CA LYON (1re ch.), 21 septembre 1995
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1151
CA LYON (1re ch.), 21 septembre 1995 : RG n° 93/03524
Extraits : 1/ « Attendu que l'envoi et la réception à LYON par monsieur X., simple consommateur, des conditions générales d'utilisation figurant au dos de la demande d'attribution d'une carte AMERICAN EXPRESS qui contiennent la clause litigieuse est établi par les documents produits ; Attendu qu'ainsi le lieu de réception du document contenant une clause susceptible de porter un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs détermine la compétence territoriale par application des dispositions de l'article 46 alinéa 3 du nouveau code de procédure civile et ce bien que l'action en suppression ait un but préventif ».
2/ « Attendu que c'est également par des motifs complets et pertinents que le premier juge, après avoir analysé les termes de la clause incriminée [NB : clause attributive de compétence territoriale] et constaté les dérogations substantielles qu'elle contenait et dont le non professionnel pouvait sous estimer l'importance, a retenu son caractère abusif au sens de l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978 et décidé, avec raison d'ordonner sa suppression suivant en cela les recommandations de la commission des clauses abusives »
COUR D’APPEL DE LYON
PREMIÈRE CHAMBRE
ARRÊT DU 21 SEPTEMBRE 1995
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 93/03524. Code affaire : 662. Nature du recours : APPEL.
Décision déférée : Jugement du 21 avril 1993 du Tribunal de Grande Instance de LYON 1re ch. : RG 1er instance n° 9210778.
PARTIES :
APPELANTE :
SA AMERICAN EXPRESS
Siège social: [adresse], Avocat : Maître Lapeysonnie substituant Maître B. Vincent, APPELANTE
INTIMÉE :
ASSOCIATION DES NOUVEAUX CONSOMATEURS DU RHONE NCR
Siège social: [adresse], Représentée par SES DIRIGEANTS LÉGAUX, Avocat : Maître Planchon, INTIMEE
[minute page 2]
COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré : madame MERMET, président, madame BIOT, conseiller, - monsieur JACQUET, conseiller, assistés pendant les débats de madame KROLAK, greffier,
INSTRUCTION CLÔTURÉE : le 28 novembre 1994.
DÉBATS : en audience publique du 15 juin 1995
ARRÊT : contradictoire, prononcé à l'audience publique du 21 septembre1995 par madame MERMET, président, qui a signé la minute avec le greffier.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS - PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par jugement du 21 avril 1993, le tribunal de grande instance de LYON, saisi par l'ASSOCIATION DES NOUVEAUX CONSOMMATEURS DU RHONE d'une demande tendant à l'annulation et à la suppression pour l'avenir de la clause attributive de compétence au profit des juridictions parisiennes insérée dans la convention proposée par la société AMERICAN EXPRESS, ainsi qu'à l'allocation de 30.000 Francs de dommages-intérêts, a rendu la décision suivante :
« - Déclare abusive au sens de l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978 la clause figurant à l'article 15 des conditions générales imprimées au verso des modèles de demande de carte à compléter et à renvoyer proposée habituellement aux consommateurs par la société AMERICAN EXPRESS CARTE FRANCE attribuant compétence territoriale exclusive aux juridictions de PARIS,
- Rejette 1’exception d'incompétence territoriale soulevée par la société AMERICAN EXPRESS CARTE FRANCE,
- Se déclare compétent,
- Ordonne la suppression de ladite clause sur tous ces modèles de convention dans un délai de trois mois à compter de la signification du jugement à intervenir sous astreinte de 1.000 Francs par jour de retard constaté passé ce délai,
- [minute page 3] Condamne la société AMERICAN EXPRESS CARTE FRANCE à payer à l'ASSOCIATION DES NOUVEAUX CONSOMMATEURS DU RHONE,
* la somme de 4.000 Francs à titre de dommages-intérêts,
* la somme de 5.000 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- La condamne aux dépens avec distraction au profit au maître PLANCHON, dans les conditions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile ».
Appelante, la société AMERICAN EXPRESS conclut à l'infirmation du jugement.
Elle décline au principal la compétence du tribunal de grande instance de LYON et subsidiairement, conteste le caractère abusif au sens de l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978 de la clause attributive de compétence incluse dans les modèles de demandes de cartes par elle proposés.
La société AMERICAN EXPRESS considère qu'en l'absence de fait dommageable établi la juridiction compétente pour trancher le présent litige est celle du lieu où demeure le défendeur.
Elle indique en effet que l'association ne démontre pas que d'autres consommateurs que monsieur X. ait reçu une telle demande, ce qui exclut le dommage à défaut de preuve d'une diffusion dans le ressort du tribunal.
Pour cette même raison elle considère en outre que la demande est irrecevable.
L'ASSOCIATION DES NOUVEAUX CONSOMMATEURS DU RHONE, intimée, conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de la société ASSOCIATION DES NOUVEAUX CONSOMMATEURS DU RHONE à lui payer une indemnité de 8.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
[minute page 4] Elle réplique que la société AMERICAN EXPRESS, qui dispose de la puissance économique par le procédé de paiement par carte qu'elle est en mesure d'offrir aux signataires d'un contrat d'adhésion ne peut en tirer avantage pour imposer une clause dérogatoire aux dispositions de l'article 46 du nouveau code de procédure civile.
En l'espèce, elle estime qu'un dommage causé à l'intérêt collectif des consommateurs a été subi à LYON, lieu de réception d'un modèle de convention proposé par la société AMERICAN EXPRESS, ce qui justifie la saisine du tribunal de grande instance de LYON.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS ET DÉCISION :
Sur la compétence :
Attendu que la qualité pour agir de l'ASSOCIATION DES NOUVEAUX CONSOMMATEURS DU RHONE, qui est régulièrement agréée, n'est pas contestée ;
Attendu que l'envoi et la réception à LYON par monsieur X., simple consommateur, des conditions générales d'utilisation figurant au dos de la demande d'attribution d'une carte AMERICAN EXPRESS qui contiennent la clause litigieuse est établi par les documents produits ;
Attendu qu'ainsi le lieu de réception du document contenant une clause susceptible de porter un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs détermine la compétence territoriale par application des dispositions de l'article 46 alinéa 3 du nouveau code de procédure civile et ce bien que l'action en suppression ait un but préventif ;
Attendu que par d'exacts motifs adoptés par la cour, le tribunal, a donc justement décidé qu'il était compétent pour statuer sur la demande de l'ASSOCIATION DES NOUVEAUX CONSOMMATEURS DU RHONE ;
Sur le caractère abusif de la clause :
Attendu que c'est également par des motifs complets et pertinents que le premier juge, après avoir [minute page 4] analysé les termes de la clause incriminée et constaté les dérogations substantielles qu'elle contenait et dont le non professionnel pouvait sous estimer l'importance, a retenu son caractère abusif au sens de l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978 [N.B. : minute mentionnant par erreur 1988] et décidé, avec raison d'ordonner sa suppression suivant en cela les recommandations de la commission des clauses abusives
Attendu que le jugement sera donc confirmé de ce chef ;
Mais attendu qu'il y a lieu, réformant la décision, de limiter à la somme de 1.000 Francs le montant des dommages-intérêts alloué à l'ASSOCIATION DES NOUVEAUX CONSOMMATEURS DU RHONE ;
Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de l'intimée l'intégralité des frais non compris dans les dépens exposés en cause d'appel ; qu'il lui sera alloué une indemnité complémentaire de 5.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions hormis sur le montant des dommages-intérêts,
Statuant à nouveau de ce chef,
Condamne la société AMERICAN EXPRESS à payer à l'ASSOCIATION DES NOUVEAUX CONSOMMATEURS DU RHONE la somme de 1.000 Francs à titre de dommages-intérêts,
Ajoutant à la décision,
Condamne la société AMERICAN EXPRESS à payer à l'ASSOCIATION DES NOUVEAUX CONSOMMATEURS DU RHONE une indemnité complémentaire de 5.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
[minute page 6] Condamne la société AMERICAN EXPRESS aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de .maître BARRIQUAND, avoué.
- 5755 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Principes généraux
- 5760 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Conditions - Contrats - Modèle de contrat
- 5770 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Procédure - Compétence
- 5800 - Code de la consommation - Clauses abusives - Fondements de la protection
- 5802 - Code de la consommation - Clauses abusives - Évolution de la protection (2) - Cass. civ. 1re, 14 mai 1991 - Application directe de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 : principe
- 5851 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de consommateur - Particulier personne physique - Absence de lien avec la profession
- 6149 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Clauses sur l’accès au juge - Clauses attributives de compétence - Compétence territoriale