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CA RENNES (1re ch. A), 3 janvier 1995

Nature : Décision
Titre : CA RENNES (1re ch. A), 3 janvier 1995
Pays : France
Juridiction : Rennes (CA), 1re ch. sect. A
Demande : 852/92
Date : 3/01/1995
Nature de la décision : Réformation
Décision antérieure : TI SAINT-BRIEUC, 21 septembre 1992
Numéro de la décision : 10
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1827

CA RENNES (1re ch. A), 3 janvier 1995 : RG n° 852/92 ; arrêt n° 10

 

Extrait : 1/ « Considérant qu'il n'est pas contesté que l'UFC soit une association régulièrement déclarée ayant pour objet statutaire explicite la défense des intérêts des consommateurs et qu'elle ait été agréée à cette fin ; Considérant qu'elle est donc recevable à intervenir devant le Juge civil au côté de  M. X. pour demander des mesures destinées à faire cesser les agissements illicites et à demander réparation du trouble causé à l'intérêt collectif des consommateurs par ces agissements ».

2/ « Considérant encore que les époux A. ne justifient pas qu'à la date de clôture des débats ils avaient définitivement renoncé à maintenir dans les contrats qu'ils proposaient à la clientèle la clause litigieuse, que notamment rien ne permettait de dire qu'ils avaient renoncé à exercer une voie de recours à l'encontre des décisions rendues dans d'autres affaires les 30 mars 1992 et 27 avril 1992 ; que le courrier du 6 mai 1992 adressé à M. X. s'il opérait remboursement de la somme de 910 Francs ne contenait aucune reconnaissance de l'illégitimité de la clause en vertu de laquelle ces 910 Francs avaient été retenus sur la caution mais au contraire exprimait une réserve soulignée par le jugement ; Considérant que l'action de l'UFC n'était pas une action déclaratoire mais l'exercice des droits consacrés par la loi du 8 janvier 1988 ; que cette association justifiait d'un intérêt légitime né et actuel à soumettre en justice l'examen de ses prétentions ».

3/ « Considérant qu'il n'est pas contesté que les époux A. ont supprimé cette clause des contrats de location qu'ils proposent à leur clientèle ; Considérant que dès lors la mesure de publication ordonnée par le premier juge n'est pas nécessaire ».

 

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

COUR D’APPEL DE RENNES

PREMIÈRE CHAMBRE A

ARRÊT DU 3 JANVIER 1995

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 852/92. Arrêt n° 10.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur ETIENNE, Président, Monsieur LE GUILLANTON, Conseiller, Madame TREMOUREUX, Conseiller.

MINISTÈRE PUBLIC : -

GREFFIER : Monsieur CAHIERRE,

DÉBATS : à l'audience publique du 15 NOVEMBRE 1994

ARRÊT : CONTRADICTOIRE, prononcé par Madame TREMOUREUX, à l'audience publique du 3 JANVIER 1995, date indiquée à l'issue des débats.

 

APPELANT :

Monsieur et Madame A., (Agence immobilière de Bretagne)

demeurant [adresse], APPELANT suivant acte en date du 12 OCTOBRE 1992 d'un jugement rendu le 21 SEPTEMBRE 1992 par le Tribunal d'Instance de SAINT BRIEUC. Maîtres CASTRES ET COLLEU Avoués associés. Maître CHAULEUR Avocat.

ET :

INTIMÉE :

L'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS

dont le siège est [adresse], INTIMÉE, Maître GAUTIER, Avoué. Maître CARTRON, Avocat.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] M. X. a loué le 28 mars 1991 un appartement à Mme Y. représentée par l'agence immobilière de Bretagne. Il a donné congé très rapidement.

Le 18 octobre 1991 l'agence de Bretagne lui a adressé un décompte provisionnel des charges incluant une somme de 910 Francs en vertu d'une clause contractuelle par laquelle le preneur en cas de départ avant un délai de trois ans s'engageait à rembourser au bailleur prorata temporis une part des frais et honoraires versés par celui-ci lors de la réalisation de la location.

M. X. a contesté devoir cette somme.

L'Union Fédérale des Consommateùrs (UFC) est intervenue volontairement à l'instance en application de la loi du 8 janvier 1988.

Par jugement du 21 septembre 1992 le Tribunal d'Instance de SAINT-BRIEUC a :

- déclaré recevable l'intervention de l'union fédérale des consommateurs ;

- déclaré illicite la clause insérée dans les contrats de location de l'agence immobilière de Bretagne relative à ce remboursement des frais en cas de départ avant le délai de trois ans ;

- condamné l'agence immobilière de Bretagne à payer à l'UFC la somme de 5.000 Francs à titre de dommages-intérêts et celle de 1.200 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

- donné acte à l'agence immobilière de Bretagne de ce qu'elle a reversé la somme de 910 Francs à M. X. ;

- l'a condamné à lui payer la somme de 250 Francs au titre des frais irrépétibles ;

- ordonné la publication du dispositif du jugement dans le journal Ouest-France du mercredi en page immobilier dans un délai de un mois à compter de la décision sous astreinte de 1.000 Francs par jour de retard pendant trois semaines ;

- a débouté l'UFC du surplus de ses prétentions ;

- a condamné l'agence immobilière de Bretagne aux dépens.

* * *

M. et Mme A. exerçant sous l'enseigne agence immobilière de Bretagne ont interjeté appel de cette décision en intimant uniquement l'UFC.

[minute page 3] Ils demandent à la Cour :

- de réformer ce jugement ;

- de déclarer irrecevable pour défaut d'intérêt l'intervention de l'UFC

- de la débouter en conséquence de toutes ses demandes ;

Subsidiairement,

- de réformer sur les condamnations,

* de réduire au franc symbolique les dommages-intérêts sollicités par l'UFC,

* de dire n'y avoir lieu à publication de la décision entreprise.

- de condamner l'UFC aux dépens.

Pour l'essentiel ils exposent que :

- Aucun dommage ni aucun trouble n'avait à être réparé par l'intervention de l'UFC puisqu'une décision du 27 avril 1992 avait déjà déclaré illicite cette clause suite à une demande présentée par la confédération syndicale du cadre de vie. Dès que cette décision leur a été signifiée ils ont supprimé cette clause.

On ne peut exercer d'action déclaratoire.

Leur agence est connue pour son sérieux et sa compétence. Elle a dès que possible établi un nouveau décompte pour M. X. Le Tribunal s'est fondé sur le défaut de logement de type social, mais ce problème n'est pas en corrélation avec l'établissement de contrat pour un autre type de parc locatif.

Le Tribunal a d'ailleurs statué ultra petita : la mesure de publication n'était pas demandée.

Les contrats signés depuis le 15 mai 1992 ne comportent plus cette clause.

L'article 5 de la loi du 5 janvier 1988 ne prévoit pas expressément l'allocation de dommages-intérêts au profit de l'association qui intervient.

* * *

L'Union Fédérale des Consommateurs (UFC) sollicite la confirmation de la décision entreprise, et la condamnation de l'appelant aux dépens ainsi [minute page 4] qu'à lui payer 5.000 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle demande que les pièces produites tardivement soient écartées des débats.

Elle fait valoir qu'elle dispose d'un intérêt à agir distinct de celui des autres associations. Le jugement du 27 avril 1992 n'avait pas autorité de chose jugée à son égard. Par ailleurs elle pouvait intervenir pour appuyer la demande de M. X.

La clause était abusive mais également contraire à l'ordre public et donc illicite.

Le Premier Juge a choisi le moyen approprié, autorisé par la loi de 1988 pour informer les consommateurs et faire réparer le préjudice collectif subi par eux.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions figurant au dossier.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Considérant que les pièces communiquées le 10 novembre 1994 selon bordereau ont été retirées par l'appelant, que dès lors la demande d'irrecevabilité est sans objet ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que l'UFC soit une association régulièrement déclarée ayant pour objet statutaire explicite la défense des intérêts des consommateurs et qu'elle ait été agréée à cette fin ;

Considérant qu'elle est donc recevable à intervenir devant le Juge civil au côté de M. X. pour demander des mesures destinées à faire cesser les agissements illicites et à demander réparation du trouble causé à l'intérêt collectif des consommateurs par ces agissements ;

Considérant que les époux A. ainsi que l'a relevé le premier juge pour des motifs que la Cour adopte ne pouvaient soutenir qu'en raison de l'autorité de chose jugée la demande de l'UFC était irrecevable ;

Considérant encore que les époux A. ne justifient pas qu'à la date de clôture des débats ils avaient définitivement renoncé à maintenir dans les contrats qu'ils proposaient à la clientèle la clause litigieuse, que notamment rien ne permettait de dire qu'ils avaient renoncé à exercer une voie de recours à l'encontre des décisions rendues dans d'autres affaires les 30 mars 1992 et 27 avril 1992 ; que le courrier du 6 mai 1992 adressé à M. X. s'il opérait remboursement de la somme de 910 Francs ne contenait aucune [minute page 5] reconnaissance de l'illégitimité de la clause en vertu de laquelle ces 910 Francs avaient été retenus sur la caution mais au contraire exprimait une réserve soulignée par le jugement ;

Considérant que l'action de l'UFC n'était pas une action déclaratoire mais l'exercice des droits consacrés par la loi du 8 janvier 1988 ; que cette association justifiait d'un intérêt légitime né et actuel à soumettre en justice l'examen de ses prétentions ;

Considérant que le caractère illicite de la clause tel que reconnu par le premier juge n'est pas contesté devant la Cour ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que les époux A. ont supprimé cette clause des contrats de location qu'ils proposent à leur clientèle ;

Considérant que dès lors la mesure de publication ordonnée par le premier juge n'est pas nécessaire ; que par contre, c'est par une juste appréciation de l'atteinte portée à l'intérêt collectif des consommateurs que le Tribunal a condamné les époux A. exerçant sous l'enseigne agence immobilière de Bretagne à payer à l'UFC la somme de 5.000 Francs à titre de réparation dudit préjudice ;

Considérant que les époux A. qui succombent sur l'essentiel de leur recours supporteront la charge des dépens ;

Considérant que l'équité justifie en outre qu'ils versent à l'UFC une somme de 4.000 Francs pour l'indemniser des frais non inclus dans les dépens qu'elle a dû exposer à raison de leur recours.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Réformant la décision entreprise :

- dit n'y avoir lieu à ordonner la publication du jugement entrepris dans le journal Ouest-France ;

Confirme pour le surplus ladite décision ;

Statuant en cause d'appel, condamne les époux A. à payer à l'Union Fédérale des Consommateurs la somme de 4.000 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

[minute page 6] Condamne les époux A. aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.