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TI ROUBAIX, 28 avril 2003

Nature : Décision
Titre : TI ROUBAIX, 28 avril 2003
Pays : France
Juridiction : Roubaix (TI)
Demande : 11-02-001641
Date : 28/04/2013
Nature de la décision : Admission
Mode de publication : Site Com. cl. abusives (CCA)
Date de la demande : 9/12/2002
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7025

TI ROUBAIX, 28 avril 2003 : RG n° 11-02-001641

Publication : Site CCA

 

Extraits : 1/ « Malgré l'expiration du délai biennal de forclusion en date du 18 septembre 2000, le juge d'instance avait bien le pouvoir de relever d'office, par jugement avant dire droit en date du 6 mars 2003 et en application des articles 12 et 16 du NCPC, le caractère abusif de clauses insérées dans le contrat de crédit, dès lors que ce moyen a été soumis au débat contradictoire ».

2/ « Ainsi, les clauses prévues au contrat aggravent la situation de l'emprunteur par rapport au contenu du modèle type, qui constitue un minimum légal de protection pour le consommateur auquel il ne peut être dérogé. Le caractère abusif de ces clauses découle de ce que le prêteur créé un déséquilibre par rapport à une situation juridique organisée de manière détaillée par les textes en vigueur visant à protéger l'emprunteur, peu important que ces clauses ne soient pas le fondement juridique de l'action en paiement. »

3/ « La présence de clauses abusives rend l'offre de crédit irrégulière par rapport aux modèles types prévus aux dispositions de l'article L. 311-13 et R. 311-6 du Code de la consommation. Leur présence est ainsi sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts, la Cour de cassation ayant approuvé une cour d'appel qui avait prononcé la déchéance du droit aux intérêts pour ce motif (Cass. civ. 1ère, 1er déc. 1993, Daguerre : Bull. civ. I, p. 247).

Ainsi, la sanction attachée à la présence des clauses abusives figurant à l'article 5-c des conditions générales de l'offre du 17 septembre 1998 est, outre le caractère réputé non écrit des clauses prévu par l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, la déchéance du droit aux intérêts pour la SNC S. conformément aux dispositions de l'article L 311-33 du Code de la consommation. »

 

TRIBUNAL D’INSTANCE DE ROUBAIX

JUGEMENT DU 28 AVRIL 2003

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11-02-001641.

A l'audience publique du Tribunal d'Instance tenue le 28 avril 2003,

Sous la Présidence de Ghislain POISSONNIER, Juge d'Instance, assisté de Micheline MORIN, Greffier ;

Après débats à l'audience du 3 avril 2003, le jugement suivant a été rendu :

 

ENTRE :

DEMANDEUR(S) :

SNC S.

[adresse], représenté(e) par Maître KEHR Paul Alain, avocat du barreau de LILLE, d'une part

 

ET :

DÉFENDEUR(S) :

Monsieur X.

Chez Mme Z. [adresse], non comparant

Madame Y épouse X.

[adresse}, non comparant, d'autre part

[minute page 2]

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon l'offre préalable en date du 17 septembre 1998, la SNC S. a consenti à M. X. et à Mme épouse X. un crédit de type prêt personnel dénommé « Expresso » n° WW portant sur un montant de 140.000 F (21.342,86 euros), au TEG de 7,75 %, et, remboursable en 84 mensualités de 2.154,97 F (328,52 euros) assurance facultative comprise.

Par acte d'huissier en date du 9 décembre 2002, la SNC S. a assigné M. X. et à Mme Y. épouse X. devant le Tribunal d'instance de ROUBAIX afin de les voir condamner solidairement à lui payer, au bénéfice de l'exécution provisoire :

- la somme de 18.081,89 euros représentant le capital restant dû, les mensualités échues impayées et l'indemnité de 8 %, assortie des intérêts au taux contractuel,

- et la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

A l'audience du 6 février 2003, où l'affaire a été évoquée une première fois, la SNC S. a confirmé ses demandes en faisant valoir que M. X. et à Mme Y. épouse X. s'étaient montrés défaillants dans le paiement des mensualités. De leur côté, M. X. et à Mme Y. épouse X. ont reconnu la dette en son principe et ont sollicité des délais de paiement en avançant qu'ils avaient actuellement des difficultés financières.

Par jugement avant dire droit daté du 6 mars 2003, le Tribunal a soulevé d'office un moyen de droit tiré de la présence de clauses éventuellement abusives figurant à l'article 5-c des conditions générales de l'offre préalable de prêt personnel, en ce qu'elles prévoient la possibilité de résilier le contrat de crédit dans des cas autres que celui de la défaillance de l'emprunteur, la présence de ces clauses étant susceptible d'entraîner une déchéance du droit aux intérêts.

A l'audience du 3 avril 2003, où l'affaire a été évoquée une seconde fois, la SNC S. a sollicité du Tribunal qu'il fasse droit à sa demande en paiement en indiquant :

- à titre principal, que les clauses figurant à l'article 5-c ne présentaient aucun intérêt pratique pour le présent litige, la demande de l'établissement de crédit étant une demande en paiement fondée exclusivement sur la défaillance des emprunteurs dans le paiement des échéances,

- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où ces clauses seraient déclarées abusives, que la sanction appliquée soit celle du caractère réputé non écrit desdites clauses en application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation et non celle de la déchéance du droit aux intérêts, sanction extensive non prévue en pareille situation.

M. X. et à Mme Y. épouse X. n'ont pas formulé d'observation sur ce point.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La SNC S. réclame la condamnation des défendeurs à lui régler le solde impayé du crédit attribué le 17 septembre 1998, en principal, intérêts et frais.

Au vu des pièces fournies à l'audience (contrat de crédit en original, tableau d'amortissement, historique des paiements depuis l'origine, lettre de mise en demeure constatant la déchéance [minute page 3] du terme), la demande en paiement de la SNC S. apparaît fondée en son principe.

Toutefois, s'agissant d'une demande en paiement ayant pour origine un contrat de crédit à la consommation soumis aux dispositions d'ordre public du Code de la consommation, il appartient au juge de vérifier le droit du prêteur au paiement des intérêts et frais au regard de la régularité de l'offre préalable de crédit souscrite.

 

Sur le pouvoir du juge de soulever le caractère abusif d'une clause contenue dans un contrat de crédit :

Conformément à l'arrêt rendu par la Cour de Justice des Communautés Européennes le 21 novembre 2002 (COFIDIS SA et Jean-Louis Fredout, C-473/00), le juge d'instance peut, malgré l'expiration du délai de forclusion de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, relever d'office ou à la suite d'une exception soulevée par le consommateur, le caractère abusif d'une clause insérée dans un contrat de crédit à la consommation, et ceci afin d'atteindre le résultat fixé à l'article 6 de la directive 93/13/CEE, à savoir garantir que les clauses abusives ne lient pas le consommateur.

En l'espèce, le contrat conclu entre les parties le 17 septembre 1998 est un contrat de crédit à la consommation soumis aux dispositions d'ordre public du Code de la consommation.

Malgré l'expiration du délai biennal de forclusion en date du 18 septembre 2000, le juge d'instance avait bien le pouvoir de relever d'office, par jugement avant dire droit en date du 6 mars 2003 et en application des articles 12 et 16 du NCPC, le caractère abusif de clauses insérées dans le contrat de crédit, dès lors que ce moyen a été soumis au débat contradictoire.

 

Sur le caractère abusif des clauses contenues dans le contrat de crédit :

En application des dispositions des articles L. 311-13 et R. 311-6 du Code de la consommation, l'offre préalable de crédit soumise par le professionnel à l'emprunteur doit être conforme au modèle type applicable à l'opération de crédit envisagée et comporter toutes les mentions obligatoires prévues par la loi et le décret (Cass. civ 1ère, 25 avril 1989).

Dans le cas contraire, le juge peut prononcer la sanction de la déchéance du droit aux intérêts. Mais il n'est pas interdit au prêteur de faire figurer sur son offre d'autres mentions ou clauses. Toutefois, ces clauses non prévues par le modèle type ne doivent pas aggraver la situation de l'emprunteur par rapport au minimum légal.

En l'espèce, l'offre préalable de prêt personnel du 17 septembre 1998 devait être conforme au modèle type n° 3.

Sa lecture révèle qu'elle contient des clauses figurant à l'article 5-c des conditions générales de l'offre, prévoyant la possibilité pour la SNC S. « de prononcer la résiliation anticipée du contrat » dans les cas suivants :

« - cessation de la domiciliation des salaires du ou des emprunteurs lorsqu'elle a été prévue ;

- clôture du compte courant ou dénonciation du compte joint domiciliataire des échéances du prêt ;

- inobservation de l'une des conditions du présent contrat ».

Ces clauses confèrent un avantage contractuel à l'établissement de crédit dont il peut se prévaloir. Elles ne sont pas en elles-même abusives, dans la mesure où elles n'ont pas pour [minute page 4] effet, au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Mais ces clauses prévoient la possibilité pour la SNC S. de prononcer la résiliation du contrat de crédit dans des cas autres que celui de la défaillance de l'emprunteur. Or, le modèle type n°1, auquel renvoie le modèle type n° 3, ne prévoit la possibilité pour le prêteur d'exiger le remboursement immédiat des sommes dues uniquement en cas de « défaillance (...) dans les remboursements » de l'emprunteur.

Ainsi, les clauses prévues au contrat aggravent la situation de l'emprunteur par rapport au contenu du modèle type, qui constitue un minimum légal de protection pour le consommateur auquel il ne peut être dérogé. Le caractère abusif de ces clauses découle de ce que le prêteur créé un déséquilibre par rapport à une situation juridique organisée de manière détaillée par les textes en vigueur visant à protéger l'emprunteur, peu important que ces clauses ne soient pas le fondement juridique de l'action en paiement.

 

Sur la sanction attachée à la présence de clauses abusives contenues dans le contrat de crédit :

La présence de clauses abusives rend l'offre de crédit irrégulière par rapport aux modèles types prévus aux dispositions de l'article L. 311-13 et R. 311-6 du Code de la consommation. Leur présence est ainsi sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts, la Cour de cassation ayant approuvé une cour d'appel qui avait prononcé la déchéance du droit aux intérêts pour ce motif (Cass. civ. 1ère, 1er déc. 1993, Daguerre : Bull. civ. I, p. 247).

Ainsi, la sanction attachée à la présence des clauses abusives figurant à l'article 5-c des conditions générales de l'offre du 17 septembre 1998 est, outre le caractère réputé non écrit des clauses prévu par l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, la déchéance du droit aux intérêts pour la SNC S. conformément aux dispositions de l'article L 311-33 du Code de la consommation.

 

Sur le montant de la créance :

L'article L. 311-33 du Code de la consommation prévoit que lorsque l'établissement de crédit est « déchu du droit aux intérêts », l'emprunteur n'est « tenu qu'au seul remboursement du capital ».

Le montant de la créance de la SNC S. sera fixé en déduisant le montant des règlements du montant du capital emprunté.

- Capital emprunté : 21.342,86 euros.

- Montant des règlements depuis l'origine (à déduire) : 15.060,13 euros

Total restant à payer : 6.282,73 euros.

M. X. et à Mme Y. épouse X. seront donc condamnés à payer à la SNC S. la somme de 6.282,73 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la date du présent jugement.

[minute page 5]

Sur l'exécution provisoire :

La nature de l'affaire et l'ancienneté du litige imposent que soit ordonnée l'exécution provisoire.

 

Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la SNC S. la totalité des frais non compris dans les dépens qu'elle a dû engager dans la présente instance. Sa demande faite au titre de l'article 700 du NCPC sera donc rejetée.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire, en premier ressort,

- condamne M. X. et à Mme Y. épouse X. solidairement à payer à la SNC S. au titre du contrat de prêt du 17 septembre 1998, la somme de 6.282,73 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la date du présent Jugement ;

- rejette toute autre demande ;

- ordonne l'exécution provisoire ;

- rappelle qu'il appartient â M. X. et à Mme Y. épouse X , en cas de plan conventionnel ou judiciaire de surendettement, de transmettre une copie du présent jugement à la Commission de surendettement de ROUBAIX ;

- condamne M et Mme Y. épouse X. aux dépens.

Ainsi jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et le Président n signé avec le Greffier.

Le Président                                                 Le Greffier