CA BORDEAUX (1re ch. civ. sect. B), 8 mars 2011
CERCLAB - DOCUMENT N° 2639
CA BORDEAUX (1re ch. civ. sect. B), 8 mars 2011 : RG n° 09/06651
Publication : Jurica
Extrait : « Attendu que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal a estimé que la clause prévue à l'article II-3 des conditions générales de l’ « Offre préalable de crédit accessoire ou non à ces contrats de vente, utilisable par fractions, et assortie d'une carte de crédit et d'avis de débit » proposée par la société anonyme Cétélem et acceptée le 2 juillet 2005 par M. X., clause intégralement reproduite ci-dessus, créait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, qu'elle constituait de ce fait une clause abusive, et qu'il l'a réputée non écrite (pages 4 à 6 du jugement) ; que contrairement à ce que prétend l'appelante, le fait que la clause litigieuse soit conforme au modèle type d'offre préalable de prêt n° 4 annexé à l’article R. 311-6 du code de la consommation n'a pas pour effet de lui conférer un caractère réglementaire qui interdirait aux juridictions de l'ordre judiciaire de la déclarer abusive ; qu'il convient d'ajouter que la décision du premier juge est conforme à l’avis n° 04-02 du 27 mai 2004 de la Commission des clauses abusives, dont l'appelante soutient à tort qu'il est erroné, ainsi qu'à l'avis n° 006 0006P du 10 juillet 2006 de la Cour de cassation ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement en ses dispositions relatives à la clause litigieuse ».
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION B
ARRÊT DU 8 MARS 2011
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 09/06651. Nature de la décision : AU FOND. Rédacteur : Monsieur Louis-Marie Cheminade, président. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 12 octobre 2009 (R.G. 11-09-014) par le Tribunal d'Instance de RUFFEC suivant déclaration d'appel du 23 novembre 2009,
APPELANTE :
SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis [adresse], Représentée par la SCP Claire LE BARAZER et Laurène D'AMIENS, Avoués Associés à la Cour, et assistée de Maître William MAXWELL, Avocat au barreau de BORDEAUX,
INTIMÉ :
Monsieur X.,
né le [date] à [ville], de nationalité française, demeurant [adresse], Représenté par la SCP Michel PUYBARAUD, Avoué à la Cour, et assisté de Maître Céline MOREAU, Avocat au barreau de la Charente, (Aide juridictionnelle totale numéro 2011/XX du [date])
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 2 février 2011 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Louis-Marie CHEMINADE, Président chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Monsieur Louis-Marie CHEMINADE, Président, Monsieur Pierre-Louis CRABOL, Conseiller, Monsieur Patrick BOINOT, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Marceline LOISON
ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu le jugement rendu le 12 octobre 2009 par le tribunal d'instance de Ruffec (16), qui a constaté que la clause stipulée à l'article II-3 des conditions générales d'un contrat de crédit du 26 avril 2004 et ainsi libellée :
« Découvert utile. L'emprunteur peut faire évoluer le découvert utile jusqu'au montant du découvert maximum autorisé à condition que, depuis l'ouverture du crédit ou la précédente augmentation du découvert utile, aucun des événements suivants ne soit survenu : a) survenance d'un cas de suspension du droit à découvert (voir article II-8 ci-dessous), b) évolution de la situation financière de l'emprunteur, c) usage des moyens d'utilisation du compte en violation des conditions du présent contrat. L'augmentation du découvert utile ne peut résulter du seul usage des moyens d'utilisation du compte et doit faire l'objet d'une demande expresse de l'emprunteur »
créait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, qui l'a en conséquence déclarée non écrite, qui a par ailleurs constaté que compte tenu du dépassement, pendant une durée supérieure à deux ans avant sa saisine, du découvert maximum autorisé à l'ouverture du compte de M. X., l'action de la société anonyme BNP Personal finance était forclose, qui l'a en conséquence déclarée irrecevable, qui a dit n'y avoir lieu de statuer sur une demande de délai de paiement présentée par M. X., qui a condamné la société BNP Personal finance aux dépens, et qui l'a déboutée d'une demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;
Vu la déclaration d'appel de la société BNP Personal finance du 23 novembre 2009 ;
Vu les conclusions de M. X., signifiées et déposées le 5 octobre 2010 ;
Vu les dernières écritures de l'appelante, signifiées et déposées le 24 décembre 2010 ;
Vu l'ordonnance de clôture du 19 janvier 2011 ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DISCUSSION :
Attendu que pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, la cour se réfère au jugement déféré (pages 2 et 3), qui en contient une relation précise et exacte ;
Attendu que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal a estimé que la clause prévue à l'article II-3 des conditions générales de l’ « Offre préalable de crédit accessoire ou non à ces contrats de vente, utilisable par fractions, et assortie d'une carte de crédit et d'avis de débit » proposée par la société anonyme Cétélem et acceptée le 2 juillet 2005 par M. X., clause intégralement reproduite ci-dessus, créait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, qu'elle constituait de ce fait une clause abusive, et qu'il l'a réputée non écrite (pages 4 à 6 du jugement) ; que contrairement à ce que prétend l'appelante, le fait que la clause litigieuse soit conforme au modèle type d'offre préalable de prêt n° 4 annexé à l’article R. 311-6 du code de la consommation n'a pas pour effet de lui conférer un caractère réglementaire qui interdirait aux juridictions de l'ordre judiciaire de la déclarer abusive ; qu'il convient d'ajouter que la décision du premier juge est conforme à l’avis n° 04-02 du 27 mai 2004 de la Commission des clauses abusives, dont l'appelante soutient à tort qu'il est erroné, ainsi qu'à l'avis n° 006 0006P du 10 juillet 2006 de la Cour de cassation ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement en ses dispositions relatives à la clause litigieuse ;
Attendu que c'est également avec raison que le tribunal a déclaré la société BNP Personal finance irrecevable en ses demandes pour cause de forclusion de son action, par application de l’article L. 311-37 alinéa 1 du code de la consommation ; qu'en effet, selon ce texte, en matière de crédit à la consommation, les actions en paiement engagées à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur « doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion » ; qu'en matière d'ouverture de crédit par découvert en compte reconstituable, le dépassement du découvert autorisé manifeste la défaillance de l'emprunteur et constitue le point de départ du délai biennal de forclusion ( Cour de cassation, 1re chambre civile, du 16 janvier 2007, pourvoi n° 06-11340, 25 avril 2007, pourvois n° 06-11805 et n° 06-12380, 12 juillet 2007, pourvoi n° 05-16712, 22 novembre 2007, pourvoi n° 05-17848) ; que le découvert autorisé s'entend du montant initialement convenu, appelé « découvert utile » dans l'offre acceptée par M. X., et non du découvert maximum autorisé (mêmes arrêts) ;
Attendu que pour critiquer la solution qui précède, la société BNP Personal finance fait valoir que « si l'on suit le raisonnement du tribunal d'instance de Ruffec, on devrait considérer que le prêteur aurait dû prononcer la déchéance du terme alors même que l'emprunteur était à jour du règlement des mensualités et qu'il n'avait fait qu'user d'une faculté que lui offre le contrat. C'est absurde » ; que toutefois, il n'est pas reproché à la société de crédit de ne pas avoir prononcé la déchéance du terme alors que l'emprunteur était à jour de ses mensualités, mais seulement de l'avoir laissé dépasser le montant d'un crédit consenti par découvert en compte, au-delà du montant initialement convenu, sans s'y opposer, alors qu'elle ne justifie d'aucune demande expresse de la part de l'intéressé, étant rappelé qu'une telle demande était formellement prévue par l'article II-3 des conditions générales de la convention ;
Attendu pour le surplus qu'il résulte de l'historique du compte versé aux débats que le 13 avril 2006, M. X. a utilisé son ouverture de crédit au-delà du montant initialement convenu de 600,00 euros, portant le débit de son compte à la somme de 784,47 euros, et que postérieurement, il n'a jamais ramené le solde débiteur à 600,00 euros au maximum, mais qu'il l'a au contraire constamment accru, jusqu'à atteindre 3.977,87 euros lors de sa dernière utilisation du crédit, le 12 juillet 2008 ; qu'il s'ensuit que c'est avec raison que le tribunal a estimé qu'à la date de l'assignation introductive d'instance, le 24 mars 2009, l'action de la société BNP Personal finance était atteinte par la forclusion biennale, prévue par l’article L. 311-37 alinéa 1 du code de la consommation et qu'il l'a déclarée irrecevable ; qu'il convient de confirmer le jugement sur ce point ;
Attendu que la société BNP Personal finance succombant en son appel, elle sera condamnée aux dépens de ce recours ; que par ailleurs, il serait inéquitable que M. X. conserve à sa charge la totalité des frais irrépétibles exposés par lui à l’occasion de cette affaire ; qu’il y a lieu de faire droit à sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR :
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Reçoit la société BNP Personal finance en son appel ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 12 octobre 2009 par le tribunal d'instance de Ruffec ;
Y ajoutant :
Condamne la société BNP Personal finance à payer à M. X. une somme de 1.500,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société BNP Personal finance aux dépens de l'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
Signé par Louis-Marie Cheminade, président, et par Marceline Loison, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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