CA VERSAILLES (1re ch. 1re sect.), 16 mars 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7520
CA VERSAILLES (1re ch. 1re sect.), 16 mars 2018 : RG n° 16/00487
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Considérant en effet que, comme l'a exactement retenu le tribunal, le renvoi était parfaitement visible et lisible dès lors que, en dépit de la contestation de M. X., il figurait bien en caractères gras bien que d'une police de caractère relativement petite ».
2/ « Mais considérant que le tribunal, après avoir rappelé les termes de l'article 8.3 des conditions générales de la société Bouygues, a exactement retenu que le manquement de celle-ci à ses engagements contractuels n'était pas d'une gravité telle qu'il soit de nature à tenir en échec le jeu de la clause ; qu'en effet, celle-ci ne supprime aucunement toute contrainte à l'obligation pour la société Bouygues Telecom de livrer les prestations objet du contrat et d'en assurer le fonctionnement continu qui sont la cause même de l'obligation de paiement du client ; qu'en bref, en rien la clause litigieuse ne vide le contrat de sa substance alors que l'équilibre du contrat doit s'apprécier dans son économie globale ; qu'en outre, c'est de manière tout aussi pertinente que le tribunal a retenu que M. X. ne pouvait d'autant moins se plaindre d'un déséquilibre des obligations contractuelles qu'il avait obtenu devant le juge des référés l'engagement de la société Bouygues Telecom de maintenir ses services malgré la suspension des paiements ; que, par ailleurs, il en découle que de quelque manière que puisse être qualifiée la situation de M. X., professionnel ou non, il n'existe aucun déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au sens du code de la consommation ; qu'en effet, sur l'ensemble des prestations fournies, seul le fonctionnement du fax a été affecté ; que la société Bouygues Telecom a donc bien exécuté son obligation essentielle de fournir le service ; que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a jugé applicable à l'espèce la clause litigieuse ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
PREMIÈRE CHAMBRE PREMIÈRE SECTION
ARRÊT DU 16 MARS 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 16/00487. Code nac : 56C. CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 novembre 2015 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE (pôle civ.7e ch.) : R.G. n° 14/12609.
LE SEIZE MARS DEUX MILLE DIX HUIT, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant après prorogation les 9 février 2018 et 9 mars 2018 les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre :
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], Représentant : Maître Pierre GUTTIN, Postulant/Déposant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 - N° du dossier 16000022
INTIMÉE :
SA BOUYGUES TELECOM
N° SIRET : XXX, Représentant : Maître Pascale REGRETTIER GERMAIN substituée par Maître Bénédicte GEORGES de la SCP HADENGUE & ASSOCIES, Postulant/Déposant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98 - N° du dossier P1600060
Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 4 décembre 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne LELIEVRE, conseiller, et Madame Nathalie LAUER, conseiller chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Monsieur Alain PALAU, président, Madame Anne LELIEVRE, conseiller, Madame Nathalie LAUER, conseiller
Greffier, lors des débats : Madame Sabine MARÉVILLE,
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu le jugement rendu le 24 novembre 2015 par le tribunal de grande instance de Nanterre qui a :
- débouté M. X. de ses demandes de dommages-intérêts présentées contre la SA Bouygues Telecom pour dysfonctionnements d'internet, de messagerie électronique et de télécopie pour temps passé perdu et en réparation d'un préjudice d'image,
- condamné M. X. aux dépens de l'instance,
- condamné M. X. à payer à la SA Bouyges Telecom la somme de 3.000 euros en indemnisation de ses frais irrépétibles.
Vu l'appel relevé le 20 janvier 2016 par M. X. qui, dans ses dernières conclusions notifiées le 29 septembre 2017, demande à la cour de :
- infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 24 novembre 2015,
- condamner la société Bouygues Telecom à payer à M. X. :
* au titre du préjudice de dysfonctionnement d'internet, de messagerie électronique et de télécopie, la somme de 16.200 euros,
* au titre du préjudice pour temps passé à gérer les échanges correspondants avec Bouygues Telecom, la somme de 6.000 euros,
* au titre du préjudice d'image, la somme de 6.000 euros,
- condamner Bouygues Telecom aux entiers dépens ainsi qu'à la somme de 4 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions notifiées le 13 septembre 2017 par la société Bouygues Telecom, par lesquelles elle demande à la cour de :
A titre principal,
- constater, dire et juger que M. X. ne rapporte pas la preuve de la durée des dysfonctionnements de service qu'il allègue à l'appui de ses demandes,
- constater, dire et juger que la société Bouygues Telecom n'a pas commis de manquement contractuel à l'égard de M. X. qui soit suffisamment grave pour justifier qu'il soit fait droit aux demandes de ce dernier,
- constater, dire et juger que la société Bouygues Telecom a accordé de nombreux gestes commerciaux à M. X. et qu'elle a été très diligente dans le traitement de ses réclamations,
En conséquence,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- débouter M. X. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société Bouygues Telecom,
A titre subsidiaire,
- constater, dire et juger que le contrat de service a été souscrit par M. X. à des fins professionnelles et en rapport direct avec son activité,
- constater, dire et juger que la société Bouygues Telecom n'a pas commis de faute lourde ou de dol,
En conséquence,
- dire et juger que les dispositions des conditions générales de service prévoyant une clause limitative de réparation au bénéfice de la société Bouygues Telecom sont opposables à M. X.,
- dire et juger que l'indemnisation qui serait octroyée M. X. serait réalisée dans les conditions prévues conformément auxdites conditions générales de service et ne pourra en tout état de cause excéder la somme de 763,41 euros HT soit 916,09 euros TTC,
A titre infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour devrait considérer que la clause limitative de réparation dont le bénéfice est invoqué ne serait pas opposable à M. X.,
- constater en tout état de cause que M. X. ne rapporte pas la preuve tant de l'existence que du quantum du préjudice dont il sollicite réparation,
En conséquence,
- débouter M. X. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société Bouygues Telecom,
En tout état de cause :
- condamner M. X. au paiement de la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile dont distraction au profit de Maître R.-G.,
- condamner M. X. au paiement des entiers frais et dépens de l'instance.
FAITS ET PROCÉDURE :
M. X., avocat, a le 16 mai 2014 signé pour accord une offre de téléphonie fixe/fax et internet ADSL, pour un prix de 198 euros HT par mois, outre la mise en service de 50 euros HT. Il a également signé pour accord le bon de commande transmis ce même mois de mai 2014 par l'opérateur.
Ce service comprend :
- une « Solution Standard PBXNèo 2 » avec accès de base, soit 4 communications simultanées pour le standard [...], avec accès illimité vers les fixes et mobiles en France, les fixes en Europe proche et les fixes et mobiles aux Etats-Unis et au Canada,
- l'A.D.S.L. pour internet,
- une ligne analogique de fax n° [...].
M. X. a reçu le 26 mai 2014 de la société Bouygues Telecom un avis de déploiement de sa solution, puis une première facture pour le mois de juin 2014.
Faisant valoir une installation défectueuse, un fonctionnement aléatoire de la boite mail et un non-fonctionnement de la ligne analogique et du fax, M. X. a par acte délivré le 24 juillet 2014 fait assigner la société Bouygues Telecom devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Nanterre aux fins de suspension des factures émises et de maintien du service dans l'attente d'une décision au fond du tribunal. Par ordonnance rendue le 1er août 2014, le juge des référés a, devant l'engagement de la société Bouygues Telecom de ne pas limiter les services de M. X. du fait du non-paiement de ses factures, provisoirement suspendu le paiement de celles-ci et fait injonction à la société de téléphonie de mettre en œuvre sans délai le service de télécopie sur la ligne [...], sous astreinte de 500 euros par jour de retard. M. X. a été autorisé à suspendre le paiement du coût de la ligne analogique jusqu'à mise en service de cette ligne. Le magistrat a ensuite statué sur les dépens et frais irrépétibles.
Arguant du mauvais fonctionnement et d'incidents techniques et administratifs concernant le service ouvert, M. X. a ensuite et par acte délivré le 24 octobre 2014 fait assigner en indemnisation au fond la société Bouygues Telecom devant le tribunal de grande instance de Nanterre qui a prononcé le jugement querellé.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR :
Sur la faute :
Considérant que M. X. reproche à la société Bouygues Telecom non seulement des désordres techniques mais encore un traitement administratif de ceux-ci désinvoltes ; qu'il invoque :
- Des désordres affectant la ligne de télécopie jusqu'au 14 août 2014, soit durant un mois et demi ; que la cour observe toutefois que telle est bien la durée prise en compte par le jugement déféré ; que la circonstance que le jugement se soit trompé sur l'origine du dysfonctionnement, dégroupage partiel au lieu d'un dégroupage total, est sans incidence sur le préjudice ;
- Des désordres affectant la messagerie électronique et le service internet dont la preuve est selon lui suffisamment rapportée par la reconnaissance qu'a pu en faire, explicitement ou implicitement, la société Bouygues Telecom ; qu'il fait valoir en effet que son intervention, le 1er août 2014 pour tenter de rétablir la messagerie électronique et internet, ne peut avoir pour origine que l'existence de défaillances indiscutées de son installation ; que pour la période postérieure, l'intervention de Bouygues Telecom a consisté à installer une solution provisoire sur le réseau 4G dont il reconnaissait que le débit internet en voie montante serait sans doute moins important que celui obtenu via la solution existante ; que le remplacement de cette solution, le 9 septembre 2014, démontre bien que cette solution provisoire n'était pas véritablement opérationnelle ; qu'il est démontré en outre que le fonctionnement avec le réseau 4G posait des problèmes pour l'utilisation du réseau privé virtuel avocat ; qu'en aucun cas, il n'est établi que ces dysfonctionnements soient le fait d'un défaut d'utilisation du service par le cabinet X. ; que le tribunal a commis une erreur de droit en inversant la charge de la preuve ; qu'il est en effet établi que ce n'est que le 9 septembre 2014 que sera installée la B.Box de Bouygues Telecom, apte à assurer le fonctionnement du service ; qu'il incombe donc à Bouygues Telecom, à défaut d'avoir fourni la prestation convenue, de rapporter la preuve que la solution provisoire possédait des standards techniques aux moins équivalents à ceux de la prestation prévue ; qu'en outre, l'explication technique donnée par le tribunal selon laquelle la situation aurait été la conséquence d'un dégroupage partiel au lieu d'un dégroupage total qui aurait dû être sollicité auprès d'Orange est erronée puisque comme l'indiquait la société Bouygues Telecom elle-même, c'est la situation inverse qui s'est produite ; qu'en troisième lieu, la référence à une altération de l'usage des seules « basses fréquences » affectant la télécopie mais non des fréquences hautes donnant accès aux services internet relève d'une analyse technique pour laquelle le tribunal ne disposait d'aucun appui technique ; que d'ailleurs, sur le plan technique toute ligne internet est nécessairement raccordée à une ligne analogique, qui était en l'occurrence celle de la télécopie ; que la coupure de la télécopie entraîne donc mécaniquement celle de la messagerie électronique ;
Considérant que la société Bouygues Telecom réplique que les relevés détaillés des factures des mois de juin et juillet 2014 laissent apparaître des consommations concernant l'ensemble des services de téléphonie fixe et des consommations de « data », ce qui établit que les services ont été activés ; que le dysfonctionnement n'a affecté que la ligne de télécopie ; que, dès le 2 juillet 2014, l'émission et la réception des courriers électroniques était rétablie comme l'a confirmé M. X. dans son mail du 3 juillet 2014 ; qu'en outre la connexion internet via une ligne ADSL dont le n° est [...] à laquelle M. X. a également souscrit était parfaitement fonctionnelle ; que les dysfonctionnements partiels du service d'accès à Internet afférents à la ligne de télécopie entre le 3 juillet et le 9 septembre 2014 ne sont pas justifiés ; que seul un problème de très courte durée a été rencontré ; qu'il était dû à la capacité de stockage de la messagerie de l'appelant et non à un dysfonctionnement imputable à la société Bouygues Telecom et aussi à un défaut de paramétrage de son service de messagerie ; que, s'agissant du service de télécopie, M. X. n'a jamais sollicité la liquidation de l'astreinte en exécution de l'ordonnance de référé du 1er août 2014, ce qui tend à prouver que le service était rétabli dès cette date ; qu'au demeurant, elle verse des tests du 1er et 11 août 2014, effectués en collaboration avec M. X., qui démontrent un fonctionnement parfait des services concernés ; que les nouveaux rapports d'erreurs versés par M. X. en cause d'appel ne précisent pas à partir de quel numéro de télécopie le fax a été émis ; que rien ne permet donc d'affirmer que les fax ont été émis à partir de la ligne de télécopie litigieuse ; qu'en tout état de cause, il a reconnu lui-même aux termes de sa lettre du 11 septembre 2014 que le service de télécopie était effectif ;
Considérant, ceci exposé, qu'avant de demander à la société Bouygues Telecom de faire la preuve que la solution provisoire était quelque peu opérationnelle, encore convient-il de rapporter la preuve des dysfonctionnements allégués ; que la circonstance que le réseau 4G soit moins performant que la solution contractuelle qui aurait dû fonctionner ne démontre pas en soi le dysfonctionnement de la messagerie et d'internet ; que le mail du 27 mai 2015 (pièce n°64 de l'appelant) n'indique pas que le système réseau privé virtuel avocat est incompatible avec le réseau 4G ; qu'il indique au contraire que le RPVA peut être utilisé par le réseau 4G à condition qu'il soit bien stable, sûr et qu'il soit bien en 4G/4G+ et non en edge ; qu'au demeurant, il n'est justifié d'aucun dysfonctionnement RPVA ; que cette solution provisoire a d'ailleurs été utilisée jusqu'au 9 septembre 2014, date à laquelle la ligne recréée a été installée ; que le tribunal a exactement retenu au terme de motifs adoptés par la cour que, le 26 mai 2014, M. X. avait été notifié de ce que l'utilisation d'une de ses lignes analogiques pour le déploiement de sa solution entraînera une interruption du service Internet associé à celle-ci ; qu'il doit être rappelé que M. X. disposait de trois lignes, l'une sur le n°[...], dédié au fax, une autre sur le n°[...] qui devait être reprise chez Bouygues Telecom et enfin la ligne ADSL n°[...] ; que M. X. ne peut donc sérieusement se prévaloir du dysfonctionnement de la ligne analogique dédiée au fax pour faire preuve des dysfonctionnements internet dès lors, en outre qu'il disposait d'une autre ligne permettant la connexion à internet ; que, le 2 juillet 2014, un technicien a installé la ligne internet, le tribunal ayant retenu, sans être contesté sur ce point, que par mail du 2 juillet 2014, M. X. avait reconnu que le service des courriers électroniques avait ainsi été remis en œuvre ; que le tribunal a donc exactement retenu que la coupure avait duré trois jours ce dont M. X. avait expressément été avisé par la société Bouygues Télécom ; qu'il ne peut être tiré aucun argument du remplacement le 9 septembre 2014 de la solution provisoire dès lors que cette intervention a consisté à mettre en place la solution contractuelle ; qu'en bref, pas plus devant la cour que devant le tribunal ou encore devant le juge des référés, les dysfonctionnements internet ne sont prouvés ;
- Des dégâts collatéraux relatifs à la déconnexion du scanner concomitante à l'intervention d'un technicien de Bouygues et signalés le 3 juillet 2014 pour lesquels il ne sollicite toutefois pas une indemnisation spécifique mais revendique l'infirmation du jugement qui a considéré qu'il n'en rapportait pas la preuve ;
Mais considérant que comme l'a justement rappelé le tribunal, affirmer n'est pas prouver ; qu'ainsi, la seule circonstance que M. X. se soit plaint de ce désordre n'est pas de nature à en rapporter la preuve ; qu'en tout état de cause, il ne tire pas les conséquences juridiques de ses affirmations en ce qu'il indique lui-même ne pas solliciter d'indemnisation distincte de ce préjudice ;
Considérant en définitive que, comme l'a exactement retenu le tribunal, le seul manquement de la société Bouygues Telecom à ses engagements contractuels vis-à-vis de M. X. a consisté en une interruption de la ligne de télécopie pendant un mois et demi ; qu'il est tout aussi exact que la défaillance de l'accès à internet pendant trois jours était contractuellement prévue et a été dûment annoncée au client ; qu'elle ne constitue donc pas un manquement ; que, pas plus à hauteur de cour que devant le tribunal, la preuve des autres dysfonctionnements n'est rapportée ;
Sur l'indemnisation des préjudices :
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 1134 et de l'article 1147 du code civil dans leur rédaction applicable au présent litige, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'elles doivent être exécutées de bonne foi et se résolvent en dommages et intérêts à raison de l'inexécution ou de la mauvaise exécution par le débiteur de l'obligation ;
Considérant que l'article 8.3 des conditions générales de la société Bouygues Telecom stipule en premier lieu que « la responsabilité de Bouygues Telecom ne pourra être engagée que pour les seuls dommages matériels et directs résultant d'une faute prouvée à son encontre. Sont exclus les préjudices immatériels et ou indirects. On entend par préjudices immatériels/ou indirects notamment les préjudices financiers et commerciaux, les pertes de chiffre d'affaires, de bénéfices ou de clientèle, et les pertes ou les corruptions de données, de fichiers et/ou de programmes » ; que le second alinéa ajoute que « pour tenir compte des obligations respectives des parties mais aussi de l'attractivité des tarifs de Bouygues Telecom, la responsabilité de Bouygues Télécom en raison des dommages matériels et/ou directs subis par le client dans le cadre de l'exécution ou de la cessation du service, quelle qu'en soit la cause, est limitée tous préjudices confondus, au montant des règlements effectués au titre du service au cours des trois derniers mois précédant la survenance de l'événement. Cette somme, dont le client reconnaît le caractère équilibré, inclut les éventuelles pénalités forfaitaires versées aux clients dans le cadre de l'exécution du service ;
Considérant que M. X. soutient d'une part que cette clause ne lui est pas opposable et d'autre part qu'elle est nulle ;
Sur l'opposabilité des conditions générales :
Considérant que M. X. fait valoir en premier lieu que l'acceptation de stipulations quelconques par un co-contractant s'apprécie différemment selon que celles-ci sont présentées au moment de la conclusion du contrat ou postérieurement ; qu'en effet, après la conclusion du contrat, le cocontractant ne s'attend plus à recevoir de modification de celles-ci ; qu'il appartient alors à la partie qui entend se prévaloir de dispositions introduites postérieurement à la conclusion du contrat de démontrer qu'elles ont été effectivement acceptées par l'autre ; qu'en l'espèce, l'offre de la société Bouygues Telecom lui a été transmise par voie électronique le 15 mai 2014 ; qu'il l'a retournée signée le 16 mai 2014 de sorte qu'à cette date, la convention était définitivement formée, sans stipulation d'une clause limitative de responsabilité ; que ce n'est que par mail du 21 mai et non le 16 mai 2014, que le bon de commande comportant un renvoi à des conditions générales, transmis en pièce jointe, sera présenté à sa signature ; qu'aucune référence aux conditions générales n'était faite dans ce courrier d'envoi ; que rien n'apparaissant mériter un long examen, le bon de commande était alors retourné dans la foulée le 21 mai 2014 par télécopie à 17h24 ainsi qu'il ressort de l'exemplaire de cette télécopie versé aux débats par Bouygues Telecom elle-même devant le tribunal et communiqué à hauteur de cour en pièce n°45 ; qu'il reproche donc au tribunal d'avoir considéré que le bon de commande aurait été signé en même temps que son acceptation de l'offre le 16 mai 2014 ; qu'en effet, si ce bon de commande présente une date au 15 mai 2014, la lecture du document montre qu'il s'agit uniquement de la date de création de celui-ci ; qu'en outre la datation du 21 mai 2014 à 17h24 est indiscutablement corroborée par le courrier électronique de Bouygues Telecom du même jour à 16h27 auquel le bon de commande était joint de sorte que cette télécopie n'est clairement que le retour du courrier électronique adressé quelques instants auparavant ;
Considérant ceci exposé que le tribunal a justement retenu que M. X. n'avait pas daté lui-même sa signature du bon de commande ; que ce document (pièce n°45 de l'appelant) porte lui-même la date du 15 mai 2014 qui, en l'absence de toute autre référence de date constitue bien la date de celui-ci ; qu'il importe peu, dans ces conditions, qu'il soit indiqué « date de création » ; que, d'ailleurs, c'est bien à cette date que l'offre elle-même a été transmise à M. X. par mail (pièce n° 2 de l'appelant) qui l'a retournée le 16 mai 2014 en prenant, cette fois, le soin de préciser cette date de sa main ; qu'au regard de la datation, il est indifférent que ce document ait postérieurement fait l'objet d'un échange par mail et par fax entre les parties le 21 mai 2014 (pièce n° 48) ; que c'est donc à juste titre que le tribunal a considéré que la date du fax ne déterminait pas la date de signature du document ; qu'en tout état de cause, il résulte de la signature de ce bon de commande par M. X. que celui-ci a expressément accepté les conditions générales prévoyant la clause limitative de responsabilité qu'ainsi, la société Bouygues Telecom fait donc la bien la preuve que ces conditions générales, et en particulier la clause limitative de responsabilité et de garanties, ont été dûment acceptées par son client ;
Considérant en effet que, comme l'a exactement retenu le tribunal, le renvoi était parfaitement visible et lisible dès lors que, en dépit de la contestation de M. X., il figurait bien en caractères gras bien que d'une police de caractère relativement petite ; qu'en outre, M. X. ne peut soutenir que, pour un cocontractant d'attention moyenne, le texte à suivre du renvoi n'avait d'autre objet que de confirmer les informations figurant au-dessus dès lors qu'il était indiqué « je certifie exacte l'information... » ; qu'en effet, il est écrit en toutes lettres : « je certifie exactes les informations figurant sur le présent bon de commande. En outre, je reconnais avoir pris connaissance des conditions générales et particulières applicables aux services souscrits, des éventuelles spécifications techniques d'accès auxdits services, et des tarifs afférents, également disponibles sur www.Bouygues Telecom-entreprise.fr. En conséquence, je reconnais pouvoir m'engager en pleine connaissance de l'ensemble des éléments susmentionnés que j'accepte dans leur intégralité et qui constituent le contrat. (...) » ; Que la certification des informations est donc clairement distinguée de la prise de connaissance des conditions générales et particulières du contrat ; que, peu importe, dans ces conditions, la remarque surabondante du tribunal concernant « l'acuité juridique du professionnel du droit » ; qu'enfin, le dol, ne serait-ce que par réticence et qui serait de nature à faire échec à l'application de la clause limitative de responsabilité n'est pas plus établi devant la cour qu'en première instance ;
Sur la clause limitative de garantie :
Considérant que M. X. fait valoir que, dans le domaine de la vente, les clauses limitatives de responsabilité ne sont valables qu'entre professionnels de même spécialité ; que l'encadrement des prestations de services est tout aussi rigoureux ; que le jugement déféré a fait une fausse application des textes ; qu'en effet aux termes de l'article R. 132-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre des professionnels et des non professionnels ou des consommateurs, de manière irréfragable sont présumées abusives et dès lors interdites des clauses ayant pour objet de supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations ; qu'ainsi, dans un arrêt du 4 février 2016, la Cour de cassation a fait application de ce texte au profit d'une SCI, promoteur immobilier à l'encontre d'un contrôleur technique, au motif qu'ils n'étaient pas de même spécialité ; que cette jurisprudence a été confirmée dans un arrêt du 15 juin 2016 ; qu'en tout état de cause la clause limitative de responsabilité de Bouygues Telecom est nulle au visa des articles 1131, 1134 et 1147 du code civil ainsi qu'il en résulte des arrêts Chronopost ; qu'ainsi la clause limitative de responsabilité est nulle, non seulement en présence d'une faute lourde, mais encore lorsque la limitation découlant de la clause supprime l'exécution de obligation essentielle et prive l'engagement de cause ; que tel est le cas de l'article 8. 3 des conditions générales de la société Bouygues Telecom qui exclut du champ de la responsabilité toutes les fautes à l'exception de celles qui provoqueraient des dommages matériels et directs ; qu'or la prestation d'abonnement de communications téléphoniques et électroniques est immatérielle par nature de sorte que l'on voit mal comment elle pourrait produire un dommage matériel et direct ; que l'attractivité des tarifs invoqués par la société Bouygues Telecom n'est toutefois pas la contrepartie d'une limitation de responsabilité mais l'expression d'un effort commercial eu égard à l'ampleur des prestations ainsi qu'il en résulte de ses documents d'approche commerciale ; que le tribunal a confondu le régime des clauses limitatives de responsabilité et celui de l'exception d'inexécution ; qu'il se déduit néanmoins implicitement du raisonnement du tribunal que la clause litigieuse est dépourvue de contrepartie ;
Considérant que la société Bouygues Telecom réplique qu'il résulte de la jurisprudence, notamment de celle de la cour d'appel de Versailles, que les clauses limitatives de réparation sont valables ; que celles-ci ne sont écartées qu'en cas de faute lourde ou de dol ; qu'il appartient ainsi à celui qui sollicite l'exclusion de la clause de démontrer que les agissements du débiteur défaillant sont délibérés ; qu'en particulier, on ne peut pas considérer que le manquement à une obligation essentielle du contrat constitue ipso facto une faute lourde ; que la jurisprudence considère en particulier que tel n'est pas le cas dès lors qu'il n'y a pas d'exclusion totale de responsabilité vidant l'engagement du cocontractant de toute substance mais simplement une limitation pécuniaire de la réparation ; qu'en effet, seule la ligne analogique concernant le fax a connu un dysfonctionnement alors que, conformément aux stipulations contractuelles, la société Bouygues Telecom a fourni à M. X. 10 lignes de téléphonie fixes, parfaitement fonctionnelles et pour lesquelles il n'a formulé aucun grief ; que la ligne relative à la connexion internet via une ligne ADSL a également été fournie ; que, par ailleurs la réparation contractuelle ne saurait être qualifiée de dérisoire dès lors qu'elle est la juste contrepartie du coût modéré des prestations fournies ; qu'il serait ainsi disproportionné d'indemniser un commerçant pour la perte de chiffre d'affaires alléguée sur une période donnée suite à un dysfonctionnement de son service de télécopie ; qu'en effet admettre une telle réparation contraindrait la société Bouygues Telecom à engager des frais élevés, notamment en termes d'assurance, ce qui aurait une répercussion directe sur le coût des abonnements proposés aux clients ;
Mais considérant que le tribunal, après avoir rappelé les termes de l'article 8.3 des conditions générales de la société Bouygues, a exactement retenu que le manquement de celle-ci à ses engagements contractuels n'était pas d'une gravité telle qu'il soit de nature à tenir en échec le jeu de la clause ; qu'en effet, celle-ci ne supprime aucunement toute contrainte à l'obligation pour la société Bouygues Telecom de livrer les prestations objet du contrat et d'en assurer le fonctionnement continu qui sont la cause même de l'obligation de paiement du client ; qu'en bref, en rien la clause litigieuse ne vide le contrat de sa substance alors que l'équilibre du contrat doit s'apprécier dans son économie globale ; qu'en outre, c'est de manière tout aussi pertinente que le tribunal a retenu que M. X. ne pouvait d'autant moins se plaindre d'un déséquilibre des obligations contractuelles qu'il avait obtenu devant le juge des référés l'engagement de la société Bouygues Telecom de maintenir ses services malgré la suspension des paiements ; que, par ailleurs, il en découle que de quelque manière que puisse être qualifiée la situation de M. X., professionnel ou non, il n'existe aucun déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au sens du code de la consommation ; qu'en effet, sur l'ensemble des prestations fournies, seul le fonctionnement du fax a été affecté ; que la société Bouygues Telecom a donc bien exécuté son obligation essentielle de fournir le service ; que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a jugé applicable à l'espèce la clause litigieuse ;
Sur l'évaluation du préjudice :
Considérant que M. X. soutient que ni l'annulation des factures ni les sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ne traduisent une indemnisation ; qu'elles ne correspondent qu'à l'inexécution des prestations et au remboursement des frais exposés ; que les dysfonctionnements rencontrés lui ont fait perdre du temps et se sont traduits par une perte de chiffre d'affaires et une perte d'efficacité dans l'organisation de son cabinet ; que la réponse à ses correspondants signalant que son numéro n'était plus attribué lui a causé un préjudice d'image ;
Considérant que la société Bouygues Telecom réplique qu'elle a fait preuve de diligences en annulant les factures de téléphonie des 13 juin, 13 juillet 2014 et 13 août 2014, ce qui représente un montant total de 888,08 euro HT et ce, alors même que, sur la totalité des services fournis en contrepartie desdites factures, seul le service de télécopie n'a pas fonctionné et pendant une période très courte ; que le cabinet de M. X. n'a jamais été entièrement privé de tous moyens de communication ; qu'il ne saurait donc prétendre que la société Bouygues Telecom l'a privé de la possibilité d'exercer son métier dans des conditions normales ; 15 mars 2018 qu'elle lui a en outre accordé un avoir de 200 euros HT ; que M. X. a donc d'ores et déjà été indemnisé ;
Considérant ceci exposé que trois factures ont été annulées pour un montant total de 910,09 euros TTC ; que, de ce qui précède, il résulte que la clause limitative de responsabilité est opposable à M. X. qui, au surplus, ne justifie pas plus devant la cour que devant le tribunal des préjudices immatériels allégués ; que l'indemnisation accordée est parfaitement proportionnée à la réalité du préjudice subi qui n'a consisté qu'en un dysfonctionnement du service de télécopie durant un mois et demi et une défaillance, non fautive, de l'accès à Internet pendant trois jours ; qu'elle ne constitue donc pas la seule contrepartie des défectuosités ;
Sur les demandes accessoires :
Considérant que le jugement sera confirmé en ce qu'il a exactement statué sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que sur les dépens ; que, succombant en son appel et comme tel tenu aux dépens, M. X. sera débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; que les conditions ne sont pas davantage réunies pour faire application desdites dispositions au bénéfice de la société Bouygues Telecom qui sera donc déboutée de sa demande en ce sens ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 24 novembre 2015 par le tribunal de grande instance de Nanterre,
Et, y ajoutant,
Déboute M. X. et la société Bouygues Telecom de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. X. aux dépens d'appel.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Monsieur Alain PALAU, président, et par Madame Sabine MARÉVILLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,
- 5945 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Activité administrative - Téléphonie et télécopie
- 5946 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Activité administrative - Informatique
- 6087 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Opposabilité des conditions générales - Conditions figurant sur l’écrit signé par le consommateur - Clauses de reconnaissance et d’acceptation
- 6222 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par contrat - Téléphonie
- 6231 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Diminution de la responsabilité de l’auteur
- 6272 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Internet - Fourniture d’accès (5) - Obligations du fournisseur
- 6389 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs - Acceptation et opposabilité des clauses
- 6390 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs - Obligation essentielle
- 6443 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Téléphonie - Téléphonie fixe