CA RENNES (1re ch. B), 28 septembre 2006
CERCLAB - DOCUMENT N° 1779
CA RENNES (1re ch. B), 28 septembre 2006 : RG n° 05/04695 ; arrêt n° 593
Publication : Juris-Data n° 315027
Extraits : 1/ : « Attendu que le contrat du 11 juin 1998 concerne indistinctement Monsieur X. en qualité de personne physique, Monsieur X. en qualité de garagiste ; qu'il est donc unique et indivisible, une seule location étant prévue ; Attendu que le matériel sophistiqué, avec centrale de télésurveillance destiné à un usage privé de Monsieur X., est sans lien direct avec son activité professionnelle ; Qu'en conséquence les dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation sont applicables ».
2/ « Attendu que ce dernier prétend qu'aucun contrat de télésurveillance ne lui a été remis ; que ni la société CEDI SÉCURITÉ venant aux droits de CEDITEL, ni la société LOCAM, ne versent aux débats le contrat litigieux ; Attendu qu'il appartient à celui qui réclame l'exécution d'un contrat d'établir sa régularité qu'il en résulte que la société CEDI SÉCURITÉ n'est pas en mesure de rapporter que les mentions impératives de l'article L. 121-23 ont été portées à la connaissance de Monsieur X. ; que faute d'avoir respecté ses dispositions d'ordre public du code de la consommation Monsieur X. est bien fondé à solliciter l'annulation du contrat de télésurveillance ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
PREMIÈRE CHAMBRE B
ARRÊT DU 28 SEPTEMBRE 2006
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 05/04695. Arrêt n° 593.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Madame Monique BOIVIN, Président, Madame Rosine NIVELLE, Conseiller, Monsieur Jean-Malo BOHUON, conseiller.
GREFFIER : Patricia IBARA, lors des débats et lors du prononcé.
DÉBATS : A l'audience publique du 08 juin 2006 devant Madame Monique BOIVIN, entendue en son rapport à l'audience, siégeant en qualité de magistrat rapporteur, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial.
ARRÊT : Contradictoire, prononcé par Madame Monique BOIVIN, Président, à l'audience publique du 28 septembre 2006.
APPELANTE :
EURL GARAGE X.
[adresse], représentée par la SCP D`ABOVILLE, DE MONCUIT SAINT-HILAIRE et LE CALLONNEC, avoués, assistée de Maître CHAPPEL, avocat
INTIMÉES :
- SA CEDI-SECURITE venant aux droits de la société CEDITEL
[adresse], représentée par la SCP GAUVAIN et DEMIDOFF, avoués, assistée de Maître BREMENS, avocat
- SAS LOCAM
[adresse], représentée par la SCP GAUTIER-LHERMITTE, avoués, assistée de la SELARL LARZUL et BUFFET, avocats, substituant Maître FERRET, avocat
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] Le 11 juin 1998 Monsieur X. a signé avec la société LOCAM un contrat de location de longue durée portant sur un système de télésurveillance avec périphériques et avec la société CEDITEL un contrat d'abonnement de télésurveillance pour sécuriser son activité de garagiste, d'une part et son domicile d'autre part.
Le 30 juin 1998, après livraison du matériel par la société CEDITEL Monsieur X. a signé deux procès-verbaux de réception et mise en service des matériels, l'un relatif à son domicile l'autre à sa maison d'habitation.
Monsieur X. a réglé les loyers pendant 2 ans.
Le 19 mai 2000 il a adressé à la société CEDITEL une lettre de résiliation des deux contrats de télésurveillance l'installation mise en place devant devenir sa propriété à compter du 30 juin 2000.
Le 5 septembre 2000 la société LOCAM a adressé à Monsieur X. une mise en demeure de régler la somme de 3.652,64 Francs ; en l'absence de règlement, le contrat a été résilié le 15 septembre 2000.
Le 7 mars 2001 la société LOCAM a déposé une requête en injonction de payer ; par ordonnance du 21 mars 2001 le Président du tribunal de commerce a condamné Monsieur X. à payer la somme de 21.767,20 Francs à compter du 8 septembre 2000.
Monsieur X. a formé opposition.
Le 13 mai 2003 Monsieur X. a assigné la société CEDITEL en nullité des contrats.
Par jugement du 3 juin 2005 le tribunal de commerce de LORIENT a débouté Monsieur X., l'a condamné à payer à la société LOCAM la somme de 3.318,39 euros, outre celle de 331,83 euros à titre de clause pénale, outre 500 euros à la société LOCAM au titre des frais irrépétibles et 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
[minute page 3]
Monsieur X. qui a interjeté appel, sollicite l'infirmation du jugement, le débouté de la société LOCAM et CEDI SECURITE venant aux droits de CEDITEL, l'annulation du contrat de location conclu avec la société LOCAM, la condamnation de la société LOCAM à lui rembourser la somme de 6.177,48 euros, montant des loyers perçus, la condamnation de la société CERI SÉCURITÉ à lui rembourser la somme de 3.088,74 euros, montant des loyers perçus, outre 3 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Au soutien de son appel il invoque :
- la nullité des contrats de fourniture et de location conclus après démarchage à domicile, nullité qui avait été sollicitée devant le premier juge, non la résolution des contrats de fourniture.
- les dispositions du code de la consommation s'agissant d'un contrat de fourniture de matériels équipant un local privé.
- en l'absence de remise d'un contrat écrit par la société CEDITEL, les dispositions des article L. 121-23 n'ayant pas été respectées, la nullité est donc encourue ; les mentions impératives qui devaient être contenues dans le contrat n'ont pas été portées à sa connaissance. Il n'y a pas eu renversement de la charge de la preuve.
- les références à des numéros de contrat portés sur les courriers de résiliation contredisent la thèse de la société CEDI SÉCURITÉ selon laquelle il n'y aurait pas de contrat.
- la nullité du contrat de fourniture de matériel de télésurveillance entraîne la nullité du contrat de financement ; il existe un lien indissociable entre les deux contrats.
- la société CEDITEL, s'agissant de matériels privés se devait de respecter les dispositions consuméristes d'ordre public.
- le matériel de télésurveillance, système d'alarme sophistiqué destiné à l'activité du garage, était sans rapport direct avec son activité professionnelle.
- [minute page 4] subsidiairement, la condition de révocabilité du contrat ne pouvant intervenir qu'à la condition de sa résiliation par le bailleur, est non seulement potestative mais impossible.
- la nullité des clauses de résiliation de plein droit des articles 7, 12 et 13 du contrat de location.
La société CEDI SÉCURITÉ conclut à la confirmation du jugement, à la condamnation de L'EURL garage X. à lui verser la somme de 3.500 euros au titre des frais irrépétibles.
Elle réplique que :
- le seul défaut de remise du contrat ne constitue pas une cause de nullité de la convention.
- il n'y a pas eu de contrat de fourniture de matériels avec Monsieur X., écrit ou verbal, mais un contrat de prestation de services.
- les lettres de résiliation des 19 mai 2000 et 9 février 2001 font références à deux contrats de télésurveillance.
- en l'absence de remise d'un contrat de fourniture de matériels, soit il n'existe pas et L'EURL GARAGE X. ne peut en demander la nullité, soit elle a souscrit auprès de la société CEDITEL, un ou plusieurs contrats d'abonnement de télésurveillance elle ne peut en demander la nullité, pour absence de remise d'un exemplaire, et il lui appartient de rapporter la preuve de la violation des dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation.
- L'EURL reconnaît dans ses écritures avoir souscrit des contrats ; en apposant sa signature elle a pris connaissance des contrats.
- faute de disposer des documents sollicités, après fermeture des agences, archivages des dossiers après absorption en 2001 de la société CEDITEL, elle est dans l'impossibilité matérielle de verser aux débats les documents sollicités.
- en toute hypothèse le contrat d'abonnement de télésurveillance souscrit par L'EURL X. pour sécuriser ses locaux professionnels [minute page 5] présente un rapport direct avec son activité professionnelle, ce qui exclut l'application des dispositions de code de la consommation.
La société LOCAM conclut à la confirmation du jugement, et forme en cause d'appel une demande d'indemnité de 1.500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Elle réplique que c'est à raison du caractère professionnel de l'investissement destiné à la protection de l'outil de travail que Monsieur X. a réglé les loyers ; il ne peut contester qu'il y a eu un seul contrat de location et Monsieur X. ne peut se prévaloir d'un double de paiement, ni se prévaloir de sa propre turpitude en acceptant de financer le système d'alarme installé à domicile sous un financement professionnel.
Elle fait encore valoir que du fait de la résiliation du contrat L'EURL X. n'a plus qualité pour demander la nullité du contrat de location, en outre les articles 2 et 12 des conditions générales répondent à l'économie du contrat ; il appartenait à Monsieur X. non pas d'écrire le 3 mai 2001, mais d'engager à l'encontre de la société CEDITEL une action en résolution de son contrat principal ; en fait l'initiative de la résiliation a été prise par la société LOCAM pour défaut de paiement des loyers.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DISCUSSION :
Attendu qu'il n'est pas contesté que les contrats de location et d'abonnement de télésurveillance ont été souscrits par Monsieur X. lors d'un démarchage à domicile ;
Qu'ils sont soumis aux dispositions des articles L. 121-21, sauf si la location porte sur des biens ayant un rapport direct avec l'activité professionnelle du souscripteur ;
Attendu que le 11 juin 1998 Monsieur X. représentant le garage X. a signé un seul contrat de location pour un système de télésurveillance avec périphériques ;
Que le 30 juin Monsieur X. a signé deux bons de livraison et réception de matériel, l'un au domicile de [ville A.] à [minute page 6] [ville B], l'autre au nom du GARAGE X. [ville C.] à [ville B.]-[ville D.] ; qu'en outre ces deux bon de commande ont été signé par Monsieur X. en sa qualité de propriétaire, domicilié à [ville A.], [ville B.];
Attendu que le contrat du 11 juin 1998 concerne indistinctement Monsieur X. en qualité de personne physique, Monsieur X. en qualité de garagiste ; qu'il est donc unique et indivisible, une seule location étant prévue ;
Attendu que le matériel sophistiqué, avec centrale de télésurveillance destiné à un usage privé de Monsieur X., est sans lien direct avec son activité professionnelle ;
Qu'en conséquence les dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation sont applicables ; qu'ainsi les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion du contrat qui comporte à peine de nullité les mentions prescrites 1 à 7 ;
Que s'il est de jurisprudence constante que le seul défaut de remise du contrat ne constitue pas une cause de nullité, la remise d'un contrat ne contenant pas les mentions informatives imposées par l'article L. 121-23 emporte nullité de la convention ;
Que les discussions relatives à l'inexistence du contrat d'abonnement de télésurveillance sont vaines ; qu'il résulte à suffire des documents de la cause, contrat de location, bons de livraison, facture de paiement LOCAM à CEDITEL le 22 juillet 1998, qu'il existe bien un contrat de prestations de services entre la société CEDITEL et Monsieur X. ;
Attendu que ce dernier prétend qu'aucun contrat de télésurveillance ne lui a été remis ; que ni la société CEDI SÉCURITÉ venant aux droits de CEDITEL, ni la société LOCAM, ne versent aux débats le contrat litigieux ;
Attendu qu'il appartient à celui qui réclame l'exécution d'un contrat d'établir sa régularité qu'il en résulte que la société CEDI SÉCURITÉ n'est pas en mesure de rapporter que les mentions [minute page 7] impératives de l'article L. 121-23 ont été portées à la connaissance de Monsieur X. ; que faute d'avoir respecté ses dispositions d'ordre public du code de la consommation Monsieur X. est bien fondé à solliciter l'annulation du contrat de télésurveillance ;
Que l'annulation du contrat principal de prestations de services entraîne l'annulation du contrat accessoire conclu avec la société LOCAM, ce dernier se trouvant dépourvu de cause ;
Qu'il ne peut être reproché à Monsieur X. de se prévaloir de sa propre turpitude la règle nemo auditur, ne faisant pas obstacle à une demande d'annulation ;
Attendu qu'il y a lieu d'ordonner le remboursement des sommes perçues par la société LOCAM ; que toutefois faute de justifier de quelque règlement auprès de la société CEDI SÉCURITÉ il y a lieu de débouter Monsieur X. du solde de remboursement de la somme de 3.088,70 euros ;
Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur X. ses frais irrépétibles qui seront indemnisés par la somme de 1.500 euros ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Vu les articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation ;
Infirme le jugement du 3 juin 2005 ;
Annule le contrat de télésurveillance conclu entre la société CEDI SÉCURITÉ, venant aux droits de la société CEDITEL, et Monsieur X. ;
Annule le contrat de location du 11 juin 1998 ;
Condamne la société LOCAM à rembourser à Monsieur X. la somme de 6.177,48 euros ;
[minute page 8] Dit que Monsieur X. est tenu de restituer l'ensemble du matériel de télésurveillance ;
Déboute les parties de leurs autres demandes ;
Condamne in solidum la société LOCAM et la société CEDI SECURITE à verser à Monsieur X. une indemnité de 1.500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile;
La condamne aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
LE GREFFIER. LE PRÉSIDENT.
- 5826 - Code de la consommation - Clauses abusives - Nature de la protection - Législation d’ordre public - Principe
- 5833 - Code de la consommation - Domaine d’application - Règles de preuve
- 5879 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères alternatifs : cadre de l’activité
- 5905 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Finalité du contrat - Protection et sécurisation de l’activité
- 5953 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation générale
- 5954 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation par activité
- 5955 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation par cour d’appel
- 5959 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats mixtes - Usage mixte professionnel et privé