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CA VERSAILLES (1re ch. B), 29 avril 2003

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (1re ch. B), 29 avril 2003
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 1re ch. sect. B
Demande : 02/01144
Date : 29/04/2003
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Legifrance
Date de la demande : 19/02/2002
Décision antérieure : TI Antony, 3 janvier 2002, CASS. CIV. 1re, 26 octobre 2004
Numéro de la décision : 287
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1715

CA VERSAILLES (1re ch. B), 29 avril 2003 : RG n° 02/01144 ; arrêt n° 287

(sur pourvoi Cass. civ. 1re, 26 octobre 2004 : pourvoi n° 03-16692 ; arrêt n° 1507)

Publication : Legifrance

 

Extrait : « Que ces consommateurs qui connaissent ce processus qu'ils ont employé n'ignoraient donc pas qu'ils n'auraient affaire avec aucun employé de cette société, et qu'il leur appartenait donc de se montrer vigilants et prudents en prenant connaissance des termes de cette clause figurant sur les deux faces de la pochette, que, manifestement, ils n'ont pas pris la peine de lire, ou qu'ils ont, au contraire, connue et acceptée ; Que de plus, cette même clause figure sur le reçu remis aux clients dépositaires de leurs films, et que ses caractères, certes petits, n'en empêchaient cependant pas une lecture normale, ni l'intelligibilité ; Qu'elle est donc déclarée opposable aux époux X. ;

Considérant que cette clause n'est pas exclusive de responsabilité, mais qu'elle est simplement limitative et qu'elle a prévu un dédommagement forfaitaire, tel que la recommandation de la CCA du 24 septembre 1982 le préconise ; Qu'elle doit donc recevoir sa pleine application en vertu de l'article 1150 du Code Civil, puisqu'il est avéré comme l'a justement retenu le 1er juge qu'il n'y a aucun dol ni aucune faute lourde à reprocher à la Société SPECTOR ; Considérant par ailleurs que les appelants n'invoquent pas expressément les articles L. 132-1 et R. 132-1 du Code de la Consommation et ne parlent pas de clause abusive sur ce fondement ; Considérant enfin que les appelants développent une argumentation sur ce qu'ils appellent « la valeur exceptionnelle » des pellicules litigieuses, mais qu'ils s'expriment en termes très généraux et qu'ils n'explicitent pas quels événements, avec quelles personnes et en quel pays, ni à quelle époque, avaient été fixés sur ces films ; Qu'au demeurant, malgré cette possibilité qui leur était expressément donnée par la clause limitative de responsabilité figurant sur la pochette et sur le reçu, les époux X. n'ont pas signalé à la société SPECTOR qu'ils considéraient que ces films avaient « une importance exceptionnelle » ; Que l'indemnisation forfaitaire prévue par cette clause qui leur est opposable doit donc s'appliquer ».

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

PREMIÈRE CHAMBRE B

ARRÊT DU 29 AVRIL 2003

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 2002-01144. Appel d’un jugement rendu le 3 janvier 2002 par le Tribunal d’Instance d’Antony.

 

APPELANT (S) :

Monsieur X.

le [date] à [lieu] de nationalité FRANÇAISE

Madame Y. épouse X.

née le [date] à [lieu] de nationalité FRANÇAISE

demeurant ensemble au [adresse], CONCLUANT par la SCP JULLIEN LECHARNY ROL, PLAIDANT par Maître Didier DAILLOUX, avocat au barreau de PARIS

 

INTIMÉE :

Société SPECTOR ILE DE FRANCE venant aux droits du Groupe RACINE

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [adresse], CONCLUANT par la SCP KEIME & GUTTIN, PLAIDANT par Maître Laurent DOLFI, avocat au barreau de PARIS

 

COMPOSITION DE LA COUR : Monsieur Alban CHAIX, président, Monsieur Daniel CLOUET, conseiller, Madame Sabine FAIVRE, conseiller, et ces mêmes magistrats en ayant délibéré conformément à la loi,

 

GREFFIER : assistée de Madame Natacha BOURGUEIL,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] FAITS ET PROCÉDURE :

Suivant acte d'huissier en date du 23 janvier 2001, les époux X. ont fait assigner le groupe RACINE devant le Tribunal d'Instance d'ANTONY aux fins de le voir condamner au paiement d'une somme principale de 7.622,45 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la perte de leurs pellicules photographiques.

Suivant acte d'huissier en date du 30 juillet 2001, les époux X. ont fait assigner, aux mêmes fins, la société SPECTOR ILE DE FRANCE venant aux droits du groupe RACINE.

Par jugement contradictoire en date du 3 janvier 2002, le Tribunal d'Instance D'ANTONY a débouté les époux X. de leurs demandes, les a condamnés au paiement d'une somme de 457,35 € par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et a laissé les dépens à leur charge.

Par déclaration en date du 19 février 2002, les époux X. ont interjeté appel de cette décision.

 

Les époux X. exposent en premier que le contrat par eux souscrit doit s'analyser en un contrat de dépôt lorsque les pellicules ont déjà été développées et que le dépositaire n'a plus, comme obligation, qu'à les restituer.

Ils soutiennent que cette qualification juridique entraîne une obligation de résultat à la charge du dépositaire.

Ils prétendent ensuite que la clause limitative de responsabilité leur est inopposable.

[minute page 3] Ils affirment enfin qu'ils n'ont pas été mis en mesure de bénéficier de l'alternative d'indemnisation offerte dès lors qu'aucun interlocuteur n'était présent lors du dépôt des pellicules.

Les époux X. demandent donc à la Cour de :

- Recevoir Monsieur et Madame X. en leur appel ;

- Les y dire fondés ;

En conséquence ;

- Réformer en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal d'Instance d'ANTONY du 3 janvier 2002 ;

Statuant à nouveau ;

- Rejeter toutes fins et prétentions de la société SPECTOR ILE DE FRANCE ;

- Juger que la société SPECTOR ILE DE FRANCE aux droits du Groupe RACINE a reconnu la perte des onze pellicules développées selon récépissés de dépôt numéros 256336C, 256337C, 256338C, 256339C, 256340C, 256340C, 256341C, 256342C, 256343C, 256344C, 256345C, 256346C, par ses services ;

- Juger inopposable à Monsieur et Madame X. la clause limitative de responsabilité invoquée ;

- Juger responsable la société SPECTOR ILE DE FRANCE aux droits du Groupe RACINE des préjudices matériel et moral subis par Monsieur et Madame X. ;

- Condamner la société SPECTOR ILE DE FRANCE aux droits du Groupe RACINE à payer à titre de dommages et intérêts à Monsieur et Madame [minute page 4] X. la somme de 7.623 € ;

- Si toutefois la cour estime qu'il existe entre les parties un contrat d'entreprise, juger sur ce fondement responsable la société SPECTOR ILE DE FRANCE au titre de l'obligation de moyen renforcée y attachée ;

- Condamner la Société SPECTOR ILE DE FRANCE aux droits du Groupe RACINE au paiement des entiers dépens ;

 

La société SPECTOR ILE DE FRANCE répond que le contrat litigieux ne saurait s'analyser en un contrat de dépôt dès lors que l'objet de l'obligation est la transformation de la pellicule ainsi que son développement et non sa garde et sa restitution à l'identique.

Elle soutient encore que la clause limitative de responsabilité était valable dès lors qu'elle offre une alternative entre une indemnisation forfaitaire et une indemnisation sur le fondement du droit commun.

La société SPECTOR ILE DE FRANCE prie donc en dernier la Cour de :

Vu les articles 1150 et suivants du Code Civil, 1913 et suivants du Code Civil ;

Il est demandé à la Cour d'Appel de céans de :

- Confirmer en tous points le jugement du Tribunal d'Instance d'ANTONY ;

Y ajoutant,

- Condamner les époux X. à payer à la Société SPECTOR une somme de 1.500 € au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- [minute page 5] Condamner les époux X. aux entiers dépens ;

 

La clôture a été prononcée le 12 décembre 2002 et l'affaire appelée à l'audience du 4 mars 2003.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR

I) Considérant que c'est à bon droit, et par une exacte qualification du contrat, que le 1er juge a retenu que les parties étaient liées par un contrat d'entreprise (ou de prestation de service) qui est donc susceptible de contenir une clause limitative de responsabilité, en application de l'article 1150 du Code Civil ;

Que, de plus, s'agissant ici d'un contrat entre une société professionnelle, et des clients consommateurs, peuvent être éventuellement invoquées les dispositions du Code de la Consommation, et plus particulièrement celles de ses articles L. 132-1 et R. 132-1, tout en tenant compte, si besoin est, des recommandations contenues dans l'avis n° 82-04 de la CCA (commission des clauses abusives), du 24 septembre 1982 ;

Que toute l'argumentation développée par les appelants au sujet du contrat de dépôt et des obligations qui en résultent pour le dépositaire est donc inopérante et sera écartée ;

Considérant, en l'espèce, que la clause limitative de responsabilité invoquée par la société SPECTOR ILE DE FRANCE et exactement analysée par le Tribunal, figure sur la pochette mise à la disposition des clients et qui a été utilisée par les époux X. qui y ont placé, eux-mêmes, leurs films, moyennant remise d'un reçu ;

Que ces consommateurs qui connaissent ce processus qu'ils ont employé n'ignoraient donc pas qu'ils n'auraient affaire avec aucun employé de cette société, et qu'il leur appartenait donc de se montrer vigilants et prudents en prenant connaissance des termes de cette clause figurant sur les deux faces [minute page 6] de la pochette, que, manifestement, ils n'ont pas pris la peine de lire, ou qu'ils ont, au contraire, connue et acceptée ;

Que de plus, cette même clause figure sur le reçu remis aux clients dépositaires de leurs films, et que ses caractères, certes petits, n'en empêchaient cependant pas une lecture normale, ni l'intelligibilité ;

Qu'elle est donc déclarée opposable aux époux X. ;

Considérant que cette clause n'est pas exclusive de responsabilité, mais qu'elle est simplement limitative et qu'elle a prévu un dédommagement forfaitaire, tel que la recommandation de la CCA du 24 septembre 1982 le préconise ;

Qu'elle doit donc recevoir sa pleine application en vertu de l'article 1150 du Code Civil, puisqu'il est avéré comme l'a justement retenu le 1er juge qu'il n'y a aucun dol ni aucune faute lourde à reprocher à la Société SPECTOR ;

Considérant par ailleurs que les appelants n'invoquent pas expressément les articles L. 132-1 et R. 132-1 du Code de la Consommation et ne parlent pas de clause abusive sur ce fondement ;

Considérant enfin que les appelants développent une argumentation sur ce qu'ils appellent « la valeur exceptionnelle » des pellicules litigieuses, mais qu'ils s'expriment en termes très généraux et qu'ils n'explicitent pas quels événements, avec quelles personnes et en quel pays, ni à quelle époque, avaient été fixés sur ces films ;

Qu'au demeurant, malgré cette possibilité qui leur était expressément donnée par la clause limitative de responsabilité figurant sur la pochette et sur le reçu, les époux X. n'ont pas signalé à la société SPECTOR qu'ils considéraient que ces films avaient « une importance exceptionnelle » ;

Que l'indemnisation forfaitaire prévue par cette clause qui leur est opposable doit donc s'appliquer ;

[minute page 7] Qu'il sera observé, à toutes fins utiles, que la société SPECTOR a offert aux appelants un dédommagement dépassant largement l'indemnisation forfaitaire prévue, puisqu'elle leur a proposé, en contre partie, un caméscope, que les intéressés ont refusé ;  

Considérant que la cour constate donc l'existence de cette offre de dédommagement et la juge satisfactoire ;

Considérant que l'argumentation secondaire formulée par les appelants au sujet d'une prétendue publicité qui, selon eux, « peut être qualifiée de mensongère » ne correspond pas à un moyen de droit utile à la solution du présent litige ;

Qu'elle est donc inopérante en l'espèce et sera écartée ;

Considérant par conséquent que le jugement est entièrement confirmé et que les époux X. sont déboutés des fins de leur appel et de toutes les demandes que celui-ci comporte ;

 

II) Considérant que le jugement est confirmé en ce qu'il a, à bon droit et eu égard à l'équité, accordé 457,35 € à la Société SPECTOR, en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et que la Cour, y ajoutant, compte tenu de l'équité, condamne les appelants à payer à cette société la somme de 915 €, en vertu de ce même article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, pour ses frais irrépétibles en appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant publiquement et contradictoirement et en dernier ressort ;

Vu les articles 1134 et 1150 du Code Civil ;

- [minute page 8] Déboute les époux X. des fins de leur appel et de toutes les demandes que celui-ci comporte ;

- Confirme en son entier le jugement déféré ;

- Constate et déclare satisfactoire l'offre de dédommagement de la SA SPECTOR ;

Ajoutant au jugement :

- Condamne les époux X. à payer à la SA SPECTOR ILE DE FRANCE la somme de 915 € en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile pour ses frais irrépétibles en appel ;

- Condamne les appelants à tous les dépens de 1ère Instance et d'Appel qui seront recouvrés directement contre eux par la SCP d'Avoués KEIME et GUTTIN aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Et ont signé le présent arrêt : Monsieur Alban CHAIX, qui l'a prononcé, Madame Natacha BOURGUEIL, qui a assisté à son prononcé.