CA COLMAR (1re ch. civ. sect. A), 1er juin 2004
CERCLAB - DOCUMENT N° 1408
CA COLMAR (1re ch. civ. sect. A), 1er juin 2004 : RG n° 02/00441
Publication : Juris-Data n° 272713
Extrait : « Attendu que, pour voir écarter ces textes, les sociétés défenderesses ne sauraient soutenir que, conformément aux dispositions de l'article L. 121-22 du Code de la Consommation, les conventions souscrites auraient un rapport direct avec les activités exercées par le garagiste ; qu'en effet, il apparaît en l'occurrence que le matériel de vidéo surveillance, s'il diminue le risque de vols, ne permet pas de promouvoir directement l'activité de l'entreprise, alors au surplus qu'il n'est aucunement établi que la réglementation en vigueur rend ce type de matériel obligatoire chez un garagiste effectuant une activité de carrosserie, mécanique, achat, vente et reprise de véhicules ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE COLMAR
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION A
ARRÊT DU 1er JUIN 2004
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A 02/00441. Décision déférée à la Cour : 11 janvier 2002 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE STRASBOURG.
APPELANTE et demanderesse :
LA SA KBC LEASE anciennement SOCREA LOCATION,
ayant son siège social [adresse], prise en la personne de son représentant légal, Représentée par Maître Anne CROVISIER, Avocat à la Cour,
INTIMÉS et défendeurs :
- Monsieur X. exploitant sous l'enseigne GARAGE DU Y.,
Demeurant [adresse], Représenté par la SCP CAHN ET ASSOCIES, Avocats à la Cour, Plaidant : Maître SIMOENS, Avocat à COLMAR,
- LA SA PROTECTION ONE (ANCIENNEMENT CET),
ayant son siège social [adresse], poursuites et diligences de son représentant légal, Représentée par Maître Raymond ZIMMERMANN, Avocat à la Cour,
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 6 avril 2004, en audience publique, devant la Cour composée de : M. HOFFBECK, Président de Chambre, Mme VIEILLEDENT, Conseiller, M. DIE, Conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme SCHOENBERGER,
ARRÊT : - Contradictoire - prononcé publiquement par M. Michel HOFFBECK, président - signé par M. Michel HOFFBECK, président et Mme Marie SCHOENBERGER, greffier présent au prononcé.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] En janvier 1997, Monsieur X., qui exploitait en nom personnel un garage à l'enseigne « Garage du Y. » à [ville], a été démarché sur son lieu de travail par un représentant de la société COMPAGNIE EUROPEENNE DE TELESECURITE CET et a signé le même jour deux contrats :
- un contrat d'abonnement de vidéo surveillance avec la société CET, ayant pour objet la fourniture et l'installation de matériel de vidéo surveillance dans les locaux d'exploitation du garage, ainsi que la maintenance du matériel durant 48 mois, au prix de 1.447,20 francs TTC par mois,
- un contrat de location du matériel de vidéo surveillance pour une durée de 48 mois, assorti du même loyer mensuel, avec la société de financement SOCREA LOCATION devenue KBC LEASE.
Ce matériel a été partiellement livré et installé sur un premier site. Monsieur X. a refusé l'installation sur le second site.
Par lettre recommandée du 8 février 1997, Monsieur X. s'est adressé à la société CET pour lui signaler que son représentant avait antidaté le contrat au 20 janvier 1997 pour « gagner du temps », alors que la convention avait été signée le 30 janvier 1997, et pour lui signifier qu'il n'était pas satisfait de cette installation « qui relève plus du gadget que du matériel professionnel ». En conséquence, il a demandé à la société CET de venir récupérer le matériel.
Monsieur X. a réitéré sa demande par des courriers ultérieurs.
La société CET a cependant fait savoir qu'elle n'entendait pas renoncer au contrat.
Par exploit du 22 août 1997, Monsieur X. a fait assigner la société CET devant la Chambre commerciale du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG.
De son côté, par exploit du 28 octobre 1998, la société SOCREA LOCATION devenue KBC LEASE a fait assigner Monsieur X. devant le Tribunal de Commerce de LYON, lequel s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG par jugement du 23 février 1999.
Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du 31 janvier 2000.
Monsieur X. a demandé au tribunal de dire et juger que les contrats opposés par la société CET et la société SOCREA LOCATION sont nuls et de nul effet, de donner acte au demandeur qu'il tient le matériel partiellement livré à la disposition de la société CET, de condamner solidairement la société CET et la société SOCREA LOCATION à rembourser au demandeur les montants que ce celui-ci s'est vu débiter de son compte bancaire, soit la somme de 5.788,80 francs, outre 20.000 francs à titre de dommages-intérêts. Subsidiairement, il a demandé au tribunal de dire et juger que la société CET n'a pas respecté son obligation de délivrance et de prononcer en conséquence la résolution de la convention du 31 janvier 1997 aux torts exclusifs de la société CET, puis de dire et juger que les obligations de l'emprunteur n'ont pas pris effet en l'absence de livraison conforme et de condamner pareillement in solidum les défenderesses au remboursement des montants versés et au paiement de dommages-intérêts.
[minute page 3] La société CET a conclu au débouté des prétentions adverses et a réclamé le paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive.
De son côté, la société SOCREA LOCATION devenue KBC LEASE a demandé au tribunal de constater la résiliation du contrat de location aux torts de Monsieur X., de condamner in solidum Monsieur X. et la société CET à payer à la société KBC LEASE la somme de 69.105,12 francs correspondant aux loyers impayés et aux loyers à échoir, outre les dommages-intérêts conventionnels de 10 %. Elle a enfin sollicité la condamnation de Monsieur X. à la restitution du matériel objet de la location, sous peine d'astreinte,
Par un jugement du 11 janvier 2002, la Chambre commerciale du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG a prononcé l'annulation du contrat d'abonnement de vidéo surveillance souscrit le 20 janvier 1997 par Monsieur X. avec la société CET, ainsi que celle du contrat de location souscrit le même jour avec la société SOCREA LOCATION devenue KBC LEASE, et a débouté la société KBC LEASE de ses propres prétentions.
En conséquence, le tribunal a condamné la société KBC LEASE à rembourser à Monsieur X. la somme de 5.788,80 francs soit 882,50 Euros, portant intérêts au taux légal à compter du 19 mars 1997 sur 1.447,20 francs, du 24 mars 1997 sur 1.447,20 francs, du 18 avril 1997 sur 1.447,20 francs et du 21 mai 1997 sur 1.447,20 francs.
Il a en outre condamné solidairement la société CET et la société KBC LEASE à payer à Monsieur X. une somme de 1.524,49 Euros à titre de dommages-intérêts, portant intérêts au taux légal à compter du jour du jugement, ainsi qu'une somme de 914,69 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Enfin, il a dit que la matériel de vidéo surveillance livré à Monsieur X. sera restitué à la société CET.
Pour statuer ainsi, les premiers juges ont retenu en substance ;
- que si le demandeur affirme avoir été démarché le 31 janvier 1997 et que les deux contrats ont été antidatés, il n'existe aucun élément permettant d'étayer cette affirmation ;
- que l'objet des contrats proposés par le démarcheur, soit la fourniture de services par la société CET et la location de matériel par la société SOCREA LOCATION devenue KBC LEASE, ainsi que les circonstances du démarchage au lieu de travail de Monsieur X., personne physique, ont pour conséquence de soumettre ledit démarchage aux dispositions des articles L. 121-21 et suivants du Code de la Consommation ; que vainement la société CET et la société KBC LEASE font valoir que ce démarchage est exclu de l'application des dispositions protectrices prévues par les articles L. 121-23 à L. 121-29 du Code de la Consommation ; qu'en effet, les contrats respectifs ne présentent aucun rapport direct avec l'exploitation d'un garage et Monsieur X. n'avait pas de compétence à titre professionnel en matière de télésurveillance ;
- qu'il apparaît en l'occurrence que les contrats ne répondent pas aux exigences de l'article L. 121-23 du Code de la Consommation, qui prévoit que la convention doit comporter, à peine de nullité, l'indication du nom du fournisseur et du démarcheur, la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés, enfin la faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L.121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 ;
- que Monsieur X. est par conséquent fondé à demander au tribunal de prononcer la nullité des contrats souscrits en date du 20 janvier 1997.
Selon une déclaration enregistrée au greffe le 28 janvier 2002, la société KBC LEASE a interjeté [minute page 4] appel de ce jugement.
Par ses dernières conclusions déposées le 20 novembre 2003, elle a demandé à la Cour de :
Réformant le jugement entrepris,
- débouter Monsieur X. de toutes ses demandes, fins et conclusions comme irrecevables et non fondées ;
Vu le contrat de location dont s'agit et le non respect des obligations contractuelles par Monsieur X.,
Constatant la résiliation du contrat de bail aux torts de Monsieur X.,
- condamner in solidum Monsieur X. et la société CET à payer à la société KBC LEASE :
+ la somme de 69.105,12 francs soit 10.535,01 Euros, outre les intérêts de droit à compter de la délivrance de l'assignation et avec application de l'article 1154 du Code Civil,
+ la somme de 9.000 francs soit 1.372,04 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
- condamner Monsieur X. à restituer à la société KBC LEASE le matériel objet de la location et tel que décrit dans le contrat, et ce sous astreinte de 1.000 francs soit 152,45 Euros par jour de retard qui commencera à courir 3 jours après la signification de la décision à intervenir.
Au soutien de son appel, la société KBC LEASE a fait valoir :
- que depuis le mois de mai 1997, Monsieur X. n'a plus réglé les mensualités dues à la concluante et ce malgré mise en demeure ;
- que dans ces conditions, par application des clauses du contrat qui font la loi entre les parties, la concluante est fondée à poursuivre le recouvrement de sa créance qui est certaine, liquide et exigible, ainsi que la restitution du matériel loué qui est resté sa propriété ;
- que Monsieur X. a signé les contrats en toute connaissance de cause ;
- que le contrat de location du matériel a été établi en autant d'exemplaires que de parties et comporte bien la signature et le tampon commercial des deux parties ;
- que c'est à tort que par le jugement entrepris, le tribunal de STRASBOURG a estimé que le contrat de location était soumis aux dispositions du Code de la Consommation ; qu'en effet, ce contrat a un rapport direct avec l'activité du locataire, et ce d'autant plus que ce matériel est imposé par décret au locataire en raison de son activité ;
- que ce contrat n'est donc pas nul et s'impose aux parties p a r application de l'article 1134 du Code Civil ;
- que si une faute devait être imputée à la société CET, il conviendra de la condamner sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil ; qu'il serait en effet inacceptable que la société KBC LEASE soit privée du montant des loyers en raison d'une faute qui aurait été commise par la société CET.
Par des conclusions déposées le 31 mars 2003, la « société PROTECTION ONE anciennement CET » a demandé à la Cour de réformer le jugement rendu le 11 janvier 2002 par la Chambre commerciale du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG, de débouter Monsieur X. ainsi que la société KBC LEASE de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions, et de condamner tout succombant au paiement d'une somme de 1.525 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
La société PROTECTION ONE a déclaré reprendre l'argumentation développée en première [minute page 5] instance et a demandé qu'il soit confirmé par la Cour le fait que Monsieur X. n'apporte pas la preuve du dol qu'il prétend avoir subi. En revanche, elle a demandé que le jugement soit réformé en ce qu'il a admis l'application de la loi de 1972 au bénéfice de l'intéressé.
Elle a plus précisément fait valoir :
- en ce qui concerne le contrat de location, qu'il apparaît à sa lecture que celui-ci a été souscrit en bonne et due forme ; qu'il se trouve opposable à Monsieur X. ;
- que le contrat d'abonnement de vidéo surveillance a bien été souscrit le 20 janvier 1997 ; qu'il n'a pas été antidaté comme le prétend la partie adverse ;
- que le matériel, objet du contrat, a été régulièrement livré et installé le 31 janvier 1997 ; que le technicien a laissé à l'abonné une notice d'utilisation ;
- que le délai de rétractation de l'abonné a parfaitement été respecté ;
- que Monsieur X. n'a pas demandé l'annulation du contrat dans le délai de 7 jours prévu par la loi de 1972, étant précisé que le bordereau de rétractation figurait bien dans ledit contrat ;
- que par ailleurs, ce contrat précisait bien le matériel à installer, à savoir deux moniteurs caméra CET 611 ainsi que deux magnétoscopes CET 653 ;
- qu'une documentation claire et précise avait également été remise à Monsieur X. par le démarcheur, au vu de laquelle le client a effectué le choix du matériel ;
- que Monsieur X. a signé le procès-verbal de réception et de mise en service du matériel, sans contestation ni réserve ;
- que les conditions d'exécution du contrat sont énumérées aux articles 6, 10 et 11 des Conditions générales ; que les modalités de paiement sont également indiquées aux articles 3 et 8 des mêmes Conditions générales ;
- que Monsieur X. a reconnu avoir pris connaissance et a approuvé les termes recto et verso dudit contrat, sur lequel il a apposé la mention manuscrite « lu et approuvé »; qu'il ne peut donc prétendre n'avoir pu contracter en parfaite connaissance de cause ;
- que le nom de démarcheur, à savoir la société CET, figurait par ailleurs sur le contrat ;
- que les dispositions de la loi de 1972 ne s'appliquent pas à Monsieur X. qui a conclu le contrat en qualité de professionnel ; qu'en effet, celui-ci a conclu les contrats en sa qualité de commerçant et pour les besoins de son commerce ;
- que Monsieur X. ne rapporte pas la preuve qu'il ne lui aurait pas été remis un contrat après la signature ; qu'il a reconnu dans la convention qu'un exemplaire lui a été délivré ;
- que le matériel livré et installé a été réceptionné sans réserve ; que le matériel qui devait être installé sur un second site a été livré mais non installé en raison du refus de Monsieur X. ;
- que dans ses courriers, ce dernier n'a pas indiqué en quoi le matériel ne lui convenait pas ou serait défaillant ;
- que Monsieur X. est rompu aux affaires du commerce et connaissait parfaitement la portée de ses engagements ;
- qu'en s'abstenant de tout paiement auprès de la société SOCREA LOCATION, il a été à l'origine de la résiliation du contrat.
Par ses dernières conclusions déposées le 22 octobre 2003, Monsieur X. a demandé à la Cour de :
- débouter la société KBC LEASE de l'intégralité de ses prétentions, fins et moyens ;
- dire et juger que la société PROTECTION ONE présente un défaut de légitimation active et un défaut de qualité à agir ;
- subsidiairement, débouter la société PROTECTION ONE de l'intégralité de ses prétentions, [minute page 6] fins et moyens ;
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf à préciser le cas échéant que la société CET et la société KBC LEASE ont été solidairement condamnées à payer à Monsieur X. la somme de 914,69 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
- et y ajoutant, condamner solidairement la société KBC LEASE et la société CET sinon PROTECTION ONE au paiement au contrat de la somme de 2.500 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Monsieur X. a fait essentiellement observer en réplique ;
- que la société PROTECTION ONE ne justifie pas venir aux droits de la société CET ;
- que le contrat litigieux a été signé après démarchage à domicile ; qu'il est soumis aux dispositions protectrices du Code de la Consommation ;
- que la société CET, que le concluant estimait être son seul cocontractant, lui a fait signer le second contrat de location sans que Monsieur X. soit en mesure de s'en rendre compte ;
- qu'elle a volontairement antidaté le contrat en vue de retirer au demandeur la possibilité qu'il avait de se rétracter dans le délai de réflexion prévu par la loi ;
- que la livraison est intervenue le 3 février 1997, c'est-à-dire avant l'expiration du délai légal, en contravention avec les dispositions de l'article L. 121-26 du Code de la Consommation ;
- que Monsieur X. a fait jouer sa faculté de renonciation, mettant ainsi à néant le contrat signé avec la société CET ;
- que subsidiairement, le contrat signé entre les parties est nul et de nul effet, en application des dispositions de l'article L. 121-23 du Code de la Consommation ; qu'en effet, le contrat se devait, en vertu des dispositions légales, de comporter une désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens et services proposés, ainsi que les conditions d'exécution du contrat, le prix global à payer et les modalités de paiement, pour permettre au client de contracter en parfaite connaissance de cause ;
- que très subsidiairement, et en relation directe avec l'absence totale de désignation de la nature et des caractéristiques des biens offerts et des services proposés, il sera constaté que la société défenderesse a manqué à son obligation de délivrance en ce que la chose livrée ne correspondait pas à ce qui avait été souhaité par Monsieur X. ni davantage au but recherché par ce dernier.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR :
Vu le dossier de la procédure, les pièces régulièrement versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles la Cour se réfère pour plus ample exposé des faits et moyens ;
Attendu que, tout en concluant dans le dispositif de ses conclusions à l'irrecevabilité de l'appel, Monsieur X. n'expose aucun moyen pour la soutenir ;
Attendu dès lors que, en l'absence de motif d'ordre public susceptible d'être soulevé d'office, il y a lieu de déclarer l'appel de la société KBC LEASE recevable ;
Attendu ensuite que Monsieur X. a fait valoir que la société PROTECTION ONE ne justifie pas qu'elle vient aux droits de la société CET, sans toutefois en tirer les conséquences sur la plan de la procédure, puisque se contentant de conclure au débouté de la partie adverse ; que ce moyen [minute page 7] sera par conséquent écarté ;
Attendu au fond qu'il convient de confirmer intégralement l'argumentation retenue par les premiers juges, conduisant à prononcer l'annulation tant du contrat d'abonnement de surveillance que celle du contrat de location, avec pour conséquence le remboursement par la société KBC LEASE des loyers d'ores et déjà versés par Monsieur X. et la condamnation in solidum des deux sociétés défenderesses au paiement d'une somme de 1.524,49 Euros à titre de dommages-intérêts, outre une somme de 914,69 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, avec obligation pour Monsieur X. de restituer le matériel litigieux ;
Attendu plus précisément qu'il est constant que Monsieur X., garagiste à [ville] (activité de carrosserie et mécanique, achat, vente et reprise de véhicules) a été démarché sur le lieu de son travail par un représentant de la société CET et qu'il a signé deux contrats datés du 20 janvier 1997, l'un d'abonnement de vidéo surveillance avec la société CET et l'autre de location de matériel de vidéo surveillance avec la société SOCREA LOCATION devenue KBC LEASE ;
Attendu que Monsieur X. soutient que ce démarchage serait en réalité intervenu le 31 janvier 1997 et que les deux contrats ont été antidatés par le démarcheur, mais n'apporte aucun élément probant à cet égard ;
Attendu qu'il faut dès lors considérer que les contrats ont bien été signés le 20 janvier 1997 ;
Attendu en tout état de cause que Monsieur X. est fondé à invoquer à son profit les dispositions protectrices des articles L. 121-21 et suivants du Code de la Consommation ;
Attendu que, pour voir écarter ces textes, les sociétés défenderesses ne sauraient soutenir que, conformément aux dispositions de l'article L.121-22 du Code de la Consommation, les conventions souscrites auraient un rapport direct avec les activités exercées par le garagiste ; qu'en effet, il apparaît en l'occurrence que le matériel de vidéo surveillance, s'il diminue le risque de vols, ne permet pas de promouvoir directement l'activité de l'entreprise, alors au surplus qu'il n'est aucunement établi que la réglementation en vigueur rend ce type de matériel obligatoire chez un garagiste effectuant une activité de carrosserie, mécanique, achat, vente et reprise de véhicules ;
Attendu au demeurant que, au-delà du caractère peu apparent des clauses figurant dans les contrats et de l'ambiguïté des termes du talon de rétractation inséré sous les Conditions générales, dont il sera discuté ci-après, il ressort de la présentation des contrats que les défenderesses entendaient bien, dans l'apparence du moins, permettre à Monsieur X. de faire usage des dispositions protectrices des articles L. 121-21 et suivants du Code de la Consommation ; qu'elles admettaient ainsi que les relations avec le client étaient régies par ces textes ; qu'en outre, dans la présente procédure, elles ont fait valoir que le délai de rétractation avait été respecté, ce qui montre encore qu'elle se situent dans le cadre de l'application des textes susvisés ;
Attendu qu'à cet égard, Monsieur X. a d'abord fait valoir qu'il avait valablement fait usage de son droit de rétractation dans le délai de 7 jours de l'article L. 121-25 du Code de la Consommation ;
Attendu cependant que les deux contrats ayant apparemment été signés le 20 janvier 1997, la renonciation intervenue par lettre recommandée du 8 février 1997 doit être considérée comme tardive ;
Attendu par contre que le demandeur et intimé invoque utilement à son profit les dispositions [minute page 8] protectrices de l'article L.121-23 du Code de la Consommation, aux termes duquel les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client et qui doit notamment comporter, à peine de nullité, l'indication des noms du fournisseur et du démarcheur, la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés, la faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du Code de la Consommation ;
Attendu d'abord que, s'il n'est pas établi que Monsieur X. n'a pas reçu un exemplaire de chaque contrat (il est au contraire mentionné au-dessus de sa signature qu'il reconnaît l'avoir reçu), il apparaît que le nom du démarcheur ne figure pas sur les contrats respectifs, et ce en méconnaissance du texte susvisé ;
Attendu ensuite que les premiers juges ont relevé à bon droit que la désignation des biens et prestations proposés dans les deux contrats ne répond pas davantage à l'exigence légale de précision dans leur nature et leurs caractéristiques ; qu'en effet, outre la contrariété apparaissant dans l'énumération du matériel, qui n'est pas la même dans l'un et l'autre contrat (celui relatif à l'abonnement de télésurveillance fait état de deux moniteurs et de deux magnétoscopes, tandis que celui relatif à la location fait état de deux moniteurs, deux caméras et deux magnétoscopes), les seules références « CET 611 » et « CET 653 » dans le contrat d'abonnement et les seules mentions « 2 moniteurs, 2 caméras, 2 magnétoscopes » dans le contrat de location, sont manifestement insuffisantes pour permettre au client de connaître exactement le type de matériel dont il est question, et ce alors même qu'il n'est aucunement démontré qu'un documentation adéquate lui aurait été simultanément remise ;
Attendu enfin que, comme le tribunal l'a également relevé avec pertinence, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du Code de la Consommation n'a pas été reproduit de manière apparente dans les deux contrats, mais au contraire imprimé en caractères minuscules et difficilement lisibles eu égard à la typographie utilisée, enfin mêlé aux Conditions générales figurant au verso des Conditions Particulières, seules susceptibles d'attirer l'attention du client et seules revêtues de sa signature ;
Attendu que l'ambiguïté des termes du talon d'annulation de la commande figurant au bas des Conditions générales doit également être relevée ; qu'en effet, il était paradoxalement prévu un retour des talons à la seule société CET, qu'il s'agisse de l'annulation du contrat d'abonnement ou du contrat de location ;
Attendu en définitive que les manquements aux dispositions protectrices du Code de la Consommation doivent effectivement être sanctionnés par la nullité des contrats ;
Attendu ainsi que Monsieur X. est bien fondé à solliciter le remboursement des loyers déjà versés ;
Attendu de même que le tribunal a retenu à bon droit que, par leur action concertée pour obtenir de Monsieur X. la souscription d'engagements, en éludant les dispositions légales destinées à protéger le consommateur, puis en persistant à ne pas remédier à la situation illégale créée en dépit des lettres de protestation adverses, la société CET et la société KBC LEASE sont à l'origine d'un préjudice matériel et moral pour Monsieur X. qui a été justement évalué à la somme de 1.524,49 Euros ;
[minute page 9] Attendu en définitive qu'il convient de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions;
Attendu que le tribunal a par contre omis de statuer sur la demande formée par la société KBC LEASE contre la société CET, lui reprochant subsidiairement un comportement fautif dans la négociation des contrats ;
Attendu cependant que, nul ne pouvant invoquer sa propre turpitude, la société KBC LEASE, qui a manifesté un comportement déloyal en concertation avec la société CET, doit être déboutée de cette prétention complémentaire ;
Attendu enfin qu'il serait inéquitable de laisser à Monsieur X. la charge de ses frais d'appel relevant de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile à hauteur de la somme de 1500 Euros.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Reçoit l'appel, régulier en la forme ;
Au fond :
Confirme le jugement entrepris ;
Condamne in solidum la société KBC LEASE et la société PROTECTION ONE ancienneté CET aux dépens d'appel ;
Les condamne également in solidum à payer à Monsieur X. une somme de 1.500 Euros (MILLE CINQ CENTS EUROS) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Y ajoutant,
Déboute la société KBC LEASE de sa demande subsidiaire dirigée contre la société CET ;
La condamne aux dépens de cette action.
Et le présent arrêt a été signé par M. HOFFBECK, Président de Chambre, et par Mme SCHOENBERGER, Greffier présent au prononcé.
- 5831 - Code de la consommation - Domaine d’application - Application conventionnelle - Illustrations voisines : démarchage à domicile
- 5870 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Notion d’activité professionnelle - Activité globale ou spécifique
- 5885 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères combinés : rapport direct et compétence
- 5901 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Finalité du contrat - Promotion de l’activité
- 5905 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Finalité du contrat - Protection et sécurisation de l’activité
- 5911 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Intensité du lien avec l’activité - Contrat imposé par la réglementation
- 5953 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation générale
- 5954 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation par activité
- 5955 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation par cour d’appel