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CA BORDEAUX (5e ch. civ.), 15 novembre 2010

Nature : Décision
Titre : CA BORDEAUX (5e ch. civ.), 15 novembre 2010
Pays : France
Juridiction : Bordeaux (CA), 5e ch.
Demande : 09/3227
Date : 15/11/2010
Nature de la décision : Annulation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 5/06/2009
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2891

CA BORDEAUX (5e ch. civ.), 15 novembre 2010 : RG n° 09/3227

Publication : Jurica

 

Extrait : « Au fond, la demande de la SAS WEB100T est fondée sur l’article 873 du Code de procédure civile qui donne compétence au Président du Tribunal de commerce pour accorder au créancier une provision ou pour ordonner l'exécution de l'obligation, dans le cas où l'existence de celle-ci n'est pas sérieusement contestable ;

La SA Clinique Saint Georges prétend que le délai contractuel de préavis fixé à 3 mois par l'article 10 des conditions générales est « parfaitement anormal » et que la clause le prévoyant est abusive ; et pour en justifier elle invoque l'article L. 132-1 du Code de la consommation et une préconisation de la Commission des clauses abusives qui recommande un délai de préavis de 3 mois ;

C'est à bon droit que la SAS WEB100T fait remarquer que la clause litigieuse est conforme à cette recommandation ;

Par ailleurs, l'article L. 132-1 du Code de la consommation ne comporte aucune indication relative au délai de préavis ».

 

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 15 NOVEMBRE 2010

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 09/3227. Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 26 mai 2009 par le juge des référés du Tribunal de Commerce de BORDEAUX (RG 2009R56) suivant déclaration d'appel du 5 juin 2009.

 

APPELANTE :

SA CLINIQUE SAINT GEORGES,

agissant en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social [adresse], représentée par la SCP GAUTIER & FONROUGE, avoués à la Cour, et assistée de Maître Valérie FOATA, avocat au barreau de NICE,

 

INTIMÉE :

SAS WEB100T,

prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social [adresse], représentée par la SCP CASTEJA-CLERMONTEL & JAUBERT, avoués à la Cour, et assistée de Maître Marie-Anne ESQUIE-BOCHEREAU substituant Maître Françoise FAURIE de la SELARL FRANCOISE FAURIE ET ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX,

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 4 octobre 2010 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine MASSIEU, Président, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Catherine MASSIEU, Président, Madame Béatrice SALLABERRY, Conseiller, Madame Caroline FAURE, Vice-Président placé, qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame Véronique SAIGE

ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

La SA Clinique Saint Georges et la SAS WEB100T ont signé le 27 janvier 2005 une convention d'assistance et de maintenance pour une durée d'un an, renouvelable par tacite reconduction, sauf dénonciation par l'une des parties 3 mois avant la date d'expiration de la période contractuelle en cours ;

Cette convention fait partie d'une convention dite « convention de signature unique » comprenant une licence de progiciel et un contrat de prestation de service applicatif ;

La SAS WEB100T a assigné la SA Clinique Saint Georges devant le Président du Tribunal de commerce de Bordeaux pour obtenir le paiement de la somme de 4.941,68 euros correspondant à la période courant à partir du 30 avril 2007 outre les intérêts au taux légal depuis le 20 mai 2008 et une indemnité de 1.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Par ordonnance du 10 mars 2009, le juge a ordonné la réouverture des débats pour qu'il soit débattu sur l'exception d'incompétence territoriale qu'il envisageait de soulever d'office ;

L'affaire a été renvoyée au 21 avril puis au 12 mai 2009 ;

Par ordonnance du 26 mai 2009, le juge des référés a retenu sa compétence territoriale, en application de la « convention de signature unique » du 27 janvier 2005 qui comporte une clause attributive de compétence au profit du Tribunal de commerce de Bordeaux (article 17) ; et au fond, il a fait droit à la demande principale de la SAS WEB100T et condamné la SA Clinique Saint Georges au paiement de 460 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens ;

Il a dit que la SA Clinique Saint Georges n'avait pas valablement résilié le contrat, et ne prouvait pas l'inexécution de ses obligations par la SAS WEB100T, et il a considéré que la créance de celle-ci n'était pas sérieusement contestable ;

Par déclaration remise au greffe de la cour le 5 juin 2009, la SA Clinique Saint Georges a relevé appel de cette décision ;

Par ordonnance du 12 août 2009, le magistrat de la cour délégué par le Premier Président, a rejeté la demande d'arrêt de l'exécution provisoire de l’ordonnance du 26 mai 2009 présentée par la SA Clinique Saint Georges, au motif d'une part que celle-ci avait pu conclure au fond et d'autre part qu'elle ne justifiait pas d'un risque de conséquences manifestement excessives dues à l'exécution ;

Par ses dernières conclusions du 5 octobre 2009, la SA Clinique Saint Georges demande à la cour de : prononcer la nullité de l'ordonnance du 26 mai 2009 au motif que le juge des référés ne pouvait se prononcer sur la compétence et sur le fond, sans avoir, au préalable, invité les parties à s'expliquer aussi sur le fond ;

A titre subsidiaire, elle demande de déclarer abusif l'article 10 des conditions générales du contrat de maintenance en application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, et en conséquence de dire que le contrat était résiliable à tout moment ;

Elle se prévaut aussi d'un courrier du 17 octobre 2007 aux termes duquel la SAS WEB100T a pris acte de sa décision de résilier sans délai le contrat, et a accepté de revoir le montant de la créance ;

En tout état de cause, elle conclut au débouté de toutes les demandes de la SAS WEB100T ;

Elle demande sa condamnation au paiement des dépens dont distraction au profit de son avoué et de la somme de 2.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Par ses dernières conclusions du 3 mars 2010, la SAS WEB100T demande à la cour de confirmer l’ordonnance du 26 mai 2009 en toutes ses dispositions, et sollicite 8.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile et la condamnation de la SA Clinique Saint Georges aux dépens dont distraction au profit de son avoué ;

Elle s'oppose à la demande d'annulation de l'ordonnance en faisant valoir que la SA Clinique Saint Georges a bénéficié de plusieurs renvois de l'affaire pour préparer sa défense, que la procédure est orale, et que par ordonnance du 12 août 2009 le Premier Président a rejeté la demande d'arrêt de l'exécution provisoire assortissant l'ordonnance au motif que la demanderesse ne justifiait pas d'une violation manifeste du principe du contradictoire ;

Elle conteste les moyens de fond invoqués par la SA Clinique Saint Georges ;

En cet état, une ordonnance de clôture a été rendue le 20 septembre 2010 ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

1. L'article 76 du Code de procédure civile dispose que le juge peut, dans un même jugement, mais par des dispositions distinctes, se déclarer compétent et statuer sur le fond du litige, sauf à mettre préalablement les parties en demeure de conclure sur le fond ;

Le juge qui entend statuer à la fois sur sa compétence et sur le fond doit donc préalablement mettre les parties en demeure de conclure au fond, si elles ne l'ont pas déjà fait ;

En l'espèce, la SA Clinique Saint Georges n'a pas comparu à la première audience, ayant donné lieu à l’ordonnance du 10 mars 2009 ;

Elle a déposé des conclusions écrites pour l'audience du 12 mai 2009, mais seulement pour se prévaloir de l'incompétence du juge des référés de Bordeaux ;

Il ne résulte ni de l’ordonnance du 26 mai 2009, ni d'aucune pièce de la procédure que les parties aient été invitées à conclure au fond, par écrit ou oralement ;

Le premier juge a donc méconnu les exigences posées par l’article 76 du Code de procédure civile et sa décision doit être annulée en ses dispositions au fond ;

En application de l’article 562 du Code de procédure civile selon lequel la dévolution s'opère pour le tout, notamment lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ; il y a lieu de statuer au fond, les deux parties ayant conclu ;

2. Au fond, la demande de la SAS WEB100T est fondée sur l’article 873 du Code de procédure civile qui donne compétence au Président du Tribunal de commerce pour accorder au créancier une provision ou pour ordonner l'exécution de l'obligation, dans le cas où l'existence de celle-ci n'est pas sérieusement contestable ;

La SA Clinique Saint Georges prétend que le délai contractuel de préavis fixé à 3 mois par l'article 10 des conditions générales est « parfaitement anormal » et que la clause le prévoyant est abusive ; et pour en justifier elle invoque l'article L. 132-1 du Code de la consommation et une préconisation de la Commission des clauses abusives qui recommande un délai de préavis de 3 mois ;

C'est à bon droit que la SAS WEB100T fait remarquer que la clause litigieuse est conforme à cette recommandation ;

Par ailleurs, l'article L. 132-1 du Code de la consommation ne comporte aucune indication relative au délai de préavis ;

Après un échange de courrier en 2005, la SA Clinique Saint Georges a notifié à la SAS WEB100T la résiliation du contrat pour le 1er mai 2007, par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 avril 2007, après avoir reçu la facture couvrant la période du 1er avril 2007 au 31 mars 2008 ;

Elle a réitéré sa position par lettre recommandée avec accusé de réception du 18 septembre 2007, ajoutant qu'elle estimait que le contrat était résilié depuis avril 2007, en raison des carences de son co-contractant dans l'exécution de son obligation de maintenance depuis 2006 ;

Dans une lettre du 17 octobre 2007, la SAS WEB100T se déclare prête à « revoir le montant » de sa facture pour sortir de cette situation « aussi désagréable pour l'un que pour l'autre », et elle propose de reprendre contact sous 15 jours ;

Les parties ne font état d'aucun arrangement particulier, et la SAS WEB100T a de nouveau réclamé le paiement intégral de la facture d'avril 2007 ;

Le contrat a été conclu le 27 janvier 2005, et tacitement reconduit chaque année ; les factures couvrent des périodes 1er avril-31 mars ;

La résiliation a été dénoncée le 26 avril 2007 ; compte tenu d'un délai de préavis de 3 mois, elle ne pourrait concerner que la période commençant en avril 2008 ;

La facture litigieuse concernant la période avril 2007- mars 2008 est donc due ;

La SA Clinique Saint Georges invoque un manquement de la SAS WEB100T dans ses obligations qui justifierait la résiliation immédiate du contrat ;

Elle fait état à cet effet de l'article 12 (en réalité 13), des conditions générales qui prévoit une résiliation immédiate, mais à condition que le co-contractant défaillant ait été mis en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception octroyant un délai calendaire de 30 jours pour respecter ses engagements ;

La lettre recommandée avec accusé de réception du 26 avril 2007 faisant état d'une résiliation pour le 1er mai suivant ne respecte pas le délai de 1 mois et ne peut justifier une résiliation fondée sur cette clause ;

Les lettres recommandées avec accusé de réception des 18 septembre et 4 octobre 2007 se réfèrent à la lettre d'avril 2007 et font état d'une résiliation acquise à cette date ;

La SA Clinique Saint Georges qui n'a pas respecté la procédure contractuelle de l'article 13, ne peut donc se prévaloir d'une résiliation du contrat à partir d'avril 2007, pour non respect de ses engagements par la SAS WEB100T ;

En définitive, la créance de la SAS WEB100T apparaît non sérieusement contestable, et il convient de condamner la SA Clinique Saint Georges au paiement de la facture de 4.941,68 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2008, date de la lettre recommandée avec accusé de réception point de départ demandant ce paiement, point de départ non contesté par la SA Clinique Saint Georges ;

Il doit être fait application de l’article 700 du Code de procédure civile au bénéfice de la SAS WEB100T ;

Vu les articles 695 et suivants du Code de procédure civile relatifs aux dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant en dernier ressort,

Annule l'ordonnance de référé du Président du Tribunal de commerce de Bordeaux en date du 26 mai 2009,

Evoquant,

Condamne la SA Clinique Saint Georges à payer à la SAS WEB100T la somme de 4.941,68 euros,

La condamne au paiement des intérêts au taux légal de cette somme à compter du 20 mai 2008 et jusqu'à complet règlement,

La condamne à payer à la SAS WEB100T la somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile,

La condamne aux dépens dont distraction au profit de la SAS Casteja-Clermontel et Jaubert, avoués.

Le présent arrêt a été signé par Madame Catherine Massieu, présidente, et par Madame Véronique Saige, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire