties

Par dernières écritures en date du 10 février 2022, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, M. X. sollicite l'infirmation de la décision et demande à la cour de :

- Infirmer le Jugement du 3 juin 2021 concernant les chefs de dispositifs suivants :

- Rejeter ses demandes à l'encontre de la société Banque Postale Financement, de la société Sogecap et de la SAS Verlingue - QP-Ade,

- Avant dire droit : ordonner une expertise médicale confiée à M. Y. ;

En conséquence, jugeant à nouveau :

A l'encontre de la société Sogecap

- Juger que les conditions générales et particulières ainsi que la notice d'information du contrat souscrit entre lui et la société Sogecap lui sont inopposables faute de preuve de la remise effective à lui de la notice d'information ;

- Dire et juger que les deux clauses suivantes du contrat sont nulles et à tout le moins lui sont inopposables :

'Je (l'assuré) ne peux pas signer la déclaration relative aux garanties décès, PTIA, ITD et ITT ci-dessus, ou le montant de mon financement est supérieur ou égal à 50.000 euros, aussi je (l'assuré) souhaite que LBP Financement m'adresse un questionnaire de santé.

Puis,

« Je déclare (le candidat), pour les garanties décès, PTIA, ITD et ITT (ADI ou sénior :

- Ne pas être à ce jour en arrêt de travail total ou partiel,

- Ne pas être et/ou ne pas avoir été atteint durant les trois dernières années d'une ou des affections ayant provoqué soit des arrêts de travail, soit des traitements soit les deux d'une durée supérieure à 30 jours ou une hospitalisation de plus de 7 jours consécutifs,

- Ne pas être titulaire d'une rente ou d'une pension d'invalidité. »

- Juger que la clause relative aux antécédents médicaux de M. X. est abusive et réputée non écrite ;

Juger que la clause d'exclusion de garantie en point 13 de la notice n'est pas valable ;

- Juger que ces clauses sont inopposables à M. X. ;

- Juger nulle et inopposable à M. X. la clause définissant l'ITD comme suit :

« L'assuré est en état d'ITD lorsque les 3 conditions suivantes sont réunies ;

1/L'assuré se trouve dans l'impossibilité totale et définitive médicalement constatée d'exercer une activité rémunérée ou un travail pouvant procurer gain ou profit sans que cet état ne nécessite pour autant l'assistance d'une tierce personne,

2/son état est consolidé (stabilisation de l'état de l'assuré) à une date fixée au plus tard ay 1095ème jour d'incapacité de travail continue,

3/Le taux d'invalidité fixé par un médecin expert désigné par l'assureur conformément au tableau suivant (en base 100) est supérieur à 66 %. Le taux d'invalidité est déterminé par le croisement du taux d'incapacité professionnelle et du taux d'incapacité fonctionnelle. Le taux d'incapacité professionnelle tient compte de la profession exercée, des conditions normales d'exercice, des aptitudes et des possibilités de reclassement dans une autre profession. Le taux d'incapacité fonctionnelle est établi en dehors de toute considération professionnelle et est basé sur la diminution de la capacité physique ou mentale consécutive à l'accident ou à la maladie :

- Dire et juger que cette clause est réputée non écrite ;

En conséquence,

- Condamner la société Sogecap à lui payer le montant des échéances de prêts depuis le 30 septembre 2016 ;

- Condamner la société Sogecap à prendre en charge les échéances de prêt à venir et régler celles-ci directement à l'établissement bancaire créancier (la société Banque Postale Financement),

- Condamner la société Sogecap à prendre en charge tous les intérêts de retard à sa charge ainsi que tous les frais annexes dont les échéances d'assurances d'un montant de 28,64 euros par mois,

- Condamner le tout d'une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir ;

- Assortir la condamnation des intérêts au taux légal depuis son premier courrier de contestation, soit le 23 février 2016 ;

A l'encontre de la banque postale

- Juger que la société Banque Postale Financement en lui délivrant de fausses informations de nature à provoquer son adhésion à l'assurance groupe et donc à vicier son consentement a commis une pratique commerciale frauduleuse ;

- Dire et juger que la banque postale ne rapporte pas la preuve de la remise effective et de l'explication de la notice à l'adhérent M. X. ;

- A titre subsidiaire, constater que cette remise s'est faite concomitamment et dans les mêmes documents de l'offre de prêt rendant cette remise totalement inefficace ;

- Juger que la Banque Postale Financement a procédé par aveu ne lui avoir fourni aucune explication sur la notice d'information et avoir donc failli à son obligation d'information ;

- Dire et juger que la banque postale a failli à son obligation d'information et de conseil étendue quant à l'absence d'adéquation entre sa situation personnelle et professionnelle et les garanties souscrites ;

- Dire et juger que la société Banque Postale Financement n'a pas tenu compte de sa situation personnelle et professionnelle particulière ;

- Dire et juger que la société Banque Postale Financement a manqué à son obligation de proposer une garantie efficace en lui laissant souscrire une garantie dont la mise en œuvre est exceptionnelle (2 % des sinistres), ce qui doit être assimilée à une absence d'efficacité du contrat souscrit par M. X. ;

- Dire et juger que la société Banque Postale Financement ne lui a pas proposé de garantie complémentaire au regard de la spécificité de son activité professionnelle requérant une capacité physique et psychique infaillible ;

- Condamner la société Banque Postale Financement à l'indemniser intégralement de son préjudice résultant de son défaut d'assurance, soit à lui payer l'intégralité des échéances de prêt (capital et intérêts) depuis le 30 septembre 2016 jusqu'au solde du prêt souscrit ; y compris les intérêts de retard pour non-paiement des échéances et les cotisations d'assurances, ainsi que tous les frais annexes ;

- Condamner la banque postale à présenter un décompte de cette somme ;

- Condamner le tout d'une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir ;

- Assortir la condamnation des intérêts au taux légal depuis son premier courrier de contestation, soit le 23 février 2016 ;

A titre subsidiaire,

- Fixer sa perte de chance à 90 % ;

- Condamner la société Banque Postale Financement à l'indemniser à hauteur de 90 % de son préjudice résultant de son défaut d'assurance soit à lui payer 90 % des échéances de prêt (capital et intérêts) depuis le 30 septembre 2016 jusqu'au solde du prêt souscrit ; y compris les intérêts de retard pour non-paiement des échéances et les cotisations d'assurances ainsi que les frais annexes ;

- Condamner la société Banque Postale Financement à présenter un décompte de cette somme ;

- Condamner le tout d'une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir ;

- Assortir la condamnation des intérêts au taux légal depuis son premier courrier de contestation, soit le 23 mars 2016 ;

- Condamner in solidum la société Sogecap et la société Banque Postale Financement à lui payer la somme 15.000 euros au titre de son préjudice moral ;

- Débouter la société Banque Postale Financement et la société Sogecap de toutes leurs demandes fins et conclusions principales et incidentes à son encontre  ;

A titre infiniment subsidiaire,

- Ordonner une expertise judiciaire avant dire droit de M. X. confiée à un expert neurologue strictement indépendant des compagnies d'assurances ;

- Juger que seul M. X., victime est maître du secret médical et sera seul à pouvoir transmettre son dossier médical à l'expert ;

- Préciser dans le corps de la mission confiée à l'expert que : « L'expert ne peut s'opposer à la présence de l'avocat durant l'examen clinique si la victime en émet la demande » ;

- Interdire à la société Banque Postale Financement et à la société Sogecap de verser tout élément médical concernant M. X. - dont l'expertise amiable - en vertu du respect du secret médical tout au long de la procédure y compris durant les opérations d'expertises judiciaires ;

- Condamner solidairement la société Sogecap et la société Banque Postale Financement à lui payer la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Camille Di-Cintio sur son affirmation de droit.

Au soutien de ses prétentions, M. X. fait valoir notamment que :

M. X. est bien un profane et la seule souscription de deux contrats d'assurances avant la souscription du contrat litigieux ne lui fait pas perdre cette qualité de profane ;

S'agissant de la notice d'information la Banque Postale Financement ne rapporte nullement la preuve de la transmission de ces conditions à M. X. puisque la notice d'information transmise aux débats n'est nullement apposée de sa signature ou ne serait-ce que de ses paraphes en bas de pages rendant cette notice inopposable ;

La société Banque Postale Financement a manqué à son obligation d'information étant donné que la remise des documents informatifs précontractuels ne suffit pas pour que l'obligation d'information et de conseil soit considérée comme exécutée ;

L'article L. 520-1-II-2° du code des assurances a institué une obligation d'information et de conseil renforcée à la charge des intermédiaires d'assurances, dont les banques, or la société Banque Postale Financement ne démontre pas avoir délivré une information claire et adaptée pour M. X. ;

Sur l'absence d'efficacité de la garantie souscrite, les tableaux à double entrée avec un seuil de 66% confinent à un défaut de garantie pour 98 % des sinistres et des accidents corporels survenus aux assurés, cette mise en œuvre rarissime des garanties contractuelles doit être assimilée à une absence totale d'efficacité du contrat souscrit, dès lors, la Banque Postale Financement a donc offert une illusion de garantie à M. X. ce qui est un manquement fautif de nature à engager sa responsabilité ;

Sur l'inadéquation entre la garantie souscrite et la situation personnelle de M. X., celui-ci n'a jamais reçu la moindre information d'inadéquation entre le contrat souscrit et sa situation personnelle et professionnelle, or, l'article L. 520-1-II-2° du code des assurances a institué une obligation d'information et de conseil renforcée à la charge des intermédiaires d'assurances, dont les banques qui adoptent ce statut ;

M. X. a été trompé dès lors qu'il a souscrit à une assurance 100 % dont l'intitulé laissait à croire à M. X. qu'il était couvert au maximum ;

S'agissant des clauses relatives à l'état antérieur de M. X. et sur la demande de questionnaire médical, M. X. ne pensait pas que son diabète était un antécédent médical puisqu'il n'a jamais été en arrêt maladie, n'a jamais été hospitalisé et a toujours été à son poste de travail ;

S'agissant des clauses d'exclusion, la jurisprudence a retenu qu'une clause même écrite en gras n'est pas de nature à attirer spécialement l''il du futur assuré et ne répond donc pas aux exigences de forme requises ;

A titre infiniment subsidiaire, l'expert désigné, M. Y., est un médecin généraliste et n'est donc pas compétent celui-ci étant spécialisée ni en matière orthopédique ni en matière neurologique.

[*]

Par dernières écritures en date du 29 novembre 2021, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Banque Postale Financement sollicite de la cour de :

A titre principal,

- Surseoir à statuer sur la responsabilité de la Banque Postale Financement jusqu'à la remise du rapport définitif de l'expert ;

- Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Chambéry en ce qu'il déboute M. X. de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de la société Banque Postale Financement ;

Subsidiairement,

- Dire et juger que la société la Banque Postale Financement a parfaitement rempli ses obligations en matière d'information et de conseil ;

En conséquence,

- Débouter purement et simplement M. X. de l'intégralité de ses demandes ;

A titre infiniment subsidiaire,

- Dire et juger que le manquement de la société la Banque Postale Financement ne peut s'analyser qu'en une perte de chance ;

- Dire et juger que la perte de chance ne peut tout au plus dépasser 10 % du montant total des échéances restants dues à compter du 30 septembre 2016 ;

- Débouter purement et simplement M. X. de sa demande formulée au titre de son prétendu préjudice moral ;

En tout état de cause,

- Condamner M. X. à payer à la société la Banque Postale Financement la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner M. X. aux entiers dépens ;

- Débouter M. X. du surplus de ses demandes.

Au soutien de ses prétentions, la société Banque Postale Financement fait valoir notamment que :

Si l'expert venait à reconnaître à M. X. un taux d'invalidité supérieur à 66 %, alors le procès deviendrait sans objet puisque l'assurance souscrite prendrait en charge les échéances de prêt, objet du litige ;

Subsidiairement, sur la responsabilité de la Banque Postale Financement, M. X. savait pertinemment que lors de la souscription d'un contrat d'assurance, il est nécessaire de prendre connaissance des conditions de prise en charge ainsi que des conditions d'exclusion et en souscrivant ce troisième contrat, avec des clauses similaires, sur les conseils d'un conseiller de la Banque Postale, la fiche conseil assurance lui a été explicitée et il n'a pas demandé d'information complémentaire à ce sujet ;

Les conditions de prise en charge apparaissent de façon précise dans la fiche conseil assurance signé par l'appelant ;

Il est en effet expressément mentionné que la garantie ITD (Invalidité Totale Définitive) « intervient lorsque l'assuré se trouve dans l'incapacité de se livrer à la moindre activité professionnelle ou toute activité pouvant lui procurer gain ou profit. L'assureur prendra en charge le versement du capital restant dû après la date de reconnaissance d'une invalidité au taux de 66 % minimum » ;

Concernant la problématique de l'inadéquation avec la situation personnelle de M. X., il sera rappelé que les garanties de prise en charge apparaissaient clairement dans la documentation remise à M. X..

A titre infiniment subsidiaire, le préjudice né du manquement par une banque à son obligation d'éclairer sur l'adéquation de l'opération proposée à la situation personnelle de son client s'analyse en une perte de chance de ne pas contracter, laquelle ne peut qu'être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.

[*]

Par dernières écritures en date du 25 novembre 2021, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Sogecap sollicite de la cour de :

- Déclarer mal fondé l'appel interjeté par M. X. à l'encontre de la société Sogecap ;

- Confirmer le jugement rendu le 3 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Chambéry en toutes ses dispositions ;

- Déclarer irrecevable et mal fondé M. X. en toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- Débouter M. X. de toutes ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société Sogecap ;

- Condamner M. X. à payer à la société Sogecap une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner M. X. aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, la société Sogecap fait valoir notamment que :

L'argumentation tirée du défaut de questions posées à M. X. et du défaut de déclaration par M. X. d'un diabète de type II lors de son adhésion est sans objet du fait de la prise en charge par Sogecap des échéances du prêt au titre de la garantie ITT ;

M. X. ne peut bénéficier d'une poursuite de prise en charge des échéances au titre de la garantie invalidité totale définitive dite ITD dans la mesure où son taux d'invalidité résultant du barème contractuel est inférieur à 66% ;

Les modalités de calcul du taux d'invalidité gouvernant la prise en charge du risque, expressément déterminé par combinaison du taux d'incapacité fonctionnelle et du taux d'incapacité professionnelle, étaient expliquées de façon claire et précise à l'aide d'un tableau très détaillé et que l'assuré ne pouvait ignorer que seul un degré d'invalidité égale à 66 % permettait de prendre en charge l'intégralité des échéances.

[*]

Une ordonnance en date du 4 septembre 2023 a clôturé l'instruction de la procédure. L'affaire a été plaidée à l'audience du 3 octobre 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience ainsi qu'à la décision entreprise.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS ET DÉCISION :

M. X. doit dans le présent litige bénéficier de la protection accordée à tout consommateur. En effet, il exerçait la profession de chauffeur salarié et taxi et ne dispose pas, malgré la souscription de deux contrats d'assurance antérieurs, de la qualité de professionnel.

 

I - Sur la responsabilité de la Banque de Savoie :

- Remise de la notice d'assurance

L'article L. 140-4 du code des assurances dans sa version applicable au litige prévoit que « Le souscripteur est tenu : - de remettre à l'adhérent une notice établie par l'assureur qui définit les garanties et leurs modalités d'entrée en vigueur ainsi que les formalités à accomplir en cas de sinistre (...) La preuve de la remise de la notice à l'adhérent et de l'information relative aux modifications contractuelles incombe au souscripteur. »

Lorsque l'offre préalable est assortie d'une proposition d'assurance, une notice comportant les extraits des conditions générales de l'assurance, le nom et l'adresse de l'assureur, la durée d'assurance, les risque couverts et exclus, doit être remise à l'emprunteur, la preuve reposant sur le souscripteur, à peine d'inopposabilité de ladite notice. La preuve peut être apportée par une mention du contrat signée par l'emprunteur, dans laquelle il reconnaît avoir reçu la notice d'assurance, et la signature de la notice elle-même n'est pas exigée (Cass., 2e Civ. 5 juillet 2018, pourvoi n°17-20.244).

En l'espèce, M. X. n'a pas paraphé ni signé la notice d'assurance. Pour autant, il a signé, avec son acceptation du contrat de crédit proposé, en dessous d'une mention stipulant « Après avoir pris connaissance de la fiche d'informations précontractuelle et de son annexe, des caractéristiques essentielle et des autres dispositions de l'offre, de la fiche conseil assurance, de la notice d'information d'assurance, des conditions et des prestations financières, le tout formant une convention unique et indivisible, je reconnais rester en possession d'un exemplaire de cette offre doté d'un formulaire détachable de rétractation », de sorte que la remise de la notice d'assurance est établie, les dénégations de l'appelant ne suffisant pas à établir la preuve contraire.

- Devoir de conseil

Le banquier qui propose à son client, auquel il consent un prêt, d'adhérer au contrat d'assurance groupe qu'il a souscrit à l'effet de garantie, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements, est tenu de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur, la notice d'assurance ne suffisant pas à cet égard (Cass., 2e Civ. 4 juillet 2019, pourvoi n°18-20.639).

En l'espèce, M. X. soutient que le contrat a été signé à distance, et qu'il a renvoyé les documents par courrier, et la société Banque Postale financement prétend à l'inverse que le contrat de prêt a été signé le 27 mars 2015, lors d'une rencontre de M. X. avec son [N.B. ou un] conseiller financier, M. E. Le fait qu'une croix soit cochée de façon dactylographiée sur le choix de l'offre d'assurance (offre intermédiaire « ADI »), ou encore que la fiche de dialogue soit remplie de façon dactylographiée et non manuscrite, corrobore la version de la Banque Postale, qui n'a pu choisir d'elle-même, à la place de son client, les modalités de l'assurance facultative retenues.

En effet, une fiche conseil assurance est produite aux débats, signée par M. X., et précise ²nos préconisations : compte tenu des informations que vous nous avez communiquées, de l'offre de contrat de crédit et de vos besoins, nous vous recommandons d'adhérer à la garantie la plus protectrice de vos intérêts, correspondant à votre âge et à votre situation professionnelle. » Il résulte de l'examen des différents tableaux, qu'au vu de l'âge du candidat à l'assurance, 51 ans au moment de la souscription du crédit, et de sa situation d'emploi, les préconisations de la Banque étaient de souscrire à l'option ADI+APE (assurance décès invalidité + perte d'emploi). Ces préconisations étaient également adaptées à l'emploi exigeant une certaine forme physique du souscripteur (chauffeur salarié, routier taxi).

Or, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, M. X. a souscrit la proposition d'assurance ADI, alors qu'une assurance ADI+APE, soit plus étendue, était conseillée. Il ne ressort ensuite d'aucun élément que l'emprunteur aurait choisi une assurance plus protectrice au niveau invalidité, mais d'un coût plus élevé. En effet, l'appelant a choisi une assurance moins étendue, et d'un coût réduit, alors qu'il sollicitait un prêt de regroupement de crédits aux fins de diminuer les mensualités de remboursement qu'il supportait, alors qu'il était hébergé par ses parents et n'avait que peu de charges de logement. Il n'est donc pas démontré que, malgré son salaire plus élevé que la moyenne, de 2 800 euros, M. X. était susceptible de choisir une assurance invalidité plus coûteuse, alors qu'il bénéficiait de son emploi depuis seulement un peu plus d'un an (décembre 2013) et qu'il a choisi de ne pas être garanti contre le risque de perte de cet emploi.

Il n'est donc pas démontré que la société Banque Postale ait manqué à son devoir de conseil, étant précisé que le contrat souscrit a trouvé application pendant la période d'accident du travail de M. X., et jusqu'à sa consolidation.

 

II - Sur la responsabilité de la société Sogecap :

L'article L132-1 du code de la consommation dispose « dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. (..) le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les clauses du contrat. Il s'apprécie également au regard de celles contenues dans un autre contrat lorsque la conclusion ou l'exécution de ces contrats dépendent juridiquement l'un de l'autre.

Les clauses abusives sont réputées non écrites. » Il est précisé dans l'article L. 133-2 du même code que les clauses doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible, et que, dans le doute, elles s'interprètent dans le sens le plus favorable au consommateur ou au non-professionnel.

Enfin, la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne admet que la vigilance du consommateur puisse être appréciée de façon plus favorable dans le cas où les contrats d'assurance et de prêt sont conclus dans le même acte. Les clauses portant sur l'objet principal d'un contrat d'assurance sont ainsi considérées comme claires et compréhensibles si elles exposent de façon transparente le fonctionnement concret du mécanisme d'assurance, et informent le consommateur des conséquences économiques qui en découlent pour lui (CJUE, C-96/14, 23 avril 2015).

 

- Sur le caractère abusif de la clause de déclaration d'état de santé :

La clause VII- adhésion aux assurances facultatives en garantie du financement rappelle en premier lieu que l'assurance garantit l'encours ou les échéances du crédit en cas de sinistre, et que l'emprunteur peut bénéficier de la garantie, à hauteur de 100 %, suivie de la mention selon laquelle l'emprunteur reconnaît avoir pris connaissance de la fiche conseil assurance et de la notice d'information décrivant les garanties incluses. Il en découle nécessairement que la prise en charge à hauteur de 100 % était conditionnée à la réunion des conditions prévues dans la notice d'assurance, et M. X. ne peut soutenir que cette seule mention de « garantie 100 % » signifiait qu'il serait pris en charge dès lors que placé en invalidité, ce qui impliquerait que la notice d'assurance n'avait aucune utilité.

M. X. soutient ensuite n'avoir pas pu lire la mention « toute fausse déclaration ou réticence intentionnelle entraîne la nullité de l'assurance (...) » mentionnée en gras, et qu'il n'a pas compris que la case à cocher « je ne peux pas signer la déclaration relative aux garanties décès, PTIA, ITD et ITT ci-dessus, ou le montant de mon financement est supérieur ou égal à 50.000 euros, aussi, je souhaite que LBP Financement m'adresse un questionnaire de santé » devait être cochée ou non par référence à la « déclaration du candidat à l'assurance - je déclare : pour les garanties PTIA, IDT et ITT (ADI ou senior) ». Toutefois, ces mentions figurent dans le même point VII, et la mention en majuscules « déclaration du candidat à l'assurance » est reprise par trois fois dans cette partie du contrat, dans les mêmes termes, afin de faciliter la liaison intellectuelle des trois éléments :

- « je déclare : ... pour les garanties décès, PTIA, ITD et ITT :ne pas être en arrêt de travail... »

- « toute fausse déclaration... »

- « je ne peux pas signer la déclaration relative aux garanties décès, PTIA, ITD et ITT », précédée d'une case à cocher, au-dessous de laquelle l'emprunteur était invité à signer et dater.

Il est dès lors évident que M. X. devait cocher la case « je ne peux pas signer la déclaration », s'il répondait « non » à la première partie « je déclare : (...) ne pas être en arrêt de travail », et qu'il n'existait pas d'ambiguïté à ce sujet pour un consommateur normalement avisé prenant le temps de lire le contrat avant de le signer.

Le saut de quelques lignes entre le paragraphe « déclaration du candidat à l'assurance » et « toute fausse déclaration », qui met en valeur cette dernière phrase, ne permet pas de considérer, comme le fait M. X. que les deux phrases n'auraient pas de lien, pas plus que la question de l'incompréhension sur la case à cocher n'apparaît crédible. En effet, M. X. a su cocher une case moins visible, au sein du point « VIII- protection des données à caractère personnel et levée du secret professionnel », pour indiquer qu'il refusait que ses données soient utilisées à des fins de prospection.

Enfin, il y a lieu de rappeler que la sanction du non-respect de l'article R. 311-5 du code de la consommation et de la rédaction de l'offre de contrat de crédit en caractères d'imprimerie inférieur au corps 8 peut être la déchéance du droit aux intérêts du prêteur, et non l'inopposabilité de la clause concernée.

En tout dernier lieu sur ce point, sauf à démontrer que M. X. souffre d'une altération de ses facultés mentales justifiant qu'une mesure de protection judiciaire soit nécessaire pour lui permettre de protéger ses intérêts, il ne peut soutenir n'avoir fait que signer sans réfléchir aux endroits indiqués par le conseiller financier et sans comprendre le sens des signatures qu'il acceptait d'apposer.

 

- Caractère abusif de la clause ITD de la notice d'assurance

La notice d'assurance n°90.206 et 98.002 stipule en son point 12 concernant la « garantie ITD (invalidité totale et définitive) : l'assuré est en état d'ITD lorsque les 3 conditions suivantes sont réunies :

1) l'assuré se trouve dans l'impossibilité totale et définitive médicalement constatée d'exercer une activité rémunérée ou un travail pouvant lui procurer gain ou profit, sans que cet état nécessite pour autant l'assistance d'une tierce personne,

2) son état est consolidé (stabilisation de l'état de l'assuré) à une date fixée au plus tard le 1095e jour d'incapacité de travail continue,

3) le taux d'invalidité fixé par un médecin désigné par l'assureur, conformément au tableau suivant (en base 100) est supérieur à 66%. Le taux d'invalidité est déterminé par le croisement du taux d'incapacité professionnelle et du taux d'incapacité fonctionnelle. » La définition de l'incapacité professionnelle et du taux d'incapacité professionnelle suit, ainsi qu'un tableau à double entrée permettant de calculer le taux d'invalidité professionnelle au sens du contrat d'assurance en fonction des taux d'incapacité professionnelle et d'incapacité fonctionnelle.

Si la détermination du taux d'invalidité professionnelle apparaît d'une certaine technicité, il y a lieu de relever que son mode de calcul est clairement expliqué, même s'il est incontournable d'avoir recours à un médecin pour déterminer les taux d'incapacité professionnelle et fonctionnelle. Enfin, la clause énonce très clairement que le taux d'invalidité doit être supérieur à 66 % pour obtenir la garantie par l'assureur du prêt, et que ce taux ne prenait pas seulement en compte l'incapacité professionnelle, de sorte que M. X. ne pouvait se méprendre sur le fait que l'incapacité physique devait être particulièrement importante pour ouvrir droit à prise en charge par la société Sogecap.

 

 

III - Sur le surplus des demandes :

Aucune faute n'étant imputable à l'établissement prêteur de denier et à l'assureur, la demande de dommages et intérêts de M. X. sera rejetée.

La réalisation d'une expertise médicale n'étant pas contestée, celle-ci sera confirmée, ainsi que les mentions portant sur la transmission de l'expertise amiable réalisée, soumise au secret professionnel.

En ce qui concerne la désignation de M. Y. en qualité d'expert judiciaire, il y a lieu de rappeler que l'expert inscrit sur les listes d'une cour d'appel a le droit de réaliser des expertises amiables, et qu'il lui appartient de refuser une mission dans le cas où il aurait déjà connu du dossier qui lui est soumis ou dans le cas où il aurait des liens avec une des parties susceptible de remettre en cause son impartialité. Ainsi, le fait que le docteur Y. soit intervenu comme sapiteur dans une expertise amiable d'une tierce personne ne suffit pas à démontrer sa partialité envers M. X.

La demande sera ainsi rejetée.

 

IV - Sur les demandes accessoires :

M. X., qui succombe en son appel, supportera les dépens de l'instance. Il ne paraît en revanche pas inéquitable de rejeter les demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile par la société Sogecap et la Banque Postale financement

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par décision contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. X. aux dépens de l'instance,

Rejette les demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.

Le Greffier,                                                  La Présidente,