TGI TOULOUSE (4e ch. Cab 1), 17 juin 2005
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 777
TGI TOULOUSE (4e ch. Cab 1), 17 juin 2005 : RG n° 03/03074 ; jugement n° 05/422
(sur appel CA Toulouse (2e ch. sect. 1), 22 mars 2007 : RG n° 05/04387 ; arrêt n° 139)
Extrait : « Et l'article 11 des conditions générales de transport qui figurent sur l'étui du titre de transport, prévoit bien une exonération de responsabilité de la compagnie en cas notamment de modifications, interruptions de services ou de retards dans les départs et arrivées, et notamment du retard dans l'exécution du contrat de transport ni de son inexécution ni toutes les conséquences pouvant résulter de grèves totales ou partielle. Il y est précisé que la compagnie décline par suite toute responsabilité pour les conséquences de ces irrégularités ou interruptions ou suppressions de service et les frais et de séjour seront à la charge des passagers.
Toutefois l'article L. 132-1 du Code de la Consommation répute non écrites les clauses abusives dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs. Il les définit comme celles qui ont pour objet ou pour effet de créer de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, le juge national pouvant apprécier d'office le caractère abusif ce caractère abusif (CJCE 27 juin 2000). Ce texte ajoute que ces dispositions sont applicables quels que soient la forme ou le support du contrat : bons de commande, factures, bons de garantie, bordereaux ou bons de livraison, billets ou tickets contenant des stipulations négociées librement au non ou des références à des conditions générales préétablies.
En l'espèce Madame X. ne peut affirmer qu'elle n'a pas eu connaissance des conditions visées à l'article 11 alors qu'est versé au dossier dans ses propres pièces, l'étui d'un titre de transport qui ne peut que lui appartenir et sur lequel est imprimé cet article 11. En revanche et contrairement aux affirmations de la SNCM les dispositions de cet article clause constitue une clause abusive puisque le voyageur qui s'acquitte du prix du voyage, lequel est souvent relativement onéreux compte tenu des distances parcourues, ne peut se voir indemniser ou alors que de façon [forfaitaire] pour un montant dérisoire (40 euros en l'espèce) alors que le départ est annulé du seul fait des préposés de l'armateur. Cette situation crée bien un déséquilibre entre les droits et obligations des parties et ce d'autant plus que l'information du voyageur ne lui parvient qu'au moyen d'un simple étui de billet au moment où il vient de s'acquitter du prix du voyage et par des caractères d'imprimerie minuscules. Ce déséquilibre et d'autant plus flagrant qu'il résulte de stipulation non librement négociées et de références à des conditions générales préétablies.
Dans ces conditions la SNCM ne peut s'exonérer de sa responsabilité envers Madame X. et ne lui accorder que la somme de 40 euros. Madame X. doit être remboursée à hauteur de la moitié du prix du passage. »
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TOULOUSE
QUATRIÈME CHAMBRE CAB 1
JUGEMENT DU 17 JUIN 2005
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
RG n° 03/03074. Minute n° 05/422.
PRÉSIDENT : Mademoiselle CLEMENT, Juge
Statuant à juge unique conformément aux dispositions de l'article 817 du Nouveau Code de Procédure civile.
GREFFIER LORS DU PRONONCÉ : Madame BROUSSES, Greffier
DÉBATS : à l'audience publique du 6 mai 2005, les débats étant clos, le jugement a été mis en délibéré à l'audience de ce jour.
JUGEMENT : Contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe
DEMANDERESSE :
Madame X.
demeurant [adresse], représentée par SCP AZAM, SIREYJOL, avocats au barreau de TOULOUSE, avocats plaidant/postulant, vestiaire : 324
DEFENDERESSE :
SOCIÉTÉ NATIONALE MARITIME CORSE MÉDITERRANÉE
dont le siège social [adresse] représentée par Maître CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant/postulant, vestiaire :
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :
Madame X. a acquis un titre de transport auprès de la SOCIÉTÉ NATIONALE MARITIME CORSE MÉDITERRANÉE (SNCM) grâce auquel elle devait embarquer le 2 décembre 2002 au Port de Marseille, à 16 h. à destination d'Alger.
Le jour du départ à 18 h. 30, elle a appris raison d'un mouvement de grève le départ était reporté au lendemain.
A titre de dédommagement la SNCM a versé aux voyageurs une somme forfaitaire de 40 euros et a refusé de dédommager Madame X. de ses préjudices.
Vu l'assignation introduite par Madame X. à l'encontre de la SOCIÉTÉ NATIONALE MARITIME CORSE MÉDITERRANÉE par acte d'huissier en date du 3 octobre 2003 devant le Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE afin d'obtenir sa condamnation à la réparation de son préjudice aux motifs que le transporteur a failli à son obligation d'acheminer sa cliente dans les délais convenus au contrat de transport.
Vu ses dernières conclusions en date du 21 septembre 2004 aux termes desquelles elle réclame, sur le fondement des articles 1134 et 1147 du Code Civil et le bénéfice de l'exécution provisoire, la condamnation de la SNCM à lui payer la somme de 8.000 euros en réparation de son préjudice, outre la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et conclut au débouté de la compagnie de navigation sur ses demandes reconventionnelles faisant valoir qu'elle n'a pas eu connaissance des conditions générales du contrat qui lui opposées pour lui refuser une indemnisation et que la grève ne peut s'analyser comme un motif de force majeure pour la SNCM.
Vu les dernières conclusions de la SNCM en date du 21 janvier 2005 aux termes desquelles elle conclut, au principal, au débouté de Madame X. et à titre subsidiaire au versement à la demanderesse d'une indemnité égale à la moitié du prix du passage ainsi qu'à titre infiniment subsidiaire la réduction de ses prétentions financières expliquant que le contrat de transport maritime est un contrat d'adhésion ; les conditions générales de transport qui figurent sur les étuis des billets et qui précisent que la grève est un élément exonératoire de responsabilité en matière de transport maritime font la loi des parties ; en vertu des dispositions de la loi du 18 juin1966 et du décret du 31 décembre 1966 elle justifie avoir fait le maximum pour respecter le contrat ; le décret indique par des dispositions auxquelles il peut être dérogées, que le contrat est résolu avec indemnité si le transporteur ne peut établir que la cause de l'absence de départ ne lui est pas imputable ; les conditions générales du [minute page 3] contrat sont compatibles avec les dispositions du Code de la Consommation sur les clause abusives Madame X. pouvait profiter de nombreux hôtels en ville ; les conditions de navigation sur le navire emprunté le lendemain par Madame X. sont confortables.
Vu l'ordonnance de clôture du 14 mars 2005.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Sur le fond :
L'article 34 de la loi du 18 juin 1966 précise que par le contrat de passage l'armateur s'oblige à transporter par mer sur un trajet défini un voyageur qui s'oblige à acquitter le prix du passage.
Et son article 39 indique que le transporteur est responsable des dommages dus au retard qui tient à l'inobservation de l'article 36 (mettre et conserver le navire en état de navigabilité convenablement armé équipé et approvisionné, faire tout diligences pour assurer la sécurité des passagers) ou à la faute commerciale de ses préposés.
En l'espèce le 2 décembre 2002, Madame X. a été victime d'un mouvement de grève du personnel navigant bloquant le navire au port de Marseille.
Peu importe que cette grève ait été soudaine et imprévisible dès lors qu'elle constitue une faute commerciale des préposés de la SNCM au sens de l'article 39 de la loi du 18 juin 1966.
En effet l'arrêt de travail des employés de la compagnie maritime n'a pas permis aux voyageurs de quitter le port pour rejoindre leur destination, de sorte que la SNCM a failli à sa propre obligation de les transporter sur un trajet défini, alors qu'ils en avaient acquitté le prix.
La défenderesse ne peut donc affirmer que ce mouvement de grève ne lui serait pas imputable.
Conformément aux dispositions de l'article 69 du décret du 31 décembre 1996, dans ces conditions, elle doit donc à Madame X., une indemnité égale à la moitié du prix du passage.
Certes l'interprétation a contrario de l'article 61 du décret permet que des dérogations soient apportées à aux dispositions de l'article 69.
Et l'article 11 des conditions générales de transport qui figurent sur l'étui du titre de transport, prévoit bien une exonération de responsabilité de la compagnie en cas notamment de modifications, interruptions de services ou de retards dans les départs et arrivées, et notamment du retard dans [minute page 4] l'exécution du contrat de transport ni de son inexécution ni toutes les conséquences pouvant résulter de grèves totales ou partielle.
Il y est précisé que la compagnie décline par suite toute responsabilité pour les conséquences de ces irrégularités ou interruptions ou suppressions de service et les frais et de séjour seront à la charge des passagers.
Toutefois l'article L. 132-1 du Code de la Consommation répute non écrites les clauses abusives dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs.
Il les définit comme celles qui ont pour objet ou pour effet de créer de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, le juge national pouvant apprécier d'office le caractère abusif ce caractère abusif (CJCE 27 juin 2000).
Ce texte ajoute que ces dispositions sont applicables quels que soient la forme ou le support du contrat : bons de commande, factures, bons de garantie, bordereaux ou bons de livraison, billets ou tickets contenant des stipulations négociées librement au non ou des références à des conditions générales préétablies.
En l'espèce Madame X. ne peut affirmer qu'elle n'a pas eu connaissance des conditions visées à l'article 11 alors qu'est versé au dossier dans ses propres pièces, l'étui d'un titre de transport qui ne peut que lui appartenir et sur lequel est imprimé cet article 11.
En revanche et contrairement aux affirmations de la SNCM les dispositions de cet article clause constitue une clause abusive puisque le voyageur qui s'acquitte du prix du voyage, lequel est souvent relativement onéreux compte tenu des distances parcourues, ne peut se voir indemniser ou alors que de façon [forfaitaire] pour un montant dérisoire (40 euros en l'espèce) alors que le départ est annulé du seul fait des préposés de l'armateur.
Cette situation crée bien un déséquilibre entre les droits et obligations des parties et ce d'autant plus que l'information du voyageur ne lui parvient qu'au moyen d'un simple étui de billet au moment où il vient de s'acquitter du prix du voyage et par des caractères d'imprimerie minuscules.
Ce déséquilibre et d'autant plus flagrant qu'il résulte de stipulation non librement négociées et de références à des conditions générales préétablies.
Dans ces conditions la SNCM ne peut s'exonérer de sa responsabilité envers Madame X. et ne lui accorder que la somme de 40 euros.
[minute page 5] Madame X. doit être remboursée à hauteur de la moitié du prix du passage.
Il ressort de son titre de transport que le trajet aller Marseille/Alger lui a été facturé 375 euros au total.
Elle doit donc recevoir la somme de 187,50 euros au titre de son remboursement du prix du voyage.
Concernant ses préjudices supplémentaires, la compagnie maritime ne peut sans une certaine mauvaise foi [affirmer] que Madame X. pouvait aisément trouver un hôtel pour attendre le prochain départ d'un navire le lendemain alors qu'elle ne conteste pas que les voyageurs ont réellement été informés de l'impossibilité d'être transportés que tard dans la soirée.
En revanche Madame X. ne rapporte pas la preuve suffisante que les conditions de navigations sur ce navire le lendemain ont été effectuées dans des conditions très inconfortables.
Au titre de son préjudice moral elle est donc indemnisée à hauteur de la somme de 1.000 euros.
Sur les demandes annexes :
En raison de la nature de l'affaire et de la teneur de la présente décision, l'exécution provisoire du présent jugement est justifiée.
Eu égard aux circonstances de la cause et à la position des parties, il est inéquitable de laisser à la charge de Madame X. la totalité des frais exposés pour agir en justice et non compris dans les dépens, ce qui commande l'octroi de la somme de 1.500 euros à son bénéfice sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Les dépens sont laissés à la charge de la partie qui succombe.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, statuant publiquement, après en avoir délibéré conformément à la loi, par décision contradictoire et en premier ressort,
- CONDAMNE la SOCIÉTÉ NATIONALE MARITIME CORSE MÉDITERRANÉE (SNCM) à payer à Madame X. la somme de 1.187,50 euros majorée des intérêts au taux légal à compter de la présente décision
- REJETTE les autres demandes
- ORDONNE l'exécution provisoire
- [minute page 6] CONDAMNE la SOCIÉTÉ NATIONALE MARITIME CORSE MÉDITERRANÉE (SNCM) à payer à Madame X. une somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- CONDAMNE la SOCIÉTÉ NATIONALE MARITIME CORSE MÉDITERRANÉE (SNCM) au paiement des entiers dépens de l'instance.
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