CA DOUAI (ch. 1 sect. 1), 4 mars 2013
CERCLAB - DOCUMENT N° 4310
CA DOUAI (ch. 1 sect. 1), 4 mars 2013 : RG n° 12/06418 ; arrêt n° 133/2013
Publication : Jurica
Extraits : « La loi du 3 janvier 2008, publiée au journal officiel le 4 janvier 2008 a ajouté à cet article que les trois alinéas de l'article L. 136-1 du code de la consommation sont applicables aux consommateurs et aux non-professionnels. Antérieurement, ces dispositions incluses dans le code de la consommation, ne concernaient que les seuls consommateurs.
Le syndicat de copropriétaires, personne morale, représentant la collectivité des copropriétaires personnes physiques, selon l’article 4 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, exerce une activité de conservation de l'immeuble bâti en copropriété et d'administration des parties communes. Il n'a pas d'activité professionnelle à proprement parler mais exerce une fonction de nature patrimoniale ayant pour objet la gestion ou la conservation d'un patrimoine, distincte par nature d'une activité professionnelle qui doit satisfaire les besoins d'une clientèle, et ne peut donc être assimilé à un professionnel (à la différence du syndic qui peut être un professionnel comme l'est, en l'espèce, la société PONS et Cie). Le syndicat des copropriétaires ne peut cependant pas être qualifié de consommateur, notion distincte de celle de non professionnel, qui ne concerne que les personnes physiques à l'exclusion des personnes morales.
Or, la résiliation est intervenue par courrier du 13 septembre 2007 (avant même la publication de la loi du 3 janvier 2008), les contrats d'entretien liant les parties ayant été reconduits en 2004 et devant se terminer (sauf reconduction) en 2009. Il ne peut être considéré que la loi du 3 janvier 2008, même d'effet immédiat, peut autoriser le syndicat des copropriétaires, non professionnel mais qui n'est pas un consommateur, à résilier les contrats d'entretien des ascenseurs à tout moment à compter de sa publication ; en effet, il ne peut être prétendu que la SA SCHINDLER avait l'obligation, avant la tacite reconduction des contrats pour une durée de cinq ans (tacite reconduction intervenue en 2004) d'informer le syndicat de sa faculté de ne pas reconduire les contrats alors qu'une telle obligation n'existait pas (l'article L136-1 du code de la consommation a été introduit par la loi du 28 janvier 2005). Dès lors, l'obligation d'information ne reposait sur la SA SCHINDLER que pour la reconduction des contrats qui devait normalement intervenir en 2009 de sorte qu'elle aurait dû délivrer les renseignements imposés par l'article L. 136-1 du code de la consommation à son cocontractant, entre trois mois et un mois avant la date du 30 mars 2009 ou du 30 juin 2009 (en fonction des contrats), soit six mois avant le terme fixé pour ces conventions. Il en résulte que la résiliation des contrats d'entretien ne pouvait intervenir que selon les modalités contractuellement fixées entre les parties.
En effet, le syndicat n'explique pas en quoi la durée de la tacite reconduction fixée dans la convention à cinq années serait excessive (s'agissant d'un contrat portant sur l'entretien d'appareils importants, ayant une grande spécificité technique) et créerait un déséquilibre significatif à son détriment. Sa demande qui tend à obtenir l'annulation de la clause de tacite reconduction qu'il considère comme abusive sera donc rejetée. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 4 MARS 2013
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 12/06418. Arrêt n° 133/2013. Jugement (R.G. n° 10/01003) rendu le 18 septembre 2012 par le Tribunal de Grande Instance de LILLE.
APPELANT :
Syndicat des copropriétaires DE LA RÉSIDENCE X. agissant en la personne de son Syndic la « SA PONS & CIE »
ayant son siège social [adresse], Représenté par Maître Dominique LEVASSEUR de la SCP LEVASSEUR LEVASSEUR, avocats au barreau de DOUAI, Assisté de Maître Philippe TALLEUX, avocat au barreau de LILLE, substitué par Maître Marie-Julie ROTSCHILD, avocat au barreau de LILLE
INTIMÉE :
SA SCHINDLER
ayant son siège social [adresse], Représentée par Maître Francis DEFFRENNES, avocat au barreau de LILLE, Assistée de Maître Jean-Jacques DIEUMEGARD, avocat au barreau de PARIS
DÉBATS à l'audience publique du 28 janvier 2013 tenue par Pascale METTEAU magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine VERHAEGHE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Evelyne MERFELD, Président de chambre, Pascale METTEAU, Conseiller, Joëlle DOAT, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 4 mars 2013 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Evelyne MERFELD, Président et Delphine VERHAEGHE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par jugement rendu le 18 septembre 2012, le tribunal de grande instance de LILLE a :
- condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » représenté par le société anonyme PONS & Cie IMMOBILIER à payer à la société anonyme SCHINDLER la somme de 40.354,49 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 5 mars 2009,
- débouté la SA SCHINDLER du surplus de sa demande,
- débouté le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » représenté par la SA PONS & Cie IMMOBILIER de l'intégralité de ses demandes,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » représenté par la SA PONS & Cie IMMOBILIER à payer à la SA SCHINDLER la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- débouté le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » représenté par la SA PONS & Cie IMMOBILIER de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » représenté par la SA PONS & Cie IMMOBILIER aux dépens de l'instance.
Le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » a interjeté appel de cette décision le 4 octobre 2012.
RAPPEL DES DONNÉES UTILES DU LITIGE :
Le 28 juin 1974, le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » a conclu avec la SA SCHINDLER cinq contrats d'entretien pour les neuf ascenseurs équipant la résidence, pour une durée de dix ans renouvelable par tacite reconduction pour des périodes de cinq ans.
L'expiration des contrats devait intervenir le 30 avril 2009 pour deux des ascenseurs et le 30 décembre 2009 pour les sept autres.
Indiquant que la législation l'avait contrainte à prendre les mesures de mise en conformité des appareils, qu'en 2007, elle avait confié le remplacement des appareils à la société OTIS, la société PONS a résilié, par lettre recommandée du 7 septembre 2007, les contrats d'entretien conclus avec la SA SCHINDLER.
Par acte d'huissier du 18 janvier 2010, la SA SCHINDLER a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Lille le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » aux fins d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 40.354,49 euros représentant le montant restant dû contractuellement jusqu'au terme des conventions, invoquant une résiliation brutale et sans préavis des contrats liant les parties.
La décision déférée a été rendue dans ces conditions.
Le 5 novembre 2012, le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » a saisi le Premier Président de la cour d'appel de Douai d'une demande tendant à voir suspendre l'exécution provisoire attachée au jugement.
Cette demande a été rejetée par ordonnance rendue le 6 décembre 2012 et l'affaire a été fixée à plaider selon la procédure à jour fixe au 28 janvier 2013.
Dans ses conclusions, le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » représenté par son syndic, la SA PONS et Cie, demande à la cour de :
Vu l’article L. 136-1 du code de la consommation :
- infirmer le jugement,
- débouter la société SCHINDLER de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la société SCHINDLER à lui payer la somme de 11.205,10 euros correspondant aux deuxième et troisième trimestres de l'année 2009,
- la condamner à lui verser la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par le défaut d'entretien des installations,
à titre infiniment subsidiaire,
Vu l’article 1152 du code civil :
- réduire le montant des sommes accordées à la société SCHINDLER au titre de la clause pénale à un euro,
en tout état de cause :
- condamner la société SCHINDLER à lui verser la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers frais et dépens.
Il affirme que l’article L. 136-1 du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi du 3 janvier 2008, entrée en vigueur au 1er juin 2008, est applicable à la reconduction des contrats conclus avec la société SCHINDLER de sorte que cette dernière, en sa qualité de professionnel, devait l'informer de ce qu'il avait la possibilité de manifester son refus de reconduction des contrats arrivant à échéance le 30 avril 2009, six mois avant cette date (son refus de reconduction pouvant être exprimé jusqu'au 30 octobre 2008), au plus tôt le 30 juillet 2008. S'agissant des contrats devant arriver à échéance le 31 décembre 2009, le texte est également applicable, selon lui.
Il fait valoir que les personnes morales ne sont pas exclues de la catégorie des non professionnels pouvant bénéficier de ces dispositions. Il ajoute, en effet, que la qualité de consommateur a été reconnue au syndicat de copropriétaires à plusieurs reprises par la jurisprudence et que c'est donc à tort que les juges du tribunal de grande instance de Lille lui ont dénié cette qualité. Il précise que le tribunal a confondu le syndicat des copropriétaires et son représentant, le syndic, le fait que ce dernier soit un professionnel de l'immobilier étant sans conséquence sur la qualité de consommateur du syndicat. Il remarque d'ailleurs que le syndic, le cabinet PONS, n'est pas partie à la présente instance de sorte que les arguments relatifs à ses éventuels manquements ne concernent pas le présent litige. Il rappelle que le syndicat des copropriétaires n'est qu'un ensemble de copropriétaires, personnes physiques et consommateurs qui ne sont pas réunis pour les besoins de leur activité professionnelle et qui ne poursuivent aucun but lucratif.
Il en déduit, en l'absence d'information par son cocontractant dans les délais impartis, qu'il était donc fondé à résilier gratuitement et à tout moment les contrats d'entretien portant sur les neuf ascenseurs de la résidence.
Il fait, en outre, valoir que la durée de cinq ans contractuellement prévue pour la reconduction du contrat apparaît excessivement longue et créée un déséquilibre significatif à son détriment alors que la recommandation du 22 février 2011 prise par la commission des clauses abusives prévoit que soient éliminées des contrats conclus entre professionnels et consommateurs, les clauses de ce type.
Il affirme que les contrats litigieux ont été conclus pour l'entretien des ascenseurs installés par la société SCHINDLER et qu'ils sont nécessairement résiliés suite au remplacement intégral de ces équipements puisqu'ils n'étaient que l'accessoire des contrats d'installation d'origine. Selon lui, rien ne justifie que la société SCHINDLER puisse disposer d'un droit exclusif et illimité dans le temps de se voir confier l'entretien de tous les ascenseurs, en ce compris ceux qui n'auraient pas été installés par elle. Il estime qu'un contrat accessoire d'entretien ne peut survivre à une installation totalement supprimée et remplacée lors d'une rénovation, en application de la théorie selon laquelle l'accessoire suit le principal. Il précise qu'à la suite de la nouvelle réglementation, les ascenseurs de la résidence devaient être modifiés et qu'il n'avait aucune obligation de contracter avec la société SCHINDLER pour ce faire même si celle-ci entretenait les équipements existants.
Il indique que, suite à la résiliation des contrats par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 septembre 2007, une somme de 11.205,10 euros correspondant aux deuxième et troisième trimestres de l'année 2009 a été versée à tort. Il demande remboursement de ces fonds.
Il sollicite également des dommages et intérêts dans la mesure où un rapport de M. G. daté du 24 mars 2005 met en évidence un défaut caractérisé d'entretien des installations imputables à la société SCHINDLER. Il ajoute qu'à elle seule, cette circonstance justifiait la rupture des contrats pour inexécution des obligations contractuelles.
A titre infiniment subsidiaire, il sollicite la réduction de la clause pénale contractuellement fixée en cas de résiliation avant terme du contrat, le montant à ce titre apparaissant manifestement excessif au regard du préjudice effectivement subi.
Dans ses dernières écritures, la SA SCHINDLER sollicite de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- dire et juger que la résiliation unilatérale des contrats d'entretien des ascenseurs par le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » représenté par son syndic la société PONS et Cie est fautive,
- débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » représenté par son syndic la société PONS et Cie de sa demande d'application des dispositions de l'article L. 136-1 du code de la consommation,
- le débouter de ses demandes reconventionnelles et plus généralement de toutes ses demandes,
- le condamner à la somme de 40.354,49 euros en principal majorée des intérêts «légaux» à compter du 6 mars 2009, date de réception de mise en demeure,
- le condamner à lui payer la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux dépens.
Elle indique que :
- les dispositions de l'article L. 136-1 du code de la consommation relatives à la résiliation des contrats à exécution successive sont inapplicables au bénéfice des syndicats de copropriétaires lorsque le syndic, mandataire du syndicat, est un professionnel. Le fait que la société PONS IMMOBILIER, syndic de la résidence « X. » soit un professionnel de l'immobilier apte à conseiller le syndicat et à gérer efficacement les contrats de maintenance et d'abonnement puisqu'il dispose d'un service de location, d'un service copropriété, d'un service gestion locatif et d'un service transaction, empêche que le syndicat des copropriétaires qu'il représente soit qualifié de simple consommateur. Par ailleurs, le syndic était informé des dates anniversaires des contrats de maintenance dont il a souhaité s'affranchir au nom du syndicat, commettant une faute dans l'exécution de son mandat. Elle n'avait pas à mettre en cause le syndic dans le cadre de la présente instance puisqu'elle agit à l'encontre du syndicat, représenté par son syndic en exercice, sur un fondement contractuel.
- les dispositions de l’article L. 136-1 du code de la consommation dans leur rédaction actuelle, issue de la loi du 3 janvier 2008, n'étaient pas applicables à la date à laquelle la résiliation des contrats a été effectuée c'est-à-dire par lettre du 7 septembre 2007 réceptionnée le 13 septembre 2007. En effet, le dernier alinéa prévoyant que ces dispositions sont applicables aux consommateurs et aux non professionnels a été introduit par la loi du 3 janvier 2008 publiée le 4 janvier 2008 qui n'est pas rétroactive.
- les dispositions protectrices de ce texte ne concernent donc que les personnes physiques à l'exclusion des personnes morales, comme le syndicat des copropriétaires. En outre, elles ne sont pas applicables à des professionnels.
- les contrats conclus avec le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » sont des contrats à durée déterminée pour lesquels les modalités de résiliation étaient prévues. La rupture unilatéralement décidée par le syndicat des copropriétaires comme devant intervenir initialement le 18 mars 2008 ne respecte pas les conditions des cinq contrats d'entretien conclus, une telle résiliation ne pouvant être effective qu'au 30 septembre 2009 pour deux ascenseurs et au 31 décembre 2009 pour les sept autres ascenseurs. Aucun motif légitime ne justifie cette rupture unilatérale anticipée, aucun grief n'ayant été formulé à son encontre s'agissant de l'entretien des installations avant la présente procédure. Les travaux préconisés par le cabinet G. étaient des travaux de sécurité.
- le contrat de maintenance des ascenseurs n'est pas nécessairement l'accessoire d'un contrat de travaux et le fait que les travaux de mise en conformité des ascenseurs ne lui aient pas été confiés n'est pas de nature à justifier une rupture anticipée des contrats d'entretien, sans respect du préavis contractuel. En outre, le syndicat des copropriétaires pouvait parfaitement effectuer les travaux après avoir résilié les contrats dans le respect des engagements contractuels et ce d'autant qu'il n'existait aucune avarie et aucune urgence à effectuer la rénovation des ascenseurs.
- elle n'a jamais acquiescé à son remplacement avant le terme des contrats de maintenance même si elle a répondu à l'appel d'offres pour les travaux concernant les ascenseurs.
- la rupture des contrats étant fautive, elle est fondée à solliciter l'indemnisation du préjudice qu'elle a subi résidant dans la non perception des redevances contractuelles jusqu'à l'échéance des contrats, soit un montant de 40.354,49 euros. Ce montant ne représente pas une clause pénale et ne peut donner lieu à application des dispositions de l’article 1152 du code civil.
- elle n'a bénéficié d'aucun enrichissement sans cause dans la mesure où le syndicat des copropriétaires a l'obligation légale d'entretenir les installations d'ascenseur, ce qui implique un contrat d'entretien en permanence en vigueur ; la mise à l'arrêt des ascenseurs du syndicat pendant les travaux n'a donc eu aucune conséquence sur l'obligation par ce syndicat d'avoir de tels contrats en cours ; sa facturation, relative à cette période, est fondée puisque correspondant à l'exécution des conventions de maintenance et d'entretien.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Selon l’article 1134 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Selon contrat signé le 28 juin 1974, la société ROUX COMBALUZIER SCHINDLER devenue SCHINDLER a conclu avec le syndic SERGIC, alors représentant du syndicat des copropriétaires de la résidence « X. », cinq contrats d'entretien portant sur les ascenseurs de cette résidence.
Ces contrats sont conclus pour une durée de 10 ans, renouvelable par tacite reconduction, pour des périodes successives de cinq ans sauf avis contraire donné par l'une ou l'autre des parties, par lettre recommandée, six mois au moins avant l'expiration d'une de ces périodes.
Ils ont débuté pour l'un d'entre eux relatif à deux ascenseurs le 1er mai 1974 (il devait donc arriver à échéance le 30 avril 2009) et pour les autres, relatifs aux sept autres ascenseurs, le 1er janvier 1975 et devaient donc arriver à échéance le 31 décembre 2009.
Par courrier recommandé daté du 7 septembre 2007 reçu par la SA SCHINDLER le 13 septembre 2007, le cabinet PONS et Cie a informé son cocontractant de la résiliation des contrats des neuf ascenseurs au 18 mars 2008, invoquant des contrats d'entretien datés du 18 mars 1998.
Il invoque, pour justifier cette résiliation hors des délais contractuellement fixés, les dispositions de l'article L. 136-1 du code de la consommation.
Selon cet article dont les dispositions sont issues de la loi du 28 janvier 2005, le professionnel prestataire de services informe le consommateur par écrit, au plus tôt trois mois et au plus tard un mois avant le terme de la période autorisant le rejet de la reconduction, de la possibilité de ne pas reconduire le contrat qu'il a conclu avec une clause de reconduction tacite. Lorsque cette information ne lui a pas été adressée conformément aux dispositions du premier alinéa, le consommateur peut mettre gratuitement un terme au contrat, à tout moment à compter de la date de reconduction. Les avances effectuées après la dernière date de reconduction ou, s'agissant des contrats à durée indéterminée, après la date de transformation du contrat initial à durée déterminée, sont dans ce cas remboursées dans un délai de trente jours à compter de la date de résiliation, déduction faite des sommes correspondant, jusqu'à celle-ci, à l'exécution du contrat. A défaut de remboursement dans les conditions prévues ci-dessus, les sommes dues sont productives d'intérêts au taux légal. Les dispositions du présent article s'appliquent sans préjudice de celles qui soumettent légalement certains contrats à des règles particulières en ce qui concerne l'information du consommateur. Les trois alinéas précédents ne sont pas applicables aux exploitants des services d'eau potable et d'assainissement.
La loi du 3 janvier 2008, publiée au journal officiel le 4 janvier 2008 a ajouté à cet article que les trois alinéas de l'article L. 136-1 du code de la consommation sont applicables aux consommateurs et aux non-professionnels.
Antérieurement, ces dispositions incluses dans le code de la consommation, ne concernaient que les seuls consommateurs.
Le syndicat de copropriétaires, personne morale, représentant la collectivité des copropriétaires personnes physiques, selon l’article 4 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, exerce une activité de conservation de l'immeuble bâti en copropriété et d'administration des parties communes. Il n'a pas d'activité professionnelle à proprement parler mais exerce une fonction de nature patrimoniale ayant pour objet la gestion ou la conservation d'un patrimoine, distincte par nature d'une activité professionnelle qui doit satisfaire les besoins d'une clientèle, et ne peut donc être assimilé à un professionnel (à la différence du syndic qui peut être un professionnel comme l'est, en l'espèce, la société PONS et Cie).
Le syndicat des copropriétaires ne peut cependant pas être qualifié de consommateur, notion distincte de celle de non professionnel, qui ne concerne que les personnes physiques à l'exclusion des personnes morales.
Or, la résiliation est intervenue par courrier du 13 septembre 2007 (avant même la publication de la loi du 3 janvier 2008), les contrats d'entretien liant les parties ayant été reconduits en 2004 et devant se terminer (sauf reconduction) en 2009.
Il ne peut être considéré que la loi du 3 janvier 2008, même d'effet immédiat, peut autoriser le syndicat des copropriétaires, non professionnel mais qui n'est pas un consommateur, à résilier les contrats d'entretien des ascenseurs à tout moment à compter de sa publication ; en effet, il ne peut être prétendu que la SA SCHINDLER avait l'obligation, avant la tacite reconduction des contrats pour une durée de cinq ans (tacite reconduction intervenue en 2004) d'informer le syndicat de sa faculté de ne pas reconduire les contrats alors qu'une telle obligation n'existait pas (l'article L136-1 du code de la consommation a été introduit par la loi du 28 janvier 2005). Dès lors, l'obligation d'information ne reposait sur la SA SCHINDLER que pour la reconduction des contrats qui devait normalement intervenir en 2009 de sorte qu'elle aurait dû délivrer les renseignements imposés par l'article L. 136-1 du code de la consommation à son cocontractant, entre trois mois et un mois avant la date du 30 mars 2009 ou du 30 juin 2009 (en fonction des contrats), soit six mois avant le terme fixé pour ces conventions.
Il en résulte que la résiliation des contrats d'entretien ne pouvait intervenir que selon les modalités contractuellement fixées entre les parties.
En effet, le syndicat n'explique pas en quoi la durée de la tacite reconduction fixée dans la convention à cinq années serait excessive (s'agissant d'un contrat portant sur l'entretien d'appareils importants, ayant une grande spécificité technique) et créerait un déséquilibre significatif à son détriment. Sa demande qui tend à obtenir l'annulation de la clause de tacite reconduction qu'il considère comme abusive sera donc rejetée.
Par ailleurs, le syndicat des copropriétaires qui n'était lié à la SA SCHINDLER que par un contrat d'entretien et de maintenance, pouvait légitimement passer un appel d'offre auprès de différentes sociétés et attribuer son marché de rénovation ou de remplacement des ascenseurs au moins disant. Si la nécessité de mise aux normes nécessaires d'appareils, sous contrat de maintenance, peut constituer un motif légitime de résiliation du contrat de maintenance dans le cas où la société prestataire n'entend pas continuer à effectuer les prestations nécessaires si elle n'est pas attributaire du contrat de réfection des ascenseurs, tel n'est pas le cas en l'espèce puisque d'une part, le syndicat des copropriétaires ne justifie pas que les travaux de remplacement devaient nécessairement intervenir avant la fin du contrat de maintenance en cours (ils auraient pu être faits en 2009, une simple mise aux normes étant nécessaire selon le rapport G. CONSULTANT, lequel a fait un audit des ascenseurs les 21 et 25 février 2005) et qu'en tout état de cause, la SA SCHINDLER n'a pas refusé (n'ayant jamais été contactée à ce sujet) d'intervenir sur la nouvelle installation.
En outre, si le syndicat des copropriétaires invoque un manquement contractuel de la société SCHINDLER à ses obligations, il ne précise pas quel aurait été ce manquement alors que le rapport G. CONSULTANT précise que les ascenseurs installés sont de bonne facture et que le comportement du matériel après trente années de fonctionnement est satisfaisant. Il est uniquement indiqué que l'entreprise doit prendre à sa charge certaines réparations et réaliser une maintenance préventive efficace en améliorant son temps de présence sur site. Le rapport conclut que la maintenance est globalement conforme aux dispositions de l’arrêté du 11 mars 1977 mais que quelques points, touchant principalement l'information en direction du syndicat de la copropriété (par exemple au sujet des suivis des rapports de panne et des informations des dispositions obligatoires dans le cadre du décret du 9 septembre 2004), doivent être améliorés. En tout état de cause, le syndicat des copropriétaires ne justifie pas avoir mis en demeure la société SCHINDLER ni même lui avoir fait part d'un quelconque mécontentement s'agissant de ses interventions de maintenance. Il n'est, en conséquence, pas rapporté la preuve d'un manquement à ses obligations par la société prestataire avant la résiliation du contrat ou d'une faute de cette société pouvant justifier une telle résiliation anticipée de la convention. Par ailleurs, en l'absence de faute contractuelle établie, la demande de dommages et intérêts présentée par le syndicat des copropriétaires sera rejetée.
La résiliation anticipée par le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » sans respect des dispositions contractuelles et sans aucun motif légitime est constitutive d'une faute qui a entraîné pour la société SCHINDLER un préjudice.
Ce préjudice est constitué par l'absence de perception de l'intégralité des sommes contractuellement fixées pendant toute la durée de la convention, soit jusqu'aux mois de septembre ou décembre 2009. En conséquence, ce préjudice doit être fixé au regard de la facturation restée impayée émise par la SA SCHINDLER, à la somme de 40.354,49 euros.
Ce montant n'est pas réductible selon les modalités fixées par l’article 1152 du code civil ; il ne représente, en effet, pas le montant d'une clause pénale qui aurait été fixée dans les contrats par les parties (les conventions signées en 1974 ne contiennent aucune clause de ce type) mais l'indemnisation du préjudice financier et matériel effectivement subi par la société prestataire de services.
Si le syndicat des copropriétaires a réglé à la SA SCHINDLER les sommes dues au titre des contrats pour les deuxième et troisième trimestres 2009, elle ne peut prétendre que ces sommes ont été indument perçues puisqu'elles ont été payées en exécution d'un contrat liant les parties, résilié de façon irrégulière par le syndicat. Ce dernier n'est donc pas fondé à solliciter remboursement de ces sommes.
En conséquence, le jugement sera confirmé sauf à dire que la somme de 40.354,49 euros, allouée à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par la SA SCHINDLER, ne peut porter intérêts au taux légal qu'à compter du jour où elle a été fixée par la juridiction soit à compter du jugement.
Le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » succombant, il sera condamné aux dépens d'appel et le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a condamné aux dépens de première instance.
Il serait inéquitable de laisser à la SA SCHINDLER la charge des frais exposés et non compris dans les dépens. Le syndicat des copropriétaires sera condamné à lui payer la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué la même somme au titre des frais irrépétibles de première instance.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant par arrêt contradictoire :
CONFIRME le jugement sauf en ce qui concerne le point des départ des intérêts sur la somme de 40.354,49 euros ;
Le réformant de ce chef :
DIT que la somme de 40.345,49 euros portera intérêts au taux légal à compter du jugement ;
CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » représenté par son syndic, la société PONS et Cie, aux dépens d'appel ;
AUTORISE s'il en a fait l'avance sans en avoir reçu provision, Maître DEFRENNES, avocat, à recouvrer les dépens d'appel selon les modalités prévues par l’article 699 du code de procédure civile ;
CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de la résidence « X. » représenté par son syndic, la société PONS et Cie, à payer à la SA SCHINDLER la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Le Greffier, Le Président,
Delphine VERHAEGHE. Evelyne MERFELD.
- 5735 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Nature - Clause nulle
- 5822 - Code de la consommation - Autres textes - Application dans le temps - Art. L. 136-1 c. consom. - Loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008
- 5859 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Protection explicite
- 5862 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Autres textes
- 6041 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Exécution du contrat - Contraintes d’exécution - Professionnel - Contraintes de gestion
- 6134 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Durée du contrat - Contrat à durée déterminée - Prorogation - Reconduction - Renouvellement
- 6432 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Prestations de services - Maintenance et entretien