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TI LILLE, 20 novembre 2006

Nature : Décision
Titre : TI LILLE, 20 novembre 2006
Pays : France
Juridiction : Lille (TI)
Demande : 06-003406
Décision : 3406/06
Date : 20/11/2006
Nature de la décision : Irrecevabilité
Date de la demande : 20/09/2006
Décision antérieure : CA DOUAI (8e ch. 1re sect.), 7 février 2008
Numéro de la décision : 3406
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3740

TI LILLE, 20 novembre 2006 : RG n° 06-003406 ; jugt n° 3406/06

(sur appel CA Douai (8e ch. sect. 1), 7 février 2008 : RG n° 07/00111)

 

Extrait : « Dans son arrêt du 21 novembre 2002 (Cofidis c/ Fredout), la Cour de Justice des communautés européennes a reconnu la possibilité pour le juge de soulever d'office le caractère abusif d'une clause insérée dans un contrat de crédit et que la forclusion biennale n'était pas opposable à un tel moyen.

En l'espèce l'article II 3 de l'offre préalable stipule […]. En premier lieu, il convient de constater que contrairement aux affirmations de la SA CETELEM, l'offre ne prévoit pas des fractions périodiquement disponibles, mais une variation du montant prêté sans périodicité définie. La clause n'est donc pas conforme aux modèles types.

En second lieu, cette clause, aux termes de laquelle le montant de l'ouverture de crédit fixé initialement peut être dépassé avec l'accord du prêteur en fonction des tirages de l'emprunteur, ne prévoit pas que l'augmentation du montant du découvert doit être réalisée dans les termes d'une nouvelle offre préalable, qui doit être acceptée par l'emprunteur et qui ouvre une faculté de rétractation. Elle conduit donc à éluder l'obligation pour le prêteur de délivrer une nouvelle offre pour chaque nouveau crédit que constitue l'augmentation du montant du crédit initial, et la faculté d'ordre public pour l'emprunteur de rétracter son acceptation. Ainsi, elle crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur. En conséquence, elle doit être déclarée abusive et, de ce fait, se trouve réputée non écrite par application de l'article L. 132-1 du code de la consommation (Commission des clauses abusives, Avis 04-02 et 04-03 du 27 mai 2004, avis de la Cour de cassation du 10 juillet 2006).

Le montant initial du crédit autorisé, de 15.000 F., a été dépassé au mois d'octobre 2001, l'historique de compte montre que le dépassement n'a jamais été régularisé et qu'au contraire la situation n'a cessé de s'aggraver. Ce dépassement du plafond constitue un incident de paiement manifestant la défaillance de l'emprunteur, laquelle ne peut être regardée comme utilement effacée par l'octroi de crédit complémentaire dans des conditions irrégulières au regard de la législation en la matière (Civ. 1re, 30 mars 2005 : Bull. I, n° 159) ; L'assignation ayant été délivrée le 20 septembre 2006, soit plus de 2 ans après le premier incident de paiement non régularisé. En conséquence, l'action de la SA CETELEM doit être déclarée forclose. »

 

TRIBUNAL D’INSTANCE DE LILLE

JUGEMENT DU 20 NOVEMBRE 2006

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 06-003406. Jugement n° 3406/06

 

DEMANDEUR(S) :

SA CETELEM

[adresse], représenté (e) par Maître DEFFRENNES Francis, avocat du barreau de LILLE

 

DÉFENDEUR(S) :

Monsieur X.

[adresse], non comparant

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Emilie PECQUEUR

Greffier : Dominique DEBRUYNE

DÉBATS : Audience publique du : 16 octobre 2006

JUGEMENT : réputé contradictoire, en premier ressort, rendu le 20 novembre 2006, par Emilie PECQUEUR, Président, assisté de Dominique DEBRUYNE, Greffier, par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] OBJET DU LITIGE :

Suivant offre préalable en date du 13 janvier 2001, la SA CETELEM a consenti à Monsieur X. une ouverture de crédit utilisable par fractions et remboursable par échéances mensuelles fixées en fonction du solde dû, le taux effectif global de 15,96 % lors de la souscription du contrat étant révisable suivant les variations en plus ou en moins du taux de base que le prêteur applique aux opérations de même nature.

Alléguant le défaut de paiement des échéances mensuelles, la SA CETELEM a fait citer Monsieur X. devant ce tribunal par acte d'huissier en date du 20 septembre 2006, en paiement des sommes suivantes :

- 5.395,25 €, outre les intérêts au taux du contrat jusqu'à parfait paiement à compter du 7 février 2006, au titre du prêt impayé,

- 458 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La SA CETELEM sollicite en outre l'exécution provisoire de la présente décision.

Monsieur X., assigné à par dépôt de l'acte à l'étude, n'a pas comparu.

A l'audience, le tribunal soulève le caractère abusif de la clause de variation du capital et la forclusion de l'action en découlant.

En réponse, la SA CETELEM conclut à l'entier bénéfice de son acte introductif d'instance. En premier lieu, elle rappelle que la juridiction n'est pas tenue de suivre l'avis de la commission des clauses abusives, que l'offre est conforme aux dispositions du code de la consommation, qui prévoit la possibilité de déterminer des fractions périodiquement disponible dans le cadre des crédits utilisables par fractions, et que dès lors que cette clause est conforme aux modèles réglementaires, le tribunal ne peut la déclarer abusive sans méconnaître la séparation des pouvoirs. Elle expose qu'en tout état de cause, la qualification de clause abusive ne convient pas, et que l'abus est inexistant, qu'en effet, il ressort de l'avis que la clause est ambiguë, qu'en réalité, c'est une prétendue irrégularité formelle que soulève le tribunal à travers cette clause, et que la notion d'abus ne peut porter sur la forme des contrat. Elle estime que le tribunal cherche à réglementer une pratique, et non à sanctionner une clause. Elle rappelle in fine que si le caractère abusif de la clause était retenue, la seule sanction possible serait de la réputer non écrite, et non de prononcer une déchéance du droit aux intérêts.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le caractère abusif de la clause de variation du capital et la forclusion de l'action :

Selon l'article 472 du nouveau code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparait pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

L'article 125 du nouveau code de procédure civile fait obligation au juge de relever d'office les fins de non-recevoir lorsqu'elles revêtent un caractère d'ordre public.

Aux termes de l'article L. 311-37 du code de la consommation, l'action en paiement née d'un contrat de crédit à la consommation doit être engagée dans le délai de deux ans qui suit l'événement qui lui a donné naissance.

[minute page 3] Conformément à la règle selon laquelle le point de départ à l'expiration duquel une action ne peut plus être exercée, se situe nécessairement à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, le délai biennal de forclusion prévu par l'article L. 311-37 du code de la consommation court, dans le cas d'une ouverture de crédit, d'un montant déterminé et reconstituable, assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, à compter du moment où le montant du dépassement maximum convenu n'est pas régularisé, cette situation constituant un incident qui caractérise la défaillance de l'emprunteur.

Dans son arrêt du 21 novembre 2002 (Cofidis c/ Fredout), la Cour de Justice des communautés européennes a reconnu la possibilité pour le juge de soulever d'office le caractère abusif d'une clause insérée dans un contrat de crédit et que la forclusion biennale n'était pas opposable à un tel moyen.

En l'espèce l'article II 3 de l'offre préalable stipule d'une part que l'offre de crédit est faite aux conditions suivantes, à savoir que le prêteur autorise l'emprunteur à tirer sur son compte dans la limite de 50.000 F., et que le montant choisi par l'emprunteur dans ce maximum constitue le découvert utile, et d'autre part en son article 3 b que l'emprunteur peut faire évoluer le découvert utile jusqu'au montant du découvert maximum autorisé à conditions que depuis l'ouverture de crédit ou la précédente augmentation de découvert, un certain nombre d'événements ne se soient pas produits.

En premier lieu, il convient de constater que contrairement aux affirmations de la SA CETELEM, l'offre ne prévoit pas des fractions périodiquement disponibles, mais une variation du montant prêté sans périodicité définie. La clause n'est donc pas conforme aux modèles types.

En second lieu, cette clause, aux termes de laquelle le montant de l'ouverture de crédit fixé initialement peut être dépassé avec l'accord du prêteur en fonction des tirages de l'emprunteur, ne prévoit pas que l'augmentation du montant du découvert doit être réalisée dans les termes d'une nouvelle offre préalable, qui doit être acceptée par l'emprunteur et qui ouvre une faculté de rétractation. Elle conduit donc à éluder l'obligation pour le prêteur de délivrer une nouvelle offre pour chaque nouveau crédit que constitue l'augmentation du montant du crédit initial, et la faculté d'ordre public pour l'emprunteur de rétracter son acceptation. Ainsi, elle crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur.

En conséquence, elle doit être déclarée abusive et, de ce fait, se trouve réputée non écrite par application de l'article L. 132-1 du code de la consommation (Commission des clauses abusives, Avis 04-02 et 04-03 du 27 mai 2004, avis de la Cour de cassation du 10 juillet 2006).

Le montant initial du crédit autorisé, de 15.000 F., a été dépassé au mois d'octobre 2001, l'historique de compte montre que le dépassement n'a jamais été régularisé et qu'au contraire la situation n'a cessé de s'aggraver. Ce dépassement du plafond constitue un incident de paiement manifestant la défaillance de l'emprunteur, laquelle ne peut être regardée comme utilement effacée par l'octroi de crédit complémentaire dans des conditions irrégulières au regard de la législation en la matière (Civ. 1re, 30 mars 2005 : Bull. I, n° 159).

L'assignation ayant été délivrée le 20 septembre 2006, soit plus de 2 ans après le premier incident de paiement non régularisé. En conséquence, l'action de la SA CETELEM doit être déclarée forclose.

 

Sur les dépens et l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Partie perdante, la SA CETELEM sera condamnée aux dépens, et déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute pate 4] PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort :

DÉCLARE l'action de la SA CETELEM forclose ;

DÉBOUTE la SA CETELEM de l'intégralité de ses demandes ;

RAPPELLE qu'aucun paiement forcé ne peut être obtenu sur le fondement du présent jugement ;

CONDAMNE la SA CETELEM aux entiers dépens.

Ainsi jugé et prononcé aux lieu, jour, mois et an ci-dessus.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT,

 

Est cité par :