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CA GRENOBLE (ch. com.), 24 septembre 2009

Nature : Décision
Titre : CA GRENOBLE (ch. com.), 24 septembre 2009
Pays : France
Juridiction : Grenoble (CA), ch. com.
Demande : 07/04685
Date : 24/09/2009
Nature de la décision : Confirmation
Date de la demande : 20/12/2007
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2270

CA GRENOBLE (ch. com.), 24 septembre 2009 : RG n° 07/04685

 

Extrait : « Ce dernier se prévaut toutefois à bon droit des dispositions protectrices du Code de la Consommation, alors que compte tenu de la nature de son activité (station service), qui ne l'expose pas à des risques particuliers, la conclusion du contrat de télésurveillance litigieux ne constitue pas un acte d'exploitation courant et n'est donc pas en rapport direct avec l'exercice de sa profession.

Aucune nullité du contrat n'est cependant encourue sur le fondement des articles L.121-21 et suivants du Code de la Consommation relatifs au démarchage à domicile, puisque la convention du 18 mai 1998 reproduit de façon apparente le texte intégral des articles L.121-23 à L. 121-26 du Code de la Consommation et comprend un formulaire de rétractation.

Si le caractère effectivement abusif des clauses, déchargeant le télésurveilleur de toute responsabilité en raison d'événements non constitutifs de la force majeure et mettant à sa charge une simple obligation de moyens, n'a pas d'incidence directe sur le présent litige, alors qu'il a été jugé que la résiliation du contrat était imputable à l'abonné, il n'en est pas de même de la clause fixant à 48 mois la durée initiale de l'abonnement, qualifiée d'irrévocable et d'indivisible.

Cette clause, qui est abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation en ce que, ne prévoyant aucune possibilité de rupture anticipée, même pour motifs légitimes, elle lie le consommateur au même professionnel pendant une période très longue et lui interdit de profiter d'une évolution favorable des prix, ne saurait, en effet, valablement fonder la demande en paiement de 47 mensualités échues impayées après résiliation unilatérale du contrat par l'abonné. Dès lors que la durée initiale du contrat n'aurait pas dû excéder une année afin de ne pas créer au détriment de M. X. un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, il sera par conséquent fait droit à la demande dans la limite de la somme de 1.820,06 € TTC. représentant 11 mensualités échues impayées. »

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 24 SEPTEMBRE 2009

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 07/04685. Appel d'une décision (N° RG) rendue par le Tribunal de Grande Instance à compétence commerciale de BOURGOIN-JALLIEU en date du 2 novembre 2007 suivant déclaration d'appel du 20 décembre 2007.

 

APPELANTE :

SA ADT FRANCE (anciennement ADT TÉLÉSURVEILLANCE venant aux droits de  la société TEP)

poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège [adresse], représentée par la SCP HERVE-JEAN POUGNAND, avoués à la Cour.

 

INTIMÉ :

Monsieur X.

[minute Jurica page 2] [adresse], représenté par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour.

 

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DÉBATS ET DU DELIBÉRÉ :  Monsieur Daniel MULLER, Président de Chambre, Monsieur Jean-Louis BERNAUD, Conseiller, Madame Françoise CUNY, Conseiller,

Assistés lors des débats de Mme Nadine LEICKNER, Greffier.

DÉBATS : Audience publique du 10 juin 2009, Monsieur MULLER, Président a été entendu en son rapport. Les avoués ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries. Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu ce jour.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

La SA ADT Télésurveillance, venant aux droits de la société TEP, a conclu le 12 mai 1998 avec M. M. X., gérant d'une station service à [ville C.], un contrat d'abonnement de télésurveillance avec option de prestation sécuritaire pour une durée de 48 mois moyennant une redevance mensuelle de 137,20 € H.T. (900 Francs).

A compter de la deuxième mensualité de juin 1998 M. X. a cessé tout paiement.

Il a été mis en demeure le 21 mars 2006 de payer la somme de 7.741,00 € représentant les 47 échéances échues impayées.

Par acte d'huissier du 8 décembre 2006 il a été assigné en paiement de cette somme et en restitution sous astreinte du matériel.

Par jugement du 2 novembre 2007, le Tribunal de Grande Instance de Bourgoin Jallieu statuant en matière commerciale a débouté la société ADT Télésurveillance de sa demande en constatation de la résiliation du contrat aux torts de l'utilisateur et en paiement de l'indemnité de résiliation, a ordonné la restitution du matériel et a débouté M. X. de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour dysfonctionnement du matériel.

La SA ADT Télésurveillance a relevé appel de cette décision selon déclaration reçue le 20 décembre 2007.

Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 6 mai 2008 par la SA ADT Surveillance qui demande à la Cour, par voie de réformation, de condamner M. X. à lui payer la somme de [minute Jurica page 3] 7.741,00 €, outre intérêts capitalisés et indemnité de procédure de 1.000 €, et d'ordonner sous astreinte journalière de 150 € la restitution du matériel aux frais de l'intimé aux motifs qu'aucune clause contractuelle ne lui interdisait de mettre le débiteur en demeure au-delà du terme du contrat, qu'aucun reproche ne peut lui être fait sur le fonctionnement du matériel puisque M. X. a refusé l'intervention d'un technicien, que les dispositions invoquées du Code de la Consommation sont inapplicables en l'espèce s'agissant d'un contrat en lien direct avec l'activité professionnelle du souscripteur.

Vu les conclusions signifiées et déposées le 10 octobre 2008 par M. M. X. qui sollicite la confirmation du jugement, subsidiairement la condamnation de la société ADT à lui payer la somme de 8.000 € à titre de dommages et intérêts et à reprendre à ses frais le matériel sous astreinte journalière de 150 €, plus subsidiairement encore de réduire l'indemnité contractuelle de résiliation et en tout état de cause de condamner l'appelante au paiement d'une indemnité de 2.500 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile aux motifs que l'indemnité contractuelle de résiliation n'est pas due à défaut pour la société ADT d'avoir mis en œuvre les modalités de résiliation anticipée prévue à l'article 11 du contrat, la mise en demeure du 21 mars 2006 étant postérieure de plus de trois années à l'échéance du contrat, qu'en l'absence de lien direct avec son activité professionnelle le contrat de télésurveillance relève des dispositions du Code de la Consommation relatives au démarchage à domicile, auxquelles les parties se sont au demeurant volontairement soumises, que la société ADT a attendu 7 jours après la signature du contrat pour installer le matériel et n'a exigé aucun paiement pendant ce délai, qu'en toute hypothèse les clauses d'exonération de responsabilité du télésurveilleur et d'indemnité pour rupture anticipée du contrat sont abusives au sens de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, que la résiliation est intervenue aux torts exclusifs de la société ADT qui lui a fourni un matériel défectueux ainsi qu'il résulte du constat d'huissier du 9 septembre 1998.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE L'ARRÊT :

Le matériel de télésurveillance a été fourni et installé le 27 mai 1998, date à laquelle M. X. a expressément reconnu en émargeant la fiche d'intervention que l'installation était en parfait état de marche, le technicien ayant pour sa part constaté le bon fonctionnement du système, même s'il a précisé qu'une nouvelle intervention était nécessaire en vue de la mise en place d'une deuxième zone temporisée.

Le 25 juin 1998, déplorant le caractère incomplet de l'installation, M. X. a mis la société TEP en demeure de procéder à l'enlèvement du matériel.

Il lui a été répondu dès le 29 juin 1998 que le technicien s'était vu refuser l'accès aux lieux en violation de l'article 6 du contrat.

Le 17 septembre 1998, M. X. a reconnu qu'il avait refusé l'intervention du technicien et a réitéré sa décision de rompre le contrat en raison du non-fonctionnement d'une partie de l'installation.

Le 6 octobre 1998 le télésurveilleur a reproché à M. X. d'avoir une nouvelle fois, le 24 septembre 1998, interdit au service technique d'accéder au matériel et lui a demandé de reprendre immédiatement contact avec la maintenance.

Aucune correspondance n'a par la suite été échangée entre les parties jusqu'à la mise en demeure du 21 mars 2006, aux termes de laquelle la société ADT a exigé le paiement des 47 mensualités échues impayées et s'est prévalue de la résiliation du contrat aux torts de l'abonné à défaut de règlement dans le délai de 8 jours.

Ayant refusé à deux reprises l'intervention complémentaire du télésurveilleur, en violation de l'article [minute Jurica page 4] 6 du contrat qui lui faisait obligation de laisser libre l'accès au matériel, M. X. a rompu fautivement le contrat dès le 25 juin 1998 ; étant observé qu'un délai raisonnable de moins d'un mois s'était écoulé depuis la mise en place de l'installation.

Dès lors que l'huissier D. s'est borné à constater le 9 septembre 1998 que la zone appartement, bien qu'équipée, n'était pas protégée, ce qui était la conséquence directe du refus injustifié d'intervention complémentaire, M. X. ne peut sérieusement prétendre imputer la responsabilité de la résiliation du contrat à la société ADT, et a donc justement été débouté de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts.

La société ADT ne peut pour sa part réclamer au sens de l'article 11 du contrat « l'indemnité contractuelle de résiliation anticipée », qui suppose, après mise en demeure infructueuse, la résiliation de plein droit de la convention « rendant immédiatement exigible le solde des loyers de la période contractuelle en cours ». La seule mise en demeure, dont il est fait état, est, en effet, bien postérieure à l'échéance du contrat conclu pour une durée de 48 mois à compter du 18 mai 1998, en sorte que n'ayant pas provoqué la déchéance du terme elle n'a pas pu déclencher le mécanisme de l'indemnité de résiliation anticipée.

La rupture du contrat étant imputable à l'abonné, la société ADT, à laquelle aucune prescription n'est opposée, est cependant recevable à réclamer le paiement des mensualités aujourd'hui intégralement échues, alors que la non fourniture des prestations de télésurveillance est imputable à M. X. qui a cessé tout paiement sans motif légitime dès le mois de juin 1998.

Ce dernier se prévaut toutefois à bon droit des dispositions protectrices du Code de la Consommation, alors que compte tenu de la nature de son activité (station service), qui ne l'expose pas à des risques particuliers, la conclusion du contrat de télésurveillance litigieux ne constitue pas un acte d'exploitation courant et n'est donc pas en rapport direct avec l'exercice de sa profession.

Aucune nullité du contrat n'est cependant encourue sur le fondement des articles L.121-21 et suivants du Code de la Consommation relatifs au démarchage à domicile, puisque la convention du 18 mai 1998 reproduit de façon apparente le texte intégral des articles L.121-23 à L. 121-26 du Code de la Consommation et comprend un formulaire de rétractation.

Si le caractère effectivement abusif des clauses, déchargeant le télésurveilleur de toute responsabilité en raison d'événements non constitutifs de la force majeure et mettant à sa charge une simple obligation de moyens, n'a pas d'incidence directe sur le présent litige, alors qu'il a été jugé que la résiliation du contrat était imputable à l'abonné, il n'en est pas de même de la clause fixant à 48 mois la durée initiale de l'abonnement, qualifiée d'irrévocable et d'indivisible.

Cette clause, qui est abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation en ce que, ne prévoyant aucune possibilité de rupture anticipée, même pour motifs légitimes, elle lie le consommateur au même professionnel pendant une période très longue et lui interdit de profiter d'une évolution favorable des prix, ne saurait, en effet, valablement fonder la demande en paiement de 47 mensualités échues impayées après résiliation unilatérale du contrat par l'abonné.

Dès lors que la durée initiale du contrat n'aurait pas dû excéder une année afin de ne pas créer au détriment de M. X. un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, il sera par conséquent fait droit à la demande dans la limite de la somme de 1.820,06 € TTC représentant 11 mensualités échues impayées.

Le jugement sera enfin confirmé en ce qu'il a ordonné la restitution du matériel, qui est sollicitée de part et d'autre, et qui se fera aux frais de la société ADT Télésurveillance, laquelle est chargée de l'installation des équipements et de leur récupération en fin de contrat.

[minute Jurica page 5] Aucune astreinte n'est nécessaire, puisque M. X. exige lui-même l'enlèvement du matériel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR

Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. M. X. de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts et ordonné la restitution du matériel de télésurveillance aux frais de la société ADT Télésurveillance,

LE RÉFORME pour le surplus et statuant à nouveau :

- DIT et juge que le contrat d'abonnement de télésurveillance a été résilié à tort par M. M. X.,

- DIT et juge toutefois que la clause fixant à 48 mois la durée initiale irrévocable du contrat est abusive et partant réputée non écrite,

- CONDAMNE M. M. X. à payer à la SA ADT France la somme de 1.820,06 € TTC avec intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2006,

- ORDONNE la capitalisation des intérêts de retard dans les conditions de l'article 1154 du Code Civil à compter de la demande en justice par conclusions d'appel du 9 juin 2008,

- CONDAMNE M. M. X. à payer à la SA ADT France une indemnité de procédure de 800 €,

- CONDAMNE M. M. X. aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP POUGNAND, avoués à la Cour

SIGNÉ par Monsieur MULLER, Président et par Madame LEICKNER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

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