TI CHARLEVILLE-MÉZIERES, 25 février 2008
CERCLAB - DOCUMENT N° 3661
TI CHARLEVILLE-MÉZIERES, 25 février 2008 : RG n° 11-07-000559 ; jugt n° 53
(sur appel CA Reims (1re ch. civ. sect. inst.), 8 avril 2009 : RG n° 08/00862)
Extraits : 1/ « Attendu que l'article L. 141-4 du Code de la consommation prévoit que le juge peut soulever d'office toutes les dispositions du présent Code dans les litiges nés de son application ;
Attendu que l'article L. 132-1 du Code de la consommation prévoit que dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;
Attendu que le contrat stipule que la résiliation du contrat peut être effective en cas de saisine d'une commission de surendettement ;
Qu'ainsi, d'une part, est manifestement abusive la clause litigieuse que le préteur insère dans le contrat de crédit ; Que cette clause crée ainsi un déséquilibre significatif entre les parties puisqu'elle alourdit les obligations de l'emprunteur et augmente les droits du préteur ; Qu'ainsi, cette clause est une clause abusive qui justifie le fait pour le Tribunal de relever d'office son caractère abusif et de la soumettre à la contradiction ;
Que d'autre part, la clause est aussi illicite puisqu'elle aggrave indûment les obligations de l'emprunteur (Cass. 1ère civ., 1er décembre 1993 : pourvoi n° 91-20.894 ; Bull civ, I, n° 354, p. 246) puisqu'il doit rembourser non seulement les sommes empruntées mais aussi d'autres sommes à titre de sanction ou de réparation ; Qu'il en résulte que l'irrégularité de la clause litigieuse a pour sanction, la déchéance du droit aux intérêts (en ce sens et sur l'ensemble de la question, rapport du Conseiller RICHARD, sous avis Cass. 10 juillet 2006 : BICC 1er novembre 2006, p. 43) ; Qu'en effet, lorsque la clause est à la fois illicite et abusive, le cumul de sanctions est dès lors possible et la sanction encourue est la déchéance du droit aux intérêts ».
2/ « Que la sanction d'une clause illicite est la déchéance du droit aux intérêts, le crédit devient à titre gratuit, seul le capital est dû ; Que le Tribunal a demandé au préteur un décompte des intérêts déjà payés ; Qu'en refusant de produire un décompte des intérêts déjà payés qui viendront en déduction du principal, le préteur fait obstacle au prononcé d'une décision de justice ; Qu'en refusant de produire les documents demandés, le préteur a contrevenu aux dispositions de l'article 11 du Nouveau Code de procédure civile qui prévoit que « les parties sont tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction sauf au juge à tirer toute conséquence d'une abstention ou d'un refus » ;
Qu'en l'espèce, et eu égard aux éléments précédemment indiqués, il convient par conséquent de débouter de sa demande, la SA BANQUE ACCORD à qui il n'appartient pas d'apprécier le bien fondé des documents demandés par le Tribunal mais seulement de faire valoir ses prétentions par une argumentation adaptée ».
TRIBUNAL D’INSTANCE DE CHARLEVILLE MEZIERES
JUGEMENT DU 25 FÉVRIER 2008
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-07-000559. Jugement n° 53.
A l'audience publique du Tribunal d'Instance tenue le 25 février 2008, Sous la Présidence de Jean-Jacques FRION, Juge d'Instance, assisté de Florence KER-SUZAN, Greffier ; Après débats à l'audience du 21 janvier 2008, le jugement suivant a été rendu :
ENTRE :
DEMANDEUR :
BANQUE ACCORD
[adresse], représentée par SCP DESLANDES-DOMBECK, avocat du barreau des Ardennes
ET :
DÉFENDEUR :
Monsieur X.
Sans domicile connu, non comparant
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par contrat du 21 août 2006, la SA BANQUE ACCORD a consenti à M. X. une offre de crédit pour un montant de 1.200 € au taux effectif global de 18,69 %.
Le contrat prévoit que M. X. demande à être titulaire d'une carte bancaire MASTERCARD et avoir pris connaissance et possession des conditions de fonctionnement de la carte.
M. X. s'est montré défaillant dans le remboursement des mensualités.
Par acte du 6 août 2007, la SA BANQUE ACCORD a fait assigner M. X. aux fins de le voir condamner à lui payer la somme de 22.372,15 € assortie des intérêts à compter du 19 février 2007, la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, voir ordonner l'exécution provisoire et le condamner aux dépens.
La SA BANQUE ACCORD fait valoir que, bien que le crédit soit limité pendant 6 mois à la première fraction de 1.200 €, il a effectué plusieurs opérations dépassant largement le crédit qui s'est élevé à la somme de [minute page 2] 52.830,15 € le 19 février 2007. Compte tenu de l'annulation de la somme de 30.458 €, la SA BANQUE ACCORD estime que M. X. lui doit la différence.
Régulièrement assigné selon les modalités de l'article 659 du Nouveau Code de procédure civile, M. X. n'a pas comparu.
Par jugement du 1er octobre 2007, le Tribunal a rouvert les débats à l'audience du 5 novembre 2007 aux fins d'inviter le préteur à :
- préciser le fondement de sa demande,
- produire un décompte détaillé de ses demandes,
- justifier du contrat d'ouverture du compte de dépôt, d'une part, le cas échéant, des conséquences juridiques à la suite de 3 soldes consécutifs débiteurs d'autre part, et en tout état de cause, d'un décompte faisant apparaître les intérêts déjà payés,
- sur le compte permanent :
* s'expliquer sur la clause « 10) Résiliation, suspension : 10.1 Banque ACCORD se réserve le droit de prononcer, après information préalable de l'emprunteur, la résiliation du contrat de crédit dans les cas suivants : (...) Saisie d'une commission de surendettement » au regard, d'une part, des clauses abusives prohibées que le juge est autorisé à relever d'office et, d'autre part, des clauses aggravantes qui constituent une irrégularité de l'offre susceptible d'entraîner la déchéance du droit aux intérêts, - produire en tout état de cause, un décompte des intérêts déjà payés.
La SA BANQUE ACCORD fait valoir qu'elle n'a conclu aucun compte de dépôt, que sa demande n'est pas forclose. De plus, à supposer que la clause litigieuse soit abusive, ce qui n'est pas le cas, elle n'annule pas le contrat, la clause ne s'applique pas. En tout état de cause, elle ne demande pas l'application de cette clause.
M. X. n'a pas comparu.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LES MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur le droit applicable :
Attendu que l'article L. 311-3 du Code de la consommation prévoit que sont exclus du champ d'application du présent chapitre (...) 3° les prêts dont le montant est supérieur à une somme qui sera fixée par décret, en l'espèce, 21.500 € ;
Qu'en cas d'ouverture de crédit indéterminée, ce qui est le cas en l'espèce, le montant du crédit qu'il convient d'apprécier au regard du plafond de 21.500 € est celui du découvert atteint à l'issue des trois premiers mois d'utilisation de la faculté offerte au client, peu importe que le découvert ait excédé, à la date de la clôture, ce plafond
Que le contrat ayant été conclu le 21 juillet 2007, le solde au 25 septembre est de 1.658,12 €, au 25 octobre 2007 est de 89,99 € et de 0 € au 24 novembre 2007 ;
Qu'il en résulte que le droit du crédit à la consommation s'applique ;
Sur la clause abusive et illicite :
Attendu que l'article L. 141-4 du Code de la consommation prévoit que le juge peut soulever d'office toutes les dispositions du présent Code dans les litiges nés de son application ;
[minute page 3] Attendu que l'article L. 132-1 du Code de la consommation prévoit que dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;
Attendu que le contrat stipule que la résiliation du contrat peut être effective en cas de saisine d'une commission de surendettement ;
Qu'ainsi, d'une part, est manifestement abusive la clause litigieuse que le préteur insère dans le contrat de crédit ; Que cette clause crée ainsi un déséquilibre significatif entre les parties puisqu'elle alourdit les obligations de l'emprunteur et augmente les droits du préteur ; Qu'ainsi, cette clause est une clause abusive qui justifie le fait pour le Tribunal de relever d'office son caractère abusif et de la soumettre à la contradiction ;
Que d'autre part, la clause est aussi illicite puisqu'elle aggrave indûment les obligations de l'emprunteur (Cass. 1ère civ., 1er décembre 1993 : pourvoi n° 91-20.894 ; Bull civ, I, n° 354, p. 246) puisqu'il doit rembourser non seulement les sommes empruntées mais aussi d'autres sommes à titre de sanction ou de réparation ; Qu'il en résulte que l'irrégularité de la clause litigieuse a pour sanction, la déchéance du droit aux intérêts (en ce sens et sur l'ensemble de la question, rapport du Conseiller RICHARD, sous avis Cass. 10 juillet 2006 : BICC 1er novembre 2006, p. 43) ; Qu'en effet, lorsque la clause est à la fois illicite et abusive, le cumul de sanctions est dès lors possible et la sanction encourue est la déchéance du droit aux intérêts ;
III - Sur la dette de crédit :
Attendu que la créance doit arrêtée comme suit :
- mensualités impayées en capital : 51.682,34 €
- intérêts échus et assurance : 1.147,81 €
- indemnité légale de 8% : 964,57 €
- annulation de créance : 30.458,00 €
Que la sanction d'une clause illicite est la déchéance du droit aux intérêts, le crédit devient à titre gratuit, seul le capital est dû ; Que le Tribunal a demandé au préteur un décompte des intérêts déjà payés ;
Qu'en refusant de produire un décompte des intérêts déjà payés qui viendront en déduction du principal, le préteur fait obstacle au prononcé d'une décision de justice ; Qu'en refusant de produire les documents demandés, le préteur a contrevenu aux dispositions de l'article 11 du Nouveau Code de procédure civile qui prévoit que « les parties sont tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction sauf au juge à tirer toute conséquence d'une abstention ou d'un refus » ;
Qu'en l'espèce, et eu égard aux éléments précédemment indiqués, il convient par conséquent de débouter de sa demande, la SA BANQUE ACCORD à qui il n'appartient pas d'apprécier le bien fondé des documents demandés par le Tribunal mais seulement de faire valoir ses prétentions par une argumentation adaptée ;
Sur les autres demandes :
Attendu qu'en application de l'article 515 du Code civil, l'exécution provisoire est compatible et apparaît nécessaire avec la nature de l'affaire ; Qu'il y a lieu de l'ordonner ;
[minute page 4] Attendu que la partie demanderesse succombant à la procédure, elle sera condamnée aux dépens ;
Attendu que sa demande fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile sera par conséquent rejetée
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et susceptible d'appel
Déboute la demande de la SA BANQUE ACCORD.
Ordonne l'exécution provisoire de l'intégralité de la décision.
Déboute la SA BANQUE ACCORD de sa demande fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamne SA BANQUE ACCORD aux dépens.
LE GREFFIER, LE JUGE D'INSTANCE,
Florence KER-SUZAN JEAN-JACQUES FRION
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