CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

T. COM. PARIS (2e ch.), 12 mars 2002

Nature : Décision
Titre : T. COM. PARIS (2e ch.), 12 mars 2002
Pays : France
Juridiction : TCom Paris. 2e ch.
Demande : 2000/046116
Date : 12/03/2002
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 29/05/2000
Imprimer ce document

 

CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 309

T. COM. PARIS (2e ch.), 12 mars 2002 : RG n° 2000/046116

Publication : Juris-Data n° 176650

 

Extrait  : « L'article L. 132-1 du code de la consommation caractérise comme abusive les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations de chacun. Le contrat comporte les causes classiques des contrats de location financière, en particulier la responsabilité du locataire dans le choix du matériel, et la possibilité de résiliation en cas de résolution de la vente du matériel ou au choix du seul bailleur en cas de défaillance du locataire. SECRE n'a pas mis en cause le choix du matériel loué qui aurait pu lui être recommandé par KJS en abusant de sa qualité de professionnel. La clause de résiliation n'est nullement discrétionnaire mais liée à des faits extérieurs à KJS. Comme dans tout contrat le prix a été discuté librement entre les deux parties et ne saurait être remis en cause après plusieurs années.

Une page du contrat rédigée en caractères très lisibles attire l'attention du locataire sur l'importance qu'il y a à bien prendre connaissance des diverses clauses rédigées en petits caractères. SECRE ne peut dans ces conditions arguer de l'incompétence juridique du secrétaire du CE qui a signé le contrat pour prétendre que sa bonne foi a été surprise ; il lui appartenait en cas de doute de prendre conseil.

Le Tribunal considère donc que le contrat ne contient pas de clauses abusives, que la bonne foi de SECRE n'a pas non plus été abusée, et donc que la résiliation unilatérale est abusive. »

 

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

SEPTIÈME CHAMBRE

JUGEMENT DU 12 MARS 2002

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 2000046116.

ENTRE :

PARTIE DEMANDERESSE :

LE COMITE D'ENTREPRISE DE LA SOCIETE SECRE ALPINE ELECTRONICS

 société anonyme - siège social [adresse], assistée de Maître Yadhira STOYANOVITCH Avocat et comparant par Maître Hugues de GASPARY Avocat, [adresse],

ET :

PARTIE DEFENDERESSE :

SOCIETE KJS HORS DOMICILE venant aux droits des sociétés MAXPAX SERVICES

société en nom collectif - siège social [adresse], et MAXPAX FRANCE Division de KRAFT JACOBS SUCHARD HORS DOMICILE - société anonyme - siège social [adresse] - assistée de Maître PIN Avocat et comparant par Maître ORTOLLAND Avocat, D897

 

L'ACTIVITÉ JURIDICTIONNELLE A ÉTÉ SUSPENDUE DU 19 FÉVRIER AU 26 MARS 2001. PAR RÉUNION EXTRAORDINAIRE DU 26 MARS 2001, LE TRIBUNAL A DÉCIDÉ LA REPRISE DE CETTE ACTIVITÉ A PARTIR DU 27 MARS 2001. LES PARTIES AYANT ÉTÉ AVISÉES.

APRES EN AVOIR DÉLIBÉRÉ

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LES FAITS :

Par contrat du 18 NOVEMBRE 1997, MAXPAX SERVICES a donné en location au COMITE D'ENTREPRISE DE SECRE ALPINE ELECTRONICS (SECRE) un distributeur automatique de boissons ; un contrat de maintenance a été conclu avec MAXPAX FRANCE le 30 JUIN 1999. Estimant abusif le premier contrat, SECRE en a demandé la résiliation amiable, puis a notifié par lettre recommandée avec accusé de réception le 23 FEVRIER 2000 la résiliation. MAXPAX n'a pas fait droit à ces demandes et a mis en demeure SECRE de lui régler les sommes contractuelles.

MAXPAX SERVICES et MAXPAX FRANCE sont aujourd'hui réunis dans la société dénommée KJS HORS DOMICILE (KJS).

 

LA PROCÉDURE :

Le 29 MAI 2000 SECRE assigne MAXPAX SERVICES et MAXPAX FRANCE pour voir prononcée la résiliation judiciaire du contrat compte tenu de son caractère abusif et les voir condamnées solidairement à lui payer 8.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, les dépens [minute page 2] étant requis. Dans ses conclusions du 21 SEPTEMBRE 2001 elle porte à 10.000 Francs la somme demandée au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et demande la condamnation solidaire de KJS.

Dans ses conclusions récapitulatives du 23 NOVEMBRE 2001, KJS demande de débouter SECRE de toutes ses demandes, de la condamner à lui payer 57.172 Francs au titre des loyers échus avec intérêts de retard contractuels, 27.521,06 Francs au titre de l'indemnité de résiliation, 1.701,58 Francs à titre de pénalité, 6.994 Francs en règlement d'une facture et les intérêts au taux légal sur 41.042,12 Francs à compter du 7 AVRIL 2000, date de la mise en demeure, avec anatocisme, 10.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, l'exécution provisoire étant requise.

 

LES MOYENS :

SECRE estime que le contrat de location entre dans le champ d'application de l'article 132-1 du code de la consommation protégeant les non professionnels. KJS n'a dans le cadre de ce contrat aucune obligation. Il contient des clauses abusives, en particulier le droit de résiliation n'existe qu'au bénéfice de KJS et de façon discrétionnaire. De plus, le prix de location consenti est largement supérieur au prix d'achat neuf du matériel, y compris en leasing.

KJS se réfère aux clauses explicites du contrat.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DISCUSSION :

Sur les circonstances de la résiliation du contrat par SECRE :

Le contrat s'est normalement exécuté, pendant plus de deux ans sans contestation ni sur le prix ni sur le service rendu par le matériel. Dans sa lettre du 18 NOVEMBRE 1999, SECRE avise KJS qu'il doit résilier le contrat, « en effet, le comité central nous impose un même et seul distributeur de boissons pour tous les comités d'entreprise appartenant au groupe ».

Il apparaît donc au Tribunal que les motifs invoqués dans ses écritures par SECRE pour rompre prématurément le contrat ont été construits pour justifier a posteriori la décision prise.

 

Sur le caractère abusif allégué du contrat de location :

L'article L. 132-1 du code de la consommation caractérise comme abusive les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations de chacun. Le contrat comporte les causes classiques des contrats de location financière, en particulier la responsabilité du locataire dans le choix du matériel, et la possibilité de résiliation en cas de résolution de la vente du matériel ou au choix du seul bailleur en cas de défaillance du locataire.

[minute page 3] SECRE n'a pas mis en cause le choix du matériel loué qui aurait pu lui être recommandé par KJS en abusant de sa qualité de professionnel. La clause de résiliation n'est nullement discrétionnaire mais liée à des faits extérieurs à KJS. Comme dans tout contrat le prix a été discuté librement entre les deux parties et ne saurait être remis en cause après plusieurs années.

Une page du contrat rédigée en caractères très lisibles attire l'attention du locataire sur l'importance qu'il y a à bien prendre connaissance des diverses clauses rédigées en petits caractères. SECRE ne peut dans ces conditions arguer de l'incompétence juridique du secrétaire du CE qui a signé le contrat pour prétendre que sa bonne foi a été surprise ; il lui appartenait en cas de doute de prendre conseil.

Le Tribunal considère donc que le contrat ne contient pas de clauses abusives, que la bonne foi de SECRE n'a pas non plus été abusée, et donc que la résiliation unilatérale est abusive.

 

Sur la date de résiliation du contrat :

Le contrat a été résilié, abusivement, par SECRE le 23 FEVRIER 2000. KJS indique dans sa facture du 7 JUIN concernant les indemnités de rupture, que le contrat a été résilié le 20 NOVEMBRE 1999, date de la première échéance impayée.

Le contrat prévoit qu'en cas de défaillance du locataire la résiliation intervient huit jours après la mise en demeure qui est du 7 AVRIL 2000. Le Tribunal fixera en conséquence la date de résiliation du contrat au 15 AVRIL 2000, soit au bout de 28 mois sur une durée totale de 63 mois.

 

Sur les sommes dues à KJS :

KJS a pour activité, entre autres, la location ou la mise à disposition de ses clients des machines du type de celle louée à SECRE, il dispose donc après la résiliation du contrat de la faculté de relouer celle-ci. Son préjudice ne saurait excéder, du fait de la résiliation abusive, 12 mois de loyer. L'indemnité de résiliation s'analysant comme une clause pénale, le Tribunal usant de son pouvoir d'appréciation, limitera à cette somme le montant dû par SECRE au titre de l'indemnité de résiliation.

Il condamnera en conséquence SECRE à payer à KJS en deniers ou quittance valable :

1) les loyers impayés de NOVEMBRE à MARS soit 5 x 2.931,58 = 14.657,90 Francs majorés de la TVA et d'intérêts de retard au taux contractuel à compter du 18 JANVIER 2000 date moyenne de paiement normale avec anatocisme

2) à titre d'indemnité de résiliation 12 x 2.931,58 = 35.178,96 Francs avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 7 AVRIL 2000 avec anatocisme

3) au titre de la facture du contrat de maintenance du 9 SEPTEMBRE 1996 6.994,80 Francs TTC.

[minute page 4]

Sur l'exécution provisoire :

Attendu que le Tribunal l'estime nécessaire, vu la nature de l'affaire, il y a lieu de l'ordonner sans constitution de garantie.

 

Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :

Attendu que la société KJS réclame une somme de 10.000,00 Francs à la société SECRE ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société KJS les frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'exposer pour organiser sa défense ;

Au vu des éléments fournis le Tribunal lui accordera 5.000,00 Francs de ce chef (déboutant pour le surplus).

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal, statuant publiquement en premier ressort par jugement contradictoire,

Condamne le COMITE D'ENTREPRISE DE LA SOCIETE SECRE ALPINE ELECTRONICS à payer à la société KJS HORS DOMICILE, venant aux droits des sociétés MAXPAX SERVICES et MAXPAX FRANCE Division de KRAFT JACOBS SUCHARD HORS DOMICILE, 2.234,58 euros (soit 14.657,90 Francs) majorés de la TVA applicable et d'intérêts de retard au taux contractuel à compter du 18 JANVIER 2000 et anatocisme.

Condamne le COMITE D'ENTREPRISE DE LA SOCIETE SECRE ALPINE ELECTRONICS à payer à la société KJS HORS DOMICILE, venant aux droits des sociétés MAXPAX SERVICES et MAXPAX FRANCE Division de KRAFT JACOBS SUCHARD HORS DOMICILE, 5.363 euros (soit 35.178,96 Francs) majorés de la TVA applicable, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 7 AVRIL 2000 et anatocisme.

Condamne le COMITE D'ENTREPRISE DE LA SOCIETE SECRE ALPINE ELECTRONICS à payer à la société KJS HORS DOMICILE, venant aux droits des sociétés MAXPAX SERVICES et MAXPAX FRANCE Division de KRAFT JACOBS SUCHARD HORS DOMICILE, 1.066,35 euros TTC (soit 6.994,80 Francs) avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 7 AVRIL 2000 et anatocisme.

Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement sans constitution de garantie.

Condamne le COMITE D'ENTREPRISE DE LA SOCIETE SECRE ALPINE ELECTRONICS à payer à la société KJS HORS DOMICILE, venant aux droits des sociétés MAXPAX SERVICES et MAXPAX FRANCE Division de KRAFT JACOBS SUCHARD HORS DOMICILE, 762,25 euros (soit 5.000 Francs) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Condamne le COMITE D'ENTREPRISE DE LA SOCIETE SECRE ALPINE ELECTRONICS aux dépens, dont ceux à recouvrer par le Greffe liquidés à la somme de 39,05 euros TTC (app 1.91 ; aff 3.78 ; émoi 27.27 ; TVA 6.09).

[minute page 5] CONFIE lors de l’audience du 2 NOVEMBRE 2001 à Monsieur CORPET en qualité de juge rapporteur

Mis en délibéré le 23 NOVEMBRE 2001

DELIBÉRÉ par Messieurs MENAT, CORPET et MARTINAUD et prononcé à l’audience publique où siégeaient : Monsieur CAVROIS, Président, Messieurs MIFFRE, CORPET, MARTINAUID et D’HAUTFOEUILLE, Juges, assistés de Monsieur LOFF, Greffier.

Les parties en ayant été préalablement avisées.

La minute du jugement est signée par le Président du délibéré et le Greffier.