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CA BESANÇON (1re ch. civ. et com.), 21 octobre 2015

Nature : Décision
Titre : CA BESANÇON (1re ch. civ. et com.), 21 octobre 2015
Pays : France
Juridiction : Besancon (CA) 1re ch. civ. et com.
Demande : 14/00290
Date : 21/10/2015
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 10/02/2014
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5349

CA BESANÇON (1re ch. civ. et com.), 21 octobre 2015 : RG n° 14/00290

Publication : Jurica

 

Extrait : « Selon l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre les professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Ces dispositions ne s'appliquent pas aux contrats de fourniture de biens ou de services qui ont un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par le cocontractant.

En l'espèce, M. X. a loué auprès de la SA Banque Populaire du Nord un matériel d'amincissement à installer dans son cabinet médical à Besançon où il exerce la profession de médecin généraliste. Il ne conteste pas avoir utilisé cet appareil dans le cadre de son exercice médical. En raison du lien direct entre le contrat et l'activité professionnelle de M. X., les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation ne sont pas applicables et la clause contenue à l'article 9 ne peut être qualifiée d'abusive sur ce fondement. Ajoutant au jugement du 17 décembre 2013, M. X. sera débouté de sa demande à ce titre.

Selon les dispositions de l'article L. 442-6-2° du code de commerce, est nulle la clause d'un contrat qui soumet ou tente de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

L'exigence de paiement des loyers HT restant à courir étant de nature à réparer le préjudice causé par la résiliation anticipée du contrat à la SA Banque Populaire du Nord, qui a financé le coût du matériel et était en droit d'en attendre le versement des loyers jusqu'au terme du contrat, augmentée d'une clause pénale sanctionnant le locataire défaillant dans l'exécution de ses obligations contractuelles n'est pas de nature à instaurer un déséquilibre significatif entre les parties. Ajoutant au jugement déféré, M. X. sera débouté de sa demande de nullité sur ce fondement. »

 

COUR D’APPEL DE BESANÇON

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

- 172 501 116 00013 -

ARRÊT DU 21 OCTOBRE 2015

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/00290. Contradictoire. Audience publique du 16 septembre 2015. Sur appel d'une décision du tribunal de grande instance de BESANÇON, en date du 17 décembre 2013 [R.G. N° 12/02741]. Code affaire : 59B  - Demande en paiement relative à un autre contrat.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur X.

le [date] à [ville], demeurant [adresse] ; Représenté par Maître Charles-Eric TALAMONI, avocat au barreau de BASTIA et Maître Isabelle TOURNIER, avocat au barreau de BESANÇON

 

ET :

INTIMÉE

BANQUE POPULAIRE DU NORD

dont le siège est sis [adresse] ; Représentée par Maître Brigitte TOURNIER de la SCP TOURNIER MAYER-BLONDEAU GIACOMONI DICHAMP MARTINVAL, avocat au barreau de BESANCON

 

COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats : PRÉSIDENT : Madame B. UGUEN LAITHIER, Conseiller, faisant fonction de Président, suivant ordonnance du 9 septembre 2015. ASSESSEURS : Mesdames H. BITTARD (magistrat rapporteur), et A. CHIARADIA, Conseillers.

GREFFIER : Madame D. BOROWSKI, Greffier.

lors du délibéré : PRÉSIDENT : Madame B. UGUEN LAITHIER, Conseiller, faisant fonction de Président ; ASSESSEURS : Mesdames H. BITTARD, et A. CHIARADIA, Conseillers.

L'affaire, plaidée à l'audience du 16 septembre 2015 a été mise en délibéré au 21 octobre 2015. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES :

Par acte sous seing privé du 8 juin 2010, M. X., médecin, a conclu avec la SA Banque Populaire du Nord un contrat de location relatif à la mise à disposition d'un matériel d'amincissement livré par la société FG Médical, pour une période de 72 mois et moyennant un loyer mensuel de 1.226 euros. Suite à des échéances impayées, la SA Banque Populaire du Nord a sollicité la résiliation du contrat de location.

Par jugement contradictoire du 17 décembre 2013, le Tribunal de Grande Instance de Besançon a :

- condamné M. X. à payer à la SA Banque Populaire du Nord, au titre du contrat du 8 juin 2010, les sommes de 4.038,01 euros au titre des loyers échus, de 55.354,22 euros au titre de l'indemnité de résiliation représentant les loyers hors taxe à échoir, de 5.535,43 euros au titre de la clause pénale, soit la somme de 64.927,76 euros, avec intérêts de 1,5 % par mois de retard à compter du 8 décembre 2011 et à supporter les dépens de l'instance, avec distraction au profit de la SCP Tournier, Mayer- Blondeau, Giacomoni, Dichamp, Martinval, avocats,

- dit que M. X. pourra se libérer de cette dette en 24 mensualités égales et consécutives, le 5 de chaque mois, à compter de la date de la signification du jugement, le premier incident de paiement entraînant l'exigibilité immédiate des sommes dues,

- débouté M. X. de ses autres demandes,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Le 10 février 2014, M. X. a interjeté appel de ce jugement et, par conclusions récapitulatives du 16 juillet 2014, a demandé à la Cour, au visa des articles L. 132-1 du code de la consommation, L. 442-6° du code de commerce, 1131 et 1152 alinéa 2 du code civil, de confirmer le jugement du 17 décembre 2013 en ce qu'il lui a accordé des délais de paiement et de l'infirmer pour le surplus, à titre principal, de déclarer abusive et donc réputée non écrite la clause du contrat de location mettant à la charge du locataire une indemnité correspondant à la totalité des loyers restant à courir à compter de la date de résiliation jusqu'à la fin du contrat (article 9, 2, a) et de débouter la SA Banque Populaire du Nord de ses demandes de paiement des sommes de 55.354,32 euros et de 5.535,43 euros, subsidiairement, de prononcer la nullité de cette clause au motif qu'elle comporte des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties et de débouter M. X. de ses demandes de paiement des sommes de 55.354,32 euros et de 5.535,43 euros, à titre encore plus subsidiaire, de modérer les effets de la triple clause pénale que contient le contrat litigieux, en tout état de cause, de condamner la banque à lui payer une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance et d'appel.

Le 19 juin 2014, la SA Banque Populaire du Nord a conclu à la confirmation du jugement du 17 décembre 2013, au constat de la déchéance du terme en raison du non-respect par M. X. des délais accordés par les premiers juges, au débouté de la demande de délais de ce dernier et à sa condamnation à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance et d'appel, avec distraction au profit de la SCP Tournier, avocats.

Pour l'exposé complet des moyens des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus visées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 janvier 2015.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA COUR :

L'article 9 du contrat de location du 8 juin 2010 prévoit qu'en cas de résiliation du contrat pour défaut de paiement des loyers, le locataire est tenu de restituer immédiatement le matériel et que le bailleur aura la faculté de réclamer au titre de la réparation du préjudice subi, une somme égale à la totalité des loyers HT restant à courir à compter de la date de résiliation jusqu'à la fin de la location contractuellement prévue, au titre de la sanction de l'inexécution des obligations, une somme égale à 10 % de la somme précédente, ces sommes étant augmentées des taxes en vigueur lors de leur exigibilité et portant intérêts au taux de 1,5 % par mois de retard.

Selon l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre les professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Ces dispositions ne s'appliquent pas aux contrats de fourniture de biens ou de services qui ont un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par le cocontractant.

En l'espèce, M. X. a loué auprès de la SA Banque Populaire du Nord un matériel d'amincissement à installer dans son cabinet médical à Besançon où il exerce la profession de médecin généraliste. Il ne conteste pas avoir utilisé cet appareil dans le cadre de son exercice médical. En raison du lien direct entre le contrat et l'activité professionnelle de M. X., les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation ne sont pas applicables et la clause contenue à l'article 9 ne peut être qualifiée d'abusive sur ce fondement. Ajoutant au jugement du 17 décembre 2013, M. X. sera débouté de sa demande à ce titre.

Selon les dispositions de l'article L. 442-6-2° du code de commerce, est nulle la clause d'un contrat qui soumet ou tente de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

L'exigence de paiement des loyers HT restant à courir étant de nature à réparer le préjudice causé par la résiliation anticipée du contrat à la SA Banque Populaire du Nord, qui a financé le coût du matériel et était en droit d'en attendre le versement des loyers jusqu'au terme du contrat, augmentée d'une clause pénale sanctionnant le locataire défaillant dans l'exécution de ses obligations contractuelles n'est pas de nature à instaurer un déséquilibre significatif entre les parties. Ajoutant au jugement déféré, M. X. sera débouté de sa demande de nullité sur ce fondement.

En application de l'article 1152 du code civil, la majoration des charges financières pesant sur le débiteur, résultant de l'anticipation de l'exigibilité des loyers dès la date de la résiliation, stipulée à la fois comme un moyen de le contraindre à l'exécution et comme l'évaluation conventionnelle et forfaitaire du préjudice futur subi par le crédit bailleur du fait de l'accroissement de ses frais et risques à cause de l'interruption des paiements prévus, constitue une clause pénale susceptible de modération en cas d'excès.

L'article 9 du contrat qui prévoit, en cas de défaillance du locataire, le paiement de la totalité des loyers restant à courir à compter de la date de résiliation jusqu'à la fin de la location contractuellement prévue, augmentée d'une somme égale à 10 % de la somme précédente, constitue une clause pénale. Cependant, réparant équitablement le préjudice résultant pour le bailleur de la perte des loyers à la suite de la résiliation du contrat et de la défaillance du locataire, elle n'apparaît pas excessive et ne doit pas être réduite.

L'article 9.2.c du contrat, qui prévoit que les sommes dues porteront intérêts au taux de 1,5 % par mois de retard, ne prévoit pas une majoration du taux d'intérêt, comme en matière de contrat de prêt (il s'agit d'un contrat de location) mais une indemnisation du retard de paiement des loyers et ne constitue donc pas une clause pénale mais un taux contractuel qui ne peut être réduit.

Le jugement du 17 décembre 2013 sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de modération de la clause pénale et condamné M. X. à payer à la SA Banque Populaire du Nord, au titre du contrat du 8 juin 2010, les sommes de 4.038,01 euros au titre des loyers échus, de 55.354,22 euros au titre de l'indemnité de résiliation représentant les loyers hors taxe à échoir, de 5.535,43 euros au titre de la clause pénale, soit la somme de 64.927,76 euros, avec intérêts de 1,5 % par mois de retard à compter du 8 décembre 2011.

La SA Banque Populaire du Nord prétend avoir signifié à M. X. le 10 janvier 2014 le jugement du 17 décembre 2013 lui accordant un délai de paiement de 24 mois et prévoyant l'exigibilité immédiate des sommes restant dues au premier incident de paiement. Faute de communication aux débats de la signification du 10 janvier 2014, la Cour ne peut constater la déchéance du délai de paiement au motif que M. X. n'aurait réglé aucune mensualité. Ajoutant au jugement frappé d'appel, elle sera déboutée de sa demande à ce titre.

La SA Banque Populaire du Nord ne contestant pas autrement le délai de paiement accordé à M. X., le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

M. X. qui succombe sera débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile formée en cause d'appel, sera condamné payer à la SA Banque Populaire du Nord la somme de 1.000 euros sur le même fondement et supportera les dépens d'appel, qui seront distraits au profit de la SCP Tournier, Mayer- Blondeau, Giacomoni, Dichamp, Martinval, avocats, le jugement déféré étant confirmé en ses dispositions relatives aux dépens de première instance.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Confirme le jugement du Tribunal de Grande Instance de Besançon du 17 décembre 2013 en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Déboute M. X. de ses demandes tendant à voir dire abusive et nulle la clause insérée à l'article 9 du contrat de location du 8 juin 2010.

Déboute la SA Banque Populaire du Nord de sa demande tendant à voir constater la déchéance du délai de paiement accordé à M. X.

Déboute M. X. de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne M. X. à payer à la SA Banque Populaire du Nord la somme de mille euros (1.000 euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne M. X. aux dépens d'appel.

Autorise la SCP Tournier, Mayer- Blondeau, Giacomoni, Dichamp, Martinval, avocats, à recouvrer directement les dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.

LEDIT ARRÊT a été signé par Madame Bénédicte UGUEN-LAITHIER, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, Magistrat ayant participé au délibéré, et Madame Dominique BOROWSKI, Greffier.

LE GREFFIER,                    P/LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE,