CA VERSAILLES (12e ch. sect. 2), 24 novembre 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5433
CA VERSAILLES (12e ch. sect. 2), 24 novembre 2015 : RG n° 14/06172
Publication : Jurica
Extrait : « Considérant qu'aux termes de l'article 1150 du code civil, le débiteur n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qu'on a pu prévoir lors du contrat ; que cette disposition permet donc d'insérer au contrat des clauses limitant la réparation à laquelle est tenue une partie ; Considérant que la clause prévue à l'article 17 du contrat conclu entre les sociétés Data Immo et Completel limite l'obligation de réparation de la société Completel aux seuls préjudices directs ; qu'elle constitue donc une clause limitative de réparation ; qu'elle ne limite pas la responsabilité de la société mais réduit les conséquences de celle-ci ; qu'elle institue une limitation pécuniaire de la réparation ;
Considérant que cette clause a été insérée dans un contrat conclu entre deux sociétés commerciales ; que la société Data Immo a conclu cette convention à des fins professionnelles et en rapport direct avec son activité ; Considérant que cette clause ne vide pas de sa substance une obligation essentielle du débiteur ; Considérant qu'elle ne créée pas davantage un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ;
Considérant qu'en l'absence de faute lourde ou d'un dol de la société Completel, cette clause doit donc recevoir application ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
DOUZIÈME CHAMBRE SECTION 2
ARRÊT DU 24 NOVEMBRE 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. N° 14/06172. Code nac : 56C. CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 18 juillet 2014 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE (4e ch.), R.G. n° 2012F04456.
LE VINGT QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE QUINZE, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANTE :
SARL DATA IMMO
N° SIRET : XXX, Représentant : Maître Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 23014, Représentant : Maître Bruno MARTIN de la SCP COURTOIS LEBEL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0044 - substitué par Maître BENATTAR
INTIMÉE :
SAS COMPLETEL
RCS NANTERRE XXX, Représentant : Maître Michèle DJIAN-LASCAR de la SCP DJIAN-LASCAR MICHELE, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 519 - N° du dossier 7635, Représentant : Maître Ronald SARAH, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0441
Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 octobre 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Alain PALAU, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Monsieur Alain PALAU, Président, Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller, Monsieur François LEPLAT, Conseiller,
Greffier F.F., lors des débats : Monsieur James BOUTEMY,
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La SARL Data Immo est une société de conseil en immobilier d'entreprise qui recherche, pour des entreprises, des locaux à usage de bureaux, d'activités-entrepôts, de réserves foncières en Ile de France et des plates-formes logistiques dans l'hexagone.
Son activité, qui consiste à mettre à la disposition de ses clients une équipe de télé prospecteurs, se réalise essentiellement à travers ses réseaux de communication et son site internet.
La société Altitude Telecom était un opérateur de télécommunication qui proposait aux entreprises des services de téléphonie et d'accès à Internet. Elle a été absorbée, à effet au 1er janvier 2012, par la SAS Completel.
Par actes du 27 novembre 2009, les sociétés Data Immo et Altitude Telecom ont conclu deux contrats dans la perspective du déménagement au 1er janvier 2010 de la société Data Immo dans de nouveaux locaux, situés [...] :
Un contrat de téléphonie professionnelle prévoyant un service de téléphonie « easy fixe », « easy mobile » et « two easy » fixe et mobile en mode externalisé sur IP, téléphonie via Internet et sa maintenance, avec l'installation de 10 postes téléphoniques et la fourniture de lignes mobiles.
Un contrat de fourniture d'accès à Internet « Connect » avec sa maintenance.
Ces deux contrats fixent un barème d'indemnisation forfaitaire en cas de non respect du délai contractuel de rétablissement du service qui est de 4 heures.
Des incidents ont fait l'objet de signalements et de réclamations de la part de la société Data Immo.
Par acte des 27 janvier et 28 février 2011, un avenant au contrat de connexion Internet a été conclu entre les parties. Il prévoit le remplacement de la technologie SDSL-AT 2M sur le site Ampère par la technologie SDSL-AT 5M pour un montant mensuel de 325 euros et le remplacement du routeur Box SDSL sur ce site par un routeur Cisco SDSL AT pour un montant mensuel de 55 euros.
Des incidents de connexion à Internet ont été signalés.
Une réunion s'est tenue le 1er juillet 2011 entre les deux sociétés.
Par lettre recommandée du 13 juillet 2011, la société Data Immo s'est plainte d'une « nouvelle interruption totale du service » depuis la veille et a fait état d'une cause similaire à celle d'un incident survenu le 25 mai 2011.
En réponse, la société reconnu sa responsabilité quant à la gêne occasionnée, a fait état de ses investigations et l'a informée de l'émission de deux avoirs d'un montant total de 304 euros ht.
Un nouvel incident a été déclaré.
Par lettre recommandée du 26 septembre, la société Data Immo a estimé insuffisante cette réponse, a considéré que la convergence des voix et données sur un seul lien n'était pas au point et a déclaré vouloir « re-diviser les liens voix et données et revenir à des solutions plus classiques de téléphonie et internet ». Elle a notifié, « conformément à l'article 10 des conditions particulières du contrat », la résiliation du contrat de téléphonie à effet à début janvier 2012.
De nouveaux incidents ont été signalés.
Par lettre recommandée du 3 novembre 2011, la société Data Immo a, compte tenu de ces dysfonctionnements, résilié son contrat de connexion à internet à effet au 4 janvier 2012, date d'effet de la résiliation du contrat de téléphonie.
Par lettre recommandée du 23 novembre, la société Altitude Telecom s'est excusée des dysfonctionnements de la téléphonie, a déclaré que de nouvelles procédures y mettraient fin et a « noté votre souhait de résilier votre contrat de téléphonie ». Elle a « espéré que ce souhait n'était plus d'actualité », proposé un rapprochement et conclu que, si ce désir était irrévocable, « conformément aux conditions générales de vente, merci de nous adresser un lettre recommandée à la fin de votre période d'engagement ».
Début 2012, la société Data Immo a conclu un contrat avec SFR.
Par courriel du 20 février 2012, le service clientèle de la société Altitude Telecom a demandé à la société Data Immo de lui justifier de sa lettre de résiliation et l'a informée que des pénalités pour résiliation anticipée lui seraient appliquées.
Par lettre du 8 mars 2012, la société Data Immo lui a répondu que les résiliations étaient imputables à ses manquements.
La société Completel a adressé des factures contestées par la société Data Immo.
Par acte du 22 novembre 2012, la société Data Immo a fait assigner la société Completel devant le tribunal de commerce de Nanterre afin, en principal, que soit prononcée la résiliation judiciaire des contrats et que lui soient alloués des dommages et intérêts.
Par jugement du 18 juillet 2014, le tribunal a constaté la résiliation des contrats du 27 novembre 2009 à la date du 4 janvier 2012 aux torts exclusifs de la société Data Immo et débouté celle-ci de ses demandes.
Il a condamné la société Data Immo à payer à la société Completel la somme de 2.750,08 euros au titre de la clause pénale.
Il a rejeté les autres demandes.
Par déclaration du 7 août 2014, la société Data Immo a interjeté appel.
Dans ses dernières écritures en date du 7 novembre 2014, la SARL Data Immo conclut à l'infirmation du jugement.
Elle demande qu'il soit jugé que la résiliation du contrat de téléphonie est intervenue aux torts et griefs de la société Completel et a pris effet le 31 décembre 2011.
Elle demande qu'il soit jugé que la résiliation du contrat du service d'accès à Internet est intervenue aux torts et griefs de la société Completel et a pris effet le 4 janvier 2012.
Elle demande que la clause limitative de responsabilité insérée à l'article 17 des conditions générales Altitude Telecom soit déclarée non écrite.
Elle sollicite le paiement de la somme de 78.045 euros à titre de dommages et intérêts.
Elle réclame le versement d'une somme de 20.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La société expose qu'elle a souscrit à une offre globale de téléphonie et d'accès à internet et que la société Altitude Telecom a mis en place un système « centrex » permettant à la société d'externaliser la gestion de son système de voix sur réseau, les routages d'appel étant exclusivement effectués via Internet.
Elle invoque l'article 1134 du code civil.
Elle relève que le contrat de service de téléphonie prévoyait « un service voix sur une infrastructure IP Centrex » et en conclut que ce service dépendait du bon fonctionnement de la liaison Internet assurée dans le cadre du contrat « Connect ». Elle indique que, dans ce cadre, la société s'est engagée à maintenir sur le lien, soit la liaison de raccordement direct établie entre la plate-forme IP Centrex et le point d'entrée du site client, un taux de disponibilité de 99,8 %. Elle souligne qu'aux termes de l'article 12.1 des conditions particulières du service de téléphonie, la société « Altitude est responsable de l'exécution du service dans les meilleures conditions ».
Elle fait valoir qu'aux termes du contrat Connect, la société s'est engagée à lui fournir un service d'accès à Internet lui assurant des « liaisons à débit garanti » de 25 jours ouvrés avec un taux de disponibilité du service de 99,8 % et qu'aux termes de l'article 7.1 des conditions particulières du service d'accès à Internet, la société « Altitude est responsable de l'exécution du service dans les meilleures conditions ».
Elle soutient également que les fournisseurs d'accès à Internet sont tenus à une obligation de résultat quant aux services offerts.
Elle infère des incidents, survenus dans un court laps de temps, que la société a manqué à cette obligation. Elle déclare que ceux-ci ont affecté les lignes téléphoniques et les connexions Internet.
Elle détaille les incidents.
Elle souligne qu'elle a subi une coupure de téléphone pendant plus de 8 heures le 11 janvier 2010 et pendant plus de 2 jours du 11 au 13 janvier. Elle reproche au tribunal d'avoir considéré que le premier incident avait été corrigé dans le respect des garanties de rétablissement prévues alors que la société Completel ne le prétendait pas et d'avoir estimé que l'autre incident ne concernait qu'un seul des dix postes en service alors que la société doit assurer un service de téléphonie en parfait état. Elle ajoute que la gravité de ce dysfonctionnement devait être appréciée au regard des nombreux autres dysfonctionnements.
Elle excipe de l'importance des incidents se traduisant par une dégradation ou une interruption du service et estime que l'obligation de rétablir les services dans un délai de 4 heures ne peut légitimer les dysfonctionnements et le manquement de la société à son obligation de résultat.
Elle soutient que l'indemnisation de certains incidents n'exonère pas la société de ses responsabilités, conteste être responsable de celui survenu le 9 novembre 2010, souligne que celui du 4 août 2011 l'a privée pendant plus de 8 heures d'un service de téléphonie en parfait état de fonctionnement et affirme que la société Completel n'a pas prouvé que l'interruption totale du service SDSL et ADSL du 12 au 20 octobre était imputable à la société France Telecom. Elle relève à cet égard que la cour d'appel de Paris a, par arrêt du 19 septembre 2014, rejeté les griefs formulés par la société Completel à l'encontre de la société France Telecom au motif que la société Completel n'avait pas procédé aux opérations de dégroupage indispensables.
Elle fait valoir que les dégradations de services récurrentes et les interruptions totales constituent des manquements graves de la société intimée à ses obligations justifiant la résiliation du contrat à ses torts.
Elle ajoute que le double système SDSL/ADSL destiné à éviter les coupures totales de liaison et à garantir le maintien d'une connexion Internet ADSL en cas de défaillance de la connexion SDSL n'a jamais fonctionné et a donné lieu à une facturation sans contre partie.
Elle calcule à la somme de 78.045 euros son préjudice.
Elle indique que l'avenant du 27 janvier 2011, sur les conseils de la société Completel, a engendré un surcoût de 2.465 euros sans contrepartie et que l'installation du double système de connexion ADSL/SDSL a fait l'objet d'une facturation totale de 1.080 euros.
Elle fait état du coût d'achat d'un nouveau système de téléphonie à la suite de la résiliation du contrat soit 6.910 euros.
Elle excipe de 7 journées d'arrêt complet de travail à la suite de l'interruption totale de connexion à Internet soit un préjudice de 59.500 euros, des interruptions partielles de travail (8.500 euros) et de la désorganisation lui causant un préjudice de 15.000 euros.
Elle conteste la clause de limitation de responsabilité figurant dans les conditions générales des contrats ainsi rédigée : « La responsabilité d'Altitude est limitée aux dommages matériels directs à l'exclusion de tout dommage indirect et/ou immatériel et, en particulier, de toute perte de chiffre d'affaires, de bénéfice, de profit, d'exploitation, de renommée ou de réputation, de clientèle, préjudice commercial, économique et autre perte de revenus. Par l'adhésion au contrat de service, le client déclare renoncer à toute réclamation en ce sens ».
Elle invoque l'article L. 132-1 du code de la consommation et considère que cette clause introduit un « déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ». Elle déclare qu'elle a souscrit aux contrats en qualité de non professionnelle et, excipant d'arrêts, que l'article précité s'applique aux personnes morales. Elle se prévaut de l'article R. 132-1 qui déclare de telles clauses abusives et demande qu'elle soit réputée non écrite. Elle considère que, pour apprécier la qualité de non professionnel, il est nécessaire de comparer les spécialités des parties au contrat, le nombre de salariés ou le chiffre d'affaires étant inopérant.
Elle affirme également que cette clause ôte au contrat son intérêt essentiel qui est d'assurer un service permanent et disponible à tout moment.
Elle soutient enfin qu'elle crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties au sens de l'article L. [442-6-I-2°] du code de commerce. Elle fait valoir que les conditions générales, dans lesquelles figure la clause, lui ont été imposées et que la clause vide de sa substance l'obligation de résultat pesant sur la société.
Elle s'oppose à la demande indemnitaire de l'intimée.
Elle fait valoir que, compte tenu de la faute de celle-ci, l'article 14.1.3 des conditions générales qui prévoit le versement d'une indemnité « sauf cas de résiliation pour faute prouvée d'Altitude » ne peut s'appliquer et invoque l'article 1184 du code civil.
Dans ses dernières conclusions en date du 9 décembre 2014, la société Completel sollicite la confirmation du jugement et réclame le paiement d'une somme de 15.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La société rappelle les contrats conclus et précise que deux incidents ayant entraîné une interruption de l'accès à Internet ont donné lieu à l'indemnisation contractuellement prévue et reproche à la société d'avoir résilié, nonobstant les clauses, les contrats.
Elle conteste avoir manqué à ses obligations contractuelles.
Elle déclare que sur les 16 incidents invoqués, cinq n'ont mené à la constatation d'aucun défaut, un est imputable à la société Data Immo, un à la société France Telecom, un n'a concerné qu'un des dix postes téléphoniques, quatre ont été corrigés dans les délais prévus et deux ont donné lieu à l'indemnisation prévue.
Elle détaille les incidents et souligne que seuls deux d'entre eux n'ont pas été résolus dans le délai prévu et ont alors donné lieu à l'indemnisation convenue.
Elle affirme que seuls 16 incidents, dont cinq n'en sont pas, ont été répertoriés en deux ans et fait valoir que l'appelante a bénéficié de l'ensemble des services auxquels elle a souscrit, que les problèmes techniques ont été résolus conformément au contrat et qu'elle a exécuté celui-ci.
Elle en conclut que la société ne pouvait résilier unilatéralement les contrats avant les 27 novembre 2011 (contrat two easy) et 27 novembre 2012 (contrat connect) conformément aux clauses de ceux-ci.
Elle sollicite donc le prononcé de la résiliation judiciaire aux torts de l'appelante, celle-ci ne pouvant résilier les contrats avant l'expiration de la période minimale de trois ans prévue.
Elle réclame, en conséquence, le paiement de la somme de 2.750 euros en application de l'article 14.1.13 du contrat Connect qui ne pouvait être résilié avant le 27 novembre 2012, expiration de la période minimale d'engagement de trois ans. Elle considère cette clause applicable en l'absence de faute de sa part.
A titre infiniment subsidiaire, elle soutient que la société ne justifie pas du préjudice invoqué.
Elle déclare que l'avenant a permis d'augmenter le débit de la bande passante et n'avait pas pour objet d'empêcher des dysfonctionnements, observe que la société ne conteste pas cette augmentation et en conclut qu'elle ne peut réclamer le remboursement des frais entraînés par cette évolution.
Elle conteste que la coupure de la connexion Internet ait entraîné la perte totale du chiffre d'affaires alors même que la société Data Immo a affirmé dans ses conclusions que 80 à 90 % de son chiffre d'affaires a été réalisé à partir de ses appels entrants. Elle soutient que les dysfonctionnements de la connexion Internet n'affectent pas sa liaison téléphonique.
Elle invoque la clause limitative de responsabilité. Elle déclare que l'article [R. 132-1] du code de la consommation est inapplicable car cantonné aux relations entre un professionnel et un consommateur alors que la société est une personne morale de forme commerciale et qu'elle a agi dans le cadre de ses activités professionnelles.
Elle fait valoir qu'elle a rempli ses obligations résultant du contrat.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 septembre 2015.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Considérant que les incidents donnent lieu à l'émission d'un ticket et à un rapport d'intervention ; que la société Data Immo ne verse aux débats aucune pièce de nature à mettre en cause ces rapports et les explications techniques qu'ils contiennent ;
Sur la résiliation :
Considérant qu'un incident a été signalé le 11 janvier 2010 à 10 heures (ticket 161721) ; qu'il a entraîné la coupure du réseau téléphonique ; que les lignes ont été rétablies le 11 janvier à 18 heures ; que le rapport de la société Completel fait état de « l'import d'un bon de commande corrompu » et de la nécessité de désactiver les lignes avant de régulariser la commande ; qu'il lui appartenait, en qualité de professionnelle, de vérifier la commande ; qu'elle est donc responsable de l'incident ;
Considérant qu'un incident sur le réseau téléphonique a été signalé le 12 janvier à 11 heures 15 (ticket 162068) ; que la société Completel en est responsable ; qu'il n'a, toutefois, concerné qu'une des dix lignes téléphoniques ;
Considérant qu'un incident sur le réseau internet a été signalé le 27 janvier 2010 (ticket 166091) ; qu'il porte sur une baisse de débit ; que le rapport d'intervention ne fait état d'aucun problème sur le réseau ; que ce rapport a été validé par le représentant de la société Data Immo ; que la responsabilité de l'intimée n'est pas engagée ;
Considérant que la société Data Immo a signalé une dégradation du signal SDSL le 12 février 2010 (ticket 170066) ; qu'aucun problème imputable à la société Completel n'a été détecté ;
Considérant que la société Data Immo a signalé, le 9 juin 2010, que le site extranet indiquait que la ligne SDSL fonctionnait en mode dégradé mais qu'elle n'en avait pas l'impression et que la ligne ADSL fonctionnait à 60 % et a demandé à l'intimée de vérifier la ligne (ticket 195166) ; que cette demande ne caractérise pas l'existence d'un incident ; que la société a procédé à la vérification demandée ;
Considérant que la société a fait état le 27 août 2010 d'une dégradation du service internet caractérisée par des micro coupures (ticket 211004) ; que l'incident a été réglé le 27 août 12 heures 08 ainsi qu'il résulte de l'avis de clôture adressé le 30 août ;
Considérant que des lenteurs sur la liaison internet ont été signalées le 9 novembre 2010 (ticket 228643) ; que le rapport d'intervention indique que ces lenteurs sont dues à la saturation et que le dossier a été clôturé en accord avec le représentant de la société Data Immo ; que la responsabilité de l'intimée n'est pas en cause ;
Considérant qu'une interruption de téléphone entrant et sortant a été signalée le 12 janvier 2011 à 10 heures 23 (ticket 237459) ; que la cause de cette interruption résulte d'une intervention de l'opérateur sur le réseau ; que le service a été interrompu jusqu'à 10 heures 30 et dégradé jusqu'à 11 heures puis rétabli totalement ; que la société intimée est responsable ; que le dysfonctionnement a été bref ;
Considérant qu'un incident a été signalé le 3 mai 2011 à 15 heures 18 (ticket 263183) ; qu'il a été réglé à 15 heures 52 ; que la société Completel en est responsable ; que le dysfonctionnement a été bref ;
Considérant qu'une interruption du service internet a été déclarée le 25 mai à 9 heures 22 (ticket 266628) ; que l'incident a été clos à 16 heures 01 ; que la société Completel fait état d'un incident imputable à France Telecom mais ne verse aux débats aucun élément de nature à en justifier ; que sa responsabilité sera retenue ; que la société a émis un avoir ;
Considérant qu'une nouvelle interruption du service internet a eu lieu le 12 juillet à 14 heures (ticket 277712) ; que le service a été rétabli le 13 juillet à 12 heures 07 ; que la société Completel en est responsable ; qu'elle a émis un avoir ;
Considérant qu'une dégradation du service voix a été signalée le 4 août à 11 heures 45 et l'incident réparé à 19 heures ;
Considérant qu'un incident a été signalé le 5 octobre (ticket 296175) ; qu'aucune précision n'est fournie par la société Data Immo étant relevé que l'avis d'ouverture mentionne à la rubrique « nature de l'incident : aucune » et que le problème rencontré serait « MA AR » ; que la responsabilité de la société Completel n'est donc pas établie ;
Considérant que le service internet a été interrompu le 12 octobre (ticket 297649) ; que le rapport d'incident fait état d'un problème « au répartiteur de notre opérateur tiers » ; que la société Data Immo n'a pas contesté ce diagnostic ; que, s'agissant du dysfonctionnement d'un équipement d'un tiers, la société Completel n'est pas, conformément à l'article 7.7 du contrat, responsable de l'incident ;
Considérant qu'une interruption de la liaison ADSL est survenue le 17 octobre à 14 heures (ticket 298578) ; que la société intimée en est responsable ;
Considérant que l'ouverture d'un ticket d'incident le 8 novembre (303454) est consécutive au mécontentement exprimé par la société et non à un incident particulier ;
Considérant, enfin, qu'une interruption du réseau internet a été signalée le19 décembre à 10 heures 53 (ticket 315525) ; qu'il y a été mis fin à 12 heures 15 ; que la société Completel en est responsable ;
Considérant qu'ainsi, la société Completel est responsable de 10 incidents ;
Considérant que, pour la plupart, ils ont été résolus dans un bref délai soit dans le cadre de la garantie de 4 heures donnée ; que l'un d'eux a concerné une des dix lignes téléphoniques ayant fait l'objet du contrat ; que deux d'entre eux ont donné lieu à l'émission d'un avoir ;
Considérant, d'une part, que l'existence de dysfonctionnements ne suffit pas à caractériser une faute de la société Completel et à justifier la résiliation du contrat à ses torts ; que les incidents doivent revêtir une importance et une gravité suffisantes ;
Considérant, d'autre part, que les deux parties ont convenu d'impartir un délai à la société Completel pour résoudre les dysfonctionnements et de mettre à sa charge, en cas de dépassement du délai, une indemnisation forfaitaire ; qu'elles ont donc reconnu, nonobstant l'obligation de résultat quant aux services offerts, la possibilité de dysfonctionnements et prévu leur traitement ;
Considérant que ces incidents sont survenus dans une période de près de 2 ans ; qu'ils ont, pour la plupart, été résolus rapidement ; qu'ils ne caractérisent donc pas une incapacité de la société Completel à assurer son service ;
Considérant que la société Completel a résolu les dysfonctionnements dans le délai garanti prévu ou a émis un avoir ; qu'elle a ainsi rempli ses obligation contractuelles ; que ces incidents ont donc été traités conformément au contrat ;
Considérant, par conséquent, que l'importance des dysfonctionnements n'est pas suffisante pour entraîner la résiliation du contrat aux torts de la société intimée ;
Considérant que, conformément au contrat, la société Data Immo devra donc payer la somme de 2.750, 08 euros en réparation de la résiliation anticipée ;
Sur la demande indemnitaire de la société Data Immo :
Considérant qu'aux termes de l'article 1150 du code civil, le débiteur n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qu'on a pu prévoir lors du contrat ; que cette disposition permet donc d'insérer au contrat des clauses limitant la réparation à laquelle est tenue une partie ;
Considérant que la clause prévue à l'article 17 du contrat conclu entre les sociétés Data Immo et Completel limite l'obligation de réparation de la société Completel aux seuls préjudices directs ; qu'elle constitue donc une clause limitative de réparation ; qu'elle ne limite pas la responsabilité de la société mais réduit les conséquences de celle-ci ; qu'elle institue une limitation pécuniaire de la réparation ;
Considérant que cette clause a été insérée dans un contrat conclu entre deux sociétés commerciales ; que la société Data Immo a conclu cette convention à des fins professionnelles et en rapport direct avec son activité ;
Considérant que cette clause ne vide pas de sa substance une obligation essentielle du débiteur ;
Considérant qu'elle ne créée pas davantage un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ;
Considérant qu'en l'absence de faute lourde ou d'un dol de la société Completel, cette clause doit donc recevoir application ;
Considérant que la société Data Immo ne réclame pas l'indemnisation d'un préjudice direct ; que, compte tenu du versement par la société Completel de l'indemnité contractuellement prévue, sa demande sera rejetée ;
Considérant que la société Data Immo ne justifie pas que les sommes versées dans le cadre de l'avenant ou la nécessité d'acquérir un nouveau matériel sont imputables à des fautes de la société intimée ;
Considérant que ses demandes indemnitaires seront donc rejetées ;
Sur les autres demandes :
Considérant que le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions ;
Considérant que la société Data Immo devra payer à la société Completel la somme de 2.500 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel ; que, compte tenu du sens du présent arrêt, la demande aux mêmes fins de celle-ci sera rejetée ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Contradictoirement,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 18 juillet 2014 par le tribunal de commerce de Nanterre,
Y ajoutant :
Condamne la SARL Data Immo à payer à la SAS Completel la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne la société Data Immo aux dépens,
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Alain PALAU, Président et par Monsieur BOUTEMY, Faisant Fonction de
Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier f.f., Le président,
- 5858 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Exclusion explicite
- 5882 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères alternatifs : contrats sans finalité professionnelle
- 5944 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Promotion de l’activité : site internet
- 6114 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du professionnel - Clauses limitatives et exonératoires - Droit postérieur au décret du 18 mars 2009 (R. 212-1-6° C. consom.)
- 6177 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Cadre général - Normes - Lois et règlements
- 6208 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par contrat - Internet
- 6231 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Diminution de la responsabilité de l’auteur
- 6242 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Régime de l’action - Compétence territoriale
- 6390 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs - Obligation essentielle