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CA COLMAR (3e ch. civ. A), 9 février 2009

Nature : Décision
Titre : CA COLMAR (3e ch. civ. A), 9 février 2009
Pays : France
Juridiction : Colmar (CA), 3 ch. civ. sect. A
Demande : 06/03402
Décision : 09/0070
Date : 9/02/2009
Nature de la décision : Confirmation
Décision antérieure : TI MOLSHEIM, 13 juin 2006
Numéro de la décision : 70
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1383

CA COLMAR (3e ch. civ. A), 9 février 2009 : RG n° 06/03402 ; arrêt n° 09/0070

 

Extraits : 1/ « Attendu, en l'espèce, qu'il ressort du contrat de crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services, liant les parties en date du 8 octobre 2004, que le crédit litigieux a été souscrit pour le financement d'un système de protection et cosigné par Mme X., sous la mention des TANNERIES X. et par la SARL TANNERIES X. ;

Attendu que la libre soumission des parties aux dispositions protectrices du code de la consommation sera écartée dès l'abord, dès lors que sans préjudice de références multiples aux dispositions de ce code, l'offre préalable n'en comporte pas moins au verso de la fiche de renseignements un encadré des plus clairs stipulant que ces dispositions sont inapplicables en cas d'opération destinée à financer les besoins d'une activité professionnelle ;

Attendu, sur ce plan, que, sans méconnaître les difficultés liées au fait que le financement a été confirmé à Mme X., ni même qu'elle s'est vue opposer une inscription au fichier national des incidents de paiement suite aux impayés enregistrés, la cour considère que la destination professionnelle du crédit ne fait pas de doute ; Attendu, en effet, d'une part, qu'il a été remis à l'organisme de crédit un RIB au nom de la SARL TANNERIES X. pour prélèvement sur son compte et que sauf l'aveu d'une fraude confinant à l'abus de bien social, l'achat à crédit d'une installation de protection payé par une société commerciale ne saurait financer un bien étranger à son objet social et donc à son activité professionnelle ; que l'intervention de Mme X. à l'acte sous la rubrique « emprunteur » mais sous le nom « TANNERIES X. » procède manifestement et exclusivement, dans ces conditions, de sa qualité de gérante de la société ; Attendu, d'autre part, qu'il apparaît établi que l'installation a été mise en place dans les locaux de la tannerie puisque le bulletin de livraison de l'installation comporte le cachet de la société commerciale ; Attendu, au demeurant, que les correspondances échangées avec SOFEMO, au titre du remplacement du prestataire notamment, émanent de la SARL et non de Mme X. personnellement (annexe n° 10 de Maître Wehr), preuve du caractère professionnel des contrats ;

Attendu que l'ensemble de ces éléments conduit à écarter l'application du code de la consommation par application de l'article L. 311-3 3° du code de la consommation, le contrat ayant manifestement été conclu pour les besoins de l'activité professionnelle tant de la société que de sa gérante personne physique, au sens de cet article, dès lors que le système et les prestations annexes ont pour objet d'en protéger l'activité »

2/ « Attendu que les appelantes s'appuient sur avis de la CCA du 22 février 2001 condamnant l'impossibilité de rupture anticipée dans les contrats avec prestations successives pour juste motif et en déduisent qu'il était donc possible d'arrêter le paiement au moment de la fin des prestations de surveillance ; […] Attendu, cependant, qu'une telle clause ne figure pas dans le contrat de crédit liant SOFEMO aux consorts X. ; Attendu, s'agissant du contrat Access que l'exception est sans emport compte-tenu de l'absence d'indivisibilité des contrats et du fait qu'en tout état de cause, la dite société, représentée par son liquidateur, n'a pas été mise en cause à hauteur de première instance ou d'appel ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE COLMAR

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRÊT DU 9 FÉVRIER 2009

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A 06/03402. MINUTE N° 09/0070. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 13 juin 2006 par le tribunal d'instance de MOLSHEIM.

 

APPELANTES :

1) SARL TANNERIES X.

dont le siège social est sis [adresse]

2) Madame X.

demeurant [adresse]

Représentées par la SCP CAHN & Associés, avocats à la cour, Plaidant : Maître Jacky PETITOT, avocat à STRASBOURG

 

INTIMÉE :

SA SOFEMO

ayant siège social [adresse]. [minute page 2] Représentée par Maître Damien WEHR, avocat à STRASBOURG

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 décembre 2008, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme RASTEGAR, président de chambre, et M. DAESCHLER, conseiller, chargé du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Mme RASTEGAR, président de chambre ,Mme MAZARIN-GEORGIN, conseiller, M. DAESCHLER, conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. UTTARD

ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. Signé par Mme F. RASTEGAR, président et M. Christian UTTARD, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le rapport,

Courant 2004, la société SOFEMO consentait un prêt d'un montant de 5.288 € destiné à financer l'achat d'un système de protection par vidéo surveillance livré par la société Access, qui assurait, par ailleurs, des prestations de maintenance et de télésurveillance. Par la suite, la société Access était placée en liquidation judiciaire. Un remplaçant était proposé à la cliente mais la proposition était refusée. Les échéances de mai et juin 2005 demeuraient impayées et le prêteur prononçait la déchéance du terme.

Sur saisine de la SA SOFEMO en date du 13 octobre 2005, le tribunal d'instance de Molsheim, statuant contradictoirement le 13 juin 2006, a condamné solidairement la SARL TANNERIES X. et Mme X. à payer à la demanderesse la somme de 4.516,81 €, avec les intérêts au taux légal à compter du 3 octobre 2005 et celle de 361,34 € avec les intérêts au taux légal à compter du jugement, ainsi que celle de 600 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, a débouté SOFEMO de sa demande au titre des cotisations d'assurance et condamné solidairement les défendeurs aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe le la SARL TANNERIE X., agissant en la personne de son représentant légal, et Mme X. ont interjeté appel général.

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

[minute page 3] Vu les conclusions récapitulatives des consorts X., reçues le 14 septembre 2007, tendant, au visa du bon de commande du 8 octobre 2004, de l'offre de crédit du 14 octobre 2004, des articles L. 121-23 et suivants, L. 311-1 et suivants et L. 311-20 du code de la consommation, des articles 1184 et 1271 et suivants du code civil, à infirmer le jugement entrepris, statuant de nouveau, dire et juger que le droit de la consommation est applicable au litige et obéit à ses règles d'ordre public, en conséquence, déclarer la demande de SOFEMO irrecevable, en tout état de cause mal fondée, en débouter SOFEMO, lui imposer les dépens de première instance comme d'appel, la condamner à payer aux appelantes une indemnité de 2.000 au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions récapitulatives de SA SOFEMO aux fins, au visa de l'article 1134 du code civil, de déclarer l'appel irrecevable, en tout cas mal fondé, en conséquence, de débouter les appelantes de leurs conclusions d'infirmation, de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, de condamner solidairement les appelantes à lui verser un montant de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, de les condamner solidairement aux frais de l'appel ;

Vu l'ordonnance de clôture du 16 juin 2008 et l'avis de renvoi du 11 septembre 2008 ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Sur ce :

Vu les pièces de la procédure et les documents joints

 

Sur la recevabilité :

Attendu qu'il n'existe aucun élément dans le dossier permettant d'en déterminer l'irrecevabilité, l'appel sera déclaré recevable ;

 

Sur l'application des dispositions du code de la consommation :

Attendu que les appelantes font valoir que le contrat fait référence expresse aux dispositions du code de la consommation et à l'identité de Mme X. et comporte un bordereau de rétractation, de telle sorte qu'il était dans la commune intention des parties de se soumettre aux dispositions protectrices du code de la consommation ; que le contrat de crédit a été conclu accessoirement au contrat de fourniture et de prestation de surveillance par application de l'article L. 311-20 du code ; que le paiement du crédit accessoire a été confirmé à Mme X. ; que le matériel est installé au domicile de Mme X. et est sans lien direct avec son activité professionnelle, la tannerie en ayant déjà une et que l'intéressée a été personnellement fichée pour non-paiement de deux échéances, de telle sorte qu'elle n'a pas agi en qualité de professionnel dans son secteur d'activité (gérante de tannerie) ; que par application de l'article L. 311-20 l'arrêt de l'activité du prestataire entraîne arrêt du paiement du prêt ;

Attendu que le préteur souligne qu'un encadré spécial écarte le code de la consommation en cas de prêt destiné à financer les besoins d'une activité professionnelle, l'opération n'ayant par ailleurs aucun caractère privé mais étant conclue pour la tannerie et les prélèvements étant faits sur le compte de la SARL (voir également le libellé du bon de commande, du procès-verbal de réception, l'absence de preuve d'une installation existante, les correspondances échangées) ; que seul compte l'objet du prêt et non la personnalité des emprunteurs ; que l'article L. 311-20 ne s'applique pas ; qu'en tout état de cause, le contrat finance l'achat du matériel mais pas les prestations ;

Attendu que les conventions légalement formées tiennent lieu de lois à ceux qui les ont faites et s'exécutent bonne foi (article 1134 du code civil) ;

[minute page 4] Attendu, en l'espèce, qu'il ressort du contrat de crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services, liant les parties en date du 8 octobre 2004, que le crédit litigieux a été souscrit pour le financement d'un système de protection et cosigné par Mme X., sous la mention des TANNERIES X. et par la SARL TANNERIES X. ;

Attendu que la libre soumission des parties aux dispositions protectrices du code de la consommation sera écartée dès l'abord, dès lors que sans préjudice de références multiples aux dispositions de ce code, l'offre préalable n'en comporte pas moins au verso de la fiche de renseignements un encadré des plus clairs stipulant que ces dispositions sont inapplicables en cas d'opération destinée à financer les besoins d'une activité professionnelle ;

Attendu, sur ce plan, que, sans méconnaître les difficultés liées au fait que le financement a été confirmé à Mme X., ni même qu'elle s'est vue opposer une inscription au fichier national des incidents de paiement suite aux impayés enregistrés, la cour considère que la destination professionnelle du crédit ne fait pas de doute ;

Attendu, en effet, d'une part, qu'il a été remis à l'organisme de crédit un RIB au nom de la SARL TANNERIES X. pour prélèvement sur son compte et que sauf l'aveu d'une fraude confinant à l'abus de bien social, l'achat à crédit d'une installation de protection payé par une société commerciale ne saurait financer un bien étranger à son objet social et donc à son activité professionnelle ; que l'intervention de Mme X. à l'acte sous la rubrique « emprunteur » mais sous le nom « TANNERIES X. » procède manifestement et exclusivement, dans ces conditions, de sa qualité de gérante de la société ;

Attendu, d'autre part, qu'il apparaît établi que l'installation a été mise en place dans les locaux de la tannerie puisque le bulletin de livraison de l'installation comporte le cachet de la société commerciale ;

Attendu, au demeurant, que les correspondances échangées avec SOFEMO, au titre du remplacement du prestataire notamment, émanent de la SARL et non de Mme X. personnellement (annexe n° 10 de Maître Wehr), preuve du caractère professionnel des contrats ;

Attendu que l'ensemble de ces éléments conduit à écarter l'application du code de la consommation par application de l'article L. 311-3 3° du code de la consommation, le contrat ayant manifestement été conclu pour les besoins de l'activité professionnelle tant de la société que de sa gérante personne physique, au sens de cet article, dès lors que le système et les prestations annexes ont pour objet d'en protéger l'activité ;

 

Sur l'exception d'inexécution et l'indivisibilité :

Attendu que les appelantes font valoir la mise en œuvre du principe d'inexécution (article 1184 du code civil), alors qu'un prestataire remplaçant a été refusé à juste titre, ne proposant pas de prestations satisfaisantes et comparables à celles existant précédemment à l'arrêt de l'activité du prestataire initial, la société Access ; que la novation des prestations n'était pas prévue par le contrat et ne peut se présumer, ni être imposée ; qu'au demeurant, les contrats sont indivisibles, les mensualités comprenant et le matériel et les services, comme le prouve le fait que la société SOFEMO a proposé un nouveau prestataire ; que la fin du contrat principal entraîne la caducité du contrat de crédit ;

Attendu que l'intimée indique qu'elle n'a proposé un autre successeur qu'à titre commercial et que la modification des prestations lui est inopposable ; que les prestations ne sont pas indivisiblement liées au prêt qui ne visait que l'achat du matériel et devaient être facturées à part après une période gratuite de deux ans ;

[minute page 5] Attendu que la lecture du contrat Access (annexe n° 1 de Maître Cahn) ne permet pas de déduire une indivisibilité des conventions, la prestation de télésurveillance d'Access étant stipulée gratuite pendant 24 mois puis payable à raison de 30 € par mois et le contrat de crédit ne se référant qu'au financement de l'acquisition d'une installation et non à sa maintenance et à de la télésurveillance ;

Attendu, que s'il est exact que la société SOFEMO a pris l'initiative de présenter un autre prestataire à sa clientèle, il n'en demeure pas moins que rien ne l'y obligeait aux termes des contrats liant les parties et qu'elle ne l'a fait que dans un souci commercial, ce qu'elle a toujours rappelé (annexes n° 6, 7 et 12 de Maître Wehr) ;

Attendu qu'il s'ensuit que l'exception d'inexécution tirée de la défaillance de la société Access apparaît inopposable au prêteur, qui a rempli, en l'espèce, ses obligations en versant les fonds nécessaires à l'acquisition du matériel après livraison ;

 

Sur les clauses abusives :

Attendu que les appelantes s'appuient sur avis de la CCA du 22 février 2001 condamnant l'impossibilité de rupture anticipée dans les contrats avec prestations successives pour juste motif et en déduisent qu'il était donc possible d'arrêter le paiement au moment de la fin des prestations de surveillance ;

Attendu que l'intimée relève que l'argument est sans emport en l'absence d'indivisibilité et que la clause abusive ne profite pas à celui qui a conclu en rapport direct avec l'activité professionnelle, ce qui est le cas de la SARL, Mme X. n'étant pas partie au contrat de prestations ;

Attendu, cependant, qu'une telle clause ne figure pas dans le contrat de crédit liant SOFEMO aux consorts X. ;

Attendu, s'agissant du contrat Access que l'exception est sans emport compte-tenu de l'absence d'indivisibilité des contrats et du fait qu'en tout état de cause, la dite société, représentée par son liquidateur, n'a pas été mise en cause à hauteur de première instance ou d'appel ;

Attendu, en conséquence, qu'il y a lieu au vu des pièces produites (le contrat, le tableau d'amortissement et le décompte actualisé des sommes restant dues) de juger l'appel non fondé et de confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

 

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Attendu que la société SOFEMO a été jugée bien fondée en sa défense, il convient de lui allouer un montant de 1.000 € au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés de ce chef ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARE l'appel de la SARL TANNERIES X., agissant en la personne de son représentant légal, et de Mme X. recevable mais non fondé ;

Le REJETTE ;

CONFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions

CONDAMNE la SARL TANNERIES X. et Mme X. au paiement d'une [minute page 6] somme de 1.000 € (mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SARL TANNERIES X. et Mme X. aux dépens.

Le greffier      Le président

 

Est cité par :